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Archives Mensuelles: juillet 2019

Qu’est-ce que l’art brut?

31 mercredi Juil 2019

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The Conversation

  1. Anne Boissière

    Professeure, Esthétique et philosophie de l’art, Université de Lille

Université de Lille

Université Lille Nord-Europe (ULNE)

L’art brut est devenu un objet d’étude spécialisé et il occupe un champ de réflexion non négligeable tant du côté universitaire que dans le monde institutionnel de l’art. Sans entrer dans les méandres de ce savoir théorique en plein essor, on peut repérer quelques points névralgiques qui ressurgissent immanquablement, autant dans les débats érudits que chez le simple spectateur.

L’art brut fait partie du paysage contemporain de l’art, et y occupe même une place importante, y compris sous l’aspect financier. Un dessin d’Henry Darger ou d’Adolf Wölflipeut atteindre des sommes astronomiques.

Un « art des fous » ?

L’art brut est-il l’art des fous ? On fait souvent la confusion entre les deux. Pourtant Jean Dubuffet (1901-1985), peintre, écrivain et inventeur de la notion d’art brut juste après la seconde guerre mondiale en France, a très tôt marqué la nette différence entre les deux. L’art brut n’est pas l’art des fous, bien que beaucoup d’œuvres estampillées art brut proviennent des hôpitaux psychiatriques, par exemple pour Aloïse Corbaz. Définissant l’art brut, Dubuffet éloigne très vite le critère psychique de la maladie mentale, pour ne retenir que celui de la création : « Ce sont les productions d’art émanant de personnes étrangères aux milieux spécialisés et élaborées à l’abri de toute influence, de façon tout à fait spontanée et immédiate, qui m’intéresse » (Honneur aux valeurs sauvages).

Mais de fait, prospectant les œuvres notamment en Suisse à ses débuts, Dubuffet empiète sur le terrain de la folie. La relation entre art brut et art des fous est donc complexe. Elle-même s’inscrit dans une histoire plus longue, celle des rapports entre art et folie qui remonte au tournant des XIXe et XXe siècles, époque où des psychiatres se rendent attentifs aux productions spontanées des malades internés, y voyant de l’art et non plus des documents cliniques. Auguste Marie et Marcel Réja en France, Walter Morgenthaler en Suisse, Hans Prinzhorn en Allemagne, figurent parmi les pionniers. Entre les deux guerres mondiales, le surréalisme poursuivra cette histoire des relations entre art et folie sur le terrain de la littérature, notamment avec André Breton ; celui-ci, d’ailleurs, épaulera Jean Dubuffet dans les premières années de l’art brut, pour se fâcher ensuite avec lui sur ce même sujet des arts des fous.

Des œuvres singulières

Historiquement, l’art brut est l’affaire d’un homme, Jean Dubuffet. On ne peut dissocier l’entreprise définitionnelle de l’art brut présente dans ses écrits, de l’effort qui a été le sien de rassembler des œuvres dans une collection, enfin de sa propre activité plastique et d’écriture, les trois étant concomitants. Mais quel rapport y a-t-il entre l’approche définitionnelle et les œuvres de la collection ?

La notion d’art brut – que certains notent avec des majuscules pour désigner ce moment fondateur avec Dubuffet – vise moins à cerner un type d’œuvres qu’à produire un discours propre à interroger et déstabiliser la conception académique et établie de l’art. Les œuvres, quant à elles, sont entièrement singulières : elles sont choisies entre autres parce qu’elles échappent à tout classement, à toute identification ; elles ne rentrent pas dans une définition englobante. Il y a donc une tension plutôt qu’une adéquation entre la mise en place du discours sur l’art brut, forcément général, et la singularité des œuvres à certains égards incommensurables entre elles.

Celles-ci, au demeurant, sont très polymorphes : dessins, parfois sur un immense rouleau comme pour le Cloisonné de théâtre d’Aloïse Corbaz, statuettes d’anonyme, sur pierre volcanique ou bois, broderies comme chez Jeanne Tripier ou Élisa Bataille, figurines en bois d’Auguste Forestier, robe comme chez Madge Gill, cahiers d’écriture et de dessins pour Aimable Jayet. Que ces œuvres fassent collection, dans une unité les rassemblant sous quelque affinité, constitue donc un autre paradoxe. La collection de Jean Dubuffet, qu’on peut aujourd’hui admirer au château de Beaulieu à Lausanne en Suisse où elle a été inaugurée en 1976, est exposée dans ce qui n’est pas à proprement parler un musée. Jean Dubuffet voulait avant tout promouvoir des œuvres qui échappaient au circuit de l’art dans sa dimension esthétique et institutionnelle : il ne pouvait toutefois mener à bien cet objectif qu’en intégrant les ouvrages élus, dans ce même circuit de l’art. Cette contradiction est inhérente à l’art brut.

Auguste Forestier, sans titre, vers 1935-49, sculpture sur bois et matériaux variés. Outsider art fair

Le qualificatif s’oppose à « culturel ». Dubuffet insiste sur le fait que les productions d’art brut sont soustraites au circuit académique de l’art – dont lui-même était loin d’être exclu puisqu’il côtoyait à Paris artistes et écrivains. Mais il souligne avant tout qu’on y trouve la création à l’état pur, non contaminée par l’imitation, les modes et les codes. La notion de « brut » renvoie à cette opération, qui manifeste l’art dans ce qu’il aurait d’authentique, de non falsifié : l’auteur d’art brut est celui qui tire tout de son propre fond. La marginalité sociale voire l’isolement et l’absence d’éducation artistique deviennent dès lors des critères de premier ordre, toujours mobilisés quand on parle d’art brut après Dubuffet. C’est en ce sens que les réalisations des prisonniers et des spirites s’agrègent à ce domaine.

La frontière entre art et non-art

Il faut toutefois prendre une distance par rapport à ces critères. Ceux-ci ne peuvent en soi constituer une garantie qu’il y ait art. Si on les érige en normes, on prend le risque d’une dilution de la notion d’art. Ce risque, en même temps, n’appartient pas à l’art brut en tant que tel. Il est inhérent à une tendance plus générale de l’art au XXe siècle. La frontière entre art et non-art est de plus en plus difficile à assigner.

Il faut par ailleurs se garder de cautionner sans recul l’idée d’un sujet entièrement autonome et replié sur soi, à l’origine de la création. Une telle conception, était fortement affirmée par Dubuffet :

« Nous entendons par là (l’art brut) des ouvrages exécutés par des personnes indemnes de culture artistique, dans lesquels le mimétisme, contrairement à ce qui se passe chez les intellectuels, ait peu ou pas de part, de sorte que leurs auteurs y tirent tout (sujets, choix des matériaux mis en œuvre, moyens de transposition, rythmes, façons d’écritures, etc.) de leur propre fond et non pas des poncifs de l’art classique ou de l’art à la mode. Nous y assistons à l’opération artistique toute pure, brute, réinventée dans l’entier de toutes ses phases par son auteur, à partir seulement de ses propres impulsions. » (Jean Dubuffet, « L’art brut préféré aux arts culturels »)

Cette vision récurrente de l’art brut répond à un idéal d’autonomie qu’on peut interroger, dans une perspective qui viserait à valoriser au contraire la teneur d’intersubjectivité et d’adresse – à l’autre – qui anime toute création dans ce qu’elle a de vif, y compris quand elle est réalisée dans la solitude.

Oeuvre d’art brut par ACM (LAM, Villeneuve-d’Ascq). Jan-Pierre Dalbéra/Flickr, CC BY

L’entreprise de Jean Dubuffet n’a pas été sans suite ; son retentissement est même très étonnant. En France et au niveau mondial, d’autres collections se sont constituées, d’autres auteurs ont été découverts, diverses expositions ont vu le jour selon une acception élargie de l’art brut. De nouvelles dénominations sont alors employées : Outsider art, art des irréguliers, les singuliers de l’art, art hors normes, art cru, etc. L’art brut entretient des rapports ambivalents avec l’art contemporain. Pour certains, il constitue le domaine d’une vitalité qui est jugée faire défaut ailleurs, et il est défendu contre une contemporanéité artistique prétendument dénaturée par le discours, l’intellect et la froideur. En même temps, on voit bien à quel point cet art dit brut a été assimilé par le marché de l’art le plus contemporain, jusqu’à parfois être promu en modèle du présent et de l’avenir.

Contre la résorption de l’art dans le discours déclarant ce que l’art doit être, il est souhaitable d’en revenir à la chose même, c’est-à-dire à l’œuvre dans son aptitude à bouleverser et à émouvoir. Cela vaut pour le champ d’art brut comme pour le reste de l’art. Il est important de noter que les auteurs d’art brut n’ont pas intention de faire art : leur geste impose une parole malgré eux. Et s’ils sont auteurs, ce n’est pas parce qu’on les a déclarés tels, artistes d’art brut. L’œuvre et la création n’existent que dans un dépassement de soi, au demeurant non programmable.

Chocs climatiques : pourquoi les agriculteurs français sont-ils si mal assurés ?

30 mardi Juil 2019

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The Conversation

 

  1. Camille Tevenart

    Doctorant en économie agricole et de l’environnement, chaire « Économie du climat » (Université Paris Dauphine), Inra

  2. Philippe Delacote

    Chargé de recherche en économie, Inra

  3. Richard Koenig

    Doctorant en économie agricole, économie de l’environnement, chaire « Économie du climat » (Université Paris Dauphine), Inra

INRA

 

En juin dernier, de violents orages de grêle se sont abattus sur la région Auvergne Rhône-Alpes, dévastant des cultures, comme ces abricots, près de Romans-sur-Isère. Philippe Desmazes / AFP

Au mois de juin, de forts épisodes de grêle se sont abattus sur la région Auvergne-Rhône-Alpes. S’ils sont restés très localisés, les dégâts ont néanmoins été considérables, avec des grêlons de la taille d’une balle de tennis. Face à la multitude de témoignages et de vidéos, notamment à Romans-sur-Isère dans la Drôme, l’actualité politique et médiatique s’est emparée des enjeux d’indemnisation et d’assurance, pour les agriculteurs notamment.

Les assurances agricoles constituent un enjeu crucial pour les professionnels et la résilience du secteur agricole, notamment face au changement climatique et aux transformations que le secteur subit et s’apprête à subir.

Risque de faillite

Le défi est de taille : l’ampleur des dégâts des dernières grêles (entre 80 % et 100 % de pertespour certains secteurs) interroge non seulement les revenus agricoles de la saison considérée, mais surtout la vulnérabilité et la faillite potentielle de nombreuses exploitations.

La rapidité de versements des indemnités des assurances et des fonds mutuels, ainsi que les aides exceptionnelles – évoquées par le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume lors de son déplacement dans la Drôme – seront cruciales pour faire face à de tels chocs. Mais l’intérêt de ces outils assurantiels diminue s’ils n’absorbent pas assez vite le choc subi. Celui-ci peut affecter l’ensemble des comptes des agriculteurs sur plusieurs mois et mener à une contagion dans les autres postes de production de l’exploitation par manque de trésorerie. Tout cela peut conduire à la faillite.

Nombre de défaillances annuelles d’entreprises du secteur agricole. Auteurs à partir des données des rapports Altares, CC BY-NC-SA

Les années 2014 et 2017 ont été particulièrement marquées par l’accroissement du nombre de défaillances d’exploitations agricoles, qui ont augmenté respectivement de 14,96 % et de 12,36 % (voir tableau) par rapport aux années précédentes. Cette évolution pourrait être due aux mauvais résultats des années précédentes.

L’année 2016 a en effet été marquée par une chute des prix et des volumes produits à la suite des mauvaises conditions météorologiques. 2013 a aussi enregistré une chute des prix de vente des céréales, aggravée par une hausse du coût des intrants (produits apportés aux terres, fertilisants et phytosanitaires par exemple).

Les aléas météorologiques, comme la volatilité des cours, peuvent constituer des chocs exogènes fatals pour des exploitations dans une situation économique déjà délicate.

Un très faible taux de souscription

Face à ces catastrophes météorologiques et anticipant les prochaines, le ministre de l’Agriculture a évoqué son ambition de refonte du système d’assurance récolte national en suggérant de la rendre obligatoire.

Malgré des subventions à hauteur de 65 % de la cotisation, la part d’agriculteurs couverts par un contrat d’assurance récolte reste faible : en 2017, seulement 29,4 % des surfaces agricoles françaises (hors prairies) étaient assurées. Avec de fortes disparités entre les filières : près de 30 % pour les céréaliers et 25 % pour les viticulteurs, mais seulement entre 2,5 et 5 % seulement pour les arboriculteurs.

Comment expliquer ce faible taux ?

Des incitations qui ne suffisent pas

L’assurance multirisque climatique, qui est proposée par les principaux assureurs du monde agricole, a été instaurée en 2005. Elle permet de couvrir les cultures contre une quinzaine d’aléas météorologiques allant du gel à la sécheresse, en passant par la grêle, la neige, les inondations, etc.

Afin d’encourager son adoption, les pouvoirs publics ont établi des subventions, initialement à hauteur de 25 % de la prime d’assurance, et depuis 2010 à 65 % (et bientôt 70 % avec le règlement « Omnibus ») sous réserve que les contrats respectent certaines caractéristiques.

Taux de diffusion en France de l’assurance multirisque climatique sur la période 2005-2017. Mise en œuvre du Programme national de gestion des risques et d’assistance technique (PNGRAT) en 2017 : résumé à l’intention du citoyen., CC BY-NC-SA

Malgré un bon démarrage en 2005 (57 000 contrats signés) et des incitations économiques en hausse, le taux de souscription stagne et a même plutôt diminué depuis le pic de souscriptions en 2013 : 31 % des surfaces couvertes.

En écoutant les principaux concernés, syndicats et agriculteurs, le constat est clair : le principal problème concerne le coût de cette assurance.

Un problème de mutualisation

L’activité d’un assureur consiste à percevoir des cotisations et à verser des indemnisations dans les conditions stipulées par contrat.

L’ensemble des souscrivants à l’assurance constitue ce qu’on appelle un « pool de mutualisation », les assurés mutualisant entre eux le risque. Dans les faits, plus un contrat est cher, moins il est attractif et les premiers à l’accepter sont naturellement les plus exposés aux aléas. Un pool restreint est donc constitué des individus les plus « risqués ». Cette « mauvaise » mutualisation des risques, conjuguée à une année marquée par des intempéries, conduit l’assureur à verser autant, si ce n’est plus, que ce qu’il perçoit.

Les pertes devant être amorties, le prix des contrats augmente alors mécaniquement l’année d’après, désincitant les agriculteurs les moins « risqués » à souscrire.

Parmi les solutions possibles, la souscription obligatoire peut être pertinente. Elle induit un pool moins risqué, et sous réserve d’une régulation par l’État, les primes demandées par les assureurs diminueront. La question de la mutualisation est donc essentielle pour la pérennité de ce type d’assurance. La Fédération française de l’assurance estime ainsi qu’il faudrait 70 % des surfaces assurées pour entamer une couverture plus abordable et durable.

Un contrat trop restrictif

Mais d’autres freins expliquent le manque de succès de cette assurance. D’une part, les caractéristiques du contrat éligible au taux de 65 % de subventions – contrat standardisé, dit « contrat socle » – paraissent peu adaptées.

Le seuil de déclenchement, c’est-à-dire le niveau de pertes à partir duquel l’indemnisation est versée, est fixé à 30 %, ce qui est considéré comme bien trop élevé. Des pertes inférieures à 30 % peuvent fortement fragiliser une exploitation agricole, voire dans des situations de vulnérabilité, suffire à la mener à la faillite.

Le niveau de franchise – le montant des pertes qui ne sera pas pris en charge par l’assureur – est quant à lui établi à 20 ou 30 %. Il est possible de souscrire à des garanties complémentaires pour abaisser ces deux paramètres ou d’avoir un complément de prix mais ils ne sont subventionnables qu’à 45 %, voire non subventionnées.

Autre point problématique pour certains syndicalistes agricoles : les modalités de calcul de la garantie. Au moment de la souscription, la compagnie d’assurance calcule la garantie en prenant les rendements moyens réalisés les cinq dernières années en écartant la valeur la plus haute et la plus basse pour faire la moyenne des trois autres.

Or, une succession de « mauvaises » années impactant négativement les rendements conduit mécaniquement à diminuer cette moyenne, rendant l’assurance de moins en moins intéressante.

Le décalage entre le paiement de la prime d’assurance et le versement de la subvention est tout aussi préjudiciable. Alors que les cotisations doivent être payées durant l’automne, les aides à l’assurance ne sont versées au mieux qu’au printemps suivant, ce qui crée un décalage de trésorerie pas toujours supportable.

L’orage de grêle a dévasté ce petit village du Var. France 3 Provence-Alpes Côte d’Azur/Youtube.

Un contexte de diffusion préjudiciable

Il faut également souligner que l’information diffusée autour de cette offre a été handicapante. Le millefeuille de garanties, de subventions et d’aides à demander est clairement une barrière à l’adoption de l’assurance. La connaissance du dispositif s’est diffusée plus lentement qu’il n’a été réformé. La complexité du système assurantiel ajoute un coût de transaction important.

Enfin, alors que la France et l’Union européenne ont acté en 2010 le taux de subvention à 65 %, les aides réellement versées les années suivantes ont été en deçà des engagements. En 2013, les agriculteurs pensant avoir 65 % d’aides n’en ont perçu en réalité que 43 et 49 %. Le nombre de déçus a probablement pénalisé la souscription des années suivantes.

La gestion des risques est une dimension clé dans la conduite d’une exploitation agricole. Mais la restriction budgétaire conduit bien souvent à certains arbitrages. En arboriculture notamment, la prévention et l’assurance sont souvent vues comme substituables au lieu d’être complémentaires. On protège les parcelles par des filets paragrêles par exemple ou on souscrit une assurance. Une gestion optimale voudrait que ces deux dimensions coexistent.

Un enjeu climatique crucial

Si les défaillances et les freins sont nombreux, il paraît essentiel de les identifier et les considérer dans leur ensemble pour les réformes à venir. Les discussions actuelles doivent certes porter sur le prix de l’assurance mais aussi sur son design, sa résilience et sa compatibilité avec les objectifs de transition écologique.

Il est nécessaire d’anticiper au mieux et d’accroître la résilience des exploitations agricoles françaises et des infrastructures rurales. Cette problématique d’adaptation est centrale si l’on souhaite garder une souveraineté alimentaire et stimuler le dynamisme des territoires.

L’assurance agricole est aussi un outil crucial d’incitation aux changements de pratiques agricoles (notamment d’atténuation des émissions de gaz à effet-de-serre) et revêt le potentiel de lever d’autres freins empêchant la transformation des exploitations agricoles.

Par un effet conjugué de son impact sur la transition agroécologique et son rôle significatif dans la préparation face aux enjeux futurs de chocs climatiques, son potentiel en matière de bien-être est à prendre en considération. Son récent attrait médiatique montre que les acteurs ont pris conscience de cet enjeu : c’est le moment de prendre à bras-le-corps l’ensemble des problématiques associées.

La pointe avancée de lʼOTAN dans les pays baltes : une épine pour Moscou

29 lundi Juil 2019

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The Conversation

  1. Cindy Regnier

    Doctorante en Relations internationales, Université de Liège

Université de Liège

AUF (Agence Universitaire de la Francophonie)

 

Une patrouille héliportée de l’armée lituanienne à la frontière avec la Russie (ici le 10 avril 2019). Wojtek Radwanski / AFP

En 2017, l’OTAN renforçait sa présence sur le flanc Est de son territoire avec l’opération « présence avancée rehaussée », qui consiste dans le déploiement de quatre bataillons multinationaux dans les pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie) et en Pologne. La France, présente en Estonie avec 300 soldats, participe avec les autres États membres de l’OTAN à ce déploiement.

Depuis la fin de la Guerre froide, aucun déploiement de cette ampleur n’a eu lieu au sein de l’Alliance atlantique. Cette décision d’envoyer des troupes aux frontières de la Russie s’est faite en réponse à un sentiment d’insécurité au sein de ces pays. En effet, l’intervention russe en Ukraine motivée officiellement par la volonté de défendre les citoyens russophones et la politique du « fait accompli » qui en résulte ont augmenté ce sentiment d’insécurité au sein de ces trois pays frontaliers de la Russie, malgré leur appartenance à l’OTAN.

Nous nous proposons d’analyser et de questionner les différentes raisons qui sous-tendent ce déploiement de troupes.

L’alibi inquiétant de la protection des Russes à l’étranger

Le concept de protection des compatriotes russes à l’étranger est régulièrement invoqué par le Kremlin pour légitimer ses interventions extérieures. Ainsi, en 2008, le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, pointait l’existence d’un « nettoyage ethnique » visant les russes en Géorgie, avant que l’armée de Moscou n’intervienne dans ce pays.

En 2014, les « little green men » » – des soldats sans signalement d’appartenance nationale – envahissaient la Crimée, territoire située en Ukraine majoritairement russophone, suivi bientôt par des soldats en uniforme de Moscou. L’annexion de ce territoire fut précédée d’un référendum organisé par la Russie et non reconnu par l’Occident.

Si la protection des populations russophones présentes dans les pays limitrophes de la Russie est évoquée par le Kremlin pour justifier ses actions, certains auteurs, considèrent plutôt que le rapprochement de l’OTAN avec ces pays et la possible adhésion de ceux-ci à l’Alliance atlantique ont poussé Moscou à intervenir militairement. De fait, ces dits pays sont devenus instables et, en tant que tel, « indigestes » pour l’Alliance.

Des soldats géorgiens formés par des instructeurs de l’Otan. sur une base près de Tbilissi, le 15 mars 2019. Vano Shlamov / AFP

Dans les pays baltes, et plus particulièrement en Estonie et en Lettonie, un quart de la population est d’origine ethnique russe. Cette forte présence russophone inquiète ces États qui craignent de devoir faire face à une intervention russe suivant les mêmes motifs.

Les politiques de désinformation et d’accusation de discrimination envers les russophonesdans la Baltique sont déjà perçues comme les prémices d’une possible intervention. Cependant, les trois pays baltes, ainsi que la Pologne, sont déjà membres de l’Alliance et, de ce fait, les références aux cas ukrainien et géorgien doivent être relativisées.

La stratégie du fait accompli

Ce fort sentiment d’insécurité des pays baltes s’explique également par leur crainte de ne pas être soutenus par l’OTAN en cas d’intervention russe et d’annexion d’une partie de leurs territoires. En effet, l’intervention en Ukraine et l’annexion de la Crimée, malgré la réprobation internationale, sont souvent interprétées comme une stratégie du « fait accompli » de la part de la Russie.

Celle-ci consisterait en une intervention rapide et une annexion définitive d’un territoire, laissant ensuite le soin aux diplomates et politiques du Kremlin de tenter de reprendre le « business as usual » avec les États qui s’étaient opposés à ces actions.

Cette politique repose sur le postulat que les États occidentaux préféreront lancer une politique de « reset » avec la Russie, et ainsi reconnaître de facto l’annexion, plutôt que de maintenir indéfiniment des sanctions contre Moscou, ou encore d’intervenir militairement.

L’OTAN en difficulté face aux attaques hybrides

A ces enjeux s’ajoutent les actions de déstabilisation auxquelles font face les pays baltes. La suspicion de cyber-attaques, ainsi que la mobilisation de la diaspora russe présente principalement en Estonie et en Lettonie, créent des tensions au sein de ces États.

Ce type de déstabilisation a la particularité de ne pas déclencher l’article 5 du traité de Washington, lequel établit le principe de la défense collective de l’Alliance : une attaque armée contre un membre est considérée comme une attaque contre tous ses membres (en vertu de l’article 51 de la charte des Nations unies qui permet la défense collective).

Un garde-frontière le long de la délimitation entre la Lituanie et la Russie, près de la localité de Pasiene (Lituanie). Wojtek Radwanski/ AFP

Or, l’article 5 implique une attaque armée et n’est donc pas mobilisable dans le cas d’attaques hybrides. Ainsi, la Russie réussit, avec des techniques non-traditionnelles, à déstabiliser les pays baltes tout en testant la solidarité des membres de l’OTAN.

Par ailleurs, si l’article 5 implique une attaque armée, le déclenchement de celui-ci – même dans ce cas précis – n’est pas automatique. Dès lors, si la Russie envahissait les États baltes, une décision par consensus devrait être prise par les 29 États membres de l’OTAN. Une attaque armée de la Russie semble certes improbable en l’état, mais le Think tank américain Rand Corporation l’a toutefois envisagée et conclut qu’il suffirait de 36 heures pour que la Russie prenne le contrôle des trois États baltes.

Effet de dissuasion recherché

Cette facilité avec laquelle la Russie pourrait intervenir militairement en Estonie, Lettonie et Lituanie s’explique notamment par l’existence du système A2AD (« anti-access area denial ») déployé à Kaliningrad et dans l’ouest de la Russie. La présence de missiles sol-air, antinavires et sol-sol empêche, de facto, une intervention des troupes de l’OTAN sur le territoire des pays baltes en cas d’agression.

Le déploiement des troupes de l’OTAN dans les pays baltes et en Pologne. DR

La « présence avancée rehaussée » de l’OTAN sur leur territoire vise, dès lors, à dissuader une attaque russe, et cela pour deux raisons. Premièrement, le déploiement des troupes de l’OTAN sur place en cas d’attaque permettrait d’alerter l’Alliance en temps réel en cas d’intervention de « little green men ».

Deuxièmement, en cas de menace sur leurs troupes, les pays occidentaux seraient automatiquement plus impliqués dans une éventuelle crise. Les pays baltes redoutent en effet l’inertie des pays fondateurs de l’Alliance, peu enclins à mobiliser leurs soldats dans un conflit direct avec la Russie en cas d’attaque. Or le recours à l’article 5 se fait par consensus… Par ailleurs, comme nous l’avons vu, le flou entourant les attaques hybrides et le doute sur la possible responsabilité de la Russie impliquent davantage d’indécision au sein des États membres de l’OTAN.

Risque d’escalade

Pour la Russie, cette présence de troupes sur le flanc Est de l’Alliance est en contradiction avec l’Acte fondateur de 1997 entre la Russie et l’OTAN stipulant qu’aucun positionnement conséquent et durable de troupes ne peut se faire sur le territoire des nouveaux membres de l’OTAN.

Cet argument est rejeté par l’OTAN, qui soutient qu’une rotation de troupes ne constitue pas une violation des accords. Il n’en reste pas moins que ce déploiement militaire à ses frontières est vu par le Kremlin comme une véritable provocation de la part de l’OTAN.

De plus, la protection de l’article 5, même mise à mal par les attaques hybrides, reste symboliquement non négligeable, et il est peu concevable que la Russie prenne le risque d’annexer militairement les pays baltes. Mais en répondant à un sentiment d’insécurité chez ses nouveaux alliés, l’OTAN prend un risque : celui d’attiser les tensions avec la Russie.

Les hiéroglyphes, cette source infinie de fascination

28 dimanche Juil 2019

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The Conversation

  1. Jean Winand

    Premier vice-recteur et professeur d’égyptologie, Université de Liège

Université de Liège

AUF (Agence Universitaire de la Francophonie)

 

Un plafond d’architrave du temple de Ramsès III à Médinet Habou. Jean Winand, Author provided

Pour les occidentaux, la première mention des hiéroglyphes remonte à Hérodote (Ve s. av. notre ère), le Père de l’histoire, qui consacra la totalité du livre II de son Enquête à l’Égypte qu’il avait visitée. Hérodote se contentait alors de parler de « caractères sacrés » ; il fallut attendre Clément d’Alexandrie au IIe s. de notre ère pour qu’on parle de caractères hiéroglyphiques, c’est-à-dire de signes sacrés gravés dans la pierre.

Un détail de trois hiéroglyphes en haut relief, pour montrer la finesse de la sculpture (tombe thébaine de la 18e dynastie). Jean Winand, Author provided

Cette écriture, que tout le monde reconnaît immédiatement, n’est pas la seule à avoir été utilisée en Égypte ancienne. Depuis les premiers temps, les scribes employaient une écriture cursive, dénommée hiératique, tracée avec de l’encre et un pinceau, écriture à laquelle est venue s’ajouter le démotique à partir du VIIe s. av. notre ère, qui en est une simplification. Enfin, à partir du tournant du IIIe -IVe s. de notre ère, les anciennes écritures furent remplacées par une écriture alphabétique, le copte, dérivée de l’alphabet grec.

Un graffito hiératique (en rouge) sur un relief provenant du grand temple de Séthi Iᵉʳ à Abydos ; il s’agit d’une inscription laissée par un voyageur. Jean Winand, Author provided

En dépit de la bonne compréhension du fonctionnement de ces écritures et des textes qu’elles transcrivent depuis le déchiffrement par J.-Fr. Champollion en 1822, les hiéroglyphes continuent à fasciner le grand public. On peut se demander quelles en sont les raisons.

Une écriture omniprésente

Tout d’abord, la lecture des écritures égyptiennes est réservée aux spécialistes. Dans une grande nation égyptologique comme la France, le nombre de personnes capables de comprendre le fonctionnement de ce système complexe demeure très réduit.

Ensuite, les hiéroglyphes sont liés à la civilisation égyptienne, laquelle a laissé une trace archéologique dont il y a bien peu d’équivalents : les monuments qu’on peut voir sur place, souvent très bien conservés (mieux que bien des vestiges grecs et romains, sans parler de ce qui reste des civilisations babylonienne, assyrienne, perse ou hittite), les artefacts de toutes sortes exposés dans les musées font beaucoup pour entretenir l’attrait du public. L’exposition parisienne toujours en cours consacrée à Toutânkhamon est une autre preuve de cette attirance. Mais surtout – et c’est là une particularité de cette civilisation – il n’y a pratiquement pas un objet, si humble soit-il, dénué d’une inscription hiéroglyphique. L’écriture est partout.

Un exemple de néo-hiéroglyphes (tombeau du Sieur Mielemans, église Sainte-Croix à Liège).Jean Winand, Author provided

Et quelle écriture ! Elle est d’une grande beauté esthétique. Les inscriptions offrent une variété de détails, une précision étonnante dans la gravure, souvent rehaussée de couleurs. Elle se démarque ainsi d’autres écritures complexes comme l’assyro-babylonien ou le chinois, qui ne se prêtent guère aux grandes compositions monumentales, même si l’écriture chinoise revêt une dimension esthétique indéniable comme le montre la calligraphie, qui est un art à part entière. La différence essentielle provient sans doute du fait que les signes cunéiformes ou chinois ne parlent pas immédiatement au profane ; au cours de leur histoire respective, ils ont été rapidement stylisés au point de devenir méconnaissables. En l’absence d’un apprentissage approprié, qui peut reconnaître un cheval dans tel signe chinois, une tête humaine dans tel signe cunéiforme, alors qu’un hiéroglyphe est immédiatement identifiable comme représentant une femme assise, un œil ou une étoile ? Mais si l’écriture hiéroglyphique est composée de dessins dont on peut reconnaître facilement un grand nombre, elle reste cependant indéchiffrable pour celui qui n’en connaît pas les codes.

Une fascination ancienne

La fascination pour cette écriture remonte à la tradition classique. Les voyageurs et philosophes de l’Antiquité, puis les humanistes de la Renaissance et les savants de l’époque baroque ont voulu y voir une écriture symbolique, destinée à révéler des mystères que les profanes ne pouvaient approcher. À la Renaissance, on a ainsi composé des inscriptions à contenu symbolique dans ce qu’on appelle parfois des néo-hiéroglyphes, qui n’avaient pas grand-chose à voir avec leur modèle supposé.

Ce type d’interprétation connut son apogée avec les travaux du père jésuite Athanasius Kircher (1602-1680), qui consacra des volumes entiers à l’interprétation des hiéroglyphes, principalement aux inscriptions qui se trouvaient sur les obélisques romains. Kircher y voyait avant tout des manifestations de la théologie chrétienne, dont les prêtres égyptiens auraient recueilli des morceaux et qu’ils auraient cachés aux profanes.

Un extrait d’un livre de l’au-delà (tombe de Thoutmosis III dans la Vallée des rois). Jean Winand, Author provided

Ce sont les travaux des érudits du XVIIIᵉ s., comme l’abbé Barthélemy en France, qui permirent de sortir de cette ornière épistémologique, ouvrant ainsi la voie à l’intelligence de cette écriture. Pour la première fois, on envisagea sérieusement que l’écriture hiéroglyphique pouvait servir à noter une langue.

L’expédition de Bonaparte en Égypte (1798-1801) eut, entre autres résultats, la découverte de la Pierre de Rosette, une inscription datée de 196 av. notre ère portant un décret touchant à la fiscalité des temples. Cette inscription contient un texte en trois versions : grecque, égyptien de tradition (en écriture hiéroglyphique) et démotique (en écriture démotique). En comparant soigneusement les versions égyptiennes à leur équivalent grec, on parvint progressivement à isoler certains principes fondamentaux de l’écriture hiéroglyphique. Il devait toutefois revenir au génie de Champollion de franchir le pas décisif en réalisant que l’écriture hiéroglyphique était un système complexe, résultant d’une combinaison de notations idéographiques, phonologiques et sémantiques.

Un défilé de génies représentant le Nil, haut en couleurs (temple de Ramsès II à Abydos). Jean Winand, Author provided

Le déchiffrement des hiéroglyphes et les progrès rapides réalisés dans la compréhension des textes auraient pu casser la fascination pour cette écriture, dès lors qu’elle était largement dépouillée de son mystère. Il n’en a rien été. D’une part, les découvertes archéologiques ont très régulièrement remis l’Égypte ancienne sur le devant de la scène médiatique. La redécouverte d’Amarna, la capitale éphémère du roi Akhénaton, et du fameux buste de Néfertiti en 1912, la découverte du tombeau de Toutânkhamon en 1922, les travaux de sauvetage menés sous l’égide de l’Unesco lors de la construction du grand barrage d’Assouan dans les années 1960, dont la réalisation la plus spectaculaire fut le déménagement et la réinstallation des temples d’Abou Simbel, les controverses récentes sur la présence de cavités secrètes dans la grande pyramide de Chéops à Gizeh ou d’une chambre dissimulée à l’arrière du tombeau de Toutânkhamon, peut-être liée à la reine Néfertiti, relancent continuellement l’attention du public.

Egyptomanie

À cela se mêle une tradition tenace sur l’Égypte ancienne, mère de toutes sagesses. Le côté supposé mystérieux de cette civilisation, en partie porté par son écriture, est régulièrement exploité par un puissant courant d’égyptomanie dont on retrouve des traces dans la littérature (il suffit de penser aux nombreux romans de momie), l’opéra (Aïda de Verdi reste la référence), l’architecture décorative (les grandes expositions universelles de Paris en 1867 et 1900, ou de Liège en 1930 avaient des pavillons égyptiens dans un style pharaonique très accusé, sans parler du pavillon des girafes du zoo d’Anvers réalisé en 1856), la bande dessinée (Astérix et Cléopâtre, Le mystère de la Grande Pyramide, Les Cigares du pharaon, etc., etc), le cinéma ou la publicité.

L’égyptomanie a encore été très présente dans l’art funéraire occidental, notamment au XIXe s. Il n’est pas rare dans les cimetières urbains un peu anciens, comme le Père Lachaise à Paris, de voir des pyramides, des sphinx, ou des obélisques, dont certains portent comme motifs décoratifs des emblèmes égyptiens ou des signes hiéroglyphiques.

Le pavillon des girafes au zoo d’Anvers. Jean Winand, Author provided

Enfin, il faut encore faire la part de l’Égypte ancienne dans certains mouvements ésotériques ou éphilosophiques, comme la franc-maçonnerie. Tout d’abord, parmi les nombreuses obédiences, il en est une, dont le nom seul est évocateur – Memphis-Misraim (Misr étant le nom de l’Égypte en arabe) – qui se réclame directement des anciens mystères égyptiens. Dans l’obédience majoritaire en France et dans les pays latins, le Grand Orient, les allusions à l’Égypte ancienne sont récurrentes dans le décor des temples dont certains prennent des allures pharaoniques. Ce lien de la maçonnerie avec la civilisation de la vallée du Nil est très ancien. Il suffit de penser à la Flûte enchantée de Mozart (1791) et aux décors qui en ont été réalisés pour des représentations aux tout débuts du XIXe s.

Pour terminer, signalons encore que certaines religions revendiquent directement un héritage de l’Égypte ancienne. Le cas le plus connu reste la religion des Mormons. Selon son fondateur, Joseph Smith, le Livre de Mormon,. serait la traduction de plaques en or découvertes dans le comté d’Ontario dans l’État de New York portant un texte gravé en caractères égyptiens anciens.

Au-delà de toutes ces manifestations, souvent superficielles, du goût pour l’Égypte ancienne et ses mystères supposés, l’étude de l’écriture hiéroglyphique révèle chaque jour aux spécialistes de nouvelles facettes de ses étonnantes capacités d’expression. En cela sans doute réside la véritable fascination pour une écriture dont il n’existe pas d’équivalent.

Biodiversité : et si vous profitiez des vacances pour faire de la science citoyenne ?

27 samedi Juil 2019

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The Conversation

  1. Bastien Castagneyrol

    Chercheur en écologie, Inra

INRA

 

À la recherche de la petite bête. Shutterstock
 

En cette période estivale, la plage constitue un passage obligé pour nombre de vacanciers. Si beaucoup prennent plaisir aux bains de mer et de soleil, d’autres appréhendent la promiscuité, le hurlement des enceintes Bluetooth ou encore les entêtants effluves de monoï…

Si vous appartenez à la seconde catégorie, pas de panique, il est toujours possible de mener près des flots une activité ludique et utile, à faire seul ou en famille : participer à un programme de science citoyenne.

Vous vous inscrirez ainsi dans la longue tradition de naturalistes amateurs qui ont contribué, par leurs observations avisées et parfois leurs obsessions, à la construction de la biologie et de l’écologie moderne, et cela bien avant même que l’on parle de « science citoyenne ». Celle-ci désigne la production de savoirs scientifiques par des citoyens dont « faire de la science » n’est pas la profession. Ici, un appareil photo et une connexion Internet peuvent suffire.

Si vous êtes coincé dans les bouchons en allant vers la plage, jetez par exemple un œil au programme BioLit pour planifier une petite escapade scientifique entre deux baignades. Vous y apprendrez comment – en photographiant algues, crabes, et méduses – aider les scientifiques à mieux connaître la biodiversité du littoral et son évolution.

Mais, rassurez-vous, il n’est pas obligatoire d’aller en bord de mer pour devenir « scientifique citoyen » (à moins que ce ne soit « citoyen scientifique » !). Il existe aussi des dizaines de programmes de ce type en ville, à la campagne ou encore à la montagne. La science citoyenne se pratique aujourd’hui absolument partout !

Planète Mer@PlaneteMer

C’est facile de remonter ses observations #BioLit avec le site mobile de #BioLit (http://mobile.biolit.fr ) ! Rendez vous sur la plage !

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1:01 PM – Apr 25, 2017
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Pas besoin d’être un expert

Vous avez probablement entendu dire que les insectes sont en train de disparaître et que les conséquences de cette disparition pourraient être catastrophiques pour notre alimentation. En même temps, vous êtes un peu sceptique et vous vous demandez si ce genre de discours est fondé, s’il n’est pas un peu exagéré.

Certes, vous vous sentez concerné·e mais, pour vous, tous les insectes sont des « bestioles » et vous ne faites pas forcément la différence entre une abeille, un bourdon, un syrphe ou une cétoine. Vous vous demandez comment vous pourriez aider à déterminer s’il est vrai que les insectes disparaissent ; et si oui, pourquoi. Les programmes de science citoyenne pourront vous y aider. Mis en place à l’initiative des scientifiques professionnels, leurs protocoles sont adaptés au grand public : pas besoin d’être un expert pour être utile.

Si vous décidez, par exemple, de participer au SPIPOLL (Suivi photographique des insectes pollinisateurs), vous « traquerez » à l’aide de votre appareil photo toutes les « bestioles » approchant la fleur que vous aurez choisie d’observer ; une fois les photos prises, vous apprendrez à identifier les insectes à l’aide des documents téléchargés à partir du site Internet du SPIPOLL.

Abeilles, bourdons, syrphes et cétoines n’auront plus de secrets pour vous et vous aurez fait progresser les connaissances scientifiques à leur sujet. C’est bien là le double enjeu des sciences citoyennes : faire avancer la connaissance et les connaissances de tous.

MNHN

✔@Le_Museum

Insectes en déclin ⚠ Depuis 2010, le projet de sciences participatives #Spipoll initié par le Muséum sensibilise à la préservation des insectes et s’engage dans le suivi photographique des pollinisateurs http://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Sciences-et-ethique/Comment-agir-contre-disparition-insectes-2018-01-23-1200908069 …

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7:10 PM – Jan 25, 2018
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Science amateure sans amateurisme

Vous voyez mal comment quelques photos de fleurs ou de crabes pourraient faire avancer la science ? C’est vrai. On ne fait rien en science avec une seule observation. Au mieux, c’est de l’anecdote. Au pire, c’est un biais. Mais des millions de photos, prises à des milliers d’endroits différents, pendant plusieurs années, voilà ce qui fait la différence !

Seule contrainte : les observations doivent être standardisées – c’est-à-dire toutes réalisées selon les mêmes critères de représentativité et de reproductibilité – pour être exploitables. C’est la partie « science » de ces initiatives citoyennes : les observations se font selon des protocoles précis mis en place par les scientifiques professionnels ; au moment de les rédiger, ces derniers ont en tête la manière dont les observations pourront être par la suite analysées.

C’est l’intérêt et le challenge des sciences citoyennes : cette impressionnante force de frappe qu’apportent les scientifiques amateurs, et la masse phénoménale de données qu’ils génèrent. Même si les experts professionnels sortent régulièrement de leurs laboratoires pour aller « sur le terrain », ils ne peuvent pas être partout à la fois.

Dans ces conditions, comment dès lors documenter la propagation du frelon asiatique en Europe ? Seul, c’est impossible, mais avec des milliers (des millions ?) de smartphonesdéployés en réseau sur tout le territoire, cela devient possible. Bien sûr, il faut ensuite pouvoir traiter les données analysées. C’est souvent là que le travail de citoyens scientifiques s’arrête, ce traitement requérant de solides compétences en statistiques. Mais des initiatives existent pour impliquer les citoyens également dans cette phase importante du travail scientifique.

Depuis plus de dix ans maintenant que les programmes de sciences citoyennes se développent, les scientifiques ont fait parlé les données et de nouvelles publications scientifiques basées sur ces approches paraissent très régulièrement. Le suivi des papillons de jour – initié par le Muséum d’histoire naturelle dans le cadre de l’Observatoire des papillons des jardins – a par exemple permis de montrer que « plus la surface d’un jardin est grande ou plus la diversité des plantes à fleurs est importante, plus l’abondance des pollinisateurs augmente ».

Les exemples illustrant l’apport des sciences citoyennes à la connaissance scientifique sont légion. Et il faut également souligner que les scientifiques amateurs progressent de leur côté, de récents travaux ayant montré qu’ils gagnent en expertise et en confiance grâce à ces pratiques. Une raison supplémentaire pour tenter l’aventure de la science citoyenne cet été, à la plage ou ailleurs.

Voici comment parlaient les ouvrierscanadiens-français avant la Révolution tranquille

26 vendredi Juil 2019

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The Conversation

  1. Steven High

    Professor of History, Centre for Oral History and Digital Storytelling (COHDS), Concordia University

Universitié Concordia

Les débats constants sur l’enseignement de l’histoire du Québec et la modification récurrente des programmes en la matière nous rappellent combien histoire et politique sont liées.

L’histoire nous rassemble autant qu’elle nous divise. Il est important d’en convenir plutôt que de le nier.

Il y a quelques années, au cours de la campagne électorale de 2014, le premier ministre libéral du Québec, Philippe Couillard, a maladroitement déclaré que tout ouvrier d’usine devait être prêt à parler anglais, mondialisation de l’économie oblige. Digne du temps où, au Québec, l’anglais était la langue de travail et la vaste majorité des gestionnaires d’usine étaient anglophones, cette petite phrase a déclenché un tollé. Même si tant de choses ont changé depuis que la Révolution tranquille et la Loi 101 ont renversé l’ordre linguistique qui régnait dans la province, les gens n’ont pas oublié.

Je l’ai constaté maintes fois à l’écoute d’entrevues d’anciens travailleurs de l’industrie montréalaise. Ces entrevues ont été réalisées dans le cadre d’un projet de recherche à long terme sur les effets de la désindustrialisation.

Entrée à l’âge de 14 ans à la filature Belding-Corticelli, à Pointe-Saint-Charles, Francine Gagnière a vite compris :

“Les anglophones, c’étaient les boss; les francophones, c’étaient les petits. »

Élise Chèvrefils-Boucher a constaté la même chose dès l’âge de 15 ans :

« C’était tout en anglais dans l’ancien temps, ici. Et là, les filles ont dit : « Élise, on a une belle job pour toé à Northern Electric”, sur Saint-Patrick. Là, tu t’en vas là, pis tu t’engages, t’as 15 ans. J’dis : “J’vas avoir une belle job, y a plein d’jeunes qui sont là.” “Est-ce que vous parlez français… Do you speak English?” Là, j’ai dit : “Non.” “Sorry, no job. Sorry, no job!” Pis à l’Anglaise qui s’en venait là, y d’mandaient pas : “Do you speak French?” Non, non. “You’ve got the job. You speak English, you’ve got the job.” »

Northern Electric, ou « la Northern », comptait parmi les pires contrevenants du Sud-Ouest de Montréal. Tous le disaient. Mais c’était aussi l’un des employeurs du secteur qui payait le mieux. Francine Gagnière raconte :

“Quand on v’nait à bout de rentrer à la Northern, on v’nait d’gagner l’gros lot dans l’quartier. Ceux qui travaillaient à Northern, y étaient dans l’échelle sociale plus élevée. »

Mais pour travailler à Northern Electric, il fallait parler anglais :

« Si on parlait de ma mère, de ma tante, y auraient aimé ça eux autres aussi, mais fallait qu’tu parles anglais pour travailler là. Pis y parlaient pas anglais, fait qu’eux autres, y avaient pas cette chance-là. Mais si t’étais unilingue anglais, tu y allais! »

Ancien employé de la sucrerie Redpath, juste à côté, Jean-Paul Bailey va dans le même sens :

« Mais si tu parles d’la Northern Electric, si tu parlais pas anglais, tu rentrais pas là, pis… Comme moé j’avais des chances parce qu’mon nom y est anglais, même que j’aurais pas parlé l’anglais trop, trop, y m’auraient engagé… Ah oui. C’tait raciste! »

La situation était la même ailleurs. Né en 1931, Jean-Guy Dutil a travaillé comme son père à l’atelier du CN, à Pointe-Saint-Charles. Il raconte en riant que, lors de son embauche, il avait dû écrire « une lettre d’application au gérant de l’usine.

« Pis fallait que j’l’écrive… une lettre de 50 mots en anglais. Pis quelques années après, y m’avaient dit que j’avais une belle lettre, mais j’avais 50 fautes! »

Une vue de l’usine de sucre Redpath, à Montréal. Photo de Parcs Canada – Canal de Lachine

Papa travaille à la « factory »

Si les anglicismes abondent dans ces entrevues en français, ce n’est pas par hasard. À l’époque, les travailleurs de l’industrie employaient en effet des termes anglais pour désigner leurs supérieurs, leurs tâches, la machinerie industrielle ou les entreprises pour lesquelles ils travaillaient. Ils parlaient même de « factory » plutôt que d’« usine ».

« Papa travaillait… à la manufacture Gair, mais papa appelait ça la factory d’papier », se rappelle Élise Chèvrefils-Boucher. Des décennies après avoir cessé de travailler chez Belding-Corticelli, Francine Gagnière qualifiait toujours sa contremaîtresse d’alors de « forelady ». Comme elle l’explique, « y appelaient ça des forelady, dans c’temps-là, c’taient un peu les chefs d’équipe ».

Dans le cadre de son premier emploi à la Redpath, Jean-Paul Bailey devait transporter des sacs de sucre d’une « shed » à l’autre, dans « le département du packing, qu’y appelaient ». Il a ensuite travaillé « dans le shipping », avant de décrocher « une job à machine shop ». Il poursuit :

« Là, une journée y m’appelle, y me dit à moé, y dit : « Là, tu vas tomber helper avec un pipefitter.” »

Lors de l’entrevue, conscient du nombre de mots anglais qu’il employait, M. Bailey a demandé pardon aux deux fonctionnaires de Parcs Canada qui l’interviewaient. Lui-même issu de la classe ouvrière québécoise, Paul-Émile Cadorette comprenait très bien : « Les métiers, c’tait anglais dans le temps, ouin. »

À la Redpath, M. Bailey a travaillé avec le père d’un des fondateurs du Front de libération du Québec (FLQ), le terroriste Paul Rose, condamné pour le meurtre du ministre québécois du Travail, Pierre Laporte, en octobre 1970.

En réalité, l’expression « les Anglais » ne désignait pas uniquement les patrons ou les habitants de Westmount. Les « Anglais » n’étaient d’ailleurs pas particulièrement « anglais », ethniquement parlant. Les quartiers pauvres du Sud-Ouest de Montréal regorgeaient d’anglophones de la classe ouvrière qui vivaient dans les mêmes logements sans accès à l’eau chaude que leurs voisins francophones et faisaient souvent face aux mêmes défis quotidiens que ceux-ci. Mais le pouvoir était aux mains des « Anglais ».

Il est important que la communauté anglophone reconnaisse ces injustices du passé, car leur souvenir continue d’avoir une incidence sur le plan politique. C’est ce souvenir toujours vivant que Philippe Couillard a ravivé par inadvertance.

En quoi consiste le travail d’une Wikipédienne en résidence ?

25 jeudi Juil 2019

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The Conversation

  1. Alexandre Hocquet

    Professeur des Universités en Histoire des Sciences, Visiting fellow at the Science History Institute, Université de Lorraine

Université de Lorraine

 

Le WikiSalon de Philadelphie, au mois de mai 2019. Avery Jensen at Wikimedia Commons, CC BY-SA
 

Durant mon séjour au Science History Institute à Philadelphie, j’ai travaillé pour la première fois avec une « wikipedienne en résidence ». J’assiste Mary Mark Ockerbloom à l’occasion des WikiSalons organisés à l’institut, et nous essayons d’imaginer ensemble des façons d’améliorer Wikipedia en collaboration avec les chercheurs associés de l’institut, sur des sujets qui les concernent.

Fidèle à l’esprit de réutilisation des licences Creative Commons, cette interview s’inspire d’une interview parue auparavant dans « Distillations », le magazine et podcast du Science History Institute, publiée sous licence CC-BY-SA-3.0.


Alexandre Hocquet : Quel est le travail d’un.e wikipédien.ne en résidence (WeR) au Science History Institute ?

Mary Mark Ockerbloom : J’écris des articles pour Wikipedia sur l’histoire des sciences et améliore ceux qui existent, et je publie des images du domaine public ou pour lesquelles l’Institut détient les droits d’auteur. Je fais aussi de la sensibilisation dans les communautés wikipédiennes à Philadelphie. Lorsque j’ai commencé à travailler ici, un certain nombre de personnes avaient peur de publier des images sous une licence Creative Commons, pour un usage libéré, mais au fil du temps, les gens sont devenus plus tolérants et même enthousiastes vis-à-vis de cette idée. L’équipe des initiatives numériques a beaucoup travaillé lors de la création de notre nouvelle archive numérique, avec comme conséquence une publication de documents d’archives numérisées sous licence CC-BY-SA 3.0 dans la mesure du possible.

A.H : Comment en êtes vous arrivée à ce type d’emploi ?

M.M.O : Au début des années 2000, j’ai créé un site Web intitulé « A Celebration of Women Writers » » pour lutter contre le manque d’informations en ligne sur les femmes écrivaines. Les lecteurs et lectrices m’ont écrit pour suggérer des écrivaines et des œuvres à ajouter, et je leur ai souvent recommandé de créer des pages Wikipedia à leur sujet. Finalement, j’ai commencé à éditer moi-même Wikipedia. En 2006, lorsque j’ai créé mon premier article, sur Harriet A. Roche, les directives de Wikipedia étaient moins nombreuses. Tel qu’écrit à l’origine, cet article n’aurait jamais satisfait aux nouvelles exigences en vigueur à ce jour. Il n’y avait pas de références et pas de format standardisé. Heureusement, les personnes qui ont examiné l’article en question ont apporté depuis des changements utiles. J’y suis retournée et l’ai amélioré plusieurs fois depuis. C’est un bon exemple de la façon dont un article peut être développé et de la façon dont les normes de Wikipedia ont évolué avec le temps.

A.H : Comment a évoluée Wikipédia au cours des années ?

M.M.O : Au fur et à mesure de l’ajout de contenu sur le site par de plus en plus de personnes, Wikipedia a créé davantage de règles pour filtrer les contenus de qualité médiocre. Wikipedia utilise un système d’équilibre des pouvoirs pour tenter d’empêcher que du contenu imprécis, insignifiant, partial ou promotionnel ne soit mis sur le site. Une des choses qui m’inquiète est la difficulté à détecter la désinformation ou les biais. Wikipedia s’appuie sur l’hypothèse selon laquelle les personnes aux opinions et aux expertises variées travailleront sur des articles et qu’elles collaboreront et résoudront leurs divergences d’opinion. L’espoir est que l’article résultant soit équilibré et complet, mais cela ne peut se produire que si des personnes ayant des perspectives différentes s’impliquent de manière productive, tant en ce qui concerne les informations contenues dans l’article qu’entre elles-mêmes.

Wikipedia permet de suivre tous les changements et tous les contributeurs et contributrices, et cette transparence permet de voir plus facilement ce qui se passe. Wikipedia est une excellente plate-forme pour enseigner aux gens des compétences en vérification de faits et en littératie numérique qui peuvent être appliquées partout, pas seulement sur Wikipedia. Les gens doivent réfléchir de manière critique aux documents qu’ils ont lus et se demander : « Qui a dit cela ? Quelle est la source originale de cette information ? La source dit-elle vraiment ce qu’elle prétend détenir ? Existe-t-il des biais dans ce qui est écrit ou est-ce que les informations pertinentes ne sont pas traitées ? L’information est-elle à la fois précise et à jour ?

A.H : Par quel type d’institution les WeR sont ils ou elles embauché·e·s ?

M.M.O : Chaque wikipédien en résidence est unique, il s’agit d’un contrat entre l’institution hôte et le wikipédien concerné. Cela dit, j’ai l’impression qu’il y a eu plus de positions de WeR en Europe qu’aux États-Unis et que les WeR européens ont tendance à se concentrer sur la publication d’images dand le domaine public plutôt que sur l’édition de contenu. Cela peut refléter comment la mission est perçue par l’institution, les types de collections et les problèmes juridiques. Une collection d’œuvres anciennes peut se concentrer sur la libération d’images. Les institutions s’intéressant à la science peuvent considérer que l’amélioration du contenu écrit est plus importante pour leur mission.

Le débat est ouvert dans la communauté de Wikipedia sur le rôle des WeR. La question se pose de savoir si un.e WeR est même censé·e éditer le contenu de Wikipédia ou pas. Beaucoup de WeR ne contribuent pas directement au contenu de Wikipédia dans le cadre de leur travail. Ceux qui le font sont plutôt employé·e·s par des établissements scientifiques, ainsi que dans des établissemnts de type GLAM. Le réseau WREN (Wikimedians in Residence Exchange Network), récemment créé, est un “Wikimedia user group” qui promeut la collaboration entre les WeR et joue le rôle de porte-parole.

A.H : Le débat autour de la question des « contributions rémunérées » à Wikipédia est récurrent au sein de la communauté. Comment les WeR gèrent-ils ou elles le problème ? Reçoivent-ils ou elles des commentaires négatifs de la part de certain·e·s wikipédien·ne·s ?

M.M.O : Il existe une préoccupation très légitime dans Wikipédia sur le fait qu’une personne qui est payée pour contribuer contribuera de manière biaisée. Le terme “contribution rémunérée” est souvent utilisé, mais l’idée de conflit d’intérêts est plus adaptée. Cela concerne les rédacteurs et rédactrices qui tentent de manipuler les informations sur Wikipedia pour introduire des préjugés, ou servir les intérêts d’une personne ou d’une institution spécifique. Un employé du “Congress” peut supprimer les critiques concernant les parlementaires, ou une entreprise de relations publiques peut promouvoir les produits de ses clients, ou un escroc peut essayer d’extorquer de l’argent en offrant de « protéger » des articles qui pourraient sinon être supprimés. Dans tous ces cas, un contributeur ou une contributrice fait passer les intérêts de quelqu’un qui bénéficiera de la présence d’informations biaisées avant les intérêts de Wikipedia et de ses lecteurs et lectrices qui sont censé·e·s bénéficier d’informations impartiales. Il s’agit d’une réelle violation des conditions d’utilisation de Wikipedia.

Un ou une WeR peut être payé·e et toujours contribuer de manière à fournir des informations impartiales et précises. La mission de Wikipedia et la mission d’institutions culturelles telles que le Science History Institute ne sont pas contradictoires. Les deux considèrent qu’il est important de fournir de bonnes informations. La règle que je me fixe à moi-même pour décider quoi éditer en tant que WeR est la même que celle que j’utilise pour l’édition personnelle : existe-t-il un conflit d’intérêts potentiel ? Si je ne suis pas la personne pour qui j’écris, je ne suis pas payée par la personne ou l’institution au nom de laquelle je contribue, et je n’ai pas écrit la source que je cite, alors je considère qu’il n’y a pas de conflit.

Le « numérique », une notion qui ne veut rien dire

24 mercredi Juil 2019

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The Conversation

 

Culture numérique

Pour une philosophie du numérique

Auteur

  1. Marcello Vitali-Rosati

    Professeur agrégé au département des littératures de langue française, Université de Montréal

Université de Montréal

AUF (Agence Universitaire de la Francophonie)

 

Le terme de numérique, trop employé, se vide de sa substance. Pexels, CC BY-SA
 

Nous parlons de plus en plus de « numérique » en substantivant un adjectif qui – initialement – comporte une signification technique précise et qui devient désormais davantage un phénomène culturel qu’une notion liée à des outils technologiques particuliers. Cette universalisation du numérique nous permet de comprendre des changements qui affectent l’ensemble de notre société et notre façon de penser, comme l’a bien expliqué notamment Milad Doueihi par son concept de « culture numérique ».

Cet usage pose pourtant un problème majeur : nous avons de plus en plus tendance à penser « le numérique » comme un phénomène uniforme et homogène (sur ce sujet, il est intéressant de lire le débat entre Morozov et Johnson) alors que, de toute évidence, il ne l’est pas. « Le » numérique n’existe pas en tant que tel. Il existe de nombreuses pratiques, usages, outils et environnements différents, chacun fondé sur des principes particuliers, chacun promouvant des valeurs spécifiques et entraînant des conséquences caractéristiques.

Le fait de penser « le numérique » comme un tout nous amène souvent à exprimer des jugements de valeur qui font abstraction des caractéristiques propres à des outils ou pratiques distincts : inévitablement donc, le jugement se radicalise, s’uniformise, se généralise en perdant tout son sens et sa cohérence vis-à-vis du particulier. « Le numérique » devient ainsi tantôt synonyme d’émancipation et de liberté, tantôt synonyme de contrôle et d’assujettissement : en somme, le numérique est bien ou le numérique est mal. D’un côté les technoptimistes, de l’autre les technophobes.

Changement de discours

Les modes changent : nous sommes passés d’un technoptimisme généralisé à une technophobie universelle. Dans les années 1990, le discours des optimistes semblait prévaloir : de la déclaration de l’indépendance du cyberespace de John Perry Barlow aux discours d’émancipation transhumanistes, en passant pas les merveilles de la virtualisation.

Depuis quelques années, il semblerait que la mode ait changé : il faut être critique vis-à-vis du numérique. Les grands gourous du numérique sont les premiers à le blâmer : de Bill Gates à Tim Berners-Lee, en passant par Jimmy Wales… Le discours critique est aussi porté par les intellectuels – Morozov est devenu le porte-drapeau de ce mouvement, avec des arguments que je partage dans l’ensemble – ou des universitaires. Des critiques philosophiques approfondies ont été développées, consacrées à des phénomènes particuliers – je pense en premier lieu à la fine analyse que Gérard Wormser propose de Facebook.

Il me semble cependant nécessaire de différencier – et ainsi d’identifier – les aspects du « fait numérique » qui peuvent et doivent nous faire peur. Bien que j’ai toujours rejeté cette opposition entre optimistes et technophobes, je conserve néanmoins une préférence pour les optimistes – encore aujourd’hui alors que cette posture est passée de mode. J’ai tendance à être en accord avec les analyses de Pierre Lévy qui soulignent le fait toujours d’actualité que plusieurs idéaux utopistes, qui portaient le développement informatique dans les années 1990, sont encore présents et en vigueur. Cependant, dans les dernières années – probablement aussi du fait que je suis devenu le père de deux enfants –, je suis de plus en plus angoissé, non pas par « le numérique » en général, mais par la place dans nos vies à laquelle accède – notamment via certaines technologies numériques – un nombre très restreint de sociétés privées : celles qu’on a commencé à appeler les GAFAM pour se référer à Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft, sachant que cet acronyme est devenu une métonymie pour inclure également les nouveaux acteurs comme Netflix, Airbnb, Uber, etc.

Cette influence ne dépend pas « du numérique », mais de certains usages spécifiques : plus précisément des usages de logiciels et de matériels propriétaires. Et, plus important, ces usages ne sont pas inévitables, mais on fait, hélas, trop peu – ou presque rien – pour les contrer, alors qu’il serait facile de mettre en place des mécanismes et dispositifs de protection de l’espace public.

Concrètement, le fléau dont nous sommes victimes est représenté par le fait que dans tous les domaines, de la vie privée à la vie publique en passant par l’activité professionnelle, nous sommes encouragés à utiliser des solutions propriétaires : MacOs, iOS, Windows, Word, Adobe, Facebook, WhatsApp, Skype, Gmail, Outlook… Ce problème n’émane pas, à mon sens, des entreprises – dont l’objectif principal est, évidemment, de vendre leurs produits –, mais du manque quasi total de sensibilité des institutions publiques et privées et de l’absence de littéracie numérique pour les usagers.

Quelques exemples :

  • nous utilisons des systèmes d’exploitation propriétaires – MacOS et Windows – alors que nous pourrions utiliser des systèmes d’exploitation libres ;
  • nous utilisons des dispositifs portables propriétaires sans nous soucier des conséquences ;
  • nous utilisons des applications mobiles alors que nous pourrions utiliser des services web ;
  • nous utilisons des logiciels propriétaires alors que nous pourrions utiliser des solutions libres ;
  • nous ne nous posons pas de questions sur les pilotes qui font fonctionner les dispositifs de nos ordinateurs alors que nous pourrions choisir les dispositifs en fonction de la transparence de leur conception.

Ce sont fondamentalement les revendications de la Free Software Foundation qui n’ont malheureusement que trop peu d’impact sur les pratiques.

Or deux considérations :

  • ces pratiques sont très dangereuses ;
  • il serait très facile de les changer.

Il me semble, en d’autres termes, que, le fait de penser « le numérique » comme quelque chose d’uniforme nous empêche de cerner le véritable problème et de chercher des solutions. Être génériquement technophobes est une posture qui n’amène à rien : cela revient à un nostalgique « o tempora o mores » qui plonge dans une inactivité abrupte. Des positions du type : « le numérique doit/ne doit pas être utilisé par les enfants » me semblent juste stupides. Elles réunissent des réalités hétérogènes qui n’ont aucun rapport entre elles : « le numérique » ? Quels outils ? Quelles plates-formes ? Quels environnements ? Quels dispositifs ? Identifier des problèmes spécifiques est sans doute plus complexes : cela demande une étude et une compréhension du fait numérique dans sa diversité, une analyse des enjeux liés à un logiciel, à un format, à un protocole qui demandent du temps et de l’expertise. Mais cela permet de trouver des alternatives et des solutions concrètes.

La femme préhistorique : artiste, muse et modèle

23 mardi Juil 2019

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The Conversation

  1. Jennifer Kerner

    Archéologue, éthnologue, spécialiste des rites funéraires, Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières

 

Partenaires

Université Paris Nanterre

 

Vénus préhistoriques. Jennifer Kerner, Author provided
 

Au sein des œuvres paléolithiques, la figure de la femme s’impose dès les plus anciennes productions artistiques européennes (vers -40 000 ans) et jusqu’à l’aube du Néolithique où la femme conservera une place prépondérante dans l’iconographie.

Lors de la naissance de l’art moderne, les artistes se tourneront d’ailleurs volontiers vers ces représentations pour s’en inspirer, de Picasso à Louise Bourgeois. La sublime exposition Préhistoire, une énigme moderne, actuellement à l’affiche au Centre Georges Pompidou,s’en fait le juste reflet.

Jennifer Kerner présente, via sa chaîne Boneless, sa revue de l’exposition « Préhistoire, une énigme moderne », actuellement à l’affiche au Centre Georges Pompidou.

Le modèle

La femme a été allègrement représentée par les artistes du Paléolithique. Sur tous les supports (serpentine, ivoire, paroi en pierre), grâce à toutes les techniques (gravure, peinture, sculpture) et sous toutes les coutures (de la femme entière à la vulve isolée). Bref, quand l’homme n’est qu’une figure approximativement anthropomorphe traitée en 2D, la femme, elle, a mobilisé toutes les forces artistiques en présence pour sublimer sa plastique.

Vénus de Willendorf, Paléolithique supérieur, vers 24 000–22 000 av. J.-C.MatthiasKabel/Wikimedia, CC BY

Femme peinte de Chauvet et vulve

La femme a donc été le modèle préféré des artistes du passé. Mais n’était-elle que cela ? De Lee Miller à Flora Mayo, les femmes artistes qui ont eu le malheur d’être aussi des modèles ont été cataloguées plus aisément dans la seconde catégorie… Et pourtant, les photographies d’Elizabeth et les sculptures de Flora n’avaient rien à envier aux œuvres de leurs glorieux amants Man Ray et Alberto Giacometti. Tout comme nos femmes préhistoriques artistes qui ont peut-être produit les œuvres les plus emblématiques de l’art paléolithique.

Portrait of Space, Lee Miller, 1937. source

L’artiste

Lorsqu’on pense à l’art paléolithique, l’image des mains positives et négatives sur les parois des grottes s’impose à l’esprit. Ces motifs se retrouvent en Europe mais également dans certaines îles de l’archipel malais.

Face à cette abondance de témoignages, deux chercheurs en médecine et un archéologue ont exploré la possibilité de déterminer le sexe des artistes paléolithiques à travers ces fameuses mains. Grâce à l’étude de populations contemporaines, ils ont réalisé qu’une diagnose sexuelle pouvait être proposée sur la base de l’observation du ratio digital chez certaines populations de sapiens.

Le « Bouquet de Mains », Ilas Kenceng. Luc-Henri Fage

Le principe est simple : l’index et l’annulaire des femmes sont sensiblement de taille égale alors que, chez les hommes, l’index est plus court que l’annulaire. Une observation du ratio digital a donc été appliquée aux mains de la grotte Gua Masri II de Bornéo avec des résultats concluants.

La mixité était donc a priori de mise parmi les artistes du Paléolithique. Évidemment, la méthode n’est pas parfaite car des adolescents mâles adultes peuvent avoir des mains particulièrement féminines. De nombreux auteurs appellent ainsi à la prudence interprétative en contexte archéologique mais la présence féminine parmi les artistes n’est généralement plus remise en doute par les préhistoriens.

Les courbes généreuses des vénus laissent rêveur… mais également perplexe ! On constate en effet que les proportions ne sont pas souvent naturelles et que certaines parties du corps sont carrément omises. Mc Dermott souligne en 1996 que ces accentuations des proportions de certaines parties des corps féminins (seins hypertrophiés, fesses surélevées) pourraient être liées au regard subjectif de l’artiste qui se regarderait elle-même – de haut donc, à une époque où la glace en pied n’existe pas – afin de se représenter.

Adhérer à l’analyse de Mc Dermott, c’est envisager que l’auto-portrait était de mise et que les femmes ne se seraient pas regardées entre elles pour se représenter de manière plus naturaliste. Même si l’hypothèse de l’auto-portrait est largement discutée, elle n’en demeure pas moins passionnante car elle pose pour la première fois la question d’une représentation artistique de soi !

Vénus Paléolithiques avec Harry Boudchicha.

Des représentations de soi donc, imaginons-nous et des représentations peut-être également POUR soi. En effet, plusieurs vénus sont destinées à être portées en pendentif et auraient pu constituer des parures féminines. Évidemment, nous savons que la parure n’est pas l’apanage des femmes au Paléolithique : une plantureuse vénus attachée au cou ou au vêtement d’un homme n’est donc pas une hypothèse à exclure. Cependant, une vénus fait figure d’exception, celle de Mal’ta (Russie, période gravettienne).

Vénus malta. Hominides.com

Elle est entaillée de plusieurs sillons. Si l’on considère les plus nets d’entre eux, ils sont au nombre de 21, ce qui a amené certains chercheurs à voir ce pendentif comme un mémo permettant aux femmes de maîtriser leur fertilité en comptant les jours qui les séparent de leur prochain cycle d’ovulation par observation empirique de leur période de fertilité personnelle au sein de leur cycle menstruel. Une interprétation controversée mais qui a le mérite de remettre la femme au centre de la production d’objet esthétique, non plus seulement en tant que simple motif mais bien en tant qu’utilisatrice !

La muse

Plus qu’un sujet parmi d’autres pour réaliser quelques études rapidement croquées, la femme semble avoir dépassé le statut de modèle pour atteindre celui de muse. Le phénomène le plus emblématique de ce règne féminin est probablement celui des vénus paléolithiques, ces statuettes de femmes en ronde-bosse à la silhouette schématique produites de l’Oural à l’atlantique, et de l’Aurignacien (-40 000) au Magdalénien (-15 000).

Vénus. C’est le nom qu’on leur donne à la fin du XIXe siècle au moment de leur découverte, comme une évocation de leur divine sensualité. Alors, divinité, la vénus paléolithique ? Assurément les abbés-archéologues bâtisseurs de la science préhistorique lors de ses balbutiements ne souhaitaient pas voir autre chose dans ces femmes aux formes étourdissantes et à la nudité sublimée.

Mais elles pourraient plus largement être des symboles de fécondité : la représentation de plusieurs femmes enceintes et la focalisation dont fait l’objet la vulve pourrait le suggérer. Mais ces femmes voluptueuses ont également pu être les témoins d’un érotisme dont les rarissimes représentations de coït se font aussi l’écho.

Qu’elle soit symbole de fertilité, déesse-mère, ou plus simplement une beauté mystérieuse dont la perfection des courbes vaut à elle seule d’accaparer l’inspiration des artistes, la femme est au centre de la représentation anthropomorphique paléolithique. Et quelles que soient les interprétations fluctuantes des préhistoriens, il est fort à parier que ces statuettes feront tourner les têtes des scientifiques et des esthètes pendant encore quelques millénaires.

Mais pourquoi aime-t-on autant la caravane du Tour de France ?

22 lundi Juil 2019

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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The Conversation

  1. Françoise Passerard

    Professeur assistant en Marketing, PSB Paris School of Business – UGEI

  2. Phillip Cartwright

    Professor of Economics, PSB Paris School of Business and Visiting Researcher, Royal College of Music, PSB Paris School of Business – UGEI

PSB Paris School of Business

Union des Grandes Ecoles Indépendantes (UGEI)

 

Quelque 160 véhicules composent cette « foire-exposition itinérante et humoristique ». Patrick Janicek/Flickr, CC BY-SA
 

La caravane publicitaire du Tour de France est un convoi de véhicules et de chars publicitaires, décorés aux couleurs des marques qu’ils représentent et qui défilent ensemble sur le trajet de chacune des 21 étapes du Tour. Si les marques mises en avant cette année sont pour l’essentiel françaises, certaines, de renommées mondiales comme Coca-Cola, se sont associées à de précédentes éditions. Chaque année, cette véritable « colonne commerciale qui précède le peloton », comme la qualifie le journaliste Jean‑Louis Le Touzet dans un livre sur le sujet, est acclamée par 10 à 12 millions de spectateurs.

A.S.O

Ces derniers s’installent en famille, conquis par les actions marketing et publicitaires, sur le bord des routes, pour voir passer plus de 600 personnes à bord de 160 véhicules(11 kilomètres de convoi) toujours plus étonnants. Trente minutes de spectacle, gratuit et accessible à tous, pour recevoir un maximum de cadeaux promotionnels, deux heures avant de voir passer le maillot jaune, là encore sans avoir à débourser un centime. La gratuité du spectacle et des cadeaux attire une foule d’autant plus singulière que près d’une personne sur deux ne viendrait que pour la caravane du Tour.

Un contexte d’exposition publicitaire à part

La popularité de la caravane est indissociable de celle du Tour de France. Bien qu’elle ne soit pas diffusée sur les chaînes télévisuelles, elle profite de la forte notoriété et de l’exceptionnelle médiatisation du Tour, l’un des événements sportifs les plus suivis dans le monde après les Jeux olympiques et la Coupe du Monde de football. Pour bénéficier de cette exposition, le ticket d’entrée le moins cher s’élèverait à 250 000 euros selon les estimations, car le budget total de la caravane reste confidentiel.

Pour ce prix-là, les marques iront à la rencontre de spectateurs (et de potentiels clients) bien particuliers. Ces derniers font en effet la démarche volontaire de venir s’exposer à un véritable bain de publicité. Ils offrent ainsi leur totale disponibilité et leur plein enthousiasme à la réception des actions publicitaires offertes lors de ce show.

La Caravane du Tour@CaravaneduTour

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10

9:58 AM – Jul 12, 2019
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Cette attitude tranche littéralement avec le matraquage publicitaire tant critiqué par les consommateurs qui expriment généralement une certaine lassitude, voire un sentiment d’intrusion dans leur sphère privée. La caravane offre donc un contexte d’exposition à la publicité tout à fait unique en son genre.

Pour mieux comprendre l’état d’esprit des spectateurs, nous avons mené une étude qualitative exploratoire sur les années 2013, 2015 et 2017, couplant une observation participante à une quinzaine d’entretiens non-directifs auprès de spectateurs qui s’identifient comme « fans de la caravane ».

Des stratégies pour plus de cadeaux

Le terrain nous montre tout d’abord l’engagement des spectateurs envers les marques. Ils soutiennent et encouragent leurs marques préférées, arborant parfois des pancartes faites maison pour attirer l’attention des caravaniers et augmenter ainsi leurs chances de recevoir davantage de cadeaux. Étonnamment, certains spectateurs nous ont expliqué collectionner les cadeaux, acquis fièrement d’année en année, sans pour autant consommer les échantillons comme les sachets de bonbons Haribo ou de mini-saucissons Cochonou.

« Les cadeaux que j’ai eu à la caravane du tour 2017 » (vidéo Frédo 1O68).

En lien avec cet engagement renouvelé dans le temps, les fans de la Caravane sont aussi nombreux à exprimer un profond attachement envers les sponsors historiques et envers la caravane en tant qu’événement populaire, social et culturel, qui réinvestit le champ de la consommation. Plus inattendu, une femme, appartenant à la génération des baby-boomers, évoque même la solidarité pour expliquer son attachement à la caravane :

« Dans les années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, je me souviens que le magazine La Vie Catholique et les journalistes de radio recommandaient aux gens de ne pas se précipiter sur les produits de la caravane pour laisser la priorité aux plus nécessiteux parce que ça leur permettait de faire des provisions gratuitement ».

Enfin, l’image positive des marques est renforcée chez les spectateurs qui s’amusent à comparer les chars et les véhicules les uns aux autres, et d’une année à l’autre. Certaines marques sont perçues comme amusantes par leur stratégie créative : Cochonou et sa légendaire 2CV à carreaux rouges et blancs, Senseo et ses dosettes géantes, ou Vittel qui régale les spectateurs en les brumisant, ce qui est fortement apprécié sous le soleil estival. D’autres marques ou institutions surprennent par leur présence, comme Mécénat Chirurgie cardiaque qui sensibilise le public à la cause des enfants malades.

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❤️ @mecenatcardiaque ❤️ #LaCaravane

A post shared by La Caravane du Tour (@lacaravanedutour) on Jul 21, 2017 at 8:01am PDT

« Tout est gratuit ! »

La gratuité de l’événement et des cadeaux participe de l’ambiance festive autour du passage de la caravane. Les spectateurs espèrent patiemment recevoir de nombreux cadeaux des marques qu’ils affectionnent. Perçus comme des dons, les goodies offerts apportent une valeur sentimentale aux produits publicitaires. Les spectateurs ressentent de la gratitude envers ces marques qui les enchantent par leur créativité renouvelée. Cette forme de « foire-exposition itinérante » et humoristique), pour reprendre l’expression du sociologue Philippe Gaboriau, symbolise la popularité et l’abondance de la société de consommation en y ajoutant un petit supplément d’âme. Une jeune maman partage ainsi sa vision d’ensemble :

« La caravane du Tour, c’est une sacrée expérience ! Tous nos repères changent, les rues sont interdites à la circulation, la musique est à fond, les voitures et les chars sont énormes. Tout est gratuit, c’est tellement rare ! Les gens font du troc de goodies et portent immédiatement les casquettes Skoda ou les t-shirts PMU… Nous, spectateurs, devenons instantanément des ambassadeurs ! Et l’ambiance est géniale avec des enfants qui gagnent un petit Journal de Mickey ou des gourmandises ».

Les parcours d’étapes se trouvent ainsi littéralement théâtralisés dans une ambiance polysensorielle. Les spectateurs contribuent à cette mise en scène tout en s’amusant en famille, et entourés de monde. Une étape correspond à un lieu immersif de divertissement, délimité dans l’espace et le temps, orchestrant les offres commerciales des différentes enseignes partenaires. Dans ce contexte unique et éphémère, l’atmosphère euphorisante réenchante la publicité et renforce la fidélité des consommateurs.

Le produit banal devient expérience

La manière dont l’évènement se déroule pour le spectacteur contribue aussi à rendre le passage de la caravane unique. Tout commence par l’anticipation de l’expérience en prenant le temps de rechercher la place idéale, de faire connaissance avec les voisins du moment, de guetter et d’attendre l’arrivée du convoi. L’excitation commence alors à monter et atteint son apogée lorsque les véhicules publicitaires se font entendre et apparaissent au loin. Ensuite, durant le passage de la caravane, de nombreuses sensations s’entremêlent entre l’action et l’expérience : les marques sont applaudies, fêtées, interpellées dans une ambiance folklorique, familiale et amicale.

« La caravane publicitaire du Tour de France cycliste 2017 à Longwy (Meurthe-et-Moselle) » (vidéo vhbleu).

Le temps d’après laisse place au plaisir du bilan et de la découverte des cadeaux reçus, en trois phases : le temps de la discussion entre proches et voisins, le temps du partage ou de l’échange de cadeaux, puis le temps du partage de l’expérience par le bouche-à-oreille sur les réseaux sociaux et dans la vie réelle. À partir des souvenirs créés, les fans développent le projet de retourner voir la caravane l’année suivante.

En rejoignant la caravane, les marques investissent donc le champ du marketing expérientiel. Grâce au divertissement, la consommation de leurs produits, perçus au quotidien comme ordinaires, devient une expérience événementielle. En rendant les campagnes publicitaires extraordinaires et excitantes, la caravane du Tour continue d’émerveiller année après année depuis son apparition en 1930, dans un environnement qui n’a pourtant jamais été autant saturé de publicité.

La caravane passe… à travers les âges (INA Sport).
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