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Archives Journalières: 15/04/2020

Non, le coronavirus ne favorise pas (encore) la montée d’un sentiment pro-Chine en Europe

15 mercredi Avr 2020

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The Conversation

  1. Philippe Le Corre

    Spécialiste des questions chinoises et asiatiques, chercheur associé à la Harvard Kennedy School et au John K. Fairbank Center for Chinese Studies à Harvard, Fellow-in-residence, Paris Seine Initiative (Institute of Advanced Studies), professeur invité, ESSEC

ESSEC

 

CC BY ND
Déchargement d’un avion transportant du matériel médical chinois le 13 mars à l’aéroport international de Rome Fiumicino. Stringer/Ansa/AFP
 

Le 13 mars dernier, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) déclarait que l’Europe était le nouvel épicentre de la pandémie de Covid-19. La Chine avait immédiatement profité de l’occasion pour offrir de l’aide à certains des pays européens les plus touchés, dans le cadre d’une campagne de relations publiques bien orchestrée, visant à améliorer l’image du parti communiste à l’étranger mais, surtout, à l’échelle nationale. Bien que les offres d’aide médicale de Pékin aient été plutôt bien accueillies par les dirigeants européens, il est encore trop tôt pour savoir si la Chine a su conquérir les cœurs et les esprits des pays du Vieux continent. En réalité, alors que la diplomatie chinoise en Europe devient de plus en plus plus offensive, voire agressive, on pourrait bien assister au phénomène contraire.

La diplomatie des masques

Déjà qualifiée par certains de « diplomatie des masques », la réaction rapide de la Chine à la pandémie de coronavirus qui sévit en Europe est un fait indiscutable. Depuis la mi-mars, de nombreux avions chinois chargés de personnel médical, de masques et de respirateurs ont atterri sur les aéroports européens. Par exemple, le 13 mars, deux jours seulement après que le nombre de cas confirmés de coronavirus en Italie ait atteint la barre des 10 000, une équipe médicale envoyée par la Croix-Rouge chinoise arrivait à Rome. À bord de l’appareil, il y avait au moins 30 tonnes de masques et de respirateurs, denrées rares de nos jours, dans des caisses recouvertes du drapeau chinois et barrées de l’inscription « la route de l’amitié ne connaît pas de frontières ».

Déchargement d’un Airbus d’Air China transportant 500 000 masques de protection à l’aéroport international d’Athènes, le 21 mars 2020. Aris Messinis/AFP

L’Espagne – aujourd’hui sur le point de devenir, après l’Italie, le pays le plus touché par le virus en Europe –, a conclu avec des fournisseurs chinois qui ont ces derniers mois considérablement augmenté leur production un accord portant sur la fourniture de plus d’un demi-million de masques, 5,5 millions de kits de test et 950 respirateurs. Les autres pays européens à avoir reçu une aide considérable de la part de la Chine sont la Grèce, la Belgique, la République tchèque, la France, l’Autriche et la Serbie. De son côté, le milliardaire chinois Jack Ma s’est également engagé à faire don de deux millions de masques à l’Espagne, à la France, à l’Italie et à la Belgique. Quant au géant chinois des télécommunications Huawei, qui est actuellement en négociation pour développer d’importants contrats 5G dans toute l’Europe, il a fait don de plus de 2 millions de masques à l’Espagne, aux Pays-Bas, à l’Italie et à la Pologne.

L’effort diplomatique de Pékin

La Chine a également intensifié ses initiatives diplomatiques en Europe. Le 13 mars, des responsables chinois ont organisé une visioconférence avec leurs homologues du groupe dit 17 + 1 qui rassemble les pays d’Europe centrale et orientale (ainsi que la Grèce), afin de partager leurs méthodes pour combattre la pandémie de coronavirus. Une autre visioconférence a eu lieu quelques jours plus tard entre les autorités sanitaires chinoises et dix pays européens, dont la France, le Portugal et le Danemark. Le numéro un chinois Xi Jinping a personnellement contacté les dirigeants de l’Italie, de l’Espagne, de la France, du Royaume-Uni et de la Serbie, pour discuter d’une alliance commune pour combattre le virus, assimilée à une « Route de la soie pour la santé ».

Dans le même temps, la Chine s’est également impliquée dans des campagnes plutôt inquiétantes de désinformation et de propagande à travers ses médias à l’intention du marché européen. L’Italie a été l’un des pays les plus ciblés. Par exemple, un tweet provenant du journal Global Times a fait planer le doute concernant l’origine du virus, suggérant qu’il provenait d’Italie. Un autre tweet posté par un porte-parole officiel chinois a présenté de façon mensongère une vidéo d’habitants de Rome en train de chanter sur leurs balcons, affirmant qu’ils remerciaient la Chine et diffusaient l’hymne national chinois. En outre, un journal italien a rapporté que la Chine, s’inspirant d’une tactique largement employée par la Russie, aurait déployé des centaines de robots sur Twitter pour diffuser sa propagande à propos du coronavirus. Ces agissements s’inscrivent dans la stratégie agressive que les responsables chinois emploient depuis plusieurs années en Europe contre tous ceux qui ne partagent pas leur vision des choses.

Global Times

✔@globaltimesnews

#Italy may have had an unexplained strain of pneumonia as early as November and December 2019 with highly suspected symptoms of #COVID19, reports said.

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937

4:56 AM – Mar 22, 2020
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Il n’est pas surprenant que la Chine intensifie sa campagne de propagande en Europe en pleine épidémie du coronavirus. Les activités mentionnées ci-dessus servent plusieurs objectifs aux yeux des autorités chinoises. Cela leur permet avant tout de détourner l’attention du fait que le virus est apparu pour la première fois dans la ville de Wuhan mais aussi que les autorités chinoises ont tout d’abord caché son existence. Ensuite, au moment où l’Occident peine à contenir le virus, Pékin cherche à tirer parti de la situation en exposant son prétendu modèle de réussite et de réaction rapide face à la pandémie, basée sur l’encadrement social, le confinement sévère et la surveillance 24 heures sur 24. Enfin, la Chine se sert de ces nouveaux instruments diplomatiques pour renforcer son « soft power » et pour tenter de se forger l’image d’un acteur international généreux sur lequel on peut compter.

Bien que l’objectif premier soit de redonner confiance aux citoyens chinois envers le Parti communiste après cette crise sociale et sanitaire majeure, c’est également une occasion pour la Chine de renforcer ses liens avec l’Europe, une région cruciale aux yeux du gouvernement du Pékin. L’intérêt stratégique de conquérir l’Europe est d’autant plus important que la Chine est engagée dans une guerre commerciale avec les États-Unis. Il s’agit donc pour elle d’améliorer son accès à la technologie et au marché européens tout en sapant une éventuelle riposte transatlantique commune.

Quels résultats ?

Jusqu’ici, l’aide en provenance de Chine n’a apporté des résultats concrets que dans très peu de pays européens. Sans surprise, les dirigeants des pays les plus touchés sont parmi les plus reconnaissants. Par exemple, Luigi di Maio, le ministre des Affaires étrangères d’une Italie en grande difficulté, a publié une vidéo sur Facebook saluant l’aide que Pékin a déployée en Europe et ne tarit pas d’éloge sur la Chine, la félicitant pour son « esprit de solidarité ». Le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a vanté les méthodes chinoises et promis qu’il s’en inspirerait pour contenir le virus. Mais le dirigeant le plus élogieux envers la Chine est le président de la Serbie Aleksandar Vučić qui a déclaré, lors d’une allocution télévisée où il promulguait l’état d’urgence dans son pays, que la Chine était « le seul pays à pouvoir nous aider ». Le fait que cette déclaration émane d’un pays non membre de l’Union européenne et allié principal de Pékin sur le continent n’est pas due au hasard.

Foreign Policy

✔@ForeignPolicy

The impetus for China’s assistance to Serbia was the EU’s initial unwillingness to offer any meaningful support to the country, @v_vuksanovic writes.https://buff.ly/3e2mjQS 

China Has Its Eyes on Serbia

Beijing is using the coronavirus pandemic to expand its influence into the EU’s backyard.

foreignpolicy.com

22

2:45 AM – Apr 10, 2020
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Pourtant, rien ne dit que ces efforts auront un impact durable sur l’image de la Chine en Europe. En effet, plusieurs indices incitent à penser que la campagne de propagande actuelle pourrait se retourner contre Pékin. D’abord, après un démarrage bancal, l’Europe est enfin en train de mettre en place une réaction commune mieux coordonnée pour lutter contre le coronavirus. En conséquence, la Chine ne peut plus exploiter le manque de solidarité des Européens et se présenter comme le seul acteur à pouvoir venir en aide aux pays du continent. De plus, la Commission européenne a également décidé de répondre aux allégations et fausses informations venant de Chine en publiant des déclarations faisant état de l’entraide entre pays européens, soulignant par exemple que « La France et l’Allemagne combinées ont fait don de plus de masques à l’Italie que la Chine ». En écho aux déclarations de la commission, Emmanuel Macron a appelé à l’unité en demandant que cesse le constant « dénigrement de l’Europe ».

Les efforts visant à lutter contre la propagande et la désinformation chinoises qui sévissent en Europe sont en cours. Le Haut représentant de l’Union européenne pour la politique étrangère, Josep Borrell, a parlé à cet égard de « confrontation globale de récits » et accusé la Chine de promouvoir et de diffuser « de façon agressive » de fausses informations. À la suite de cette déclaration, l’entreprise de télécommunications Huawei a choisi de réduire l’ampleur de son programme de dons de masques à l’Europe, de peur d’être entraînée dans un conflit géopolitique à l’heure où elle cherche à tout prix à se faire une place sur le marché de la 5G.

Autre exemple : une équipe du Service européen pour l’action extérieure, qui se consacre habituellement à vérifier les fausses informations en provenance de Russie, a récemment repéré une série de messages de propagande sur le coronavirus en provenance de Chine dont le mode opératoire est étrangement similaire à celui de la Russie en Europe. Le 26 mars, le Conseil européen a reconnu qu’il était nécessaire de s’investir dans cette bataille de communication, s’engageant à « contrer les fausses informations par une communication transparente, exacte et fondée sur des faits ». Comment expliquer le fait que l’envoi de matériels européens à la Chine, début février, ait été entièrement passé sous silence par les médias chinois bien qu’ayant fait l’objet d’une communication à Bruxelles ?

L’état défectueux de divers matériels médicaux envoyés par Pékin a également fait scandale. Des pays comme l’Espagne, les Pays-Bas et la République tchèque ont déjà renvoyé des kits de test fabriqués en Chine. Des masques produits en Chine présentant des défauts de fabrication ont également été signalés par plusieurs pays. Voilà qui est de nature à exacerber la méfiance qu’éprouvent les Européens à l’égard de la qualité des produits chinois et de leurs normes de sécurité.

Gatestone Français@Gatestone_FR

Alors que le coronavirus prolifère en Europe, nombre de pays réalisent que les millions d’équipements médicaux qu’ils ont achetés en Chine pour vaincre la pandémie – ou qu’ils ont reçus de la Chine en cadeau –sont défectueux et inutilisables. https://fr.gatestoneinstitute.org/15849/chine-materiel-medical-defectueux …

Coronavirus : la Chine Inonde l’Europe de Matériel Médical Défectueux

En Espagne, le ministère de la Santé a révélé que les 640 000 tests de dépistage du coronavirus achetés en Chine étaient défectueux. L’autre million de tests de dépistage du coronavirus livré en…

fr.gatestoneinstitute.org

2

11:46 PM – Apr 5, 2020
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Une fois la crise du coronavirus passée, certains pays pourraient donc, pour des raisons de sécurité, décider de réduire l’emprise économique chinoise sur l’Europe. La Commission européenne a déjà émis de nouvelles lignes directrices pour la mise en œuvre d’un mécanisme européen commun de filtrage des investissements étrangers, évoquant explicitement la nécessité de protéger les « infrastructures stratégiques de l’Union », y compris les ressources médicales. L’Union européenne ne veut surtout pas voir se répéter le même scénario qu’après la crise financière de 2008, lorsque des entreprises d’État chinoises (ainsi que quelques entreprises privées) avaient profité de la situation pour s’inviter au capital de plusieurs infrastructures européennes majeures, dans des secteurs comme les transports ou l’énergie. De même, Emmanuel Macron appuie l’initiative visant à intégrer le secteur médical et pharmaceutique (https://www.politico.eu/pro/macron-urges-massive-increase-in-local-production-of-medical-eq) à la liste des domaines stratégiques où l’Europe se doit d’acquérir plus de « souveraineté ».

Enfin, le scepticisme des élites européennes et de l’opinion publique envers la Chine n’est pas susceptible de changer, puisqu’il prend racine dans l’inquiétude croissante suscitée par la puissance économique et politique de celle-ci. Ainsi, certains Italiens ont réagi avec vigueur à la poussée chinoise dans leur pays, allant jusqu’à réclamer des « indemnités de guerre ». Cette attitude correspond à la fermeté affichée dernièrement par l’Europe envers la Chine : l’année dernière, une communication de la Commission européenne sur la stratégie européenne envers la Chine qualifiait déjà le pays de « rival systémique ».

Il apparaît donc que le Covid-19 et ses conséquences pourraient avoir impacté négativement la relation entre l’UE et la Chine, déjà très mal en point auparavant. Le sommet annuel prévu entre les deux parties a été annulé et personne ne sait si la réunion rassemblant les 27 dirigeants de l’Union et le président chinois Xi Jinping, censée se tenir à Leipzig sous présidence allemande, en septembre, aura lieu. Avant la crise sanitaire, il était déjà douteux que l’objectif principal de la rencontre, à savoir la signature d’un accord bilatéral d’investissement entre l’UE et la Chine, puisse être atteint. Aujourd’hui, cette perspective semble encore plus lointaine.

Et après la pandémie ?

En résumé, Pékin pourrait bien marquer quelques points à court terme en Europe, en particulier auprès des dirigeants les plus populistes, mais son actuelle campagne de propagande ne changera probablement pas son image en profondeur. Si la Chine veut sérieusement améliorer sa position auprès des gouvernements européens, elle devra mettre en place bien plus qu’une aide médicale symbolique et des séances de photos arrangées. Elle devra notamment se montrer bien plus transparente sur les conditions d’apparition du virus en Chine, éviter de politiser son aide médicale, cesser la diffusion de propagande et de désinformation et mettre l’accent sur les institutions multilatérales. Elle devra également s’engager dans de vrais partenariats commerciaux et scientifiques avec l’Europe.

Cependant, les dirigeants européens ne doivent pas prendre à la légère les récentes offensives diplomatiques chinoises. Si après la pandémie, cette attitude conquérante devenait une constante de la politique étrangère chinoise en Europe, une réponse forte et ferme de la part de l’UE s’imposerait. Simultanément, cette dernière doit s’efforcer d’accroître la solidarité envers les pays membres les plus touchés comme l’Italie ou l’Espagne, mieux faire connaître l’aide qu’elle apporte à ses voisins et lutter plus fermement contre la propagande chinoise et la désinformation.

La statistique publique face à l’urgence du décompte des morts

15 mercredi Avr 2020

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The Conversation

  1. Gilles Pison

    Anthropologue et démographe, professeur au Muséum national d’histoire naturelle et chercheur associé à l’INED, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)

  2. France Meslé

    Démographe, Institut National d’Études Démographiques (INED)

Institut National d'Études Démographiques (INED)

Muséum National d’Histoire Naturelle

 

CC BY ND
Machine à statistiques, Musée des arts et métiers, musée des sciences et des technologies, du Conservatoire national des Arts et Métiers à Paris. Yann Caradec/Flickr, CC BY-NC-SA
 

Depuis le début de la pandémie de Covid-19, différentes questions se posent à propos de la mortalité qu’elle entraîne. Les hommes meurent-ils vraiment plus que les femmes ? La part des jeunes progresse-t-elle parmi les victimes ? De façon plus générale, comment le risque de mortalité varie-t-il selon le sexe et l’âge ? Ces variations se retrouvent-elles dans les différents pays ? La pandémie serait-elle moins meurtrière dans certains que dans d’autres ?

Les pays européens ont développé au cours du XXe siècle une statistique publique solide qui permet de suivre la mortalité et son évolution. En France, l’Insee et l’Inserm œuvrent à la production de ces statistiques indispensables pour suivre au long cours la situation sanitaire.

Mais elles peuvent difficilement répondre en temps réel aux questions soulevées par l’épidémie. La statistique publique est en effet l’héritière d’une tradition administrative dont les temps de production sont peu compatibles avec l’urgence, comme nous allons le voir ici en retraçant son histoire.

Des registres paroissiaux aux registres d’état civil

Le système statistique français s’est construit sur plusieurs siècles.

Registre paroissial de Giou-de-Mamou (Cantal) (1641-1673). Archives du Cantal. Archives du Cantal

Il repose sur l’enregistrement des naissances et des décès généralisé il y a près de cinq siècles par l’édit de Villers-Cotterêts de François 1ᵉʳ (en 1539).

Copie du préambule et des articles toujours appliqués de l’ordonnance de Villers-Cotterêts. Wikimedia, CC BY-ND

Celui-ci a rendu obligatoire la tenue dans chaque paroisse de registres des baptêmes et des sépultures tenus par le curé. Les intendants de Louis XV ont organisé la remontée des données paroissiales à Paris dans les années 1770.

La Révolution a institué les registres d’état civil en gardant le même principe d’enregistrement, transféré des paroisses aux mairies. Aujourd’hui, lorsqu’un décès survient, la famille doit le déclarer à la mairie dans les 24 heures. L’officier d’état civil le consigne dans le registre des décès.

Registre des décès de Vitry-sur-Seine de 1910.

Figure 3. Fac-similé de l’avis de décès utilisé en 2020 (source Insee). Une fois rempli par la mairie l’avis de décès est adressé à la délégation régionale de l’Insee.

Il doit aussi remplir un bulletin de décès fournissant différentes informations sur le défunt (sexe, âge, lieu de résidence, etc.), mais sans donnée médicale (figure 3) et le transmettre à l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), chargé d’exploiter ces bulletins.

Le décompte annuel des décès : un chiffrage très précis

L’Insee exploite donc les bulletins de décès et en tire en début d’année un décompte du total des décès de l’année précédente. Le 14 janvier 2020, par exemple, l’institut a annoncé 612 000 décès en France pour 2019. Même si les bulletins du mois de décembre manquent parfois à l’appel, l’estimation est précise à quelques centaines près, l’incertitude étant de l’ordre d’un pour mille. L’Insee publie quelques mois après, à l’automne, la distribution détaillée des décès par sexe, âge, département, etc., informations indispensables pour une étude précise de la mortalité.

En cours d’année, l’Insee publie chaque mois un décompte des décès du mois précédent. Il s’agit d’une extrapolation à partir des décès survenus dans les grandes villes ou les villes moyennes, dont les bulletins ont fait l’objet d’une transmission électronique au siège de l’Insee (88 % en 2019).

Les causes de décès : une statistique plus récente

L’intérêt de mieux connaître les causes de décès et d’établir des statistiques dans ce domaine n’est apparu que tardivement. De telles statistiques nécessitent de déterminer la cause de chaque décès, et de classer ensuite les décès par cause. À des fins de comparaison, il est nécessaire que tous les pays utilisent le même système de classement.

Le statisticien français Jacques Bertillon, photo apparue dans le Los Angeles Times, 1910. Wikimedia

C’est en 1893 qu’un système de classement international des causes de décès voit le jour, à l’initiative du statisticien français Jacques Bertillon (1851-1922).

En France, l’information sur la cause du décès a été introduite dans le bulletin de décès en 1907 (figure 5). Elle était, à l’origine, remplie par l’officier d’état civil, au vu des déclarations du médecin traitant, du médecin d’état civil ou de la famille.

Figure 5. Fac-similé du bulletin de décès utilisé en 1907 (repris de Vallin et Meslé 1988, page 62).

Elle était traitée comme les autres informations du bulletin par la Statistique générale de la France (SGF, créée en 1833, remplacée par l’Insee en 1946). La SGF a ainsi régulièrement publié annuellement la statistique des causes de décès par sexe et âge à partir de 1925.

La cause de décès est traitée à part depuis 1937

Figure 6. Fac-similé du certificat de décès utilisé en 2020. Une fois le certificat rempli par le médecin, le volet réservé à la cause de décès est cacheté, détaché et transmis à l’Agence régionale de santé.

Secret médical oblige, le système a été modifié en 1937. L’information sur la cause du décès est dorénavant notée sur un certificat de décès (figure 6) distinct du bulletin de décès. Ce document confidentiel est rempli par le médecin certifiant le décès ; il est adressé de nos jours à un service qui ne dépend pas de l’Insee mais de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), chargé depuis 1968 d’établir la statistique des causes de décès.

Mais pour savoir finalement qui meurt de quoi (par exemple la répartition des causes par âge), il faut apparier in fine les deux bulletins, au terme d’un circuit complexe (figure 7). De ce fait, la statistique annuelle des causes de décès est publiée avec un certain délai, et les fichiers de données (dûment anonymisés) ne sont disponibles pour les utilisateurs extérieurs que deux à trois ans après.

Figure 7. Cheminement des informations sur les causes de décès en 2020. La cas d’une transmission papier. Cepidc

Dans les deux systèmes, la remontée des informations se fait par étapes. Elle passe d’abord par un service régional (la Direction régionale de l’Insee pour les bulletins, l’Agence régionale de santé pour les certificats), qui doit remonter ensuite les informations au niveau national. Les délais sont allongés d’autant. Si le certificat médical est transmis sous forme papier, la cause du décès n’est disponible pour traitement que trois semaines à quatre mois après le décès (figure 7).

Les systèmes statistiques à l’épreuve de la canicule de 2003

La canicule d’août 2003 a entraîné en dix jours une surmortalité de près de 15 000 décès en France, principalement chez les personnes âgées. Mais le nombre des morts n’a été connu que bien longtemps après. Ce sont les professionnels placés en première ligne qui ont annoncé l’accroissement soudain des décès : les urgentistes, qui étaient débordés, et les Pompes funèbres, en rupture de stock de cercueils. Ce fut une révélation : la statistique publique n’était pas organisée à l’époque pour pouvoir surveiller en temps réel les épidémies ou les catastrophes.

Après la canicule, la statistique publique dut s’adapter pour fournir des chiffres à jour, sans attendre les bilans annuels ou mensuels. On décida de mettre en place ou d’accélérer le remplissage et la transmission des documents par la voie électronique.

Du côté de l’Insee, 88 % des bulletins de décès sont transmis par voie électronique par les mairies en 2019, mais en transitant toujours par la délégation régionale. En accélérant les procédures, comme c’est le cas face à l’épidémie de Covid-19, l’Insee est capable d’estimer le nombre journalier de décès dans chaque département au plus tôt 7 jours après. Du côté de l’Inserm, en revanche, seule une minorité de décès (18 % en 2020) sont certifiés électroniquement par les médecins (figure 8). Ce qui réduit la capacité du système à servir d’outil de surveillance immédiate.

Figure 8. Cheminement des informations sur les causes de décès en 2020. La cas d’une transmission par voie électronique. Cepidc

Une mécanique peu adaptée pour l’information en temps réel

Le système statistique classique est donc bien en peine de fournir en temps réel des informations sur la mortalité, même quand il se mobilise comme pendant l’épidémie de Covid-19. D’où le recours à des sources ou des méthodes alternatives. Le Système d’information pour le suivi des victimes d’attentats et de situations sanitaires exceptionnelles (SI-VIC), mis en place à la suite des attentats de Paris de 2015, est devenu la principale source du décompte journalier des décès par Covid-19, communiqué chaque jour par les autorités de santé. Mais le chiffre est incomplet, puisque seuls les décès survenus à l’hôpital sont décomptés, et non ceux survenus à domicile ou en maison de retraite.

Le dernier bilan en date des lieux de décès, qui porte sur l’ensemble des décès de l’année 2018, indique qu’un peu plus de la moitié des personnes meurent à l’hôpital (53 %), près d’un quart à domicile (24 %), et une sur sept en maison de retraite (Ehpad)(13 %) (le reste mourant dans un lieu public ou un lieu non précisé dans le bulletin de décès).

Les morts par Covid-19 survenus en maison de retraite vont donc s’ajouter à ceux survenus à l’hôpital, mais dans quelle mesure ? D’après le bilan publié le 12 avril, leur nombre correspondrait à plus de la moitié de celui des morts hospitaliers. Mais ce bilan est annoncé comme étant encore partiel, et sur ce point encore, les autorités de santé vont devoir réformer les circuits de diagnostic et de transmission des informations.

Le système statistique se retrouve finalement soumis à deux injonctions contradictoires : informer de façon juste et complète, mais informer en temps réel. L’urgence et la statistique ne font pas bon ménage ! Pour autant, nous ne devons pas renoncer à construire une statistique d’urgence qui soit utile à la décision publique et à l’information des citoyens.

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