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Archives Journalières: 29/05/2020

Données de santé : l’arbre StopCovid qui cache la forêt Health Data Hub

29 vendredi Mai 2020

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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The Conversation

 

  1. Bernard Fallery

    Professeur émérite en systèmes d’information, Université de Montpellier

Université de Montpellier

 

CC BY ND
Un logo indiquant Covid tracker est représenté dans un centre d’appels dédié au traçage des contacts, où des appels téléphoniques sont effectués pour cartographier le nombre de personnes à Bruxelles qui ont contracté le Covid-19, le 8 mai 2020 à Bruxelles. Laurie Dieffembacq/Belga/AFP
 

Le projet de traçage socialement « acceptable » à l’aide des smartphones dit StopCovid, dont le lancement était initialement prévu pour le 2 juin, a focalisé l’intérêt de tous. Apple et Google se réjouissaient déjà de la mise en place d’un protocole API (interface de programmation d’application) qui serait commun pour de nombreux pays et qui confirmerait ainsi leur monopole.

Mais la forte controverse qu’a suscitée le projet en France, cumulée au fait que l’Allemagne s’en est retirée et à l’échec constaté de l’application à Singapour, où seulement 20 % des utilisateurs s’en servent, annoncent l’abandon prochain de StopCovid.

« Ce n’est pas prêt et ce sera sûrement doucement enterré. À la française », estimait un député LREM le 27 avril auprès de l’AFP.

Pendant ce temps-là, un projet bien plus large continue à marche forcée : celui de la plate-forme des données de santé Health Data Hub (HDHub).

Health Data Hub, la forêt qui se cache derrière l’arbre

Dès la remise du rapport Villani sur l’intelligence artificielle (IA) en mars 2018, le président de la République annonce le projet HDHub. En octobre de cette même année, une mission de préfiguration définit les traits d’un système national centralisé regroupant l’ensemble des données de santé publique, un guichet unique à partir duquel l’IA pourrait optimiser des services de reconnaissance artificielle et de prédiction personnalisée.

Mais l’écosystème de l’IA s’apprête aussi à franchir une nouvelle marche en obtenant l’accès à des données massives provenant des hôpitaux, de la recherche, de la médecine de ville, des objets connectés, etc., et à un marché massif de la santé (prestigieux et à valeur potentielle énorme dans la mesure où il pèse plus de 12 % du PIB). La France, avec son assurance maladie, et le Royaume-Uni, avec son National Health Service (NHS), font ici figure de test, puisque des données cohérentes et fiables y sont maintenues depuis des décennies : Amazon a déjà accès à l’API du NHS pour alimenter son assistant vocal, et Microsoft a déjà signé l’hébergement de toutes les données de santé françaises (stockage, gestion des logs et des annuaires, puissance de calcul et conservation des clés de chiffrement).

Author provided

Le projet HDHub mené « au pas de charge »

En novembre 2018, Stéphanie Combes est nommée cheffe de projet. Fin 2018, le choix de Microsoft est déjà acté (en « dispense de marché public »), alors même que la définition des principes de HDHub attendront juillet 2019 (dans la Loi Santé) et que ses missions ne seront définies qu’en avril 2020, par arrêté ministériel. La CNIL, malgré ses échanges avec Stéphanie Combes, continue à se poser de nombreuses questions.

D’autres voix se sont inquiétées de la gestion si hâtive du projet (comme le Conseil national des barreaux, l’Ordre national des médecins ou encore un député LREM) ; des collectifs ont lancé des alertes argumentées, comme les professionnels de InterHop ou les entreprises du logiciel libre ; et certains médecins ont mis en ligne des vidéos exprimant leur révolte.

Health Data Hub, un cas d’école sur toutes les problématiques du numérique

Contourner l’arbre qui cache la forêt, c’est découvrir toute l’étendue des questions posées par la « transformation numérique » dans la société, et ici dans la santé.

Les questions politiques se cristallisent ici autour du choix de Microsoft, que Stéphanie Combes justifie très classiquement par l’urgence, sans publication des délibérations : « Microsoft était le seul capable de répondre à nos demandes. On a préféré aller vite, pour ne pas prendre de retard et pénaliser la France. »

C’est une question de politique nationale, déjà soulevée dans The Conversation France, puisqu’il s’agit de faire gérer un bien public par un acteur privé, et sans espoir de réversibilité. Mais aussi une question politique de souveraineté numérique européenne puisque cet acteur étasunien se trouve soumis au Cloud Act, loi de 2018 qui permet aux juges américains de demander l’accès aux données sur des serveurs situés en dehors des États-Unis.

Health data Hub, plate-forme de la discorde ou de la concorde ? Extrait du débat « Les Contrepoints de la santé » du 18 décembre 2019 sur le thème des données de santé : « Volontarisme ou vigilance » avec Stéphanie Combes, Directrice du Health Data Hub, Pr Laure Fournier, Service de Radiologie, Hôpital Européen Georges Pompidou, Pierre-Alain Raphan, député de l’Essonne, David Gruson, comité pilote d’éthique du numérique, fondateur du think tank Éthik-IA.

Les questions techniques se révèlent ici dans un vif débat entre centralisation ou interopérabilité des bases de données. La centralisation définit des architectures de « défense en profondeur » avec des barrières successives par exemple dans le nucléaire ; dans le projet HDHub, cette défense est sous-traitée chez Microsoft.

Stéphanie Combes observe que « si l’on veut faire du traitement de données à cette échelle, on doit centraliser, c’est la seule solution ». À l’opposé, la vision technique des architectures de l’interopérabilité vise à « ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier » : d’une part, la majorité des attaques ne viennent pas de l’extérieur mais de l’intérieur, avec un risque plus élevé en cas de centralisation, et d’autre part l’anonymat ne résiste pas à la ré-identification d’une personne par croisement de données.

Cette architecture décentralisée consiste alors à gérer les échanges en réseau entre des bases de données qui restent hétérogènes et entre des traitements distribués sur plusieurs serveurs, mais en intégrant ces échanges par des couches d’interfaces qui sont aujourd’hui standardisées et en Open source. À titre d’exemple, c’est une option qui a été choisie dans le projet eHop pour un groupe d’hôpitaux. Elle présente l’avantage de maintenir localement les compétences des ingénieurs et des soignants, nécessaires à la qualification des données de santé.

Les questions juridiques concernent ici le consentement et le secret médical. Les principes européens du RGPD organisent le consentement dès la conception des systèmes d’information (privacy by design) et par une culture de transparence interne dans les organisations (via le délégué à la protection des données). Les données des patients touchent bien sûr à leur intimité, mais la durée, le droit de retrait et surtout la finalité claire d’une utilisation de ces données, sont des principes intangibles fixés par la CNIL.

CNIL

✔@CNIL

#Deconfinement La CNIL publie son avis sur le projet de décret encadrant les systèmes d’information SI-DEP et Contact Covid #COVIDー19 👉 https://www.cnil.fr/fr/deconfinement-lavis-de-la-cnil-sur-le-projet-de-decret-encadrant-les-systemes-dinformation-mis-en …

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11:00 AM – May 13, 2020
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Stéphanie Combes a donné des perspectives sur ce point :

« Les données ne sont censées être stockées que durant la période de l’état d’urgence sanitaire. À sa fin, elles devront être détruites, SAUF SI un autre texte prévoit cette conservation lors de la mise en place finale du Health Data Hub. »

Dans la pratique, et sans compter les problèmes futurs de responsabilité individuelle du médecin, les patients pourraient être soumis à une rupture du secret médical, un principe juridique mais aussi une règle éthique qui fonde la confiance basée sur le serment d’Hippocrate. Une rupture de cette confiance présenterait bien sûr des risques en termes de santé publique.

Les questions économiques se cristallisent autour des enjeux de la transformation numérique. Les tenants du néo-libéralisme voient surtout dans le numérique une force de destruction créatrice : la dérégulation et le désengagement des États favorisent l’innovation disruptive et la croissance par des start-up. Au-delà du seul intérêt scientifique, un développement rapide de l’IA grâce aux GAFAMI, les six géants américains qui dominent le marché du numérique, peut donc être considéré comme relevant de « l’intérêt général », une finalité introduite en 2019 dans la Loi santé.

À l’opposé, les tenants d’une politique économique alternative voient surtout dans le numérique une possibilité de gestion des communs numériques, en suivant les analyses de Elinor Ostrom : des ressources immatérielles non rivales, dont les règles d’accès et d’usage sont gérées par des communautés auto-organisées très diverses (par exemple, depuis Internet, en passant par Wikipedia et jusqu’à l’Open data, le logiciel libre ou les énormes bases scientifiques de type Protein Data Bank). Ceux qui partagent cette vision dénoncent l’idée de la séparation entre d’une part la qualification des données médicales, qui se fait grâce à un long travail de collecte et de tri financé par le secteur public et soumis aux traités de libre circulation des données, et d’autre part la valorisation de ces données, avec une marchandisation de la santé par le secteur privé que protègent les traités sur les brevets.

Le contrôle des « data santé » vu par les penseurs d’hier et d’aujourd’hui

La question sociale du contrôle sanitaire de nos comportements ne peut pas être analysée sans les concepts forgés par les sociologues. Michel Foucault a décrit le passage progressif à la société disciplinaire en utilisant les concepts de « biopolitique » (qui porte sur les formes d’exercice du pouvoir sur les corps) et de « gouvernementalité » (qui associe gouvernement et rationalité, dans des technologies du gouvernement des individus et de soi, pour assurer l’autodiscipline : hier déjà, le confinement, l’école, l’hôpital, les statistiques et maintenant les panoptiques du drone et du bracelet).

Gilles Deleuze a décrit un nouveau passage vers la société de contrôle par le collier électronique, avec les concepts de « langage numérique » d’accès à la réalité. Alors que Kafka a forgé la notion d’« atermoiement illimité » : il ne s’agit plus de discipliner et d’ordonner, mais de contrôler en gérant tout désordre.

Antoinette Rouvroy, docteure en sciences juridiques et chercheuse qualifiée du FNRS, s’exprime sur le sujet de la gouvernementalité algorithmique et l’idéologie des big data, le 6 mars 2018. À la minute 10, elle s’exprime notamment sur les données médicales.

Aujourd’hui, des sociologues comme A. Rouvroy ou D. Quessada montrent un prochain passage à la société des traces avec les concepts de gouvernementalité algorithmique (qui va au-delà d’une maîtrise du probable ; il s’agit d’une maîtrise du potentiel lui-même, pour « ajuster » nos comportements) et de sousveillance, qui n’est plus une sur-veillance, mais une sous-veillance par un quadrillage discret, immatériel et omniprésent de tous les types de traces que nous laissons, comme nos signaux, nos productions, nos empreintes, nos passages et nos liens…

Quand Merkel et Macron endossent la tunique mythique du couple franco-allemand

29 vendredi Mai 2020

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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The Conversation

 

  1. Sylvain Kahn

    Professeur agrégé, Sciences Po – USPC

Université Sorbonne Paris Cité

Sciences Po

 

CC BY ND
Conférence de presse commune d’Angela Merkel et Emmanuel Macron, le 18 mai 2020, Berlin / Paris. Kay Nietfeld/Pool/AFP
 

Depuis la spectaculaire annonce franco-allemande d’un plan pour une relance européenne, les commentaires entonnent le refrain de la « renaissance du couple franco-allemand ». Ces commentaires sont d’un classicisme prononcé… depuis 40 années.

Faire ce constat n’a pas pour but de disqualifier de tels commentaires. Il s’agit au contraire d’en prendre la mesure. Par leur permanence, ils constituent un fait en soi dont l’analyse permet de comprendre une dimension centrale de l’Union européenne : le couple franco-allemand est le mythe opératoire de l’Europe.

Une annonce historique

L’annonce d’une dette européenne par Angela Merkel et Emmanuel Macron est, au sens propre, historique. Elle constitue, en effet, un tournant dans l’histoire de l’UE.

Pourtant, la plupart des commentaires portent surtout sur les dirigeants nationaux et les pays : Macron a-t-il gagné ? Le premier ministre néerlandais, Mark Rutte, très attaché à la discipline budgétaire, a-t-il perdu ? Merkel va-t-elle rentrer dans l’histoire et se représenter aux élections ? Qui a mangé son chapeau ? Étrangement, ce type de commentaires porte la marque de ce que l’UE n’est pas et n’a jamais été : un concert des nations. C’est-à-dire un système de relations internationales mû par des rapports de forces – les forces en question étant pour l’essentiel les États. Georges-Henri Soutou a pourtant montré depuis trente ans déjà que la construction européenne choisie depuis 1950 tourne le dos au concert européen des nations (dont on peut faire remonter les débuts aux traités de Westphalie de 1648 ou au Congrès de Vienne de 1815).

Jean Monnet (au centre à gauche), chef de la délégation française, signe les documents, le 19 mars 1951 au ministère français des Affaires étrangères à Paris, du Plan Schuman de mise en commun des ressources minières et sidérurgiques de la France, de l’Allemagne, de l’Italie et des trois pays du Benelux, créant la Communauté européenne du charbon et de l’acier, sous la présidence de Robert Schuman (à droite, avec des lunettes), ministre français des Affaires étrangères, auteur du plan. AFP

Ce choix est celui de l’interdépendance et de la conviction qu’il existe un intérêt général européen qui subsume les intérêts particuliers que sont les intérêts nationaux. C’est pourquoi la construction européenne n’est pas soluble dans le champ des relations internationales : avant d’être un objet diplomatique et étatique, elle un objet social et politique.

L’Union européenne est autant un système politique qu’une société ; elle est autant un ensemble d’institutions – en l’espèce multiscalaire – qu’une communauté de citoyens. En fait, donc… l’UE est un pays. Mais, chut ! Il ne faut pas le dire. Dans les récits des Européens sur eux-mêmes, il ne saurait y avoir de pays que d’États-nations. Que les Bavarois, les Écossais et les Catalans puissent appartenir à deux pays, celui de leur État local et celui de leur État fédéral (Allemagne, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande, Royaume d’Espagne) est pourtant un énoncé couramment admis. En l’occurrence, l’Allemagne, l’Espagne, la France, la Lettonie, la Slovaquie, le Luxembourg, le Danemark… sont au sein de cet État fédéral qu’est l’UE des États locaux disposant de tous les attributs de la souveraineté.

L’Europe est un pays

Oui, l’UE est un pays fédéral baroque et complètement atypique. Le poids des héritages étatiques et le narcissisme des classes politiques sont tels, l’habitude d’encastrer la démocratie dans la seule nation, l’habitude d’utiliser la scène nationale comme principal théâtre de la distribution de l’accès au pouvoir dans le cadre de la compétition démocratique sont telles, qu’il n’est toujours pas possible de reconnaître que l’Europe est, elle aussi, un pays.

Même l’apparition d’une monnaie européenne n’a pas entamé la résistance à cette réalité. Au contraire ! Elle en a redoublé les ardeurs. Et voici maintenant les Européens sur le point d’émettre une dette publique européenne. Ne pas qualifier l’Europe de pays ou d’État fédéral va encore plus s’apparenter à un déni de réalité. Pourtant, il n’y a pas de raison que cela s’arrête, tant ce déni finit par être consubstantiel à la construction européenne elle-même.

Et peu importe qu’une majorité toujours plus grande d’habitants de l’Europe considère l’existence de l’UE comme une bonne chose et l’UE comme un appareil d’État et un système de gouvernement qui est à l’échelle des menaces qui pèsent sur eux et des besoins qu’ils ressentent (comme le montrent, notamment, les enquêtes Eurobaromètre et la toute récente enquête Kantar sur le rapport des Français à l’Europe). Peu importe, puisque les classes politiques restent nationales, de même que les organes de presse, puisque la socialisation par l’école place la construction de l’État-nation au centre du village des connaissances, et puisqu’une minorité tout à fait respectable d’Européens se défient de la supranationalité.

C’est là qu’intervient le mythe du couple franco-allemand. D’ici peu, quand l’Europe émettra concrètement de la dette publique sur les marchés, le mythe de la relance franco-allemande servira à recouvrir plusieurs faits.

Le couple franco-allemand : mythe opératoire de l’Union européenne

Il recouvrira tout d’abord le fait que tant de commentaires aient expliqué tout au long de la crise sanitaire que l’Allemagne ne pouvait que bloquer une telle évolution puisqu’elle n’y avait pas intérêt, voire parce qu’elle est égoïste ; il recouvrira donc le fait que tous ces commentaires se sont « trompés ». Il recouvrira aussi le fait qu’il s’agit d’un processus historique, social, bien plus que l’évolution d’un rapport de forces dont on nous rebat les oreilles depuis près de dix ans non sans flirter parfois avec une germanophobie qu’on imaginait enterrée. Et voilà : le couple franco-allemand est un deus ex machina, une sorte de dieu de l’Olympe. De temps en temps, il renaît, il se réveille d’une longue sieste, il surgit : ça ne s’explique pas ; ça se constate.

Olivier Pingal@pingal_HG

[Histoire] Les couples franco-allemands : ciment de la construction européenne
via @touteleurope Journée 🇫🇷 🇩🇪 franco-allemandehttps://www.touteleurope.eu/actualite/histoire-les-couples-franco-allemands-ciment-de-la-construction-europeenne.html …

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Prenons parmi les quelques précédents un exemple archétypal resté fameux dans l’histoire : le couple Helmut Schmidt–Valéry Giscard d’Estaing. Ce duo est considéré comme un couple franco-allemand européen indiscutable, essentiel, voire idéal (comme on le dit d’un gendre). Il est passé à la postérité pour avoir impulsé le système monétaire européen (SME), le Conseil européen et l’élection du Parlement européen au suffrage universel. Toutes choses rigoureusement exactes. Mais le mythe recouvre les sept années de divergences et de débats féroces sur la politique économique et monétaire entre l’Allemagne de l’Ouest et la France ayant précédé le lancement du SME. Sept années durant lesquelles les deux hommes eurent des responsabilités concordantes selon un calendrier concordant : ministres des Finances puis chefs de l’exécutif.

Le mythe du couple franco-allemand a aussi pour fonction de recouvrir un autre fait : l’Europe est un régime politique. Et c’est un régime délibératif et pluraliste. Il ne suffit évidemment pas que les deux pays les plus peuplés de l’UE se mettent d’accord pour faire voter une loi européenne ni pour qu’une nouvelle politique publique européenne soit mise en œuvre. L’UE est le contraire d’un concert des nations. Le droit du plus fort, c’est terminé. Il faut convaincre, négocier, réunir des coalitions, emporter la conviction, dans un mélange subtil d’idéalisme et de marchandage.

Le droit du plus fort, c’est terminé

L’Europe est une société pluraliste. Elle est tissée par des débats et des oppositions sur les préférences collectives, entre représentations, groupes et intérêts variés qui s’affrontent ou se confrontent sur la vision de l’intérêt général et des politiques publiques. Sur le plan franco-allemand d’une dette européenne, les différentes familles politiques confronteront des visions différentes de la mise en place de cette endettement mutualisé ; certaines commenceront par le refuser, et seront probablement minoritaires au sein du Parlement européen. Mais toutes pèseront sur le compromis final.

Le processus sera du même ordre au sein de la communauté des États. Déjà les États dits « radins » ou « frugaux » (Danemark, Pays-Bas, Autriche, Finlande, Suède) ont déclaré leur opposition au plan franco-allemand. Mais, comme on le voit à chaque avancée depuis deux mois, leur position va s’assouplir, et se mettre en phase avec leurs opinions publiques. La société civile européenne, dans toutes ses composantes diverses, convergentes et antagonistes, pèsera sur la forme finale et opérationnelle du plan.

Au final, pour certains, les effets de ce nouveau mécanisme d’endettement européen seront trop modestes et pour d’autres trop importants. Le plus important est que ce nouveau mécanisme aura été adopté par un processus délibératif avec ses promoteurs, ses opposants, ses compromis, ses heureux et ses furieux – comme n’importe quelle réforme dans n’importe quel pays démocratique. Cachez ce sein que je ne saurais voir… : recouvrez-le par le couple franco-allemand.

Le mythe raconte l’histoire interdite de la mutualisation de souveraineté

Enfin, la construction du mythe du couple franco-allemand, moteur de l’Europe, a pour fonction d’habiller et d’apprêter le changement de paradigme de la souveraineté opéré dans la construction européenne. Changement de paradigme, en effet : la mutualisation de la souveraineté n’est pas la mise sous tutelle ou la perte de l’indépendance. Elle correspond à une rupture non seulement avec le concert des nations mais aussi avec le nationalisme. Le discrédit profond et durable du nationalisme fut, et demeure, la condition nécessaire à l’intégration européenne. Celle-ci met chacun des pays qui y adhèrent sur un pied d’égalité, tout du moins d’égale dignité. Ce faisant, cette démarche repose sur l’accord librement consenti et négocié à des mutualisations de souveraineté nationale.

L’invention du couple franco-allemand est l’histoire avec laquelle la France, ses manuels scolaires et ses médias tout particulièrement, se raconte ce choix. Le mythe du couple a en effet pour fonction d’habiller la mutualisation des souverainetés nationales dans l’Europe, et donc l’abandon par la France de sa centralité dans l’histoire et dans l’espace mondial. De la déclaration Schuman à sa bénédiction donnée par Mitterrand à une réunification allemande enchâssée dans l’Union européenne, la France ne témoigne-t-elle pas de magnanimité et de générosité avec l’envahisseur d’hier ? N’est-ce pas l’apanage d’un pays sûr de sa force et de son aura, d’un pays souverain ? Emmanuel Macron a lui aussi sacrifié au mythique rituel en proposant il y a peu d’étendre à la protection du territoire allemand la dissuasion nucléaire française.

Il y a donc de nombreuses raisons au rituel régulièrement rejoué du couple franco-allemand. À la façon des deux corps du roi que raconte Kantorowicz, le couple franco-allemand survit toujours à la mort politique ou physique des dirigeants qui l’incarnent à un moment donné : de Gaulle-Adenauer ; Giscard-Schmidt ; Mitterrand-Kohl. Il est exigé des dirigeants qu’ils l’incarnent, quand bien même, tels Chirac-Schröder, Sarkozy-Merkel ou Merkel-Hollande, ils n’y inclinent pas. Avec leur plan de relance par une dette publique européenne, Angela Merkel et Emmanuel Macron, tandem jusque-là poussif, viennent d’endosser la tunique immortelle du couple franco-allemand avec laquelle les Français se racontent chaque renforcement de leur nouveau pays qu’est l’Europe.

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