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Archives Mensuelles: avril 2021

Pourquoi la dette publique effraie-t-elle autant ?

30 vendredi Avr 2021

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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  1. Baptiste MassenotProfesseur Associé en Economie et Finance, TBS Business School
Toulouse Business School
CC BY NDNous croyons à la libre circulation de l’information
En France, le niveau de la dette publique approche les 120 % du PIB. Shutterstock

Un ménage surendetté prend le risque de se retrouver en défaut de paiement et de subir la saisie de ses biens par un huissier. Par analogie, un gouvernement surendetté serait également fragilisé. L’envol de la dette publique actuelle, qui approche les 120 % du PIB, alors que les critères de Maastricht recommandent de ne pas dépasser les 60 %, a ravivé certaines inquiétudes quant à la pérennité des dépenses publiques.

Ces inquiétudes peuvent concerner la soutenabilité de la dette, un enrayement de la compétitivité et donc de la croissance, le retour d’une inflation incontrôlée, ou encore la charge qui pèsera sur les futures générations. Pourtant, sur ces différents points, les craintes peuvent être exagérées dans les prises de parole dans le débat public.

Une dette soutenable ?

Le 21 avril, dans une interview accordée à Sud Radio, le ministre délégué chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt, a prévenu qu’« il faudra mettre fin au quoiqu’il en coûte, progressivement » pour « revenir à un niveau soutenable de dépense publique ».

Pourtant, si un ménage qui s’endette plus se met potentiellement dans une situation précaire, ce n’est pas forcément le cas pour un État… En France, la dette publique a augmenté de 33 points de PIB depuis 2007 alors que les charges d’intérêts ont baissé dans le même temps de 17 milliards d’euros. De même, le Japon continue d’emprunter à des taux d’intérêt négatifs, en dépit d’un taux d’endettement record de plus de 200 % du PIB.

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En outre, la dette peut renforcer une économie. Les dépenses financées vont en effet permettre de stimuler la consommation en se transformant en revenus pour ses citoyens, qui pourront ensuite plus facilement supporter une augmentation d’impôt.

Certes, il y a évidemment une limite à ne pas dépasser. Avec un endettement élevé, la part des finances publiques dédiée au remboursement de la dette augmente, ravivant les craintes d’un défaut de paiement et faisant fuir les investisseurs. Un endettement surélevé peut par exemple provoquer l’exclusion des marchés financiers ou pousser les investisseurs à demander des taux d’intérêt exorbitants, comme la Grèce en a fait l’expérience en 2012. Une perspective qui apparaît toutefois assez éloignée aujourd’hui si l’on regarde l’évolution des taux d’intérêt malgré l’envol de l’endettement.

Un frein à la croissance ?

Les inquiétudes peuvent également concerner le poids que la dette publique fait porter sur la croissance d’un État. En 2010, deux économistes américains, Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff, avaient notamment montré que, lorsque le ratio dette publique/PIB d’un pays dépasse 90 %, le taux de croissance du pays en question s’en retrouve négativement affecté, notamment à long terme.

Graphiques : PIB, dette et déficit public. Insee

Les économistes, inspirateurs des politiques d’austérité mises en place en Europe à la suite de la crise de la dette, ont d’ailleurs depuis corrigé leurs erreurs de calcul.

En outre, le niveau de dette ne semble pas avoir pesé sur l’attractivité de la France auprès des investisseurs étrangers qui pourraient redouter des hausses d’impôt. En 2019, les investissements internationaux ont ainsi atteint un niveau record, faisant de la France le pays d’Europe le plus attractif pour les investisseurs étrangers.

Une charge pour les générations futures ?

Les craintes concernent aussi le fardeau laissé aux générations futures qui devront rembourser la dette actuellement levée. Par exemple, Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, s’était inquiété fin 2020 « pour les générations futures […] qui auront à payer pour l’éternité une dette écrasante ».

Mais le surendettement de l’État se fait-il vraiment aux dépens de nos enfants ? En effet, ils bénéficieront également des revenus supplémentaires engendrés par les dépenses publiques plus importantes.

Comme le soulignait récemment l’économiste Patrick Artus :

« Si la dette publique finance un supplément d’investissements efficaces (infrastructures, éducation, formation, recherche, soutien aux entreprises innovantes), elle génère un supplément de revenu dans le futur, et elle n’est donc pas une charge pour les générations futures ».

Le surendettement de l’État ne va-t-il pas accélérer l’inflation ? Lorsque les dépenses publiques augmentent, cela stimule la demande et exerce une pression à la hausse sur les prix. Si l’État dépense de manière irresponsable, l’inflation pourrait même devenir incontrôlée. D’un autre côté, un pays qui traverse une période économique difficile fera face à une tendance à la baisse des prix, de telle sorte qu’un plan de relance financé par la dette publique pourrait avoir l’effet bénéfique d’éviter la déflation.

La question du retour de l’inflation fait d’ailleurs actuellement débat chez les économistes dans un contexte où les prévisions à ce sujet deviennent plus difficiles que jamais. Si les prix peuvent monter en raison de la hausse des prix actuelle sur les matières premières, elle a en effet également perdu son moteur que constitue la dynamique salariale à l’heure où le pouvoir de négociations des syndicats s’amenuise.

Une chose est sûre : la corrélation traditionnelle entre hausse des prix et augmentation de la masse monétaire en circulation dans un pays ne fonctionne plus, car le déversement de liquidités des politiques monétaires des banques centrales n’ont pas relancé l’inflation.https://platform.twitter.com/embed/Tweet.html?dnt=false&embedId=twitter-widget-0&features=eyJ0ZndfZXhwZXJpbWVudHNfY29va2llX2V4cGlyYXRpb24iOnsiYnVja2V0IjoxMjA5NjAwLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfSwidGZ3X2hvcml6b25fdHdlZXRfZW1iZWRfOTU1NSI6eyJidWNrZXQiOiJodGUiLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfX0%3D&frame=false&hideCard=false&hideThread=false&id=1384578114001506304&lang=en&origin=https%3A%2F%2Ftheconversation.com%2Fpourquoi-la-dette-publique-effraie-t-elle-autant-159458&sessionId=f7cb7b646a0e466f83e69cd97641d6d0ddf83e8a&siteScreenName=FR_Conversation&theme=light&widgetsVersion=ff2e7cf%3A1618526400629&width=550px

Un avenir incertain pour nos enfants, l’incapacité des États à financer leurs dépenses, ou une inflation hors de contrôle, voilà qui a de quoi effrayer. Mais peut-on accuser un niveau trop élevé de la dette publique de provoquer ces scénarios catastrophiques ? La dette publique peut en effet parfois s’avérer indispensable, pour sortir d’une crise économique ou financer des projets d’avenir. Une dette publique surélevée peut par ailleurs parfois être un symptôme de maux plus profonds, tels que l’irresponsabilité de certains gouvernements…

Certes, déterminer si un niveau plus élevé de dette publique est néfaste ou bénéfique n’est pas chose facile. Mais tirer des conclusions en se basant uniquement sur son niveau, sans tenir compte du contexte unique que nous vivons, apparaît aujourd’hui comme trop facile.

Trente-cinq ans après Tchernobyl, la Russie joue crânement la carte nucléaire

29 jeudi Avr 2021

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  1. Anastasiya ShapochkinaMaître de conférences en géopolitique, Sciences Po
Sciences Po
CC BY NDNous croyons à la libre circulation de l’information
Une centrale nucléaire près de Saint-Pétersbourg.
Une centrale nucléaire près de Saint-Pétersbourg. Eric Feferberg/AFP

Catastrophe humanitaire, sociale et environnementale, Tchernobyl a eu un impact majeur sur l’industrie nucléaire mondiale, entraînant la sortie du nucléaire de l’Italie, l’élan du mouvement anti-nucléaire en Allemagne, l’arrêt de la construction de nouvelles centrales pour un tiers de siècle aux États-Unis et une perte importante du savoir-faire au Royaume-Uni, un pays à l’origine du développement de l’industrie. Et, bien entendu, Tchernobyl a aussi détruit la réputation de la filière nucléaire soviétique. Pourtant, la Fédération de Russie, surgie des décombres de l’URSS en 1991, accorde une place de plus en plus importante à cette énergie.

35 ans après la tragédie, 20 % de la production électrique russe proviennent en effet du nucléaire, dont la part dans le mix énergétique n’a cessé de croître tout au long des années 2000. La Russie est le quatrième producteur d’énergie nucléaire dans le monde, après les États-Unis, la France et la Chine. Elle est également le septième producteur d’uranium, et fabrique 17 % du combustible nucléaire.

Outre son rôle clé dans la Stratégie énergétique russe, l’énergie nucléaire est un véritable levier de l’influence géoéconomique de la Russie dans le monde. Cette filière, qui est l’un des rares secteurs russes hautement technologiques à l’export (aux côtés des secteurs de l’espace et de la défense), bénéficie du soutien financier et politique de l’État, qui voit là un moyen efficace d’étendre l’influence de Moscou en Europe et ailleurs, de renforcer l’intégration de l’économie russe dans l’économie mondiale et d’améliorer l’image du pays, nettement dégradée par les multiples aventures géopolitiques du Kremlin et par son bilan domestique en matière de libertés politiques et de droits humains.

Le rôle central de Rosatom

Le moteur de cette croissance industrielle est l’entreprise publique Rosatom (« Corporation nationale pour l’énergie atomique » de son nom complet), chargée de représenter les intérêts du gouvernement russe à l’étranger dans les secteurs nucléaires civil et militaire. Héritière du ministère soviétique de l’Énergie nucléaire, Rosatom a été créée en 2007 et dirigée jusqu’en 2016 par l’ancien premier ministre (aujourd’hui chef adjoint de l’administration présidentielle) Sergueï Kirienko. Ce dernier a réussi à consolider l’industrie nucléaire russe, dispersée au cours des années 1990 dans des centaines d’entreprises, sous un seul nom, qui est devenu l’une des rares « marques » russes reconnues à l’étranger.

Sergueï Kirienko, alors directeur général de Rosatom, prononce un discours lors de la session d’ouverture de la 58ᵉ conférence générale de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), le 22 septembre 2014 à Vienne. Dieter Nagl/AFP

Aujourd’hui, Rosatom contrôle plus de 400 entreprises et emploie plus de 275 000 personnes. En plus d’être un employeur recherché (et dans certains endroits du pays, unique), Rosatom est un contribuable important, ayant versé l’équivalent d’environ 3 milliards d’euros au budget en 2019. Dans le même temps, le groupe est l’un des plus grands bénéficiaires du soutien financier de l’État pour la construction de nouvelles centrales nucléaires, en Russie comme à l’étranger. C’est aussi un bras armé de l’État russe, intégré verticalement tout au long de la chaîne de valeur : de l’extraction d’uranium, la production du combustible, la construction de centrales nucléaires et la fabrication d’équipements, l’exploitation et la maintenance, au démantèlement et à la gestion des déchets nucléaires.

Rosatom exploite à la fois la technologie nucléaire civile et militaire, contrôle le « bouton nucléaire » du Kremlin et tient la plume en matière de réglementation sectorielle. Le groupe supervise l’exploitation de la flotte russe de brise-glaces nucléaires et gère le développement de la Route maritime du Nord, qui comprend des infrastructures émergentes dans l’Arctique. Rosatom est également en charge de la coopération nucléaire à l’étranger, représentant la Russie à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Ses représentants sont détachés auprès des ambassades russes à travers le monde, où ils développent des relations bilatérales avec les États fondées sur la coopération scientifique et technologique.https://platform.twitter.com/embed/Tweet.html?dnt=false&embedId=twitter-widget-0&features=eyJ0ZndfZXhwZXJpbWVudHNfY29va2llX2V4cGlyYXRpb24iOnsiYnVja2V0IjoxMjA5NjAwLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfSwidGZ3X2hvcml6b25fdHdlZXRfZW1iZWRfOTU1NSI6eyJidWNrZXQiOiJodGUiLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfX0%3D&frame=false&hideCard=false&hideThread=false&id=897677766388314113&lang=en&origin=https%3A%2F%2Ftheconversation.com%2Ftrente-cinq-ans-apres-tchernobyl-la-russie-joue-cranement-la-carte-nucleaire-159574&sessionId=3df58e01fd4132bb14d25a643d794a48947beb57&siteScreenName=FR_Conversation&theme=light&widgetsVersion=ff2e7cf%3A1618526400629&width=550px

Même si la Russie ne peut pas rivaliser avec la Chine en termes de vitesse de construction de nouvelles centrales, son rythme constant d’un nouveau réacteur nucléaire tous les deux à trois ans est inatteignable pour l’industrie nucléaire européenne ou américaine. Cette croissance du secteur nucléaire russe a été rendue possible grâce à une politique étatique pro-nucléaire assumée. Alors que pays après pays se retirait du nucléaire suite à l’accident de Fukushima en 2011, le Kremlin n’a jamais cessé de soutenir l’industrie nucléaire nationale. Notamment pour des raisons géopolitiques : des pays récipiendaires de centrales nucléaires russes, et dépendant donc de Moscou dans ce secteur, peuvent se montrer moins enclins à critiquer le Kremlin pour son attitude internationale comme intérieure.

Début 2021, Rosatom construit 2 réacteurs nucléaires en Russie (dans le cadre du renouvellement du parc de 38 réacteurs opérationnels à ce jour) et 10 à l’étranger : 4 en Turquie (projet Akkuyu, 4800 MW), 2 en cours de la mise en service en Biélorussie (projet Astravets, 2400 MW), 2 en Hongrie (Paks-2, 2400 MW) et 2 au Bangladesh (Rooppur 1 & 2, 2400 MW).

Manifestation à Budapest contre l'extension de la centrale hongroise Paks-2.
La Russie vend, développe et entretient de nombreuses centrales nucléaires à l’étranger, ce qui ne va pas sans susciter la contestation, comme ici à Budapest le 2 février 2014, durant une manifestation contre l’extension de la centrale hongroise Paks-2. Sur la pancarte : « Camarades, bonjour. » Attila Kisbenedek/AFP

En outre, 5 sont au stade de la pré-construction : 1 en Finlande (Hanhikivi, 1 200 MW) et 4 en Égypte (El-Dabaa, 4 800 MW). Rosatom affiche également 35 nouveaux projets de centrales nucléaires au total, qui se trouvent à différents stades de développement, notamment en Chine, en Inde, en Iran et en Arabie saoudite.https://platform.twitter.com/embed/Tweet.html?dnt=false&embedId=twitter-widget-1&features=eyJ0ZndfZXhwZXJpbWVudHNfY29va2llX2V4cGlyYXRpb24iOnsiYnVja2V0IjoxMjA5NjAwLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfSwidGZ3X2hvcml6b25fdHdlZXRfZW1iZWRfOTU1NSI6eyJidWNrZXQiOiJodGUiLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfX0%3D&frame=false&hideCard=false&hideThread=false&id=909175890596302850&lang=en&origin=https%3A%2F%2Ftheconversation.com%2Ftrente-cinq-ans-apres-tchernobyl-la-russie-joue-cranement-la-carte-nucleaire-159574&sessionId=3df58e01fd4132bb14d25a643d794a48947beb57&siteScreenName=FR_Conversation&theme=light&widgetsVersion=ff2e7cf%3A1618526400629&width=550px

Le rôle de l’industrie nucléaire russe dans l’image du pays à l’étranger

La contribution du nucléaire à l’image russe à l’étranger comporte trois éléments essentiels.

Tout d’abord, les prêts et les garanties financières que l’État russe fournit pour la construction de centrales nucléaires par Rosatom, ce qui confère au groupe un avantage concurrentiel déterminant, même en Europe. Citons, à titre d’exemples, le prêt gouvernemental de 10 milliards d’euros octroyé à la Hongrie pour la construction de Paks-2, ou l’achat de 34 % du projet de construction du réacteur nucléaire de Hanhikivi en Finlande. Quant aux pays pauvres primo-accédants au nucléaire, le financement par Moscou des projets de construction ou de recherche qui y sont menés permet au Kremlin d’étendre sa portée géopolitique au-delà de ses sphères d’influence traditionnelles (notamment en Afrique, en Amérique latine, ou encore en Asie du Sud-Est).https://platform.twitter.com/embed/Tweet.html?dnt=false&embedId=twitter-widget-2&features=eyJ0ZndfZXhwZXJpbWVudHNfY29va2llX2V4cGlyYXRpb24iOnsiYnVja2V0IjoxMjA5NjAwLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfSwidGZ3X2hvcml6b25fdHdlZXRfZW1iZWRfOTU1NSI6eyJidWNrZXQiOiJodGUiLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfX0%3D&frame=false&hideCard=false&hideThread=false&id=796025065607491584&lang=en&origin=https%3A%2F%2Ftheconversation.com%2Ftrente-cinq-ans-apres-tchernobyl-la-russie-joue-cranement-la-carte-nucleaire-159574&sessionId=3df58e01fd4132bb14d25a643d794a48947beb57&siteScreenName=FR_Conversation&theme=light&widgetsVersion=ff2e7cf%3A1618526400629&width=550px

Le deuxième élément tient à la capacité de Rosatom à proposer une gamme complète de services d’énergie nucléaire – conception et ingénierie des réacteurs, construction, exploitation, maintenance, approvisionnement en combustible nucléaire, récupération d’uranium usé, formation des experts locaux… Ce dernier aspect est indispensable pour les pays primo-accédants comme la Turquie, l’Égypte ou le Bangladesh, qui ambitionnent de pouvoir, à terme, exploiter par eux-mêmes leurs centrales nucléaires. En outre, en tant que propriétaire de la technologie, Rosatom est un consultant clé de ses pays clients sur le cadre réglementaire de l’industrie en création chez eux.

Le troisième élément est la domination historique de la technologie nucléaire russe sur certains marchés. C’est particulièrement vrai en Europe, où les technologies des réacteurs soviétiques VVER et RBMK ont été imposées aux États satellites d’Europe centrale et orientale, ainsi qu’aux républiques baltes, pendant la guerre froide. C’est cette présence historique, en plus du financement étatique, qui a facilité l’obtention par Rosatom d’un contrat de construction en Hongrie (même si la conjoncture politique a empêché Rosatom de répliquer ce modèle en Pologne ou en République tchèque).

En plus d’accroître l’influence politique de la Russie au sein de l’UE, la construction de nouvelles centrales nucléaires renforce les liens économiques entre le fournisseur russe et les pays clients européens pour les décennies à venir, avec un effet comparable à celui d’un gazoduc. Les étapes consécutives à la construction (fourniture du combustible nucléaire et d’équipements, ainsi que les contrats de maintenance) sont la véritable source de revenus (et d’emplois) pour la Russie pour les années à venir. En outre, le nucléaire permet à Moscou de co-définir le mix énergétique futur de l’Europe, ce qui peut lui donner la possibilité d’avancer ses pions sur d’autres dossiers, notamment celui du gaz.

Tchernobyl, un traumatisme surmonté ?

Enfin, à travers ses projets nucléaires en Europe, le Kremlin cherche à améliorer l’image de marque du « nuke russe » aux yeux des pays de l’UE. Son implication dans le projet de Hanhikivi en Finlande s’inscrit pleinement dans cette démarche, car la Russie ne peut que bénéficier de l’association de son image à celle de ce pays européen reconnu dans le monde entier pour le haut niveau d’exigence de son régulateur nucléaire, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (STUK).

Car Tchernobyl a causé un préjudice très profond à l’image du nucléaire « made-in-Russia ». C’est encore vrai aujourd’hui, même si l’accident s’est produit il y a 35 ans en Ukraine soviétique et si la technologie du réacteur RBMK utilisée à Tchernobyl ne fait pas partie de l’offre de Rosatom à l’export. C’est peut-être pour cette raison que Rosatom a vivement recommandé à toutes ses équipes de visionner la fameuse mini-série de HBO…

Quant à la population, les sondages montrent qu’elle a surmonté le traumatisme de la tragédie et a réappris à aimer l’énergie nucléaire. L’accident de Fukushima a servi de piqûre de rappel : en 2011, 40 % des personnes interrogées par le Centre Levada, un institut de sondages russe indépendant, estimaient nécessaire de sortir du nucléaire. Cependant, le scepticisme n’a pas perduré, car le soutien à l’atome était remonté à 72 % dès 2013 et était encore de 74 % en 2018…

Légalisation du cannabis : l’exemple des marchés licites et illicites du Canada

28 mercredi Avr 2021

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  1. Sarah PerrinDoctorante en sociologie, Université de Bordeaux
Université de Bordeaux
CC BY NDNous croyons à la libre circulation de l’information
A l’intérieur des boutiques de la Société québécoise du cannabis ( SQDC ) , les consommateurs ont le choix entre différentes variétés de cannabis. MARTIN OUELLET-DIOTTE / AFP
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Pour Emmanuel Macron, « la drogue a besoin d’un coup de frein, pas d’un coup de pub ». Dans une interview accordée au journal Le Figaro le 18 avril 2021, le président de la République montre son opposition à la légalisation du cannabis. Si en France la législation concernant les usages de drogues est extrêmement prohibitive, ce n’est pas le cas de tous les pays.

Au Canada, par exemple, la situation est tout autre. Depuis 2018, les adultes sont autorisés à acheter et détenir jusqu’à 30 grammes de cannabis produit sous licence, vendu dans les boutiques de la Société québécoise du cannabis (SQDC).

Dans un contexte national où les débats sur la légalisation du cannabis sont d’actualité, il peut être bon d’aller observer les effets de cette légalisation dans un pays où elle est déjà appliquée.

Provinces et âge légal

Le Canada étant un état fédéral, les provinces ont eu certaines marges de liberté pour ajuster l’organisation concrète de la légalisation : par exemple, il faut avoir au minimum 21 ans pour acheter légalement du cannabis au Québec, alors que dans le reste du Canada, l’âge légal est fixé à 18 ans.

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Le cannabis est, en France comme au Canada, un produit très consommé, avec des niveaux d’usage parmi les plus élevés au monde, surtout chez les jeunes. Selon l’Institut National de Santé publique du Québec, 44,5 % de la population jeune et adulte a déjà expérimenté le cannabis au moins une fois dans sa vie, et jusqu’à un tiers des jeunes du secondaire sont des consommateurs réguliers. À titre comparatif, les niveaux de consommation de cannabis au Canada sont proches des niveaux de consommation français, où 44,8 % des adultes âgés de 18 à 64 ans ont déjà consommé du cannabis au cours de leur vie, selon l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, avec là encore une forte prévalence chez les jeunes.

L’objectif de la légalisation du cannabis promise par le premier ministre Justin Trudeau était de restreindre l’accès des jeunes à ce produit, de permettre une meilleure santé publique, de réduire le coût du système pénal et les activités criminelles.

En 2012, le marché noir du cannabis canadien était évalué à 6,2 milliards de dollars canadiens, soit environ 3,98 milliards d’euros. Le cannabis était de plus en plus accessible financièrement, ce qui contribuait à augmenter l’offre et à stimuler la demande tout en alimentant les réseaux criminels. Les prix du cannabis vendu par la SQDC ne devaient donc pas être trop élevés pour ne pas rediriger vers les marchés illicites, sans être non plus trop faibles pour ne pas motiver les consommations. L’organisme national Statistique Canada avait diffusé un sondage en janvier 2018 pour connaître le prix moyen d’un gramme de cannabis sur le marché noir, auquel 15 000 Canadiens avaient participé, d’après Radio Canada.

Depuis le 17 octobre 2018, les Canadiens peuvent aller acheter du cannabis légalement dans les boutiques de la SQDC (Société québécoise du cannabis). Alice Chiche/AFP

Contrairement à ce qu’annonçaient les détracteurs de la légalisation, on a pu constater que les consommations de cannabis n’ont pas explosé et le nombre d’accidents de la route liés aux usages d’herbe ou de résine n’a pas augmenté, comme démontré par Statistique Canada. Cependant, les consommateurs sont encore nombreux à passer par le marché noir, malgré les efforts mis en place pour dissuader les recours aux trafics illicites.

Pourquoi les usagers continuent-ils à acheter du cannabis de manière illégale ? C’est une des questions posées dans cette thèse en sociologie, qui compare les trajectoires de consommatrices et consommateurs de drogues insérés socialement, à Bordeaux et Montréal. Les résultats ici mobilisés s’appuient sur des entretiens réalisés avec 19 femmes et 8 hommes consommateurs de cannabis et d’autres drogues, insérés socialement et vivant à Montréal. L’objectif est d’illustrer le débat à partir du cas précis montréalais, sans généralisation abusive.

Des tarifs plus concurrentiels

Depuis plusieurs années, le marché illicite du cannabis à Montréal a mis en place une offre très professionnalisée. Avec cette offre, les dealers proposent plusieurs variétés de cannabis avec des tarifs dégressifs en fonction de la quantité achetée. Contrairement aux prix des filiales de la SQDC qui restent fixes. Ces prix fixes sont très critiqués par les interrogés.

Les prix sur le marché noir sont aussi moins élevés. Debby, 19 ans, étudiante en cinéma, explique que sur le marché licite, elle paye en moyenne 25 dollars canadiens pour trois grammes, alors que sur le marché illicite, ces trois grammes lui coûtent 10 dollars. Son dealer, qu’elle connaît depuis longtemps, pratique aussi des promotions, avec « 5 grammes offerts pour 10 grammes achetés », ce que la SQDC ne propose pas. Pour cette jeune femme qui fume quotidiennement et ne dispose pas de beaucoup d’argent, les tarifs dégressifs et moins élevés proposés sur le marché noir constituent un argument de poids.

Également, plusieurs interrogés mettent en avant une qualité décevante à la SQDC, ainsi que des problèmes sur la présentation des produits, vendus dans des emballages opaques ne permettant pas aux consommateurs de voir ce qu’ils achètent, et les quantités. Sofian, 25 ans, consultant en développement économique, interrogé au cours d’un entretien, affirme ainsi qu’« une fois quand j’ai ouvert il n’y avait clairement pas les 3,5 grammes indiqués, il manquait 0,5 gramme. Vu les tarifs, je ne peux pas me permettre ça. »

Un marché noir plus confortable

Le marché illicite n’est pas seulement moins cher, il est aussi, semble-t-il, moins contraignant. Le marché noir propose des livraisons quasiment en continu quand la SQDC est ouverte du lundi au vendredi de 9 heures à 21 heures, et le week-end de 9 heures à 17 heures. Il est possible de se faire livrer du Cannabis par la SQDC, mais il faut attendre plusieurs jours pour recevoir son colis, contre une livraison dans la journée sur le marché noir.https://www.youtube.com/embed/oSc_fMkGzW4?wmode=transparent&start=0Le marché noir du cannabis est toujours aussi fort au Canada.

Les déplacements jusqu’aux filiales de la SQDC sont parfois décrits comme contraignants par les usagers. Ils déplorent aussi le fait que la SQDC vérifie les cartes d’identité de ses clients à l’entrée des magasins, alors que les contrôles sont moins stricts pour les magasins de la Société d’Alcool du Québec (SAQ).

Également, la SQDC a parfois été en rupture de stock sur certaines variétés de cannabis très demandées, et les files d’attente peuvent être longues les jours d’affluence. Plusieurs interrogés expliquent donc qu’il est plus simple et plus pratique pour eux de se faire livrer leur cannabis via le marché noir.

D’autres interrogés ne se font pas livrer leur cannabis, mais passent par des amis qui se chargent de commander l’herbe ou la résine sur le marché illicite. Faire des achats groupés entre amis permet plusieurs avantages : bénéficier de tarifs dégressifs, mais aussi passer un moment « convivial », pour reprendre les propos de Fleur, 24 ans, serveuse dans un café, rencontrée chez elle pendant une heure, quand le déplacement dans un magasin de la SQDC est vécu comme pénible.

Enfin, certains consommateurs refusent par principe d’acheter sur le marché licite, mettant en avant des arguments idéologiques liées à la vente étatique et aux sanctions pesant toujours sur les dealers. C’est le cas d’Amanda, 23 ans, animatrice en centre-périscolaire, qui explique par téléphone qu’elle refuse d’acheter « au gouvernement » : « Tant que les gens qui ont été emprisonnés pour possession de cannabis n’ont pas été libérés, tant qu’on n’efface pas leur dossier criminel, c’est de l’hypocrisie. »

Beaucoup d’interrogés critiquent aussi l’aspect peu écologique des nombreux emballages en plastique non-réutilisables utilisés par la SQDC. Cette dernière justifie ces emballages par la nécessité de protéger les produits vendus de toute altération, mais pour les consommateurs, cela n’empêche pas de les réutiliser ou de proposer un système de recyclage.

Des achats à la fois sur les marchés licites et illicites

In fine, la plupart des interrogés déclarent se fournir à la fois sur le marché licite et illicite. Les usagers apprécient la possibilité, dans les magasins de la SQDC, de connaître les taux de THC des variétés de cannabis et de pouvoir être conseillés par les vendeurs. Certains consommateurs rencontrés mettent aussi en avant un autre argument idéologique, allant cette fois par principe en faveur du marché licite : June, 28 ans, chargée de projet numérique, consommatrice quotidienne de cannabis ayant accepté de participer à la recherche, explique ainsi qu’« on a voulu la légalisation, maintenant il faut acheter sur le marché licite, il faut soutenir ça ».

Les marchés du cannabis québécois, qu’ils soient légaux ou illégaux, semblent avoir de beaux jours devant eux : les magasins de la SQDC sont ainsi restés ouverts durant les confinements au Québec, tandis que de nombreux commerces jugés moins essentiels fermaient leurs portes, et l’usage récréatif du cannabis au Canada a considérablement augmenté depuis le début de la crise sanitaire.https://www.youtube.com/embed/NEcP-JZwa6I?wmode=transparent&start=0A Montréal, le coronavirus a fait augmenter les ventes de cannabis.

En France aussi, les fumeurs ont globalement consommé davantage depuis le début de la crise sanitaire, et on a vu apparaître sur le territoire depuis la fin de l’année 2020 de nombreuses alertes sur des cannabinoïdes de synthèse dangereux présents dans les lots d’herbe et de résine échangés sur le marché noir.

Malgré ces constats, les fumeurs français sont contraints de continuer à se fournir sur le marché illicite, la position du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin n’allant pas dans le sens d’un assouplissement de la législation.

2021, année décisive pour la protection et la restauration des forêts mondiales ?

26 lundi Avr 2021

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  1. Serge MullerProfesseur, chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205 ISYEB, CNRS, MNHN, SU, EPHE), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)

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Muséum National d’Histoire Naturelle
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En août 2020, dans l’État de Para au Brésil, coucher de soleil sur fond de fumées provenant d’incendies illégaux. CARL DE SOUZA / AFP

La publication fin mars 2021 du bilan des déforestations pour l’année 2020 par le World Resources Institute est à nouveau alarmante.

Selon ce document, la perte de couvert forestier atteint les 25,8 millions d’hectares, soit plus de 0,6 % de la superficie mondiale des forêts, estimée à plus de 4 milliards d’hectares par la FAO (avec 45 % de forêts tropicales, 27 % de forêts boréales, 16 % de forêts tempérées et 11 % forêts subtropicales). Les forêts représentent environ 31 % de la superficie des terres émergées du globe.

Ce recul concerne tout particulièrement les forêts tropicales, où la perte atteint les 12,2 millions d’ha, dont 4,2 millions de forêts humides primaires – c’est 12 % de plus qu’en 2019 et ceci malgré le ralentissement de l’économie mondiale imposé par la pandémie.

Le Brésil constitue le pays responsable de la majorité des déboisements de forêts humides primaires (1,7 million d’ha), avec une augmentation de 25 % des destructions dans ce pays en 2020 par rapport à 2019.

Répartition des types de forêts dans le monde.

Les forêts, ces précieux « puits de carbone »

Toujours selon les données de la FAO, les forêts de la planète mobilisent environ 662 gigatonnes (Gt) de carbone en 2020 (contre 668 en 1990), avec une densité moyenne de 163,1 tonnes de C/ha en 2020 (contre 158,8 en 1990). La forêt constitue ainsi, avec le milieu marin, un des principaux « puits de carbone ».https://www.youtube.com/embed/kpE_4pXs224?wmode=transparent&start=0La forêt, première solution contre le changement climatique, avec Jean Jouzel. (Reforest’Action/Youtube, 2019).

On le comprend bien, la destruction des forêts contribue à réduire cette fonction de fixation du carbone.

Or cette destruction se poursuit à un rythme accéléré : elle représente selon la FAO, 178 millions d’hectares de forêts (tous types confondus) pour la période entre 1990 et 2020 ; dans les régions tropicales, l’extension de l’agriculture et de l’élevage en constitue la cause principale.

Selon Global Forest Watch, de 2002 à 2020, il y a eu une perte de 64,7 millions d’hectares (M ha) de forêt tropicale humide primaire (soit une perte de 6,3 % de sa superficie) ; cela correspond à 16 % de la perte de forêt dans le monde.

Forêt tropicale protégée de la réserve naturelle nationale de La Trinité, en Guyane. Olivier Tostain/ECOBIOS, CC BY-NC-ND

Les forêts sont également les victimes du changement climatique, en particulier les cyclones et tempêtes, les sécheresses et surtout les incendies.

La FAO avance le chiffre de 98 M ha de forêts touchées par les incendies en 2015. Au cours des dernières années, ce sont 18 M ha qui ont brûlé en Australie pour la période 2019-2020 et 21 M ha qui sont partis en fumée en Sibérie au cours des 6 premiers mois de l’année 2020.

Lutter contre la déforestation importée

Comment inverser ces tendances délétères ?

La première action à mener est évidemment d’agir sur la déforestation volontaire, en particulier celle des forêts primaires dans les zones tropicales, car ce sont ces forêts primaires qui abritent de loin la biodiversité la plus élevée.

Cela concerne tout particulièrement les États qui abritent ces forêts, mais également les pays importateurs des produits issus de la déforestation, dont l’Europe, considérée par le WWF comme responsable en 2017 de 16 % de la déforestation du fait de sa consommation de denrées issues des déboisements ; c’est ce phénomène que l’on appelle la « déforestation importée ».

La France a adopté en 2018 une stratégie nationale ambitieuse contre la déforestation importée, mais celle-ci peine à être mise en œuvre. Dans une récente communication, le WWF a identifié les produits importés par la France qui présentent le plus d’enjeux – et correspondant à une surface potentielle de déforestation annuelle de 5,1 millions d’hectares.

Infographie du WWF sur la déforestation importée. WWF

Avec d’autres ONG, le WWF a aussi proposé fin 2020 dix actions concrètes pour lutter contre la déforestation importée ; et l’UE devrait également proposer une loi cette année.

Débats autour de la « reforestation massive »

Une seconde action concerne la restauration et la reforestation des zones dégradées et déboisées. Dans ce domaine, le « défi de Bonn » adopté en 2011 a retenu l’objectif de restauration de 150 millions d’hectares de terres dégradées et déboisées d’ici à 2020. Objectif rehaussé à 350 millions d’hectares en 2014 lors du Sommet des Nations unies sur le climat… mais aussi reporté à 2030.

Ces mesures ont été approuvées à ce jour par plus de 100 gouvernements, organisations de la société civile et entreprises ; des engagements de restaurations et plantations ont été pris par 43 pays.

Mais des scientifiques se sont alarmés en 2019 des propositions de plantations monospécifiques – ne correspondant en rien à des forêts naturelles et n’en présentant pas les mêmes intérêts pour la biodiversité et le climat – faites par certains pays (le Brésil, par exemple, pour 19 M ha, soit 82 % de ses engagements de restauration).

En juillet 2019, une publication dans la revue Science avait fait grand bruit, estimant qu’il serait possible d’accroître la superficie forestière mondiale de 0,9 milliard d’hectares ; ce qui permettrait de stocker 205 Gt de carbone supplémentaires.

Mais dans un commentaire publié deux semaines plus tard, d’autres spécialistes ont considéré que ces estimations comportaient de nombreuses erreurs. Un erratum a fait suite à ces commentaires.

L’idée de « reforestation massive » a toutefois fait son chemin, reprise par exemple début 2020 par le Forum économique mondial de Davos, avec un projet de plantation de 1000 milliards d’arbres, avec l’objectif de capter l’essentiel des émissions de CO2.

Cette proposition a rapidement été considérée comme irréaliste, du fait d’erreurs d’évaluation et de l’impossibilité de réaliser de telles plantations sans impacter fortement terres agricoles et écosystèmes ouverts (comme les savanes).

Forêt tempérée protégée (frênaie-érablaie) des vallons des plateaux calcaires de Lorraine. Serge Muller/MNHN, CC BY-NC-ND
Forêt boréale (sapinière à sapin baumier) à Saint-Pierre et Miquelon. Serge Muller/MNHN, CC BY-NC-ND

Une année de mobilisation mondiale

En janvier 2021, le Sommet mondial sur l’avenir de la planète, le « One Planet Summit », a marqué le début d’une série d’évènements en faveur de la préservation de l’environnement et de la biodiversité en particulier. Cette quatrième édition aura notamment vu la relance du projet de la grande muraille verte du Sahel. L’Alliance pour la préservation des forêts tropicales aura également reçu une forte attention lors de l’événement.

En septembre prochain, se tiendra le Congrès mondial de la nature, organisé par l’UICN à Marseille ; puis en octobre, la conférence de l’ONU sur la biodiversité (COP 15) prévue à Kunming en Chine.

Un des objectifs de ces conférences est d’inciter les États à renforcer les superficies protégées et restaurées dans le monde, l’ONU ayant déclaré la décennie 2021-2030 comme celle de la « restauration des écosystèmes ».

Espérons que son futur bilan sera plus satisfaisant que celui de la décennie précédente, tant pour le climat que la biodiversité, aucun des 20 « objectifs d’Aichi » n’ayant été pleinement atteint.

Comment restaurer des centaines de millions d’hectares de forêts ?

Sur la thématique plus spécifique de la conservation et de la restauration des forêts, deux conférences internationales ont mobilisé scientifiques et décideurs en ce début d’année : la « Reforestation for biodiversity, carbon capture and livelihoods », à partir de Londres et le « Global Forest Summit », à partir de Paris.

La rencontre londonienne aura permis de présenter les 10 règles d’or devant guider les opérations de restauration des forêts ; elles avaient fait l’objet d’une récente publication.

Les dix règles de la reforestation.

Il s’agit de protéger prioritairement les forêts existantes ; travailler avec les populations locales ; maximiser la restauration de la biodiversité ; sélectionner la surface adéquate pour la reforestation ; privilégier la restauration naturelle ; choisir les espèces d’arbres qui maximisent la biodiversité ; utiliser des espèces d’arbres résilientes qui peuvent s’adapter au climat changeant ; programmer à l’avance ; apprendre en faisant ; rentabiliser les opérations.

Au Global Forest Summit de Paris (dont le mot d’ordre était « Protect faster, Restore stronger »), la priorité a été donnée à la protection des forêts subsistantes, soulignant la nécessité de stopper la déforestation puis de mener des opérations correspondant à de réelles restaurations de « forêts naturelles », différentes de plantations ligneuses monospécifiques à seul objectif de production ; il s’agissait également de développer des partenariats avec les acteurs des territoires concernés.

Co-organisatrice du Global Forest Summit de Paris, Reforest’action a financé depuis sa création en 2010 la plantation ou la régénération de plus de 11 millions d’arbres dans 30 pays dans le monde. De nombreuses autres structures interviennent dans de telles actions, en France en premier lieu l’Office national des forêts qui y gère près de 11 millions d’hectares de forêts publiques, dont plus de la moitié en Outre-mer (Guyane en tête).https://www.youtube.com/embed/eYCf20oGI_0?wmode=transparent&start=0Reportage sur une action de reboisement en région parisienne. (Département des Yvelines/Youtube, 2019).

Atteindre la neutralité carbone

Dans sa stratégie en faveur de la biodiversité, l’Union européenne a également affiché un objectif de plantation au cours de la prochaine décennie de 3 milliards d’arbres sur son territoire, en respectant les principes écologiques.

Il est toutefois évident que ce volet de restauration et surtout de plantation de forêts – très prisé actuellement par les entreprises au titre de la « compensation carbone » – ne doit pas se faire au détriment des efforts prioritaires nécessaires pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, indispensables pour espérer atteindre la neutralité carbone en 2050.

Ces efforts sont plébiscités par des mobilisations d’un nombre de plus en plus important de citoyens, à l’image en France de la Convention citoyenne pour le climat et de « l’Affaire du siècle ». L’enjeu n’est ni plus ni moins que les conditions de vie pour l’espèce humaine au cours de la deuxième moitié du XXIe siècle !

Sécheresses, incendies et maladies : les risques en cascade qui menacent les forêts françaises

25 dimanche Avr 2021

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  1. Félix BastitDoctorant en économie, Inrae
  2. Marielle BrunetteChargé de recherche, Inrae
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Dans la forêt de Villiers-les-Nancy, un épicéa dépérissant. Marielle Brunette, CC BY-NC-SA

Parmi les facteurs qui façonnent les écosystèmes forestiers, les aléas naturels jouent un rôle primordial. Incendies, tempêtes, invasions d’insectes… ces phénomènes se caractérisent à la fois par leur singularité – ils doivent être inattendus, incontrôlables et d’une ampleur inhabituelle – et par les conséquences directes qu’ils ont sur les activités humaines ou les personnes.

Les espèces s’adaptant perpétuellement à leur environnement, un aléa naturel de grande ampleur entraînera une perturbation importante des conditions de ce dernier. Mais sa survenue offre aussi des opportunités pour certaines espèces, et peut être bénéfique à la biodiversité.

Les essences dites « pyrophiles », c’est-à-dire celles dont la croissance est stimulée par le feu, constituent un cas intéressant : les graines des cônes du pin d’Alep (Pinus halepensis), une espèce installée sur le pourtour méditerranéen, ne sont par exemple libérées qu’après le passage d’un incendie.

Sans ce dernier, leurs peuplements ne peuvent donc pas prospérer ! Dans de nombreux cas, les aléas naturels peuvent offrir un intérêt écologique primordial, mais ils représentent aussi une menace pour les forêts.

Pins d’Alep. Frenciscobcn/Wikimedia, CC BY-NC-ND

Des aléas destructeurs

Entre 2002 et 2013, 67 millions d’hectares de forêt ont brûlé chaque année dans le monde, anéantissant l’équivalent de quatre fois la surface des bosquets métropolitains français.

Sur cette période de 12 ans, 85 millions d’hectares ont été affectés par les insectes (s’attaquant, par exemple, au feuillage ou à l’écorce des arbres), 38 millions par des conditions météorologiques extrêmes (tempête, ouragan, sécheresse, etc.) et 12,5 millions par diverses maladies.

À titre de comparaison, la surface de la forêt mondiale est d’environ 4 milliards d’hectares.https://platform.twitter.com/embed/Tweet.html?dnt=false&embedId=twitter-widget-0&features=eyJ0ZndfZXhwZXJpbWVudHNfY29va2llX2V4cGlyYXRpb24iOnsiYnVja2V0IjoxMjA5NjAwLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfSwidGZ3X2hvcml6b25fdHdlZXRfZW1iZWRfOTU1NSI6eyJidWNrZXQiOiJodGUiLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfX0%3D&frame=false&hideCard=false&hideThread=false&id=1220253585893662720&lang=en&origin=https%3A%2F%2Ftheconversation.com%2Fsecheresses-incendies-et-maladies-les-risques-en-cascade-qui-menacent-les-forets-francaises-157448&sessionId=7b1f60b69ff9c55bec438b61a7775549e651dce2&siteScreenName=FR_Conversation&theme=light&widgetsVersion=ff2e7cf%3A1618526400629&width=550px

En Europe, la tempête en tête

Au niveau européen, sur la deuxième moitié du XXe siècle, 35 millions de m³ de bois ont en moyenne été endommagés chaque année par des événements naturels, soit 8,1 % de la récolte annuelle.

La tempête était responsable de 53 % de ces dégâts, le feu de 16 % et les facteurs biotiques – c’est-à-dire du monde vivant sur les forêts – de 16 %, la moitié d’entre eux étant dus aux scolytes, insectes xylophages (qui se nourrissent de bois).

En France, des sécheresses plus importantes

À plus petite échelle, en France, de nombreuses perturbations ont affecté les peuplements forestiers. Les tempêtes Martin et Lothar de décembre 1999 sont encore dans les mémoires. Elles ont mis à terre 140 millions de m³ de bois, principalement dans l’est de la France.

Avec les sécheresses importantes depuis 2018, ce sont au moins 300 000 hectares qui ont été concernés par des mortalités directement liées à la sécheresse ou à des attaques de scolytes dans les forêts publiques françaises, les secondes étant souvent encouragées par les premières, nous le verrons plus tard.

La chalarose du frêne (Chalara fraxinea), maladie qui a émergé dans les années 1990 dans l’Est de l’Europe, décime les peuplements de frênes et avance un peu plus chaque année à travers le territoire français.https://www.youtube.com/embed/G0ARpXPibos?wmode=transparent&start=0La chalarose du frêne. (Inra_France/Youtube, 2018).

Enfin, le nématode du pin (Bursaphelenchus xylophilus), une espèce de vers présente au Portugal, pourrait avoir des conséquences économiques dramatiques s’il s’installait dans les forêts landaises.

Quand les aléas entrent en interaction

L’ampleur et la fréquence de ces événements naturels augmentent du fait du changement climatique.

Cette intensification est déjà observée et tend à s’accentuer. Par exemple, les dommages causés par le vent, le feu et les insectes ont considérablement progressé en Europe entre 1958 et 2001 : en moyenne de + 2,6 %/an pour le vent, + 4,2 %/an pour les incendies, et + 5,3 %/an pour les scolytes.

Ces exemples ne considèrent en outre qu’un seul aléa naturel à la fois alors que le changement climatique favorise les interactions entre eux. On peut les définir à travers leurs effets temporels selon deux types en particulier : les événements « simultanés » ou « composés », qui se déroulent au même endroit et au même moment ; les événements « en cascades », qui surviennent au même endroit mais décalés dans le temps. Le cas échéant, un temps durant lequel l’effet du premier événement perdure doit être défini.

Le cas du scolyte de l’épicéa, développé plus bas, fournit plusieurs exemples de tels événements.

Ces effets peuvent modifier la vulnérabilité de la forêt et/ou la récurrence de l’aléa, c’est-à-dire le temps de retour moyen de l’aléa en question ou bien d’un autre.

Des phénomènes multiples et complexes

Les scientifiques s’attendent ainsi à voir les interactions entre les risques se renforcer beaucoup plus vite que les risques eux-mêmes : de plus en plus de peuplements seront donc touchés à l’avenir par des aléas multiples et complexes.

Les enjeux qui entourent leur prise en compte sont nombreux : sur les plans économiques et sociaux, il s’agit de pérenniser la fourniture de biens et services environnementaux (bois, loisirs, etc.) ; sur le plan financier, il est question pour les propriétaires forestiers de retour sur investissement mais aussi de coûts associés à la couverture des aléas multiples.

Enfin, sur les plans environnementaux et écologiques, ces aléas multiples mettent en péril les habitats naturels, mais aussi les services d’atténuation du changement climatique.

Le scolyte de l’épicéa, un cas d’école

Le scolyte de l’épicéa, ou encore bostryche, est un insecte xylophage de quelques millimètres de long. À un niveau de population endémique, il joue un rôle fondamental dans le maintien de l’écosystème forestier, puisqu’il ne s’attaque qu’aux épicéas (Picea Abies) les plus fragiles.

Ces derniers ayant tendance à augmenter fortement l’évapotranspiration – c’est-à-dire le transfert d’eau vers l’atmosphère –, leur retrait permet de mieux réguler la ressource hydrique pour le reste du peuplement, et aussi de faire de la place aux jeunes générations plus dynamiques.

Épicéas malades dans le massif des Vosges. Marielle Brunette, CC BY-NC
Photographie prise par les auteurs à Rupt-sur-Moselle (Vosges) en juin 2020. Auteurs, CC BY-NC-SA

Cet équilibre écologique peut être perturbé de plusieurs façons et mener à la destruction de grandes surfaces de pessières (on désigne ainsi les forêts principalement constituées d’épiceas).

Perturbations en cascade

Une tempête peut par exemple produire un certain volume de chablis, c’est-à-dire d’arbres déracinés et tombés au sol sous l’effet d’événements naturels.

Or les chablis, dont la vigueur et les capacités de défenses associées sont réduites à néant, constituent des cibles particulièrement faciles pour les scolytes. Ils offrent donc une occasion aux populations d’insectes de croître très rapidement. Cette interaction entre tempêtes et population d’insectes constitue un premier exemple d’aléas en cascades.

Le changement climatique engendre la combinaison d’autres aléas simultanés. À l’instar des chablis dont la vigueur est diminuée, les arbres subissant des sécheresses estivales de plus en plus intenses et régulières sont très affaiblis et deviennent aussi des cibles faciles pour les scolytes.https://www.youtube.com/embed/Omj5kMschkw?wmode=transparent&start=0La crise des scolytes en région Grand Est. (ONF/Youtube, 2019).

Le temps nécessaire à une larve pour atteindre l’âge adulte est par ailleurs inversement proportionnel à la température. La hausse de cette dernière aide donc les populations d’insectes à se développer plus rapidement.

Historiquement, une ou deux générations d’insectes étaient observées chaque année. Désormais ce sont jusqu’à trois générations annuelles, ce qui provoque une croissance des populations beaucoup plus brutale.

L’Est de la France particulièrement touché

Ces aléas mènent à de profondes modifications des écosystèmes et peuvent engendrer des niveaux de dégâts désastreux.

C’est notamment ce qui a été observé au cours des étés 2019 et 2020 dans les régions Grand Est et Bourgogne-Franche Comté où plusieurs millions de mètres cubes d’épicéas ont été touchés, diminuant par la même occasion drastiquement le prix de vente du bois.

Plus de 40 millions de mètres cubes d’épicéas en 2018 et 2019 ont également été impactés en Allemagne.

La cascade de risques ne s’arrête pas là : les peuplements ayant subi des attaques constituent une importante quantité de bois sec (troncs, branches, aiguilles) qui pourra à l’avenir potentiellement augmenter la sévérité des incendies dans la région affectée. Ces zones n’étaient pourtant pas particulièrement concernées par le risque de feux par le passé. Réciproquement, les peuplements incendiés pourront favoriser des pullulations de scolytes.

Interactions possibles entre aléas naturels dans les pessières de l’est de la France (Source : Auteurs).

Écologues, économistes et interactions

Les scientifiques s’intéressent aux risques naturels depuis longtemps mais les analysent, en général, un par un ou de manière indépendante. Les interactions entre les aléas ne sont considérées que depuis peu, notamment sous l’impulsion du changement climatique, qui tend à les favoriser.

Elles soulèvent pourtant des questions importantes, notamment en matière de modélisation de chaque interaction. Au contraire des aléas isolés, les impacts des aléas multiples ne sont pas linéaires en raison d’effets de synergie.

En fonction du prisme disciplinaire, la question sera par ailleurs abordée différemment.

Les écologues s’engagent souvent dans l’étude précise de certaines interactions, au prix de résultats dépendant fortement de l’écosystème considéré et donc peu généralisables. Par exemple, l’interaction entre tempêtes et scolytes de l’épicéa est particulièrement bien connue dans les massifs montagneux d’Europe centrale.

Les économistes au contraire préfèrent s’intéresser à des cas beaucoup plus généraux, faisant donc la plupart du temps l’hypothèse de risques indépendants les uns des autres. On suppose par exemple l’existence de deux risques uniques et indépendants : les incendies et les tempêtes. L’étude théorique d’aléas naturels aléatoires et indépendants est ainsi bien traitée dans la littérature économique récente.

Davantage d’interdisciplinarité serait bénéfique à chacune de ces deux disciplines. Les économistes auraient beaucoup à gagner en s’inspirant des modèles d’écologie : ils décrivent mieux les interactions à l’intérieur d’un écosystème. Quant aux écologistes, les modèles économiques pourraient leur apporter d’intéressantes indications sur le devenir des forêts françaises, généralement gérées par l’homme.

Risque de marché et risque financier

Comme évoqué avec le cas du marché de l’épicéa dans l’Est de la France, la crise des scolytes a mis une grande quantité de bois sur le marché. En volumes récoltés, c’est l’équivalent de quelques années normales qui sont arrivées annuellement sur le marché local.

Cette offre très importante a fortement déstabilisé les marchés et a mécaniquement diminué le prix du bois. Une baisse de 70 % du prix des épicéas sur pied vendus par l’ONF a été observée entre mars 2018 (avant la crise) et mars 2020.

Au risque d’aléa naturel s’ajoutent donc deux autres risques.

Le premier concerne le risque de marché pour les propriétaires forestiers, avec des prix en chute. À notre connaissance, il n’a d’ailleurs pas encore été étudié dans le cadre d’aléas multiples par les économistes.

Le second concerne le risque financier : le retour sur investissement de ces propriétaires dépend essentiellement des bénéfices, qui ne couvrent plus forcément les coûts de replantation. La gestion de ce second risque est indispensable pour la conservation d’un couvert forestier durable et revêt donc un intérêt public majeur.

Le lien entre changement climatique et réduction de la quantité de bois sur pied. Auteurs

Le changement climatique devrait augmenter les aléas et leurs interactions à l’avenir, diminuant ainsi la quantité de bois sur pied. La forêt constituant un important stock de carbone, une boucle de rétroaction s’installe donc entre changement climatique et volume de bois sur pied.

Plus le changement climatique s’intensifie, plus les aléas sur la forêt aussi, détruisant davantage de surfaces, diminuant le puits de carbone forestier et contribuant à un changement climatique plus prononcé, etc.

La prise en compte et la gestion de ces aléas multiples, ainsi que des divers risques qui en découlent, est donc primordiale pour pérenniser les peuplements forestiers et les nombreux services écosystémiques associés.

UE : les trois limites du projet de taxe carbone aux frontières

24 samedi Avr 2021

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  1. Mehdi AbbasMaître de conférence, Université Grenoble Alpes (UGA)
Université Grenoble Alpes

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Ce projet s’intègre dans le cadre, à la fois, de sa nouvelle stratégie commerciale et du « Green Deal » (« pacte vert »), visant à faire de l’Europe, d’ici à 2050, le « premier continent neutre en carbone ». Shutterstock

En mars dernier, le Parlement européen a voté le principe d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF). Ce projet de taxe carbone aux frontières s’intègre dans le cadre, à la fois, de sa nouvelle stratégie commerciale, intitulée Une politique commerciale ouverte, durable et volontaire, et du « Green Deal » (« pacte vert »), visant à faire de l’Europe, d’ici à 2050, le « premier continent neutre en carbone ».

Le texte indique que le MACF devra être non discriminant, c’est-à-dire respecter les articles I (clause de la nation la plus favorisée) et III (traitement national) des accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et être compatible avec les dispositions de l’Article XX (les exceptions générales), particulièrement ne pas générer de distorsions aux échanges.

Afin d’éviter d’être associé à une restriction quantitative aux échanges (prohibée par l’OMC), le dispositif n’impose ni l’achat de quotas, ni la participation à un marché parallèle réservé aux importateurs. De fait, le mécanisme s’apparenterait à une taxe à l’importation calculée en fonction du contenu carbone des importations et dont le taux serait fixé en fonction du prix de la tonne de CO2 dans le système communautaire d’échange de quotas d’émission (SEQE).

Trois réserves peuvent toutefois être émises sur ce projet. Il n’est en effet pas certain que les précautions citées précédemment suffisent à ce que le MACF soit adopté, soit compatible avec le régime OMC, et soit effectif.

La décarbonation sacrifiée ?

La première concerne l’effectivité de la mesure. En indiquant que le MACF doit inciter à la fois à décarboner, à améliorer la compétitivité des produits européens tout en ne nuisant pas aux opportunités commerciales de l’Union européenne (UE), nous sommes au cœur du trilemme globalisation-compétitivité-commerce.

Selon la recherche, il n’est pas possible d’obtenir simultanément une économie globalisée, s’appuyant sur des stratégies d’ouverture compétitive tout en étant sur une trajectoire ambitieuse de décarbonation. Du Sommet de la Terre de Rio de 1992 à l’Accord de Paris de 2015, la gouvernance climatique internationale s’interprète comme un arbitrage, constamment réaffirmé, en faveur d’une globalisation, dont l’un des moteurs est les politiques de compétitivité, au dépens de l’angle décarbonation.https://platform.twitter.com/embed/Tweet.html?dnt=false&embedId=twitter-widget-0&features=eyJ0ZndfZXhwZXJpbWVudHNfY29va2llX2V4cGlyYXRpb24iOnsiYnVja2V0IjoxMjA5NjAwLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfSwidGZ3X2hvcml6b25fdHdlZXRfZW1iZWRfOTU1NSI6eyJidWNrZXQiOiJodGUiLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfX0%3D&frame=false&hideCard=false&hideThread=false&id=1239395118173618176&lang=en&origin=https%3A%2F%2Ftheconversation.com%2Fue-les-trois-limites-du-projet-de-taxe-carbone-aux-frontieres-159149&sessionId=9ee504cb848bad6ea3d41d0c98ff03609d2d99e6&siteScreenName=FR_Conversation&theme=light&widgetsVersion=ff2e7cf%3A1618526400629&width=550px

La nouvelle stratégie ne tranche pas ce dilemme : elle affirme que l’accès au marché intérieur de l’UE sera un levier pour amener les partenaires à accroître leurs efforts en matière climatique et environnementale. En parallèle, elle réaffirme la doctrine libre-échangiste et le fait que la politique commerciale est un soutien à la politique de concurrence. La décarbonation sera-t-elle dès lors sacrifiée une nouvelle fois sur l’autel de la realpolitik commerciale ?

La deuxième réserve renvoie à la compatibilité avec le régime OMC. Ce dernier n’a pas de doctrine fixe concernant les mesures d’ajustement aux frontières.

Trois points méritent d’être rappelés. Primo : une mesure d’ajustement aux frontières ne peut s’appliquer que vis-à-vis de pays présentant une « situation similaire » ou des « conditions comparables ». Cela exclurait les pays les moins avancés (PMA) mais également les pays en développement (PED) tels les émergents, cette catégorie n’existant pas à l’OMC.

Deuxio : le MACF risque de buter sur le test de nécessité selon lequel, pour qu’une mesure soit tolérée, il faut démontrer qu’elle est nécessaire à défaut de tout autre dispositif à la réalisation des objectifs énoncés par le régulateur.

Ne perdons pas de vue que l’article 3.5 de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) empêche le recours aux mesures commerciales pour atteindre les objectifs de politique climatique. Aussi, le MACF ne peut être la seule option de l’UE pour décarboner les échanges, comme nous l’avions souligné dans un article de recherche récent.

Tertio : l’OMC étant une organisation conduite par ses membres, la compatibilité d’un MACF dépendra, en dernier ressort, du consensus des États membres.

C’est pourquoi l’UE devra engager une diplomatie du consensus building et engager une procédure au titre de l’article IX.3 de l’accord instituant l’OMC. La prochaine conférence ministérielle qui se tiendra à Genève en novembre 2021 pourrait être l’occasion d’avancer dans ce sens.

Une piste prometteuse mais problématique

La troisième réserve porte sur l’articulation avec le SEQE. Deux éléments doivent être gardés à l’esprit pour la comprendre.

Le premier est que la mise en place d’un MACF implique la fin de la gratuité des quotas d’émission aujourd’hui en vigueur. Celle-ci devrait intervenir en 2030, mais si la mesure entre en vigueur en 2022, le SEQE devra être réformé au risque que l’UE soit attaquée pour double protection de ses producteurs : ils ne paient pas pour leurs émissions et ils sont protégés par le MACF.

La mise en place d’un MACF devra s’accompagner d’une réforme du SEQE, afin d’empêcher la double protection des producteurs européens. Shutterstock

Ce dernier pourrait même inciter les firmes les plus émettrices à localiser leurs sites en Europe. Paradoxe climatiquement intenable.

Le second élément renvoie à la comptabilité carbone des importations : comment calculer, en l’absence de toute méthodologie consensuelle internationale, l’empreinte carbone des biens importés/produits hors de l’UE. Le projet laisse entendre que les importateurs devraient avoir la possibilité de prouver que la teneur en carbone de leurs produits est inférieure à celle de leurs équivalents européens.

Certes, mais quelle institution certifiera cette information et selon quelles modalités de calcul ? Faut-il se limiter au produit en tant que tel ou inclure les procédés et méthodes de production, et le bilan carbone des entrants et le prix local du carbone ? Le chantier est immense et d’une redoutable complexité.

L’option d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE représente une piste à la fois prometteuse et problématique. Elle est prometteuse car le projet entend compléter la stratégie de décarbonation de l’UE, accompagner la révision du système européen des quotas d’émissions (acter la fin de leur gratuité) et contribuer à la réindustrialisation décarbonée de l’économie européenne.

Elle est cependant problématique car la géoéconomie du carbone et les nouveaux rapports de puissance dans l’économie globale la rendent hautement conflictuelle. Le mécanisme implique en effet une action au niveau multilatéral (OMC), susceptible d’en retarder l’adoption et/ou de grandement en neutraliser les effets.

Le projet de taxe carbone aux frontières dépendra donc, dans une large mesure, de la capacité de l’Europe à construire un consensus international, c’est-à-dire à convaincre et à peser sur les rapports de force, talon d’Achille de l’UE.

« C’est comme un marshmallow noir » : décrire l’infini de l’espace, un défi extraterrestre

23 vendredi Avr 2021

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  1. Joël ChevrierProfesseur de physique, Université Grenoble Alpes (UGA)
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L’astronaute Story Musgrave salue les caméras le 9 décembre 1993 après avoir effectué la cinquième et dernière sortie dans l’espace pour réparer le télescope spatial Hubble. NASA/AFP

Thomas Pesquet s’apprête à rejoindre l’ISS. Il y restera 6 mois, 6 mois en chute libre, libéré des effets de la gravité sur son corps. Mais à 400km d’altitude, il restera finalement dans la proximité immédiate de la Terre qu’il verra toujours avec beaucoup de détails. Pourtant, de l’autre côté, il sera face au vide, à l’infini de l’espace, au noir de cet infini ponctué par les étoiles dont la lumière n’est ni atténuée, ni déviée dans ce vide.

C’est l’environnement que connaîtront les voyageurs vers Mars qui, eux, perdront totalement la Terre de vue. Au XXe siècle, l’astronaute américain Story Musgrave s’est tourné résolument vers cet espace infini depuis les navettes spatiales. Il a exploré comment son corps habitait l’espace, l’apesanteur, le noir, l’infini, la lumière. Il a ensuite essayé de partager ce qu’il a vécu. C’est un véritable défi pour la perception humaine, la sienne et la nôtre. Rien dans notre existence terrestre ne nous prépare à appréhender cet inconnu. Il a tenté cette communion par les mots, en nous parlant. Est-ce seulement possible ?

Le corps humain, produit de la vie sur Terre

Notre corps, en fait tout notre être, n’est pas fait pour l’espace. Nous nous sommes constitués dans les conditions de vie sur Terre au fil de l’évolution biologique, à travers les générations. Une gravité omniprésente a largement contraint ce que nous sommes devenus aujourd’hui, ainsi que l’alternance des jours et des nuits. Et même, si nous sommes fascinés par la nuit qui nous dévoile les étoiles, notre perception du monde est d’abord celle de la surface verte de la Terre, du bleu du ciel avec nuages, vent et soleil, des couleurs de l’eau et de la présence partout d’une vie multiforme. Sont-ce cette évidence et nos habitudes qui fondent nos comportements désinvoltes, mais insoutenables, dans l’appropriation du monde ? Story Musgrave vient nous raconter ce court moment de sa vie au cours duquel tout cela a disparu, remplacé par un strict minimum reconstruit dans la navette spatiale pour survivre dans le vide.

Story Musgrave est un astronaute américain né en 1935 ; lors de sa dernière mission, en 1993, il était âgé de 61 ans. En six missions, il est resté pratiquement deux mois dans l’espace. À l’instar de la Française Claudie Haigneré, il fait partie de ces astronautes au parcours universitaire hors du commun. On lui attribue six diplômes de l’enseignement supérieur : chirurgien, informaticien, chimiste… Dans sa jeunesse, il a fait partie du corps des marines de l’armée américaine, et fut alors technicien sur un porte-avion.

« I am a space person »

En 2003, dans le film documentaire intitulé Story, de la cinéaste Dana Ranga, Story Musgrave se raconte en homme de l’espace, une réalité au-delà de tous nos repères. Ses propos sont déroutants. Il choisit de se présenter en artiste ou en poète pour créer une expression verbale très réfléchie, mais libérée de tous les cadres.

En s’attachant aux perceptions corporelles, il déborde une approche rationnelle attendue, au vu de la solidité et de la variété de ses connaissances scientifiques. Il cherche plutôt à mettre en mots un indicible vécu, à partir de l’observation de son propre corps malmené dans l’espace, dans un témoignage littéralement extraterrestre. Au centre du film de Dana Ranga, se trouve donc l’apprentissage du corps en l’absence de gravité dans la navette spatiale en orbite, confronté au noir absolu, à la lumière invisible mais qui remplit l’espace, au vide de matière partout, à l’infini qu’il sait être devant lui.https://www.youtube.com/embed/nsJ5fDrlvbM?wmode=transparent&start=0

S’abandonner à l’espace pour y vivre

Story Musgrave se dit de la génération de la Conquête Spatiale pour immédiatement souligner cette conquête impossible voire dangereuse quand il s’agit de son corps dans l’espace. Au lieu d’une conquête, il parle au contraire de l’abandon nécessaire d’un corps aux conditions de l’espace, pour s’adapter et vivre. Dans ce film, il tente de décrire les réactions de son corps, comment il est perdu sans repères. Il n’explique rien : c’est impossible. Il découvre « seulement » combien il doit être à l’écoute de son corps et lui donner raison :

« Je trouve absolument merveilleux que mon corps aille dans un sens et mon esprit dans l’autre. Quand mon corps me dit, par exemple au milieu de la nuit, qu’il veut se retourner et que je lui dis : “Hé, mon gars, ça ne te mènera nulle part. Cela ne te mènera à rien. Nous sommes en chute libre, nous sommes en gravité zéro. Se retourner dans ce lit, ou où que nous soyons, ne va rien t’apporter et nous n’avons pas besoin de le faire”. Et nous essayons cela pendant un moment, puis mon corps me dit que si je ne me retourne pas, je vais passer une nuit pénible, et je vois que oui, le corps a raison. Alors, je me retourne et les choses vont bien. C’est comme un désaccord avec mon moi physique qui essaie de s’adapter à un environnement pour lequel il n’a pas du tout été conçu. »

Le noir de l’espace infini

Et plus loin dans le film, il décrit ce qu’il voit lorsqu’il regarde par le hublot :

« Dans l’espace, quand vous regardez dehors, bien sûr, il y a cette fantastique obscurité. Et l’obscurité est différente dans la lumière de l’espace, et vous essayez de l’appeler noirceur ou obscurité, mais la langue n’a en fait pas de terme pour cela. Cette obscurité a une texture différente, et c’est si réel que vous avez l’impression de pouvoir la toucher, alors que c’est le vide. Mais en fait, ce n’est pas le vide. C’est le cosmos. Il est très énergétique et contient beaucoup de messages, de choses. Il est très riche. J’avais le soleil qui venait derrière moi, et il y avait la lumière du soleil qui éclairait l’obscurité devant moi. Pourtant il n’y a rien là. Je suppose qu’il n’y a rien que l’œil puisse percevoir pour que la lumière revienne, mais il doit bien y avoir quelque chose qui renvoie la lumière dans votre direction parce que l’obscurité est différente de jour ou de nuit.

Vous savez… Je la décris comme un velours. Elle est infiniment flexible. Elle est infiniment multiple. Et elle ne vous résiste en aucune façon. En fait, si, un peu : elle vous résiste assez pour pouvoir être comme si vous pouviez l’atteindre et la toucher. C’est comme un marshmallow noir. C’est comme… Je sais ce que c’est. C’est comme un voile d’eau. C’est comme une eau très fine, sauf que vous percevez presque qu’elle a une température et qu’elle n’est pas mouillée. Et donc, c’est comme si une sorte de milieu était associé à cette obscurité. C’est comme… Si vous deviez vous déplacer à travers elle, ce serait quelque chose. Ce serait quelque chose avec les mains, vous savez, quelque chose que vous pouvez sentir avec les mains. Quelque chose que vous pouvez sentir couler à travers vous, quelque chose qui pourrait être un peu spongieux. »

Story Musgrave regarde par le hublot et il n’y a rien à toucher. Pourtant, dans une forme surprenante de synesthésie, des impressions tactiles d’une matière qui occuperait l’espace vide viennent à lui.

Anish Kapoor dans les limbes

Des artistes ont, par leur imaginaire, exploré ces universels que sont l’infini, le noir et l’apesanteur en se détachant de l’expérience terrestre. Mais eux, d’une part ne sont pas allés dans l’espace, et d’autre part, ne le font pas par les mots. Leur gageure est ailleurs : il s’agit de rééquiper grâce à l’art, par des œuvres ou des spectacles, notre perception de terriens, pour nous faire approcher ainsi, mais en extra-terrestre, l’infini, le noir ou l’apesanteur.https://platform.twitter.com/embed/Tweet.html?creatorScreenName=J_Chevrier&dnt=false&embedId=twitter-widget-0&features=eyJ0ZndfZXhwZXJpbWVudHNfY29va2llX2V4cGlyYXRpb24iOnsiYnVja2V0IjoxMjA5NjAwLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfSwidGZ3X2hvcml6b25fdHdlZXRfZW1iZWRfOTU1NSI6eyJidWNrZXQiOiJodGUiLCJ2ZXJzaW9uIjpudWxsfX0%3D&frame=false&hideCard=false&hideThread=false&id=1032903546126168064&lang=en&origin=https%3A%2F%2Ftheconversation.com%2Fcest-comme-un-marshmallow-noir-decrire-linfini-de-lespace-un-defi-extraterrestre-158814&sessionId=f593f58dcf1b77cfd7f124f76dae453753a11526&siteScreenName=FR_Conversation&theme=light&widgetsVersion=ff2e7cf%3A1618526400629&width=550px

C’est ce que fait, à mes yeux, Anish Kapoor avec Descente dans les limbes (1992). Le dispositif de cette œuvre est très simple : un trou de 2,5m de profondeur avec un diamètre d’environ 1,5 mètre. Son revêtement, un noir aussi idéal que possible à cette époque, ne réfléchit que très peu la lumière visible, et rend ce trou irréel en égarant la perception.

Cette œuvre nous fait percevoir sur Terre, dans la salle d’exposition, un espace hors de la Terre, infiniment noir et aux dimensions indéfinis. Mais qu’est-ce que voir l’infini et le noir, interroge Story Musgrave quand il regarde par le hublot ?

La proximité entre l’œuvre de Anish Kapoor et le décor du film de Dana Ranga est d’ailleurs étonnante. Pour accueillir les propos de Story Musgrave, elle le filme dans un espace étroit, et dans une ambiance qui installe l’obscurité. Presque comme si Story Musgrave se trouvait dans Descente dans les limbes. Story Musgrave en « personne de l’espace » devient une vision onirique et mystérieuse. On pense à la fin du mythique 2001 Odyssée de l’espace de Kubrick (1968) avec cet homme loin de la Terre, perdu dans l’espace et le temps.https://www.youtube.com/embed/hNTC0TK0GbM?wmode=transparent&start=0

La chorégraphe Kitsou Dubois cherche à s’approcher de l’apesanteur comme Story Musgrave. Des danseurs de sa compagnie, depuis 30 ans, s’envolent avec le CNES pour des vols paraboliques. Ils sont en apesanteur pendant une durée trop brève, moins d’une minute par parabole, mais pendant ce temps, leur corps flotte comme celui de Story Musgrave ou de Thomas Pesquet. Dans les vidéos, les danseurs en vol montrent comment ils manipulent la relation au réel d’un corps en mouvement, et comment ils en jouent, ce que décrit aussi Story Musgrave. Le corps, libéré de son poids, quitte le sol et toute surface. Sans contact, il n’y a plus de friction, plus de point d’appui non plus. Mais les danseurs en s’accrochant à la structure de l’avion, peuvent réintroduire à loisir ces éléments, et varier leur interaction avec les surfaces et les objets. Ils nous le montrent.https://www.youtube.com/embed/AXS8P0HksQo?wmode=transparent&start=0

Mais ce que ni Kitsou Dubois, ni Anish Kapoor, ni Story Musgrave ne peuvent montrer, et ce qu’ils peinent à expliquer, ce sont les sensations internes du corps, le comportement des organes, la pression du sang qui monte à la tête. Comment partager par des mots une expérience qui est seulement perçue par un corps dans l’espace ? La science et la médecine les mesurent ; mais les dire, c’est une autre histoire.

Comment le vivant s’adapte dans l’espace

22 jeudi Avr 2021

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  1. Guillemette Gauquelin-KochResponsable des Sciences de la Vie au CNES, Centre national d’études spatiales (CNES)
Centre national d'études spatiales (CNES)

Centre national d’études spatiales (CNES) apporte un financement en tant que membre adhérent de The Conversation FR.

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Jadis, les grands explorateurs, navigateurs, conquérants de l’impossible ont parcouru des distances incroyables au travers des mers et océans, propulsés par leurs progrès techniques. Les terres inexploitées et inexplorées par la civilisation ont de ce fait « disparu » de la surface du globe.

Aujourd’hui, les astronautes s’élèvent dans l’espace et séjournent six mois en orbite de la Terre à bord de la station spatiale internationale, pratiquement libres de toute gravité. Demain, les séjours spatiaux vers la Lune ou Mars pourraient durer plusieurs années. De gros changements pour le corps humain.

En effet, les changements environnementaux dans l’espace sont très importants et modifient durablement le fonctionnement des êtres vivants qui, jusqu’alors, ont évolué lentement pour s’adapter à des modifications environnementales, comme leur milieu ou le climat. La « biologie spatiale » s’applique à comprendre les phénomènes induits par les changements de milieu de vie des explorateurs de l’espace, et un accompagnement est nécessaire pour maîtriser au mieux ses conséquences sur les organismes de nos astronautes.

Les corps sans gravité

La gravité a façonné pendant des millions d’années le monde animal et végétal. Si elle n’existait pas, nous n’aurions pas besoin d’un système cardiovasculaire aussi complexe. Par exemple, le mécanisme de protection qui nous permet de maintenir une circulation cérébrale normale lorsque nous changeons de position rapidement (position allongée à debout notamment) est lié à l’existence de la gravité. C’est l’orthostatisme. Il en est de même pour les systèmes osseux et musculaire, adaptés à la gravité terrestre, car nous passons l’essentiel de notre vie à lutter contre la pesanteur.


À lire aussi : « C’est comme un marshmallow noir » : décrire l’infini de l’espace, un défi extraterrestre


L’ensemble des fonctions physiologiques est abordé en médecine spatiale. Certaines sont particulièrement importantes pour le bien-être et la performance des astronautes, car elles nécessitent une adaptation à l’environnement spatial. C’est par exemple les systèmes cardiovasculaire, musculo-squelettique, neuro-sensoriel, la nutrition, l’énergétique, la radiobiologie et la psychologie. Toutes ces recherches en biologie spatiales ont en fait des applications dans la médecine quotidienne.

La circulation du sang, au cœur des études depuis Laïka

L’absence de gravité, mais aussi le confinement et les radiations cosmiques, ont des retentissements sur la régulation cardiovasculaire.

La chienne Laïka, premier être vivant dans l’espace. RV1864, Flickr, CC BY-NC-SA

Dès le début de la conquête spatiale, on a dû étudier si le cœur et les vaisseaux supportaient un voyage en microgravité. Ainsi, la pression artérielle et la fréquence cardiaque de la chienne Laïka ont été suivies pendant tout son vol en 1947. Ces mesures ont montré que le système cardiovasculaire peut s’adapter relativement bien et de façon paradoxale à cet environnement, car les contraintes qui lui sont imposées sont en fait plus faibles que sur la Terre.

C’est au retour sur Terre que le système cardiovasculaire se trouve désadapté à la gravité. Survient alors un syndrome de déconditionnement cardiovasculaire, provoqué par l’inactivité physique et les transferts de liquides induits par la microgravité. Le syndrome de déconditionnement, rapidement réversible après le retour sur Terre, a été décrit dès 1945 dans un autre contexte, par A. Keys, chez des patients alités de façon prolongée.

De la nécessité de la salle de muscu de l’espace

Le système musculo-squelettique nous permet de marcher et courir « contre la gravité », avec une perception spécifique du mouvement et de l’orientation. Il a été façonné par la gravité constante sur Terre (de valeur 1 g), mais il est évidemment très difficile de faire des expériences qui modifient la valeur ou la direction du champ de gravité… sauf en allant dans l’espace (ou en vol parabolique, mais l’expérience est beaucoup plus courte).https://www.youtube.com/embed/FFMozMtSL3E?wmode=transparent&start=0Thomas Pesquet à bord d’ISS en 2017 présente la salle de sport des astronautes, une des contre-mesures principales mises en œuvre pour lutter contre les troubles musculo-squelettiques.

Tester des individus vivant en gravité modifiée permet donc d’étudier le rôle spécifique de la gravité sur le tissu osseux en particulier. En effet, l’absence de gravité modifie sa masse, sa structure et sa résistance, et le temps nécessaire pour les récupérer est plus long que la durée de la mission.

L’exposition à la microgravité lors d’un vol spatial provoque également une désorientation spatiale, des modifications du schéma corporel et une altération des mouvements du bras et des gestes de précisions. Ces altérations sont dues à l’absence de référentiel gravitationnel fourni par les otolithes, des petits cristaux situés dans l’oreille interne, qui se déplacent quand la tête bouge et modifient ainsi les signaux proprioceptifs, mais qui dysfonctionnent en absence de gravité. Dans l’espace, les astronautes montrent une préférence pour les informations visuelles.


À lire aussi : Et si la gravité disparaissait…


Le vol spatial se traduit aussi par une réduction drastique de l’activité physique, qui peut entraîner le développement de troubles métaboliques, comme l’insulino-résistance ou les dyslipidémies. Leur rôle est de plus en plus évident dans des pathologies liées à la sédentarité au sol : obésité, diabète, hypertension artérielle, ou comme facteur de risque de psychopathologies.

Attention aux rayons cosmiques ! Quelle crème solaire pour les astronautes ?

L’exposition aux radiations ionisantes est l’une des composantes majeures du danger associé à l’exploration spatiale. Les sources de radiations sont bien définies : rayonnements solaire et galactique s’ajoutent aux rayonnements à l’intérieur du vaisseau, puisque celui-ci ne bénéficie pas de la protection de la magnétosphère terrestre. En revanche, les risques biologiques associés à une exposition prolongée à ces radiations restent difficiles à évaluer.

Les particules solaires à l’origine des aurores boréales ne sont qu’un exemple des radiations spatiales auxquelles sont soumises les astronautes. NASA, CC BY-NC

En effet, l’exposition aux radiations spatiales pose des questions complexes d’intérêt scientifique, médical et sociétal qui sont, pour la plupart, identiques à celles posées par le radiodiagnostic. C’est notamment le cas du risque des cancers radio-induits, du phénomène de l’hypersensibilité aux faibles doses de radiation, des effets des doses répétées et de la radiosusceptibilité individuelle aux radiations, qui entraînent des transformations cellulaires.

Psychologie et socialisation : l’humain au-delà de ses mécaniques

Un voyage vers Mars devrait durer plus de 500 jours. Cette nouvelle dimension dans l’espace et le temps doit être prise en compte dans les futurs projets, en se référant au concept de « microsociétés auto-organisées ». Durant les missions interplanétaires, les équipages devront être entièrement autonomes. En particulier, le système de support-vie (recyclage de l’eau, de l’oxygène, du gaz carbonique) pourrait avoir une incidence sur les comportements au fil du temps.

De plus, les perspectives de missions interplanétaires vers la Lune ou Mars orientent les recherches vers de nouveaux facteurs psychologiques, par exemple l’isolement, le confinement et la monotonie, et de nouveaux facteurs sociologiques, comme le genre, la culture, le groupe.

Les contre-mesures, clef de la santé dans l’espace

Dès les premiers vols spatiaux, les agences spatiales internationales ont pris conscience des nombreux effets négatifs de l’environnement sur le corps des astronautes. La conquête de l’espace ne pouvait se faire sans le maintien de la santé des spationautes afin d’assurer leur survie et le succès de la mission. C’est ainsi qu’ont été mis au point des protocoles permettant de prévenir ces altérations physiologiques, que l’on appelle « contre-mesures ». Avec l’entrée des programmes martiens dans la phase exploratoire, qui va imposer des vols de deux ou trois ans, mettre au point des protocoles optimaux de maintien de la santé des astronautes devient une priorité absolue.

Les contre-mesures actuelles sont principalement des contre-mesures d’exercice physique, nutritionnelles ou pharmacologiques. Dernièrement, la vibration, la stimulation électrique, ou encore la centrifugation ont été également développées. Ces contre-mesures sont en général des traitements recommandés aux personnes sur Terre souffrant par exemple d’ostéoporose, d’insuffisance rénale, d’altérations artérielles et veineuses, de sarcopénie, ou d’insulino-résistance. Elles sont tout d’abord testées sur Terre dans des expériences d’alitement prolongé.

La sédentarité, problème de santé publique du XXIᵉ siècle dans l’espace… et sur Terre

Bien que l’espace soit un environnement unique, il existe des parallèles évidents entre les vols spatiaux, le vieillissement et l’immobilisation, mais aussi pour nous sur Terre afin de réduire les effets néfastes de l’inactivité sur la santé en général. L’OMS a depuis longtemps classé la sédentarité parmi les 10 principales causes de mortalité et d’incapacité dans le monde.

Le début du troisième millénaire verra les projets d’exploration du système solaire se multiplier. À la différence des bateaux qui parcouraient les océans avec des équipages, les nouveaux vaisseaux qui traversent l’espace interplanétaire ne sont pas, actuellement, habités par l’homme mais par des robots, ce qui rend les missions beaucoup moins contraignantes.

Finance : ce que la chute du fonds Archegos peut changer

21 mercredi Avr 2021

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  1. Éric PichetProfesseur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School

Kedge Business School

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Le 25 mars dernier, l’ensemble des positions spéculatives du hedge fund était évalué à 50 milliards de dollars. Shutterstock

Vendredi 26 mars 2021, le cours de ViacomCBS, un conglomérat de médias américain, plongeait de 27 %, en même temps que ceux des groupes chinois Tencent Music ou Baidu (le principal moteur de recherche sur Internet chinois).

La cause de ces brutales corrections est rapidement identifiée : des ventes massives d’actions d’un montant total d’environ 20 milliards de dollars par Goldman Sachs (10 milliards), Morgan Stanley (8 milliards) et Deutsche Bank (4 milliards).

Ces ventes, inhabituelles par leur ampleur, ont fait craindre des pertes importantes pour les banques d’investissement, ce qui a déclenché une brève correction des valeurs bancaires dans le monde, sans lendemain sauf pour le Crédit suisse et le japonais Nomura dont les cours ont perdu environ 20 % ces 15 derniers jours.

Un Fonds privé victime de son hubris

Lundi 29 mars, on apprenait qu’il s’agissait de la vente des actions détenues par des prime brokers, ces départements spécialisés des banques d’affaires qui offrent une large gamme de services aux fonds spéculatifs.

Les actions en question, des « collatéraux », constituaient la garantie des positions hautement spéculatives d’Archegos Capital Management (un terme à connotation messianique qui signifie le chef, le prince en grec ancien). Ce Family office, détenant la fortune de Bill Hwang un ancien gérant de hedge funds, était devenu le plus gros actionnaire institutionnel de Viacom début 2021. Les prime brokers garantissaient au fonds une performance de 5 fois à 10 la hausse de l’action sous-jacente.


À lire aussi : Family Office : le monde discret de la gestion de patrimoine des grandes fortunes


Archegos, géré à sa totale discrétion puisque sans client extérieur, a vu son encours passer de 2 milliards de dollars à sa création en 2013 à environ 10 milliards fin 2020 et même 20 milliards en mars 2021 par la magie d’achats à fort effet de levier (endettement pour augmenter la capacité d’investissement) sur des actions technologiques très volatiles.

Le 25 mars, l’ensemble de ses positions spéculatives était évalué à 50 milliards, dont 18 milliards chez Morgan Stanley, 10 milliards chez Goldman Sachs et 10 milliards chez Crédit suisse.

Gérer les pertes de manière concertée

La brutale correction du cours de Viacom, qui a perdu 33 % entre le 22 et le 25 mars, exposait Archegos alors au défaut de paiement. Bill Hwang, réalisant que ses pertes potentielles dépassaient ses actifs, s’est alors décidé, s’inspirant de la sauvegarde du fonds LTCM en septembre 1998, à organiser en urgence, le jeudi 25 mars, une réunion téléphonique avec ses principaux prime brokers (Goldman Sachs, Morgan Stanley et Wells Fargo, UBS et Crédit suisse, MitsubishiUFJ et Nomura) pour tenter une liquidation ordonnée de ses positions et éviter ainsi des ventes massives qui auraient déprimé encore plus les cours et accru ses pertes.

Mais dans l’affaire LTCM, la concertation avait été initiée et supervisée par le régulateur des banques de Wall Street, la Federal Reserve de New York, qui avait su inciter les banques créancières à recapitaliser le fonds pour assurer, avec succès d’ailleurs, le dénouement des positions.

Rien de tel dans les échanges informels du 25 mars qui ont été conclus, selon les médias, par un vague gentlemen agreement entre les contreparties du fonds à gérer en commun la liquidation des positions. Une enquête est d’ailleurs en cours sur ce point à la demande de la Securities and Exchange Commission (SEC) et de la Financial Conduct Authority londonienne.

L’accord a de fait très vite volé en éclat lorsque les banques new-yorkaises ont décidé de vendre leurs positions dès le 25 mars au soir dans des opérations de gré à gré avec des hedge funds (pour Morgan Stanley) puis sur le marché boursier le vendredi 26 mars. La Deustche Bank, qui avait détecté des mouvements importants sur les titres, a également soldé son exposition le 26 mars prenant de court Crédit suisse et Nomura contraintes de vendre au plus bas le lundi 29 mars.

Au terme de ces cessions, il semble qu’Archegos, qui a perdu la totalité de son capital, laisse une ardoise totale de quelque 10 milliards de dollars principalement chez Crédit suisse (4,7) et Nomura (2 milliards).

Des contrôles internes à renforcer

Comme dans l’affaire LTCM, les banques d’affaires, à l’exception notable de JPMorgan Chase qui avait refusé de traiter avec Hwang, n’ont pas scruté avec suffisamment d’attention le CV d’un gérant qui avait dû plaider coupable devant la SEC en 2012, écopant au passage d’une amende de 44 millions dollars et de 5 ans d’interdiction de trading.

Pire, conscient de son passé, mais alléché par les perspectives de plantureuses commissions, Goldman Sachs est finalement passé outre ses réticences initiales.

Les déboires d’Archegos auront coûté près de 5 milliards de dollars au Crédit suisse. Spencer Platt/AFP

Une fois la relation d’affaires établie, le financement des clients institutionnels fait systématiquement l’objet d’un dépôt de garantie (le collatéral) chez le prime broker et d’appels de marge quotidiens (versement supplémentaire pour couvrir une dépréciation). En effet, les procédures internes des banques exigent qu’au premier signal d’alerte, en cas de défaut sur les appels de marge, les positions trop risquées soient soldées.

Ici le mot d’ordre est la réactivité : c’est cette variable clé qui a manqué à Nomura et surtout au Crédit suisse, dont l’affaire Archegos a mis en lumière les défaillances du management des risques.

Extension du domaine de la régulation

Quelles conséquences de l’affaire peut-on anticiper ? Notons d’abord que la chute d’Archegos n’a manifestement pas eu d’impact ni sur la stabilité des marchés financiers ni sur la solvabilité du système bancaire, les moins-values étant absorbées sans difficulté par les banques perdantes.

Elle ne devrait pas remettre en cause non plus le business lucratif des départements de prime brokerage des banques d’investissement qui représente quelque 15 milliards de dollars de revenus par an (dont 4 milliards en Europe).

En revanche, les déboires d’Archegos devraient renforcer la vigilance des clients institutionnels des banques d’investissement et probablement accentuer encore la concentration d’un métier qui restera l’apanage d’une poignée d’acteurs très réactifs et dotés d’une culture sophistiquée des marchés financiers (maîtrisant leur liquidité, leur volatilité, etc.) pour évaluer les positions spéculatives de leurs clients (même si elles ne peuvent pas avoir une vision globale de l’ensemble de leurs positions, les fonds spéculatifs travaillant en général avec plusieurs prime brokers). Elle devrait également inciter les prime brokers à limiter l’effet de levier accordé à leurs clients.

Les régulateurs semblent en revanche d’ores et déjà tentés de durcir la régulation, en particulier sur la transparence des positions susceptibles de déclencher un risque systématique. Les pouvoirs publics devraient notamment demander au Congrès d’amender le Dodd-Franck Act de 2010 qui permet aux fonds spéculatifs d’échapper à la réglementation de la SEC.

Janet Yellen, secrétaire au Trésor des États-Unis. US Department of the Treasury

La secrétaire au Trésor Janet Yellen a d’ailleurs souligné que l’endettement de certains fonds pouvait amplifier les turbulences des marchés lors de sa première réunion du Financial Stability Oversight Council. En outre, le président du comité bancaire du Sénat a, dès le 5 avril, sommé les banques impliquées dans l’affaire Archegos de justifier leurs relations sous 15 jours.

La lutte contre les conflits d’intérêts des prime brokers devrait également être renforcée après la découverte que Morgan Stanley avait participé activement à la levée de 3 milliards dollars d’actions nouvelles pour Viacom, ce qui a contribué à diluer les anciens actionnaires à l’origine de la baisse des cours à compter du 22 mars 2021.

Reste la question fondamentale pour la stabilité financière : les régulateurs parviendront-ils un jour à être correctement informés des positions du « shadow banking », dont les fonds fermés au public et donc non régulés constituent un élément clé ?

Les jeux érotiques de Salammbô et de son python fétiche

21 mercredi Avr 2021

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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  1. Christian-Georges SchwentzelProfesseur d’histoire ancienne, Université de Lorraine
Université de Lorraine
CC BY NDNous croyons à la libre circulation de l’information
Salammbô
Salammbô par Gaston Bussière (1910), Musée des Ursulines, Mâcon. Wikipédia, CC BY

Le célèbre roman de Flaubert, Salammbô, publié en 1862, mêle histoire ancienne et fantasmes. L’auteur, qui avait d’abord penché pour un conte égyptien, qui se serait intitulé Anubis (du nom d’une ancienne divinité pharaonique), n’a pas choisi la facilité. De l’antique Carthage, où il situe son intrigue, ne subsistent ni pyramides, ni grand sphinx, ni momies… L’archéologie carthaginoise, au milieu du XIXe siècle, n’en était qu’à ses débuts. Salammbô n’en connut pas moins un énorme succès que retrace l’exposition « Fureur ! Passion ! Éléphants ! », à l’occasion du bicentenaire de la naissance de Gustave Flaubert.

C’est une exposition itinérante, constituée autour de la figure de Salammbô, qui sera successivement présentée au Musée des Beaux-Arts de Rouen (à partir du 20 mai 2021), au Mucem à Marseille (fin 2021-début 2022), puis au Musée du Bardo à Tunis (du printemps à la fin de l’été 2022).

Trois étapes d’une chaîne qui suivra à peu près le périple que Flaubert lui-même accomplit en 1858, lorsqu’il se rendit en Afrique du Nord, en quête d’informations et de sensations, mais aussi de rêveries et de fantasmes, qui devaient nourrir son projet littéraire.

L’Orient précieux et cruel

Le roman déborde d’or, de pierres précieuses et de tissus splendides. L’accumulation de termes rares et la débauche descriptive y créent un exotisme mystérieux et envoûtant. Cet Ailleurs est aussi un lieu d’expression de la cruauté. Raffinement extrême et barbarie sanglante sont les deux pôles que Flaubert se plaît à réunir.

Il compose des scènes terribles, source de jubilation trouble. Des lions crucifiés, des hommes écrasés par des éléphants, des enfants sacrifiés dans le feu du grand dieu Baal. Un étalage sidérant et jouissif sous la façade de la reconstitution historique et de l’érudition.

Wikipedia
Salammbô par Glauco Cambon (1916).

L’exactitude archéologique n’importe que dans la mesure où elle assure la promotion de descriptions raffinées, parfois scabreuses ou sadiques, dont le but est d’abord de provoquer l’imaginaire du lecteur et de réveiller ses fantasmes. Il ne faut pas prendre Salammbô trop au sérieux. Souvent Flaubert s’amuse. Il peut donc, en janvier 1863, écraser de son mépris ironique les attaques de Wilhelm Frœhner, un savant archéologue du moment :

« Je n’ai, monsieur, nulle prétention à l’archéologie. J’ai donné mon livre pour un roman, sans préface, sans notes, et je m’étonne qu’un homme aussi illustre que vous, par des travaux si considérables, perde ses loisirs à une littérature si légère ! »

Des œuvres dérivées de Salammbô

La puissance évocatrice du roman a donné naissance à toute une série d’œuvres secondaires inspirées de quelques scènes particulièrement marquantes et jouissives.

Il y a, bien sûr, la perte de la virginité de Salammbô dans les bras du Libyen Mâtho que la jeune fille est allée trouver dans le camp des mercenaires (chapitre XI, « Sous la tente »). En 1895, une sculpture de Théodore Rivière montre l’amant de la jeune fille, « à genoux, par terre, devant elle », soupirant « de façon caressante » en étreignant le corps désiré.

Théodore Rivière, Salammbô chez Mathô. Je t’aime ! Je t’aime, 1895.

On pense à Cléopâtre s’offrant à César, selon la description que donne l’auteur antique Plutarque (Vie de César, 54) de la première nuit d’amour entre la reine d’Égypte et le chef romain.

Flaubert établit également un lien avec Judith, l’héroïne biblique, qui rejoint sous sa tente le général Holopherne, ennemi de son peuple, afin de le séduire avant de le décapiter. D’ailleurs, Salammbô, saisie « d’une envie sanguinaire » songe elle aussi, un instant, à tuer Mâtho endormi.

Érotisme torride et serpent sexuel

Gaston Bussière, Salammbô, 1910. Wikimedia

L’autre moment intense qui suscita une importante production artistique est la fameuse danse de Salammbô avec son python « fétiche » (chapitre X, « Le serpent »). Outre la référence biblique à Eve confrontée au reptile tentateur, Flaubert a pu en trouver l’idée dans l’œuvre de Plutarque (Vie d’Alexandre, 2) et de Justin (Histoires philippiques, XI, 11) qui évoquent l’union entre Olympias, mère d’Alexandre le Grand, et Zeus, le grand dieu, incarné sous la forme d’un serpent. « Un serpent d’une grosseur prodigieuse » (serpente ingentis magnitudinis), écrit Justin. L’historien latin Suétone (Vie d’Auguste, 94) rapporte quant à lui une légende racontant que la mère du futur empereur Auguste vit en songe un reptile venu faire l’amour avec elle.

Un tableau de Gaston Bussière (1910) illustre les préliminaires de la danse de Salammbô avec son python lorsque, « la queue collée contre le sol, il se leva tout droit ».

Autre œuvre dérivée du roman, une sculpture de Désiré Maurice Ferrary montre le serpent qui enlace déjà le corps de la jeune fille. Salammbô paraît s’abandonner au plaisir intense que lui procure la caresse du reptile.

L’artiste a probablement voulu traduire dans le marbre l’image mentale suggérée par cette phrase : « Salammbô haletait sous ce poids trop lourd, ses reins pliaient ».

Salammbô par Désiré Maurice Ferrary (1899).

La relation avec le reptile rapproche encore Salammbô de Cléopâtre dont le suicide, par la morsure d’un serpent, a souvent été représenté dans l’art, dès le Moyen Âge, comme un orgasme produit par un reptile phallique. Le contact entre les seins de la reine et le serpent produit un puissant effet érotique. Beauté du corps féminin nu et monstruosité de l’animal, plaisir et mort sont imbriqués.

Mais pour Salammbô, « mourir » sous le poids de son python est métaphorique. Le verbe suggère l’abandon à un plaisir intense qui fait perdre tout contrôle de soi en une pâmoison érotique. Contrairement au suicide de Cléopâtre, on remarque aussi que le reptile ne touche pas les tétons de la Carthaginoise, mais pénètre au creux de ses cuisses : « Elle se sentait mourir ; et du bout de sa queue, il lui battait la cuisse tout doucement ».

La mort de Cléopâtre par Giampetrino (vers 1530), Musée du Louvre, Paris. Wikimedia

Carthage futuriste

Au XXe siècle, le cinéma s’empare à son tour de la figure de Salammbô. Un film muet lui est consacré en 1925 par Pierre Marodon. En 1960, le péplum franco-italien Salammbô de Sergio Grieco s’achève sur un happy end en contradiction totale avec l’œuvre de Flaubert : condamné à mort, Mâtho est finalement sauvé par Hamilcar qui lui accorde la main de sa fille !

Plus étonnant encore, de 1981 à 1986, Philippe Druillet sort (aux éditions Glénat) les trois volumes de son adaptation graphique de Salammbô, d’abord publiée, à partir de 1978, dans le magazine Métal hurlant. Le monde carthaginois s’est métamorphosé en un étrange univers de science-fiction. Toujours un Ailleurs, mais cette fois non ressuscité du passé : la mythique Carthage est projetée dans le futur et sur une autre planète.

Mais, au fond, est-ce si différent ? Sous le masque de l’archéologie, la reconstitution flaubertienne était bien fantaisiste et excessive.

Dans un jeu vidéo tiré de la bande dessinée en 2003 (Salammbô, les périls de Carthage ; en anglais, Battle for Carthage), Salammbô sertie d’étonnants bijoux et revêtue d’extravagantes tenues futuristes demeure conforme à l’image de la femme exotique et sublime.

Salammbô sur la pochette du jeu Battle for Carthage, 2003. Mais où est donc passé son python ? Wikimedia

De Salammbô à Salma Hayek

Sans référence directe à Salammbô, des œuvres de la fin du XXe siècle ont ressuscité la figure érotique de la femme désirable associée à un serpent. Nastassja Kinski se fait photographier par Richard Avedon, en 1981, nue, un reptile enroulé autour de son corps.

L’œuvre, diffusée sous la forme de posters, connut un grand succès et fut souvent imitée.

En 1996, dans le film From Dusk till Dawn, réalisé par Robert Rodriguez (en français, Une Nuit en Enfer), Salma Hayek incarne une danseuse satanique qui tétanise Quentin Tarantino dans le rôle de Richie. De la même manière, l’apparition de la sublime Salammbô, dans les jardins d’Hamilcar, avait échauffé et subjugué l’esprit de Mathô. Quentin Tarantino, qui est aussi l’auteur du scénario, se serait-il inspiré de la Carthaginoise de Flaubert ?

Salma Hayek dans From Dusk till Dawn. Allociné

Christian-Georges Schwentzel a publié « Le Nombril d’Aphrodite, une histoire érotique de l’Antiquité », aux éditions Payot.

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