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Archives Journalières: 15/03/2022

Entre la langue ukrainienne et le russe, une lutte ancienne

15 mardi Mar 2022

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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Auteur

  1. Phillip M. CarterAssociate Professor of Linguistics, Florida International University

Déclaration d’intérêts

Phillip M. Carter ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Une femme tient une pancarte avec les mots « la langue est une arme » écrits en ukrainien lors d’une manifestation en 2020 contre un projet de loi visant à élargir l’utilisation du russe dans l’enseignement public ukrainien. Evgen Kotenko/ Ukrinform/Future Publishing via Getty Images

Quel est le rapport entre l’invasion russe de l’Ukraine et la langue ?

D’après Vladimir Poutine, la politique conduite par les autorités de Kiev promouvant l’utilisation de la langue ukrainienne sont une preuve du « génocide » qui viserait les Russes ethniques dans l’est russophone, et justifie donc en partie l’invasion.

Cette propagande mise à part, un autre élément lie la guerre à la langue : le pouvoir. Bien avant que les premiers coups de feu soient tirés, une lutte de pouvoir s’est jouée dans la région autour des questions linguistiques et, plus précisément, autour de cette interrogation : l’ukrainien est-il ou non une langue à part entière ?

Ni les linguistes professionnels ni les Ukrainiens n’hésitent à considérer l’ukrainien comme une langue distincte – elle est probablement aussi différente du russe que l’espagnol l’est du portugais. Pourtant, les nationalistes russes ont longtemps cherché à la classer comme un dialecte du russe.

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Le statut de langue de pouvoir de la Russie

Il s’avère que classer une variété linguistique donnée comme « une langue » est moins évident qu’on pourrait le croire, et les interprétations populaires de « langue » par rapport à « dialecte » sont généralement fondées sur des critères politiques plutôt que linguistiques. Comme le sociolinguiste Max Weinreich l’a succinctement formulé, « une langue est un dialecte avec une armée et une marine ».

Le russe, la langue de Tolstoï et de Dostoïevski, est l’une des rares langues de pouvoir dans le monde. Aux côtés de langues telles que le mandarin, l’espagnol et l’anglais, le russe est profondément lié à la politique, aux affaires et à la culture populaire mondiales.

Sur les 260 millions de locuteurs du russe, environ 40 % – soit 103 millions – le parlent en tant que deuxième langue, signe que les gens trouvent un intérêt à l’apprendre. C’est une lingua franca en Asie centrale et dans le Caucase, et elle est largement parlée dans les pays baltes. En Ukraine – le plus grand voisin européen de la Russie –, le russe est utilisé par environ un tiers de la population, soit quelque 13 millions de personnes. Le « nombre de locuteurs » n’est cependant pas la caractéristique déterminante d’une langue puissante. Le bengali, par exemple, compte 265 millions de locuteurs, soit plus que le russe, mais la plupart des gens ne se bousculent pas pour l’apprendre.

Le russe, en revanche, est unique parmi les langues slaves en ce sens qu’il est enseigné dans les plus prestigieuses universités d’Europe, d’Asie et des États-Unis. Avec tous ces locuteurs, toute cette influence et toute cette production culturelle, le statut de langue de pouvoir du russe semble aller de soi.

Or ce n’est pas le cas.

Les langues de pouvoir ne tirent pas leur statut de quelque chose d’inhérent au système linguistique, mais plutôt des arrangements historiques du pouvoir qui donnent à leurs locuteurs – et à leur culture – un statut et une valeur perçus.

Le russe a acquis des locuteurs – et éliminé d’autres langues – au cours de sa remarquable histoire d’expansionnisme : les Moscovites, habitants du Grand Duché de Moscou qui a précédé l’Empire russe, se sont déplacés vers l’est et le nord, s’emparant de Kazan et de la Sibérie au cours du XVIe siècle. À la fin du XIXe siècle, les Russes avaient conquis l’Asie centrale, jusqu’à la frontière de la Chine. Après la Seconde Guerre mondiale, l’Union soviétique a étendu sa sphère d’influence à l’Europe de l’Est.

L’Ukraine a fait partie de l’Union soviétique en 1922. Elle a obtenu son indépendance en 1991, lorsque l’Union soviétique a éclaté.

Bien que personne ne sache avec certitude quel est son projet ultime, il semble que Poutine cherche à faire en sorte que tout ou partie de l’Ukraine fasse à nouveau partie de la Russie.

Deux brindilles sur la même branche linguistique

Si le russe est une « langue de pouvoir », qu’en est-il de l’ukrainien ?

Si l’on en croit certains nationalistes russes, l’ukrainien n’est pas du tout une langue. En 1863, le ministre russe de l’Intérieur Piotr Valouev a déclaré qu’« une langue ukrainienne distincte (“petit russe”) n’a jamais existé, n’existe pas et n’existera pas ». Selon une autre citation – attribuée au tsar Nicolas II –, « il n’y a pas de langue ukrainienne, seulement des paysans illettrés qui parlent le petit russe. »

Le tsar Nicolas II niait l’existence de la langue ukrainienne. Hulton Archive/AFP

Mais d’un point de vue historique, l’ukrainien et le russe sont apparus comme des langues distinctes à partir d’une langue source commune parlée vers 500 après J.-C., que les linguistes appellent « protoslave ».

Les langues slaves partagent plus que des similitudes linguistiques grammaticales et phonologiques. Elles ont également une patrie commune, et cette patrie était très probablement l’Ukraine occidentale.

Pour des raisons dont les linguistes, les archéologues et d’autres spécialistes débattent encore, les locuteurs du protoslave se sont dispersés à partir de leur patrie, se déplaçant vers le nord, l’ouest et le sud.

Au fur et à mesure de leurs déplacements, le protoslave a donné naissance aux variétés linguistiques qui sont devenues les langues slaves contemporaines, dont le polonais, le serbe, le russe et l’ukrainien. Au IXe siècle, certains Slaves restés près de chez eux se sont rapprochés des Rus – un groupe composé de Slaves eux-mêmes ou de Scandinaves assimilés – et ont créé la première fédération slave orientale notable, connue sous le nom de Rus de Kiev, située, comme son nom l’indique, à Kiev. La Rus de Kiev peut être considérée comme le prédécesseur des nations ukrainiennes, biélorusses et russes modernes.

Résister au russe

La langue étant devenue un élément clé de l’identité nationale, il n’est pas étonnant que le fait de requalifier l’ukrainien en dialecte du russe fasse partie intégrante de la campagne discursive de Poutine, tout comme ce fut le cas pour le tsar Nicolas II il y a 200 ans. Il s’avère qu’une partie du pouvoir réside dans la capacité à encadrer le discours, et le titre de l’essai de Poutine, Sur l’unité historique des Russes et des Ukrainiens, qu’il a publié en juillet 2021, ne laisse guère de doute quant à sa position. Si tout ce qui est ukrainien – y compris la langue – est simplement un dérivé de tout ce qui est russe, l’invasion ressemble moins à un acte d’agression qu’à une réintégration.

Les Ukrainiens, bien sûr, se hérissent devant cette caractérisation, non pas parce qu’on ne parle pas russe en Ukraine – Volodymyr Zelenskyy est lui-même russophone – mais parce que pour beaucoup, l’identité ukrainienne implique le bilinguisme. De nombreux Ukrainiens parlent à la fois l’ukrainien et le russe et les mélangent même sous une forme que les gens appellent « sourjik » – la version slave orientale du « Spanglish ».

Dans la vie publique ukrainienne, les craintes concernant la primauté du russe ou de l’ukrainien ont déjà conduit à des conflits. En 2020, il y a eu de vifs débats et des protestations à propos d’un projet de loi qui aurait abrogé une disposition exigeant que 80 % de la scolarité se fasse en ukrainien. Une bagarre (physique) a eu lieu en 2012 au Parlement ukrainien à propos d’un projet de loi qui aurait fait du russe une langue officielle, aux côtés de l’ukrainien, dans certaines parties du pays.

Des hommes en costume s’attaquent les uns aux autres
Une rixe éclate au Parlement ukrainien en mai 2012 à propos d’un projet de loi qui aurait adopté le russe comme langue officielle dans certaines parties du pays. Maks Levin/AP

Plus récemment, des rapports montrent que dans l’est de l’Ukraine, certains Ukrainiens russophones abandonnent le russe pour éviter d’utiliser « la langue de l’occupant ».

Bien sûr, des locuteurs du monde entier abandonnent régulièrement leur langue maternelle au profit d’une autre langue, mais cela se fait généralement de manière progressive, généralement en faveur des langues de pouvoir. Sauf dans des circonstances extrêmement contraignantes – un envahisseur extérieur ou la soumission forcée par un groupe dominant –, il est plutôt inhabituel que des locuteurs abandonnent leur langue maternelle du jour au lendemain.

Au Salvador, les locuteurs des langues indigènes lenca et cacapoera l’ont fait dans les années 1930 pour éviter d’être tués par les troupes hispanophones salvadoriennes. Mais en Ukraine, certains locuteurs n’adoptent pas la langue de l’envahisseur, ils l’abandonnent.

L’attaque de Poutine va presque certainement accélérer cette tendance. Si le statut du russe en tant que langue de pouvoir n’était probablement pas affecté, il pourrait commencer à perdre des locuteurs. Et avec toute l’attention portée à l’Ukraine, peut-être le monde en viendra-t-il à l’apprécier comme la patrie slave où les gens semblent préférer parler ukrainien – et non russe

Guerre en Ukraine : 50 ans après, un choc énergétique de l’ampleur des chocs pétroliers

15 mardi Mar 2022

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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Publié: 9 mars 2022, 20:26 CET

Auteur

  1. Patrick CriquiDirecteur de recherche émérite au CNRS, Université Grenoble Alpes (UGA)

Université Grenoble Alpes (UGA) apporte des fonds en tant que membre fondateur de The Conversation FR.

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Le 26 février 2022 à Bordeaux, manifestation de soutien à l’Ukraine. Philippe LOPEZ / AFP

Après la crise du Covid, qui a montré que la sécurité sanitaire avait un coût et que ce coût devait être accepté, il va falloir adopter le même changement de perspective pour la sécurité énergétique. Le monde est devenu plus dangereux.

Il y a dans l’histoire des moments charnières. Le premier choc pétrolier, au début des années 1970, en fut un.

Au moment de la « guerre du Kippour » à l’automne 1973, les pays consommateurs découvrent leur dépendance excessive au pétrole provenant d’une région déstabilisée par le conflit israélo-palestinien. En quelques semaines, le prix du pétrole est multiplié par quatre, et l’Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole décide un embargo pétrolier vers les pays supposés apporter un fort soutien à Israël.

Cet embargo ne sera jamais effectif, mais il déclenchera une panique aux États-Unis et une réponse stratégique dans le « Projet Indépendance » de Richard Nixon. Parmi les conséquences de cette initiative, certaines ne se feront sentir que plusieurs décennies plus tard, mais elles seront majeures, en particulier à travers le développement des hydrocarbures non conventionnels, gaz et pétrole de schiste.

Peu de temps avant ce choc pétrolier de 1973, un article de Foreign Affairs avait averti :

« This time, the wolf is here ».

En ce début 2022 aussi, le loup est dans la bergerie. Et, même si le pire peut être évité, l’invasion de l’Ukraine marquera un nouveau moment charnière.

Jusqu’à maintenant, la question de la dépendance énergétique de l’Europe par rapport à la Russie était présente, mais elle demeurait abstraite et lointaine. Aujourd’hui, elle est devenue vitale. Et la question qui s’impose est : peut-on se passer du gaz, et du pétrole, de la Russie ?

Pour les États-Unis, Joe Biden a décidé d’un embargo sur les hydrocarbures venant de Russie. Mais, avec son pétrole et son gaz de schiste, ce pays a depuis quelques années retrouvé son indépendance énergétique.

La situation est bien plus difficile pour l’Europe qui dépend de la Russie pour 40 % de ses approvisionnements en gaz. En discussion au Sommet de Versailles ce jeudi et vendredi, la réponse européenne sera probablement plus graduelle et s’appuiera plutôt sur des efforts de réduction de la demande et le déploiement de nouvelles sources d’approvisionnement.

Quels sont les risques à court terme pour l’économie globale de l’énergie ? Les conséquences structurelles pour les politiques énergétiques en Europe ? Enfin, quelles sont les voies d’une sortie de crise ?

Impossible d’effacer la Russie de la scène énergétique

L’approvisionnement énergétique mondial s’appuie sur une combinaison de production domestique et d’importations, selon les dotations en ressources de chaque région. Pour les zones structurellement importatrices comme l’Europe, les infrastructures de transport jouent un rôle clé, mais de manière différente pour le pétrole et le gaz naturel. Et, pour le gaz naturel, il faut encore distinguer celui qui est transporté par gazoduc et le gaz naturel liquéfié (GNL), acheminé dans des chaînes de liquéfaction-transport par méthanier-regazéification.

Depuis toujours, on a pu considérer le pétrole comme une « commodité globale », pour laquelle le coût du transport était minime et qui circulait dans un grand bassin unique. Inversement, le commerce international de gaz était directement dépendant de la géographie des gazoducs.

Mais depuis plusieurs années, la montée du GNL a bouleversé la structure des marchés. Ceux-ci offrent aujourd’hui beaucoup plus de souplesse qu’avant dans la gestion des approvisionnements : comme le pétrole, le GNL peut maintenant atteindre différents points de livraison, voir changer de terminal d’arrivée en cours de trajet.

Pour autant, il ne sera pas possible d’effacer rapidement la Russie de la carte des fournisseurs majeurs d’hydrocarbures. Pour une raison simple : la Russie est le deuxième producteur mondial de gaz, derrière les États-Unis et devant l’Iran ; et c’est aussi le troisième producteur mondial de pétrole, après les États-Unis et juste derrière l’Arabie saoudite.

Mais surtout, la Russie est le premier pays exportateur, pour le gaz comme pour le pétrole (dans ce dernier cas, ex aequo avec l’Arabie saoudite).

On comprend alors que l’on ne pourra sortir complètement la Russie du marché. Cela, même si les évolutions des quinze dernières années marquent des changements majeurs sur le marché du gaz : grâce au GNL, le Qatar est devenu un exportateur majeur, grâce au GNL et au gaz de schiste, les États-Unis sont passés du statut d’importateur à celui d’exportateur.

Commerce mondial total en 2020 : 808 Mtep pour le gaz et 1 306 Mtep pour le pétrole. P. Criqui (données Enerdata), CC BY-NC-ND

Certes, l’Agence internationale de l’énergie vient de proposer un plan en 10 points pour réduire, dans l’année, la dépendance de l’Europe par rapport au gaz russe d’un tiers, voire de moitié. À ces dix points, il faut ajouter la possibilité de réduire les consommations d’engrais azotés, dont la fabrication est grande consommatrice de méthane.

Mais il ne s’agit que de réduire la dépendance et pas de la ramener à zéro. Il faudra faire encore, dans le futur proche, avec un certain montant d’importations de gaz ou de pétrole russes.

Des révisions déchirantes pour les politiques de l’énergie en Europe

Dans les années 1990, les trois commissions Delors avaient marqué un tournant dans la politique énergétique européenne, avec l’objectif de la création des marchés uniques de l’électricité et du gaz.

C’est dans cette perspective qu’ont été conçues les différentes Directives européennes sur l’introduction de la concurrence dans ces deux secteurs. Elles ont eu pour principale conséquence de mettre fin aux monopoles historiques et d’ouvrir les marchés à de nouveaux fournisseurs, plus ou moins rapidement selon les États membres.

Elles ont aussi progressivement modifié les mécanismes de fixation des prix sur les marchés de gros. Dès avant la crise ukrainienne, l’instabilité et les hausses de prix du gaz et de l’électricité, consécutives aux à-coups de l’économie dans la crise du Covid, constituaient déjà un problème majeur à résoudre. Aujourd’hui, c’est bien pire encore.

Dans cette perspective historique, on peut considérer que la politique énergétique européenne a toujours été tiraillée entre trois objectifs : des bas prix de l’énergie pour le pouvoir d’achat et la compétitivité ; la sécurité de l’approvisionnement ; la protection de l’environnement et du climat.

Dans le monde idéal de la politique européenne, ces trois objectifs sont parfaitement complémentaires, et même synergiques, à travers l’objectif recherché d’une « énergie propre, sûre et efficace ».

Une rhétorique fondée, mais difficile à mettre en œuvre. Dans la réalité, les contradictions sont fortes lorsque les objectifs sont pris deux à deux :

  • Entre le bas prix de l’énergie pour la compétitivité et la défense de l’environnement par la mise en œuvre d’un prix du carbone dans le marché européen des quotas ou la fiscalité de l’énergie ;
  • Entre le bas prix de l’énergie et la sécurité d’approvisionnement, lorsque l’on est tenté de mobiliser massivement des ressources importées bon marché (le gaz russe) ou lorsqu’il faut développer de coûteuses capacités de réserve et de stockage ;
  • Entre la sécurité d’approvisionnement et l’environnement, lorsque des ressources considérables de charbon existent sur le sol européen (en Pologne et en Allemagne, respectivement dixième et onzième producteurs mondiaux), sans même évoquer la question du gaz de schiste en Europe.
graphe. P. Criqui, CC BY-NC-ND

On ne peut pas dire que jusqu’à aujourd’hui ces contradictions aient été vraiment résolues… en dehors du monde idéal du discours. Tout comme n’a pas été prise en compte la contradiction entre la volatilité des prix, consubstantielle aux mécanismes de marché, et l’impératif de visibilité à long terme, dans un secteur très intensif en investissement comme celui de l’énergie. C’est à une véritable remise à plat qu’appellent la crise du Covid et, a fortiori aujourd’hui, l’invasion de l’Ukraine. Elle doit conduire à une révision du poids relatif des différentes priorités. Un chantier titanesque.

Dernier élément, et non des moindres : la taxonomie européenne. Après d’âpres négociations, la taxonomie européenne pour les investissements verts a pu apparaître, tout d’abord comme le véhicule privilégié pour la transition environnementale en Europe, et ensuite, à travers l’introduction conjointe du nucléaire et du gaz naturel en tant qu’« énergies de transition », comme un point d’équilibre négocié entre les visions française et allemande des trajectoires de décarbonation.

La crise ukrainienne remet en question ce fragile équilibre. Alors que la Belgique, très dépendante du gaz, envisage de réviser sa stratégie de sortie du nucléaire, l’Allemagne hésite encore entre un appel accru au charbon et le report de la fermeture de ses dernières centrales nucléaires. Et au même moment, les attaques russes contre la centrale de Zaporojie rappellent les difficultés du maintien de la sécurité pour les installations nucléaires civiles.

Une nouvelle géopolitique de l’énergie

Une page est tournée et de multiples dimensions des politiques de souveraineté vont devoir être révisées. Tout d’abord il va falloir gérer les conséquences à court et moyen terme de la nouvelle géopolitique du monde. Les incertitudes sur ce point sont absolument considérables et il est impossible de formuler la moindre prédiction, si ce n’est à travers l’élaboration de scénarios contrastés.

Tout au plus peut-on identifier des lignes rouges qui ne seront pas franchies, d’un côté comme de l’autre. Ainsi, et sauf nouvel imprévu catastrophique, il semble exclu que l’approvisionnement énergétique de l’Europe par la Russie soit ramené à zéro, que cette annulation provienne de la Russie elle-même ou au contraire de l’Europe. À court et moyen terme, on ne pourra au mieux que réduire la dépendance.

« Et à long terme, nous serons tous morts », disait John Maynard Keynes. Pourtant, c’est bien en visant cet horizon du long terme mais en accélérant la décarbonation et la sortie des énergies fossiles que l’on pourra remettre en convergence les trois objectifs de la politique européenne. Le paquet climat, dit « Fit for 55 », proposé par la Commission européenne en 2021 constitue une bonne feuille de route pour cette stratégie. Il faut maintenant le mettre en œuvre au plus vite.

Dans cette nouvelle mise en convergence des politiques européennes, il faudra accepter de payer le prix, tant de la sécurité énergétique que de la préservation de l’environnement

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