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Archives Journalières: 30/04/2022

Les oligarques ukrainiens en ordre de bataille face à la Russie

30 samedi Avr 2022

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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Auteur

  1. Paul CruzDoctorant en science politique au Centre Émile Durkheim, Université de Bordeaux

Déclaration d’intérêts

Paul Cruz ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Depuis le début de la guerre, le milliardaire Petro Porochenko, ancien président de l’Ukraine (2014-2019) et adversaire politique de Volodymyr Zelensky, a pris la tête d’une brigade de la défense territoriale. Ici le 26 février à Kiev. Drop of Light/Shutterstock

Des phénomènes politiques uniques en leur genre se sont développés en Ukraine depuis l’accession du pays à l’indépendance en 1991. Le président Volodymyr Zelensky, dont le parcours n’a pas fini de nous interpeller, en est un exemple emblématique. Les oligarques, figures centrales des systèmes politique et économique ukrainiens, en sont un autre. Leur rôle a été prépondérant durant les 30 dernières années, quels que soient les responsables au pouvoir. Qu’en est-il de leur action aujourd’hui, quand leur pays est en proie à la violente attaque russe depuis plus de deux mois ?

Un cas dissemblable de la Russie

Élite économique ayant bâti leur fortune dans le sillage du passage à l’économie de marché au cours des années 1990, les oligarques ont largement joué, durant les 30 dernières années, des liens personnels qu’ils ont tissés avec les acteurs politiques pour servir leurs intérêts économiques.

Leur émergence rappelle celle de leurs homologues russes, qui ont su, sous la présidence Eltsine (1991-1999), tirer profit de l’imperfection des réformes pour s’assurer richesse et influence. Fin février, il était ainsi frappant de voir, comme à travers un miroir, les présidents ukrainien et russe convoquer chacun leurs troupes oligarchiques respectives pour s’assurer de leur soutien dans les heures précédant la guerre.

Le parallèle entre les systèmes oligarchiques ukrainien et russe contemporains s’arrête toutefois à ces deux réunions. Depuis une vingtaine d’années, les oligarques russes ont été mis au pas par Vladimir Poutine, et bien peu d’entre eux osent aujourd’hui grogner contre la guerre menée par le Kremlin, qui dévaste pourtant leurs actifs économiques.

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Au contraire, les oligarques ukrainiens constituent depuis des années des forces autonomes, et ont largement façonné le système politique national en y projetant leurs rivalités d’affaires. Certes clientéliste, celui-ci était caractérisé, avant le bouleversement induit par la guerre, par un indéniable pluralisme.

2014 : les oligarques en première ligne

Les oligarques ukrainiens ont tenu un rôle spécifique face à chacune des agressions du Kremlin sur leur territoire. Toutefois, ce rôle a largement évolué depuis l’annexion de la Crimée et l’apparition des républiques séparatistes du Donbass en 2014.

Appartenant par nature tant au monde politique qu’à celui des affaires, les oligarques ont vu leur double nature poussée à son paroxysme pendant le conflit de 2014, au point qu’ils se sont parfois substitués à des institutions étatiques ébranlées. Face à la déroute de l’armée ukrainienne dans l’Est, les oligarques ont en effet remplacé par leurs réseaux personnels la chaîne administrative, utilisé leurs propres sources de revenus pour financer des missions relevant du régalien et ont occupé le devant de la scène politique.

Au plus fort de la crise, certains de ces hommes d’affaires sont devenus gouverneurs de régions : ainsi, Ihor Kolomoïsky a pris la tête de l’oblast de Dniepropetrovsk (mars 2014–mars 2015) et Serhiy Taruta celle de l’oblast de Donetsk (mars-octobre 2014).

D’autres ont tenu le rôle de négociateurs directs avec les séparatistes ou avec le Kremlin : ce fut notamment le cas de Viktor Medvedtchouk et de Rinat Akhmetov.

Les exemples de leur implication dans les affaires politiques et militaires à cette époque abondent. Il serait difficile de ne pas citer Petro Porochenko, l’une des premières fortunes du pays, élu président en 2014 à la suite de la fuite en Russie de son prédécesseur Viktor Ianoukovitch (2010-2014). À la tête d’un mouvement pro-européen, Petro Porochenko avait alors confié à un autre milliardaire, Iouri Kossiouk, le poste stratégique de chef adjoint de l’administration présidentielle en charge du contrôle des armées.

Son successeur au sommet de l’État, Volodymyr Zelensky, novice en politique avant son élection en 2019, avait durant la campagne présidentielle été présenté par ses adversaires comme une marionnette d’Ihor Kolomoïsky, bien connu, au-delà de son passage au poste de gouverneur de l’obast de Dniepropetrovsk, pour avoir pris en charge le financement des bataillons armés de volontaires venus épauler l’armée ukrainienne dans le Donbass.

Ihor Kolomoïsky avait effectivement mis ses chaînes de télévision au service du candidat Volodymyr Zelensky et, après la victoire de celui-ci, a réussi pendant un pendant un temps à imposer son avocat personnel à la tête de l’administration présidentielle.

« Serviteur de l’oligarque, poupée de l’oligarque » peut-on lire sur cette pancarte montrant Ihor Kolomoïsky derrière le futur président Volodymyr Zelensky, le 8 février 2019. Yuriy Dyachyshyn/AFP

Quand Zelensky tente de « désoligarchiser » l’Ukraine

Après ces épisodes de faste pour le système oligarchique ukrainien, l’année 2020 a constitué un tournant. Volodymyr Zelensky, en poste depuis mai 2019, s’est alors décidé à réduire l’influence de l’ensemble des figures oligarchiques du pays. Les objectifs de cette entreprise étaient pour lui nombreux. Il s’agissait tout autant de tenir ses promesses de lutte contre la corruption, de se libérer de soutiens bien encombrants, de brider des concurrents politiques et de se conformer aux demandes de réformes des bailleurs de fonds internationaux.

Cette « désoligarchisation » s’est traduite par la ratification, en novembre 2021, de la loi sur « l’influence excessive de personnalités économiques ou politiques sur la vie publique (oligarques) » qui vise à encadrer les activités politiques des milliardaires, notamment leur financement des partis. Plus tôt, le Parlement avait voté le le 13 mai 2020 en faveur d’une loi qui empêchait les banques déclarées insolvables ou nationalisées d’être récupérées par leurs précédents propriétaires, et dont la finalité était à ce point destinée à contrecarrer un oligarque en particulier qu’elle est désormais passée à la postérité sous le nom de « loi anti-Kolomoisky ».

L’activisme des autorités ukrainiennes a également eu pour effet de dresser des obstacles sur la route d’oligarques étant ou se rêvant concurrents politiques de Volodymyr Zelensky, comme Petro Porochenko ou Viktor Medvedtchouk. Certains observateurs s’accordent à dire que les procédures légales pour soupçons de trahison lancées en 2021 contre ce dernier, relais plus que notoire de Vladimir Poutine en Ukraine, n’ont pas été sans conséquences sur la dégradation des relations entre Kiev et le Kremlin.

Ces actions ont aussi pu avoir pour effet de détériorer les canaux de communication entre la présidence et les hommes d’affaires. Dans les heures précédant l’invasion, plusieurs sources de presse ont annoncé le départ de nombreux oligarques ukrainiens vers l’étranger. Ces errements ont obligé Volodymyr Zelensky à resserrer les rangs lors de la réunion évoquée au début de cet article.

En 2022, les oligarques acceptent de laisser l’État ukrainien prévaloir

L’entièreté des conclusions sur le rôle précis des oligarques ukrainiens dans ce conflit ne pourra être tirée qu’à la fin de celui-ci. Pour autant, leurs actions pendant cette première phase de la guerre permettent déjà d’esquisser quelques hypothèses.

Huit années après la révolution du Maïdan, les oligarques ukrainiens ont cette fois-ci choisi de soutenir l’État plutôt que de se substituer à son action. Confronté de nouveau à l’invasion de son territoire par la Russie, le gouvernement ukrainien s’est affirmé dans son rôle, laissant moins de marge de manœuvre aux oligarques qu’en 2014.

Au lieu d’endosser des fonctions régaliennes, les plus grandes fortunes d’Ukraine ont cette fois mis leurs ressources au service du gouvernement, contribuant à le renforcer. Ce fut notamment le cas de Rinat Akhmetov, qui a offert une avance sur l’impôt de ses sociétés, de Iouri Kossiouk, qui a fait don de la quasi-totalité de la production agro-alimentaire de son groupe MHP à l’effort de guerre et à des organismes de charité, ou encore de Viktor Pintchouk, qui a fourni à l’armée du matériel destiné à la construction de fortifications antichars via son groupe industriel Interpipe.

Une deuxième conclusion se dessine aussi clairement. Mis à part quelques acteurs isolés comme le pro-russe Viktor Medvedtchouk, interpellé le 13 avril, les acteurs du système oligarchique se caractérisent cette fois par la grande homogénéité de leur jeu vis-à-vis du Kremlin. Tous font preuve d’unité pour soutenir la résistance ukrainienne et condamnent sans réserve l’invasion russe.

Illustration de l’ironie d’un patriotisme ukrainien renforcé involontairement par Vladimir Poutine, même les oligarques ukrainiens qui soutenaient par le passé l’idée d’une relation renforcée avec le Kremlin lui ont désormais tourné le dos. C’est le cas d’acteurs importants comme Rinat Akhmetov, mais aussi de figures moins connues comme les époux Oleksandre et Galina Gerega, bénéficiaires du groupe de distribution Epicentr, qui ont annoncé mettre la totalité de leur flotte de véhicules à disposition de l’armée ukrainienne. Oleksandre Gerega avait siégé au Parlement ukrainien de 2012 à 2014 sous l’étiquette du Parti des Régions de Viktor Ianoukovitch, et s’en était détaché quelques jours avant la destitution de ce dernier.

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Cette évolution des rapports avec l’État n’invalide pas l’existence du système oligarchique ukrainien, mais révèle sa grande capacité d’adaptation plastique. Aujourd’hui, comme en 2014 et comme pendant la crise du Covid, le gouvernement puise chez les oligarques les ressources et le soutien susceptible de l’aider à traverser les épisodes de crise les plus intenses.

Interrogé début mars 2022 sur le processus de désoligarchisation, Volodymyr Zelensky a laconiquement répondu que celui-ci avait été initié « dans une autre vie ». Une vie qu’a essayé d’interrompre l’invasion lancée par Vladimir Poutine le 24 février dernier, et dont il faut espérer et favoriser le retour.

Et si le chromosome Y n’avait pas évolué comme prévu ?

30 samedi Avr 2022

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Publié: 24 avril 2022, 22:28 CEST

Auteurs

  1. Thomas LenormandResearch director, Université de Montpellier
  2. Denis RozeChercheur en génétique évolutive, Sorbonne Université

Déclaration d’intérêts

Thomas Lenormand a reçu des financements de l’ANR, l’ERC, l’Université de Montpellier

Denis Roze a reçu des financements de l’ANR.

nds en tant que membre fondateur de The Conversation FR.

Université de Montpellier apporte un financement en tant que membre adhérent de The Conversation FR.

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C’est une des données de la génétique la plus connue : les femmes sont XX et les hommes XY. Chez les humains, les chromosomes déterminent le sexe, et cette paire particulière, la 23e, est la plus étonnante. C’est la seule paire de chromosomes où deux versions présentant d’énormes différences coexistent. Au point qu’il est même difficile de reconnaître dans cette paire deux chromosomes ancestralement très proches, mais qui, au fil de millions d’années d’évolution, sont devenus méconnaissables.

Pourquoi les chromosomes sexuels ont-ils évolué pour devenir si singuliers ? Cette question taraude les généticiens depuis près d’un siècle. Plusieurs hypothèses ont été proposées au cours du temps, et une théorie s’est peu à peu consolidée. Pourtant, cette longue construction théorique vient d’être chamboulée par un nouveau modèle qui remet en cause cet édifice.

La dichotomie X-Y

Schéma des deux chromosomes X et Y. X est plus grand avec quatre bras bien dessinés (en forme de X, en somme). Y est plus petit, avec des bras dissymétriques
Ancestralement semblables, les chromosomes X et Y sont devenus très différents. NIH/Flickr, CC BY-NC

Le X est un chromosome assez banal, avec près de 800 gènes codant pour des protéines. Le Y, lui, est nettement plus étrange : plus petit (environ un tiers de la longueur du X), il ne lui reste environ qu’une soixantaine de gènes. Ces deux chromosomes forment toutefois bien une « paire ». Lors de la fabrication des spermatozoïdes, ils s’apparient et recombinent sur une petite portion (la recombinaison est un échange de matériel génétique, ici entre les deux chromosomes d’une même paire), témoignant de leur homologie ancestrale. Mais 95 % du Y ne recombine plus du tout. Le X, lui recombine sur toute sa longueur chez les femelles XX lors de la fabrication des ovules.

Enfin, autre bizarrerie, un seul X est exprimé chez les femelles. C’est-à-dire que les gènes sont lus pour donner des protéines à partir d’un seul X, soit celui hérité du père, soit celui hérité de la mère, aléatoirement selon les cellules. Cela permet une « compensation de dosage », afin que les gènes portés sur le X soient exprimés à un même niveau chez les mâles et les femelles.

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Des différences largement répandues dans le vivant

On pourrait penser que ces excentricités sont propres à l’humain. Il n’en est rien : elles sont en fait extrêmement répandues chez les animaux, et même les plantes, même si les détails varient.

Mais, de manière très régulière, on observe un arrêt de recombinaison sur les chromosomes sexuels, un chromosome non-recombinant (Y) qui comporte peu de gènes fonctionnels (il est « dégénéré »), ainsi qu’une compensation de dosage.

Ces régularités sont vite tombées dans l’œil des généticiens, qui se sont mis à rechercher une théorie expliquant pourquoi la recombinaison s’arrête sur ces chromosomes, et pourquoi cet arrêt de recombinaison est associé à une dégénérescence. Ces mêmes généticiens se sont également vite rendu compte que répondre à cette question permettrait peut-être aussi de lever le voile sur une question générale qui les taraudait encore davantage : le rôle de la recombinaison dans l’évolution.

Le rôle de la recombinaison

La recombinaison, lors de la fabrication des gamètes, permet un « brassage » génétique. C’est une caractéristique essentielle de la reproduction sexuée, et sans doute le facteur clé expliquant l’avantage du sexe par rapport à la reproduction asexuée clonale. La dégénérescence des chromosomes sexuels non recombinants semble être une preuve grandeur nature de l’importance de la recombinaison pour maintenir l’intégrité des génomes, face au flux constant de mutations délétères altérant l’information génétique.

En effet, la plupart des chromosomes portent des mutations, qui peuvent être transmises d’une génération à l’autre lorsque leur effet sur la survie ou la fécondité des organismes n’est pas trop important. La version exempte de mutation d’un fragment de chromosome peut être assez rare au sein d’une population, et peut même disparaître si les individus la portant ne laissent pas de descendants. Lorsque cela arrive, un fragment exempt de mutation ne pourra être recréé que par recombinaison entre chromosomes portant des mutations à des endroits différents. Du fait de ce processus, on s’attend à ce que les zones non-recombinantes des chromosomes accumulent peu à peu des mutations.

L’absence de recombinaison pourrait donc expliquer la dégénérescence du Y. Mais cela ne résout pas entièrement la question : pourquoi diable les chromosomes sexuels s’arrêtent-ils de recombiner si cet arrêt mène à une dégénérescence ?

La théorie des gènes « sexe-antagonistes »

Jusqu’à nos travaux, cela était expliqué par la théorie des gènes « sexe-antagonistes ». Les mâles et les femelles diffèrent pour de nombreux caractères : c’est le dimorphisme sexuel. Pour de nombreux gènes, il y a donc des versions (des « allèles ») qui sont avantageuses pour un sexe et désavantageuses pour l’autre.

Deux petits oiseaux posés sur des branchages ; le mâle a un plumage dans les tons bleu vif, blanc et noir, la femelle a des tons bruns et blanc
Dimorphisme sexuel chez le Mérion superbe : le mâle est à gauche, la femelle à droite. benjamint444/Wikimedia, CC BY-SA

Si ces gènes « sexe-antagonistes » sont fréquents, on peut s’attendre à en trouver sur les chromosomes sexuels. Supprimer la recombinaison (et donc l’échange d’allèles entre les chromosomes X et Y) peut alors devenir avantageux. Si un allèle avantageux chez les mâles se retrouve sur un Y qui ne recombine plus, il restera sur ce Y : il se trouvera toujours chez les mâles mais jamais chez les femelles.

Une théorie globale de l’évolution des chromosomes sexuels en trois étapes s’est ainsi imposée. L’étape 1 est l’arrêt de recombinaison sur le Y, causé par la présence de gènes sexe-antagoniste sur les chromosomes sexuels. L’étape 2 est l’accumulation de mutations délétères (la dégénérescence), consécutive à l’arrêt de recombinaison. L’étape 3 est l’évolution de la compensation de dosage pour compenser le déficit d’expression des gènes du X chez les mâles.

Cette théorie avait l’avantage d’être très élégante, car très générale. Pourtant, plusieurs observations ultérieures ont remis peu à peu en cause cet édifice, et ont réouvert le débat théorique.

Une nouvelle théorie

Pour cela, nous sommes partis des seuls « ingrédients » qui paraissent indispensables pour expliquer l’évolution des chromosomes sexuels : des évènements d’arrêt de recombinaison sur le Y (mais qui ne sont pas irréversibles), des mutations délétères (la dégénérescence ne peut avoir lieu sans elles), et des régulateurs de l’expression des gènes qui peuvent moduler leurs niveaux d’expressions (la compensation de dosage ne peut avoir lieu sans eux).

À notre grande surprise, ces ingrédients, et notamment le dernier qui n’avait jamais été formellement intégré dans la théorie classique, se sont avérés suffisants. Notre recherche a mis au jour un processus global entièrement différent de la théorie « classique », où l’ensemble des relations de causalité est inversé, et les gènes « sexe-antagonistes » deviennent inutiles.

Théorie classique : arrêt de la recombinaison, dégénerescence, compensation de dosage. Nouvelle théorie : compensation de dosage, arrêt de la recombinaison, dégénerescence
Notre nouvelle théorie inverse les relations de causalité. Thomas Lenormand, Fourni par l’auteur

Comme la théorie classique, cette nouvelle théorie suppose une situation ancestrale dans laquelle un gène porté par une paire de chromosomes « normaux » (des autosomes) détermine le sexe des individus. Deux formes différentes de ce gène (ou allèles, qu’on notera M et F) coexistent, les individus MF se développant en mâles et les individus FF en femelles.

On suppose ensuite que des inversions chromosomiques peuvent se produire : une inversion correspond à un « retournement » d’une partie du chromosome, les gènes situés dans cette partie se retrouvant alors dans un ordre inversé. Ces inversions correspondent à une forme de mutation assez rare, mais se produisant néanmoins de temps en temps au sein des populations. Elles ont pour effet d’empêcher (au niveau de l’inversion) la recombinaison entre chromosomes inversés et non-inversés. En effet, l’ordre différent des gènes empêche l’appariement correct des chromosomes dans cette zone.

Lorsqu’une inversion englobant l’allèle M (déterminant le sexe mâle) se produit, celle-ci peut être avantagée si les gènes qu’elle contient portent moins de mutations délétères que la moyenne. Dans ce cas, elle va augmenter en fréquence au cours des générations, jusqu’à ce que tous les individus mâles portent cette inversion. De ce fait, les chromosomes portant les allèles F et M deviennent des « proto-chromosomes » X et Y, ne recombinant plus sur une partie de leur longueur (dans la zone de l’inversion).

Cependant, l’arrêt de la recombinaison cause, à terme, une accumulation de mutations délétères sur le chromosome portant l’allèle M (celui portant l’allèle F continuant à recombiner chez les femelles). Cette accumulation de mutations peut favoriser soit un retour à la recombinaison (par exemple, par une nouvelle inversion chromosomique restaurant l’ordre initial des gènes), soit une réduction de l’expression des gènes mutés portés par le proto-Y, qui sera compensée par une augmentation de l’expression des gènes du proto-X : c’est le début de la compensation de dosage. Lorsque celle-ci se met en place suffisamment vite, elle empêche tout retour en arrière : une restauration de la recombinaison aura pour effet de détruire cet équilibre délicat entre les niveaux d’expression des gènes du X et du Y.

Les simulations informatiques que nous avons réalisées montrent ainsi un arrêt progressif de la recombinaison, par « strates » successives correspondant à différentes inversions stabilisées par l’évolution de la compensation de dosage, sans qu’il y ait besoin d’invoquer l’existence de gènes à effet sexe-antagoniste.

En renouvelant entièrement notre vision des scénarios possibles d’évolution des chromosomes sexuels, cette nouvelle théorie ouvre un vaste champ d’expérimentations et de tests empiriques. Elle montre également l’importance de prendre en compte les mécanismes de régulation de l’expression des gènes dans la théorie de l’évolution. Finalement, elle pourrait suggérer que prendre en compte l’évolution des régulateurs pourrait être une des clés pour résoudre le mystère du maintien de la reproduction sexuée chez les plantes et les animaux.

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