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Archives Journalières: 01/09/2022

Mineurs trans : pourquoi leur prise en charge est aussi controversée

01 jeudi Sep 2022

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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auteurs

  1. Anna C. ZielinskaMCF en philosophie morale, philosophie politique et philosophie du droit, membre des Archives Henri-Poincaré, Université de Lorraine
  2. Arnaud AlessandrinSociologue, Université de Bordeaux

Déclaration d’intérêts

Anna C. Zielinska est membre du Comité Scientifique de la DILCRAH.

Arnaud Alessandrin est membre du Comité Scientifique de la DILCRAH.

Partenaires

Université de Lorraine apporte des fonds en tant que membre fondateur de The Conversation FR.

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Femme non-binaire se prenant en photo.
Femme trans non-binaire se prenant en photo. Pour de nombreux mineurs trans l’accompagnement médical et psychologique demeure compliqué du fait de différents biais sociétaux. Zackary Drucke/The Gender Spectrum Collection, CC BY-NC-ND

L’annonce récente de la fermeture imminente de la Tavistock Gender Identity Development Service à Londres, accompagnant des personnes mineures souffrant de la dysphorie de genre – la souffrance des personnes dont l’identité de genre ne correspond pas au sexe qui leur a été assigné à la naissance – s’est fait dans une atmosphère hautement polémique. Cette fermeture met aussi en jeu des questions médicales, sociales et politiques faisant aujourd’hui débat notamment en France.

Il faut commencer par souligner la spécificité de la structure de la clinique Tavistock à Londres. Au Royaume-Uni, l’offre d’accompagnement s’adressant aux mineurs trans est très centralisée, puisque le Tavistock Gender Identity Development Service reste aujourd’hui la seule institution (de santé publique, NHS) qui permettait aux jeunes d’accéder aux bloquants hormonaux. Il s’agit des médicaments qui inhibent la production des hormones sexuelles et de ce fait suspendent la puberté chez les enfants et les adolescents – ils font en sorte que le corps de l’enfant est moins vécu comme son ennemi, et cela sans intervention chirurgicale.

Il en est tout à fait autrement en France où, pour un grand nombre de besoins médicaux, des centres spécialisés sont répartis à travers le territoire. Les services de changement de genre ne font pas exception (notons qu’en France non plus on ne propose pas d’interventions chirurgicales aux mineurs).

Une fermeture médiatique

Le centre Gender Identity Development Service (GIDS) est donc le seul (présent sur trois sites, à Londres, Leeds et Bristol) proposant l’accompagnement des jeunes trans, ce qui l’a fragilisé, étant donné la forte hausse des demandes.

La fréquentation a cru de façon exponentielle : entre 2011 et 2021 le nombre de mineurs suivis est multiplié par 20. En conséquence, les services proposés par le centre se sont détériorés. On commence à le voir à travers les articles de presse dès 2018. En 2021, un rapport d’une commission publique notait que les listes d’attente pour les jeunes étaient devenues trop longues et qu’il était nécessaire d’y remédier.

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Réduction idéologique

En parallèle, en 2019, la médiatisation d’une plainte met un coup de projecteur inattendu sur la clinique Tavistock de Londres. La plaignante, Keira Bell, accuse alors le service de lui avoir donné des bloqueurs de puberté trop précocement, et gagne en première instance. Cette dénonciation s’inscrit dans une mise en accusation plus large.

La critique des milieux conservateurs britanniques insiste alors sur les difficultés d’appréciation des conséquences d’une hormonothérapie ou d’un blocage des hormones de la part des personnes mineures.

Les critiques stipulent en même temps que ce qui est exprimé par les jeunes constitue un événement passager dans la vie de l’enfant, une « manifestation subite de dysphorie de genre » (rapid-onset gender dysphoria), un sentiment superficiel que le genre assigné ne correspond pas à l’identité de la personne, dû à l’influence sociale d’un groupe ou à des troubles psychiques.Kids on the Edge : The Gender Clinic.

L’existence même de ce phénomène est toutefois hautement controversée. Cette réduction idéologique de la dysphorie de genre à la manifestation d’un autre phénomène psychique est en opposition aux décennies de recherches sur les transidentités.

En 2021, la cour d’appel de Londres finit par donner raison à la clinique Tavistock contre Keira Bell. Selon les juges, les actes médicaux prodigués ne contrevenaient pas au droit et les juges n’étaient pas compétents pour juger ce cas.

La clinique devra toutefois fermer ses portes en 2023. Le NHS a pris cette décision guidé notamment par un rapport rédigé par la pédiatre Hilary Cass, qui a confirmé que le service était sous « pression insoutenable », où les attentes des patients ne peuvent pas être satisfaites, et où l’atmosphère autour de la clinique créée par certains médias fait que le personnel ne reste pas, ce qui détériore davantage la qualité des soins.

Faire évoluer le parcours de soin face à des besoins qui évoluent

La leçon fondamentale du rapport Cass est épistémologique – le texte constate l’échec d’un modèle où les transitions se font dans un centre spécialisé et prône la décentralisation des soins. L’accompagnement des personnes en transition va se faire désormais plus près de leur lieu de résidence et en contact avec leurs médecins traitants.

Les débats entre les chercheurs et les soignants autour de cette clinique et sa fermeture ne doivent pas être interprétés comme un succès par les militants opposés à la médicalisation des demandes de transition chez les mineurs. Il s’agit d’une évolution normale des stratégies de soin et d’accompagnement face à des besoins jusque là inconnus.

Les discussions sur ces mêmes thèmes ont également lieu dans d’autres pays, selon le modèle similaire : une surmédiatisation des rares témoignages des personnes qui regrettent la transition dans la presse conservatrice. On l’observe dans plusieurs journaux : le Daily Mail, le New York Post, Le Figaro…

La lecture des rapports en Suède et en Finlande montre toutefois le constat partagé de la même difficulté, qui a conduit à repenser les stratégies d’accompagnement des mineurs : leurs besoins médicaux doivent être examinés et traités ensemble. Cette idée a été d’ailleurs réitérée par Hilary Cass dans un commentaire publié le 18 août 2022.

Un climat clivant

Le climat qui entoure ces débats en France n’est pas non plus apaisé. Des pétitions (au moins deux en France mais aussi en Belgique) et des contre-pétitions se succèdent, appuyées par des institutions de mieux en mieux structurées.

D’un côté, des associations comme GrandirTrans mettent en avant le mieux-être des enfants suivis hormonalement par des structures hospitalières et des professionnels compétents et soutiennent les demandes de reconnaissance de cette population.

De l’autre, des groupes comme l’Observatoire de la petite sirène ou le collectif Ypomoni soutiennent l’idée d’une « contagion sociale » et d’un surdiagnostic des variances de genre chez les mineurs. Pour ces militantes et militants, les jeunes trans ainsi diagnostiqués sont soumis à des regrets ultérieurs du fait d’une impossibilité fondamentale à pouvoir maîtriser les conséquences de la médicalisation qui leur est proposée.

Les idées défendues par ces derniers, loin d’être à contre-courant comme elles se présentent, sont pour certaines promues et financées par des organisations internationales liées à l’extrémisme religieux et à l’opposition aux droits humains à la santé reproductive, comme le signale le rapport récent du Forum parlementaire européen pour les droits sexuels et reproductifs (EPF). Elles vont aussi à l’encontre de la Recommandation du Comité des Ministres aux États membres de l’Union européenne « sur des mesures visant à combattre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre » (CM/Rec(2010)5, ch. VII, § 33).

Comment distinguer dans ces débats ce qui est scientifique de ce qui est idéologique ? Depuis quelques dizaines d’années, les réflexions sur l’identité de genre se défont progressivement du regard social normatif, pour penser et accompagner la diversité. La terminologie continue à évoluer, et les institutions européennes proposent depuis longtemps des recommandations sensibilisant aux discrimination.

Plusieurs éléments de réponses peuvent cependant être apportés pour nourrir le débat en s’appuyant sur des précédents et des évolutions sociétales importantes.

Des arguments à modérer et à contextualiser

Une première inquiétude, récurrente, est celle de l’âge. A quel âge une intervention endocrinienne – une prise d’hormones – peut-elle être consentie ? C’est du côté de la psychanalyse que les publications d’essais sont les plus virulentes et que la thèse de l’impossible consentement des mineurs prend forme. On s’est pourtant déjà posé cette question pour la contraception et en traitant différemment les aptitudes à consentir d’une même population sur un sujet similaire, nous finissons par nous engager dans un traitement subjectif et non éthique du problème.

Il est nécessaire d’évoquer ici la « capacité Gillick » (Gillick competence) qui est, dans le droit de santé anglo-saxon (britannique et australien), la notion permettant de trancher si une personne de moins de 16 ans est capable de consentir à son propre traitement médical.

Il s’agit d’une évaluation fait au cas par cas par le médecin qui cherche à savoir si la jeune personne comprend les implications soit de l’utilisation des moyens de contraception, soit de sa propre vaccination (quand les parents s’y opposent), soit enfin de la prise de médicaments hormonaux. Cette capacité était reconnue à Keira Bell par la cour d’appel en 2021.

La deuxième inquiétude concerne le caractère irréversible des traitements proposés, même dans le contexte des médicaments seuls, sans chirurgie. En effet, les inhibiteurs d’hormones peuvent notamment limiter la croissance de jeunes patients. Mais la littérature internationale met en balance, comme toujours en médecine, le bénéfice psychique de ces traitements, face aux risques afférents, comme les pratiques et pensées suicidaires.

Troisièmement, peut-on parler vraiment d’un phénomène d’influence sociale et donc de surdiagnostic qui en découle ? Les jeunes (trans) seraient alors influencés par des modèles et des discours – et au fond, les jeunes trans seraient principalement des personnes homosexuelles si on ne leur proposait pas l’option de la transidentité. Cependant, le lien entre homosexualité et transidentité a été définitivement rompu depuis 1953, et la multiplicité des expériences des personnes trans fait qu’il aurait été difficile aujourd’hui de prétendre de trouver une explication causale essentialiste.

Enfin, un dernier point de tension apparaît, conséquence des précédents : le risque de regret à la majorité de l’enfant. Là encore, les connaissances cumulées déterminent les regrets opératoires aux alentours de 1 %. Si ces 1 % méritent évidemment un accompagnement adéquat, ce chiffre, comparé aux regrets liés à d’autres procédures médicales, reste très inférieur.

Un « principe de précaution » éthique ?

Ceux qui s’opposent à l’accompagnement médical des jeunes trans évoquent souvent le « principe de précaution », une formule qui à leurs yeux a le pouvoir d’arrêter toute action en vertu de l’absence de certitude absolue quant aux conséquences de l’action en cause. Il s’agit d’un procédé rhétorique certes impressionnant, mais pas forcément valide. Ce principe a déjà montré ses limites, tant dans sa définition maladroite que dans son application. Les sciences du vivant, et de l’humain en particulier, avancent de façon différente que les sciences fondamentales.

L’accompagnement que la société décide de garantir aux personnes trans n’est pas informé uniquement par les sciences fondamentales, dont les résultats se présentent comme indépendants des facteurs sociaux. La manière dont la sphère publique s’en empare contribue à la formation du problème, et peut provoquer un sentiment d’inadéquation, de rejet, de détestation de soi. Il est impossible de ne pas inclure cette variable dans toutes les discussions.

Essayons donc de comprendre les raisons exactes de l’imperfection des stratégies d’accompagnement existantes, en prêtant oreille aux témoignages venant des sources différentes et en s’appuyant sur le savoir de celles et de ceux donc l’expertise dans le domaine est reconnue.

Mikhaïl Gorbatchev, figure emblématique et tragique de la fin de l’URSS

01 jeudi Sep 2022

Posted by mirmandepatrimoines in Uncategorized

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auteur

  1. Matthew SussexFellow, Strategic and Defence Studies Centre, Australian National University

Déclaration d’intérêts

Matthew Sussex a reçu des financements de l’Australian Research Council, de la Carnegie Foundation, du Lowy Institute et de diverses agences gouvernementales australiennes.

Partenaires

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Photo encadrée de Mikhaïl Gorbatchev
Mikhaïl Gorbatchev, dont on voit ici le portrait couvert d’un bandeau de deuil affiché dans les locaux de la Fondation qui porte son nom à Moscou, est mort le 31 août 2022. Alexander Nemenov/AFP

 

Peu de dirigeants mondiaux auront joué un rôle historique plus important et, aussi, plus tragique que Mikhaïl Serguéevitch Gorbatchev, décédé ce 30 août à l’âge de 91 ans.

Il y a une sorte de logique dans le fait que le dernier dirigeant de l’URSS ait probablement été le seul à être doté d’une vraie humanité. Et il est assez glaçant de constater que Gorbatchev disparaît à un moment où la répression politique dans sa Russie natale est redevenue étouffante et où le spectre du conflit armé en Europe, qui a longtemps plané sur la région pendant la guerre froide, est devenu réalité.

Durant ses années au pouvoir, Gorbatchev a justement cherché à réduire aussi bien le degré de répression politique que les risques de guerre. Il a contribué à l’ouverture de la société soviétique, encourageant l’espoir de changement et le débat alors que ses prédécesseurs faisaient tout pour étouffer l’un comme l’autre. Il a tenté de revitaliser l’URSS, qu’il voyait rejoindre la « Maison européenne commune » au cours du siècle à venir, dont il annonçait qu’il s’agirait d’un « siècle de paix ».

Les réalisations de Gorbatchev

Parmi les nombreuses réalisations de Gorbatchev, la négociation avec les États-Unis de traités de réduction des armements tient une place à part. Ces pourparlers se déroulèrent lors de plusieurs sommets avec le président américain Ronald Reagan. Quand en octobre 1986, à Reykjavik, il déclara à Reagan que les États-Unis et l’URSS devraient éliminer les armes nucléaires, il a pris de court l’ensemble de l’establishment américain de politique étrangère qui, au départ, ne voyait en lui qu’une version plus jeune des gérontocrates auxquels il avait succédé.

Quelques mois plus tôt, après avoir hésité dans un premier temps, il avait admis la réalité et l’ampleur de la catastrophe de Tchernobyl, tout en étant parfaitement conscient que reconnaître la portée de la tragédie l’affaiblirait tant sur le plan intérieur qu’extérieur. En 1988, il a unilatéralement réduit les forces du Pacte de Varsovie en Europe, sans attendre un accord réciproque avec les pays de l’OTAN.

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Au début de son mandat, il a établi une bonne relation personnelle avec la première ministre britannique Margaret Thatcher, qui a confié à la BBC qu’il était un homme avec lequel l’Occident pouvait faire affaire. Il a retiré les forces soviétiques d’Afghanistan en 1988-1989, et a admis que leur présence dans ce pays constituait une violation du droit international.

Il a refusé d’intervenir dans de nombreuses manifestations spontanées visant à renverser les dirigeants communistes en place dans les pays du Pacte de Varsovie, et fait pression sur ceux-ci pour qu’ils n’utilisent pas la force contre leurs propres citoyens.

Surtout, il a été le principal architecte d’un grand projet visant à ranimer l’économie de l’Union soviétique (par la « perestroïka », ou restructuration), sa société (par la « glasnost », c’est-à-dire l’ouverture) et sa politique (« demokratizatsia », démocratisation).

Une carrière linéaire

Son ascension dans les rangs de la « nomenklatura » ne laissait pas nécessairement présager que, une fois parvenu au sommet du pouvoir, défendrait un programme aussi radical. Né en 1931, fils de paysans de Stavropol – une région touchée de manière cataclysmique par la collectivisation forcée de l’agriculture –, le futur premier secrétaire a suivi une voie toute tracée pour devenir influent dans la politique soviétique.

Il rejoint le Komsomol (la ligue de jeunesse du Parti communiste) et est admis à la faculté de droit à l’université d’État de Moscou. Après être devenu premier secrétaire de Stavropol, puis chef de la section régionale du parti, il commence à cultiver une image de réformateur modéré, offrant des primes et des lopins de terre privés aux cultivateurs et éleveurs méritants qui dépassaient les normes de production agricole fixées par les autorités.

Cette photo d’archive publiée en 1990 montre Mikhaïl Gorbatchev prononçant un discours lors d’un rassemblement local à Stavropol dans les années 1970. Vladimir Velenouri/Scanpix Sweden/AFP

Sa carrière politique aurait pu en rester là. Mais comme de nombreux membres de l’élite politique à avoir réussi, il a bénéficié de protections haut placées, en l’occurrence de la part du principal idéologue du PCUS, Mikhaïl Souslov, et du chef du KGB, Iouri Andropov, les deux hommes voyant en lui un jeune responsable à grand potentiel – profil d’autant plus précieux que la direction soviétique apparaissait de plus en plus sclérosée.

Se positionnant comme un adversaire déterminé de la corruption, Gorbatchev est promu au Comité central du Parti, puis au Politburo, le principal organe de décision de l’URSS. En 1982, à la mort du secrétaire général du PCUS Léonid Brejnev, en poste depuis 1964, Andropov prend les rênes et offre à Gorbatchev un contrôle croissant sur l’économie. Ce dernier devient dans les faits la deuxième personnalité la plus puissante de la scène politique soviétique, et s’empare du poste de secrétaire général en 1985, à la suite du décès d’Andropov un an plus tôt, suivi de celui de son successeur Konstantin Tchernenko.

L’homme de l’effondrement

Bien que Gorbatchev ait été vénéré à l’Ouest comme l’homme qui a mis fin à la guerre froide, il a été presque tout aussi vilipendé dans son pays, vu par bon nombre de ses concitoyens comme un dirigeant stupide qui a provoqué ce qu’il n’avait même pas prévu : l’effondrement de l’URSS. L’Europe et les États-Unis se souviendront surtout de lui comme d’un grand artisan de la paix ; pour les Russes, il aura personnifié l’instabilité et le déclin.

Avec Ronald Reagan lors du fameux sommet de Reykjavik en octobre 1986. Mike Sargent/AFP

Lorsque les dominos communistes d’Europe de l’Est sont tombés en 1989, avec pour point culminant la chute du mur de Berlin en novembre et la défection d’une grande partie de la main-d’œuvre de Berlin-Est vers l’Ouest pratiquement du jour au lendemain, l’URSS a perdu son empire. Elle était également en train de perdre son idée nationale unificatrice.

La principale raison en est que les réformes sociales de Gorbatchev ont été couronnées de succès tandis que ses réformes économiques, elles, se sont soldées par un échec cuisant. La perestroïka n’a fait que révéler la profonde inefficacité et la corruption galopante de l’économie planifiée soviétique. Le « programme d’accélération économique » initial a abouti à l’élaboration du fameux « plan de 500 jours » destiné à transformer en un an et demi une économie planifiée en économie de marché. Pour faire passer ses réformes, Gorbatchev s’est appuyé sur un groupe de jeunes technocrates, alors même que de nombreux membres de la vieille garde restaient à des postes de direction.

Les campagnes de lutte contre l’alcoolisme qu’il a lancées lui valurent le sobriquet méprisant de « Secrétaire aux eaux minérales », et les goûts dispendieux de sa femme Raïssa en matière de vêtements occidentaux suscitèrent la colère populaire. Le fossé entre les performances économiques de l’État et la capacité du peuple à les critiquer se creuse.

Mikhaïl et Raïssa Gorbatchev à Moscou le 18 mars 1990. Il est élu ce jour-là président de l’URSS par le Congrès des députés du peuple, mais sa popularité est déjà en berne. Vitaly Armand/AFP

Gorbatchev se rend compte un peu trop tard que l’Union est en train de craquer. En 1990, année où il reçoit le prix Nobel de la paix, il envoie l’armée réprimer les troubles à Bakou et ordonne un blocus de la Lituanie qui vient de voter pour son indépendance.

Le putsch et l’effacement

Alors que Gorbatchev a de plus en plus de mal à maintenir l’URSS en vie, la vieille garde soviétique lance un coup d’État en août 1991, et l’assigne en résidence surveillée dans sa villa de Foros, une station balnéaire de la mer Noire. Boris Eltsine, le président de la Fédération de Russie, devient alors le visage de la résistance, imitant Lénine en montant sur un char et exigeant la libération de Gorbatchev ainsi que des élections libres et équitables. L’armée russe refuse de tirer sur la foule des manifestants ; le coup d’État échoue.

Gorbatchev rentre à Moscou politiquement très affaibli. Il démissionne dès le 24 août de son poste de secrétaire général du PCUS, puis, le 25 décembre, de son poste de président (créé en 1990), devenu caduc après que les parties constitutives de l’URSS ont négocié la fin du traité de l’Union et le début de leur propre souveraineté. En tant que président de la Russie, principale composante de l’Union soviétique, Eltsine héritera du siège de l’URSS au Conseil de sécurité des Nations unies et, un peu plus tard, de la totalité de son arsenal nucléaire.

Gorbatchev se présente à l’élection présidentielle russe de 1996, mais n’obtiendra que 0,5 % des suffrages. Il écrira des livres et des Mémoires. Dans les dernières années de sa vie, alors qu’il se faisait de moins en moins présent dans la vie publique, il en est venu à exprimer ses regrets sur la façon dont l’histoire s’était déroulée. Au départ, il a loué la capacité de Vladimir Poutine (devenu président en 2000) à unir la Russie, mais, comme l’a révélé en 2022 le journaliste russe Alexeï Venediktov, il a été amèrement déçu par le fait que Poutine avait détruit tout ce qu’il avait tenté de créer.

Dans une boutique de Moscou, le 16 décembre 2018. Vasily Maximov/AFP

En fin de compte, la tragédie de Gorbatchev aura résidé dans sa foi injustifiée dans l’économie soviétique et dans le fait qu’il a pris le désir d’autodétermination nationale de la population de l’URSS pour une manifestation de volonté de revitaliser l’idée soviétique.

Pourtant, sa foi dans un progrès éclairé et sa volonté de prendre des risques pour y parvenir contrastent fortement avec la caricature à laquelle ressemble la Russie d’aujourd’hui. L’humanisme cher à Gorbatchev, aussi imparfait fût-il, n’a pas sa place dans la Russie de Vladimir Poutine.

À l’instar d’autres réformateurs tragiques de l’histoire, le principal héritage de Gorbatchev est donc de nous rappeler ce qui aurait pu être, plutôt que ce qui s’est produit.

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