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Archives Mensuelles: octobre 2022

Ces comédies de Molière qu’on étudie encore et toujours à l’école/

31 lundi Oct 2022

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  1. Isabelle Calleja-RoqueChercheuse en didactique de la littérature, Université Grenoble Alpes (UGA)

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Isabelle Calleja-Roque ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Une scène du Bourgeois Gentilhomme, par William Powell Frith WilPublic domain, via Wikimedia Commons

*

« Au voleur ! Au voleur ! À l’assassin ! Au meurtrier ! Justice, juste ciel ! Je suis perdu, je suis assassiné, on m’a coupé la gorge, on m’a dérobé mon argent » : composée en 1668, la célèbre tirade de L’Avare résonne encore dans des théâtres du monde entier. Et dans les classes des collèges.

Dans les manuels scolaires du XXIe siècle, Molière est en effet toujours très présent, et les pièces qu’on fait lire aux élèves demeurent en grande partie celles qui étaient étudiées par les générations précédentes. Au-delà de L’Avare, les parents retrouvent ainsi dans les classeurs de leurs enfants collégiens des cours sur Les Fourberies de Scapin, Le Médecin malgré lui, Le Malade imaginaire, ou encore Le Bourgeois gentilhomme pour le collège.

Au lycée, ce sont plutôt des textes de L’École des femmes, Dom Juan, Le Misanthrope, ou du Tartuffe qui sont proposés. Pourquoi étudie-t-on encore et toujours ces comédies en cours de lettres ? Retour sur la scolarisation de ces comédies et son histoire.

Un corpus assez stable

Depuis les premiers programmes scolaires, rédigés en 1803, Molière est présenté comme une figure incontournable de la littérature française. Jusqu’en 1880, seules trois pièces y sont présentées : Le Misanthrope, L’Avare et Les Femmes savantes et leur étude, de 1880 à la fin du siècle, se renforce. Mais, c’est aussi au cours de cette période, alors qu’en 1880, Jules Ferry est au pouvoir, que le français comme discipline se développe au lycée.


À lire aussi : Comment l’école a façonné notre image de Molière


Dans ce cadre, le panel d’œuvres de Molière pris en considération s’ouvre de façon manifeste. Trois nouvelles comédies entrent alors dans le répertoire des classes : Le Tartuffe, Le Malade imaginaire et Le Bourgeois gentilhomme. En 1900, le corpus canonique des œuvres de Molière est donc constitué de six pièces. Trois d’entre elles sont manifestement réservées aux grandes classes : Le Misanthrope, Le Tartuffe et Les Femmes savantes. Les trois autres sont les comédies que l’école républicaine estime être les mieux adaptées à la formation des jeunes élèves.

Si ce n’est l’introduction des Précieuses ridicules, en 1941, sous le gouvernement de l’État français, c’est surtout dans le dernier quart du XXe siècle que le corpus va s’étendre à de nouvelles pièces. Cette ouverture qui débute à la fin des années 1970, peut certainement être mise en lien avec l’impact que le film Molière d’Ariane Mnouchkine, sorti sur les écrans en 1978, va avoir sur le grand public.Extrait du Molière d’Ariane Mnouchkine (Théâtre du Soleil).

La nouveauté réside d’abord dans l’introduction de la farce dans les petites classes du collège. En 1977, Le Médecin malgré lui et Les Fourberies de Scapin entrent respectivement en sixième et en cinquième. Les textes officiels de 2008 confirment l’ouverture du corpus farcesque avec l’apparition de nouveaux titres en classe de sixième, comme Le Médecin volant, Le Sicilien ou l’Amour peintre, L’Amour médecin.

En ce qui concerne le lycée, les programmes de 1987 introduisent L’École des femmes. Parmi les pièces étudiées actuellement, seule Dom Juan n’a jamais été officiellement inscrite aux programmes alors qu’elle recueille tous les suffrages des auteurs des manuels du second cycle depuis les années 1980. Longtemps mise au purgatoire, elle est aujourd’hui l’objet de toutes les attentions.

Relecture des personnages

Qu’en est-il de la fortune de ces comédies ? Leur mobilisation est-elle la même au fur et à mesure que les années passent ? Si l’on excepte Les Femmes savantes, les autres comédies ne cessent d’être remises en avant dans les manuels. Seule cette pièce, victime d’une lecture axiologique trop restrictive, témoigne d’un retour de fortune. Son héroïne Henriette, considérée par l’école républicaine comme l’égérie de la femme française, focalise pendant des décennies toutes les lectures et l’exploitation de la pièce se sclérose dans cette image de la femme idéale.

La comédie ne résistera pas à la révolution féministe des années 1980 détrônée par l’ingénue Agnès de L’École des femmes, plus en phase avec les valeurs d’une société qui prône l’égalité des sexes. La disparition des Femmes savantes dans les manuels témoigne ainsi du lien étroit qui unit la littérature scolaire à la société. Elle reflète les changements sociaux qu’opère le dernier quart du XXe siècle.

Les textes littéraires ne sont désormais plus considérés comme les garants d’une éducation morale ; ils s’inscrivent plutôt dans une tradition humaniste, une culture ouverte, libératrice, qui se doit d’être le reflet de la société de son temps.

Le Malade imaginaire vu par Honoré Daumier. Philadelphia Museum of Art, Public domain, via Wikimedia

En ce qui concerne l’analyse des pièces, elle varie peu au cours des temps. C’est toujours en tant que critique sociale et/ou morale qu’une comédie de Molière est appréhendée. On constate aussi que les ouvrages scolaires ont souvent modélisé la lecture qui en est faite. Ainsi, les anthologies ont fait du Bourgeois gentilhomme l’archétype de la comédie-ballet et du Médecin malgré lui celui de la satire de la médecine.

En règle générale, ce sont toujours les mêmes morceaux choisis qui sont sélectionnés, et ce, depuis plus d’un siècle. Par exemple, c’est toujours la première scène de l’acte I du Misanthrope qui constitue le morceau privilégié des anthologies du second cycle pour illustrer les caractéristiques de la scène d’exposition.

C’est surtout dans l’approche du personnage et non dans la lecture globale de la pièce que l’on peut constater des évolutions. À chaque époque correspond sa vision des « héros » moliéresques.

Ainsi, Harpagon est exploité pendant longtemps comme un contre-exemple à proposer à la jeunesse pour ancrer les sacro-saintes valeurs de la famille. Jusqu’au milieu du XXe siècle, dans une perspective axiologique, c’est son côté odieux et inquiétant qui intéresse les auteurs des manuels. La lecture s’inverse ensuite en donnant à lire avant tout le personnage comme un rôle comique.

L’exemple de Dom Juan est, lui aussi, très révélateur. Jusque dans les années 1970, on le stigmatise en contre-exemple et on condamne le « grand méchant homme ». À partir des années 1980, la tendance s’inverse et les manuels interrogent la complexité du personnage qui incarne la volonté de puissance de l’être humain, un désir forcené et désabusé de liberté qui fascine.

L’angle de la représentation théâtrale

La modification du regard institutionnel sur la visée de l’enseignement de la littérature à l’école n’est cependant pas la seule explication à cette modification du point de vue sur l’analyse des personnages. Elle va de pair avec l’importance accrue, depuis le début du XXIe siècle, de l’étude du théâtre en lien avec la représentation.« L’Avare » à la Comédie Française, en 2000 (INA Culture).

C’est l’intérêt de plus en plus croissant porté au travail du plateau qui permet le renouvellement dans les manuels de la lecture du personnage moliéresque. En effet, c’est souvent dans la confrontation des mises en scène d’une pièce à différentes époques que se situe la richesse de l’analyse d’une comédie de Molière. Cette constatation illustre le fait qu’aujourd’hui, la lecture scolaire d’une pièce de Molière ne peut être dissociée de ce qui en fait une œuvre théâtrale.

La lecture du théâtre de Molière passe toujours par le prisme du penseur par le rire mais l’image du dramaturge est celle d’un artiste complet. Aux côtés de mises en scène classiques, on montre aux élèves des choix scénographiques qui transposent les comédies de Molière dans un autre univers que celui de sa création initiale. Par ces photographies, le texte de Molière entre en résonance avec le monde d’aujourd’hui.

Ainsi, dans les manuels, depuis plus d’un siècle, les mêmes comédies demeurent toujours très présentes ; mais, elles ne peuvent être accessibles à la jeunesse que si elles sont actualisées par des photographies de mises en scène qui permettent aux adolescents de comprendre que la lecture de Molière est toujours d’actualité parce qu’il nous parle de problèmes qui nous concernent encore.

Décentralisation : la gouvernance des collectivités locales est-elle assez fiable ?

31 lundi Oct 2022

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  1. Michel AlbouyProfesseur émérite de finance, Grenoble École de Management (GEM)

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Michel Albouy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Mairie de Serres-Castet, dans les Pyrénées-Atlantiques
En juillet dernier, le Sénat a présenté un rapport préconisant d’élargir les compétences des régions, départements et communes (Ici, mairie de Serres-Castet, dans les Pyrénées-Atlantiques). Marcel Roblin/Wikimedia commons, CC BY-SA

La cause semble entendue : il faut décentraliser la République ! C’est ainsi que Gérard Larcher, le président du Sénat, a déclaré « Le temps de l’hypercentralisation est révolu » le 2 juillet 2022 lors de la présentation d’un rapport regroupant 50 propositions « pour le plein exercice des libertés locales » élaboré par tous les groupes politiques du Sénat. C’est dire si la décentralisation est appelée des vœux de tous les élus représentant les collectivités locales.

Pour le président du Sénat, la forte abstention des dernières élections municipales relève d’un « mal plus profond et plus ancien » :

« Nos compatriotes réclament moins de discours, moins de bureaucratie, plus de proximité […] Seul un nouvel équilibre des pouvoirs entre l’État et les collectivités territoriales me semble permettre de restaurer la confiance et de donner un nouvel élan à notre pays […]. Nous voulons donner aux collectivités la pleine et entière responsabilité de compétences qu’elles nous paraissent pouvoir mieux exercer que l’État, parce qu’elles sont en proximité, parce que leur exercice pourra être plus souple et plus réactif. »

L’idée est donc de donner aux collectivités de nouvelles compétences concernant l’emploi, la santé et l’écologie. Pourquoi pas ? Mais avant de valider un tel constat (qui reste à démontrer) et de telles demandes, il convient de s’interroger sur la gouvernance des collectivités locales. Dans quelle mesure cette gouvernance est-elle exemplaire ? Dans quelle mesure est-elle mieux à même que l’État d’assurer ces nouvelles missions et surtout dans quelle mesure est-elle est plus démocratique ?

Une gouvernance bien différente des entreprises

Bien sûr, les collectivités locales, et au premier chef les communes, sont en proximité avec la population. Mais si cela est vrai des communes, est-ce le cas des départements et de régions ? On peut en douter. Pour la plupart de nos concitoyens, les compétences des départements et des régions restent floues. C’est d’ailleurs pourquoi les électeurs votent davantage pour les municipales que pour les élections régionales ou législatives.

Si les rapports en faveur de plus de décentralisation sont nombreux, rares sont ceux qui s’interrogent sur la gouvernance effective des collectivités locales. Alors que l’exécutif de l’État doit composer avec l’Assemblée nationale et le Sénat pour valider ses propositions de loi, rien de tel avec un exécutif régional, départemental ou municipal. Il leur suffit de faire approuver par leur majorité au sein de leurs conseils les délibérations qu’ils veulent faire appliquer.

Le cas des communes est particulièrement exemplaire. Le système électoral pour les communes a été construit afin de donner à la liste gagnante sortie des urnes une solide majorité de façon à assurer la stabilité de l’exécutif local. C’est ainsi que, dans les communes de plus de 1000 habitants, la liste gagnante obtient 50 % des sièges des conseillers municipaux et que le reste des sièges est réparti au prorata des voix obtenues par toutes les listes. Concrètement, si au second tour de l’élection il ne reste que deux listes, la liste gagnante qui a obtenu, par exemple 60 % des voix, rafle 50 % des sièges plus 60 % des sièges restants, soit au total 80 % (50 % + 30 %). La minorité s’en sort avec 20 % alors qu’elle avait obtenu 40 % des suffrages. C’est donc une forte distorsion dans la représentativité des élus municipaux qui va s’instaurer.

Ainsi, tant que le maire a la confiance de sa majorité il va pouvoir faire voter toutes les délibérations qu’il souhaite, même un budget non sincère. L’opposition aura beau demander des débats contradictoires, faire des amendements et manifester rien ne changera : le maire aura gain de cause, et cela pendant six ans. Hormis ses électeurs en vue du prochain scrutin, il ne devra en outre de comptes à personne, sauf à la trésorerie et à la préfecture pour des aspects purement administratifs. Le seul risque réel pour le maire est donc de voir sa majorité se fracturer, aussi il est important pour lui de soigner sa cohésion.

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Au total, le maire va pouvoir diriger sa commune sans contre-pouvoir réel. On est ici bien loin de la gouvernance des entreprises privées avec leurs conseils d’administration, voire de surveillance, avec des représentants des actionnaires. En effet, ces derniers sont relativement indépendants car ils n’ont pas été élus sur la liste conduite par le PDG (comme pour le maire) et qu’ils ont également des comptes à rendre à leurs mandants.

Le précédent des « emprunts toxiques »

Ces dernières années, la gestion des 36 000 communes de France a connu quelques ratés spectaculaires. Le cas des « emprunts toxiques » est à cet égard exemplaire. Dans les années 2004-2008, plus de 850 collectivités locales ont souscrit à des emprunts qui se sont avérés être des emprunts toxiques. Or, non seulement les élus savaient ce qu’ils faisaient – contrairement à ce qu’ils ont affirmé régulièrement – mais plus les élus savaient, plus ils signaient.

Dans un article publié en 2016, nous montrions à partir de l’expérience de la métropole grenobloise comment les élus responsables avaient fourvoyé leurs collectivités avec de tels montages financiers. Comme de très nombreuses collectivités locales, la métropole grenobloise a pu sortir de la nasse des emprunts toxiques grâce à l’appui de l’État, via le Fonds de soutien (SFIL). Mais outre que cette sortie a été très coûteuse financièrement, elle a eu également un coût politique.


À lire aussi : Emprunts toxiques : entre ignorance et petits calculs



À lire aussi : Emprunts toxiques : la douloureuse sortie de la Métropole grenobloise


Autre exemple emblématique : la région Poitou-Charentes qui sous la présidence de Ségolène Royal a souscrit pour près de 200 millions d’euros d’emprunts devenus toxiques, dont 47 millions à très haut risque, selon le cabinet EY. On pourrait malheureusement citer bien d’autres exemples de la mauvaise gestion financière de ces collectivités.

Si on peut comprendre les élus des collectivités demandant davantage de compétences et de responsabilités afin d’élargir leurs pouvoirs, on peut néanmoins s’interroger si « un nouvel équilibre des pouvoirs entre l’État et les collectivités territoriales permettra de restaurer la confiance et de donner un nouvel élan à notre pays », pour reprendre les mots du président du Sénat. À tout le moins, si cela devait se faire il conviendrait de revoir sérieusement la gouvernance des collectivités locales.

Pourquoi l’écriture doit-elle s’apprendre en classe ?

30 dimanche Oct 2022

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  1. Véronique MagniantDoctorante Université de Bordeaux au LABE3D, Université de Bordeaux

Déclaration d’intérêts

Véronique Magniant ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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En classe, l’élève peut observer ce que font ses camarades et demander directement conseil à l’enseignant. Shutterstock

La scolarité des élèves a été perturbée dans le monde entier par la crise du Covid-19. En France, l’enseignement à distance imposé par les situations de confinement a ainsi accru les inégalités scolaires liées aux origines sociales des enfants et adolescents. Au-delà de la fracture numérique relative aux conditions matérielles d’équipement, les différences dans les usages du langage, à l’oral et plus encore à l’écrit, ont mis à mal la possibilité d’une continuité pédagogique pour les enfants issus des milieux les plus populaires.

Entrainements, révisions, exercices : ces activités à distance préconisées par le ministère de l’Éducation nationale, possibles avec des élèves suffisamment âgés, peuvent prendre appui sur l’expérience commune développée en classe avec les enseignants, ou sur les compétences des parents dans certains cas. En classe de CP en revanche, avec des élèves de six ans, qui ne savent pas encore lire et écrire, comment entrainer à l’écriture en dehors de la classe lorsque les enfants n’en maîtrisent pas les bases ? D’autant plus dans le cas où les parents ne lisent pas couramment le français ?


À lire aussi : « Les Héritiers » : ce que Bourdieu et Passeron nous ont appris de l’inégalité des chances


Les deux mois de confinement du printemps 2020 ont rappelé la complexité de l’écriture et des usages : l’écrit comporte de nombreuses composantes, matérielles, graphiques, langagières. Si l’on souhaite une vraie équité entre enfants de milieux socio-culturels différents, celles-ci doivent toutes être enseignées par un adulte expert.

Enseigner, étayer l’apprentissage de l’écriture nécessite de vraies compétences professionnelles : des façons de dire et de faire, des façons de montrer et d’aborder les savoirs, que les sciences de l’éducation, en s’inspirant du champ de l’ergonomie, appellent les « gestes professionnels ».

Rebondir sur l’erreur

Les outils numériques proposés par le ministère de l’Éducation (environnement numérique de travail, boîtes mail académiques, padlets divers) impliquaient un usage de l’écrit inhibant pour certains parents, ne maîtrisant pas bien ses codes langagiers ou ses normes orthographiques. L’utilisation de chaines YouTube créées pour l’occasion ou d’applications comme WhatsApp a permis d’être au plus proche de leur quotidien et de garder le langage oral comme moyen de communication malgré la distance.

Pour autant, de nombreux obstacles se sont posés à l’apprentissage de l’écriture dès lors que les classes ont cessé de réunir entre leurs murs les enfants qui s’y côtoyaient habituellement.

L’un des plus grands malentendus sur l’école et sur les attentes des enseignants concernant l’écriture est que, très tôt, dès les premières années d’apprentissage, les enfants devraient maîtriser la graphie et l’orthographe. Ainsi, souvent, les écrits des élèves pendant le confinement étaient gommés, corrigés voire réécrits par un adulte avant d’être envoyés au maître ou à la maîtresse d’école. Or en faisant disparaître les erreurs, on efface le lieu exact où l’enseignement doit se concentrer, et on empêche l’apprentissage.


À lire aussi : Covid-19, ce que la continuité pédagogique nous apprend de l’école


La façon de traiter les erreurs est en effet un geste professionnel fondamental qui sert les apprentissages de élèves. Apprendre à écrire un texte nécessite de se tromper, de comprendre les raisons de l’échec grâce à un adulte qui explicitera les façons de dépasser les obstacles, les procédures pour y arriver : faut-il prononcer le mot pour pouvoir l’écrire ? Faut-il le connaître par cœur ? Ce qui est écrit permet-il à un lecteur tiers de comprendre ce qu’on souhaitait exprimer ? Qu’est-ce qui est correct, qu’est-ce qui est incomplet ou erroné dans l’essai produit ?

Il faut que l’enfant soit intimement convaincu de l’importance d’une tâche scolaire pour maintenir ses efforts. Shutterstock

À lire aussi : Estime de soi et difficultés scolaires, un cercle vicieux ?


Si certains l’avaient oublié, le confinement a rappelé une évidence : la classe est un endroit où les individus, enseignants et apprenants, partagent l’espace, le matériel, la position des corps et des objets. L’entrée dans l’univers écrit est marqué par l’apprentissage de l’usage des supports de l’écrit et de ses outils : cahiers, feuilles, livres, lignes, crayon de papier ou de couleur, stylo.

En classe, l’enfant de six ans apprivoise ce nouveau lexique, étayé par les gestes professionnels de l’enseignant ou de l’enseignante qui aidera à sortir le bon cahier, ouvrir à la bonne page, isoler la ligne, puis qui reformulera les consignes, veillera à ce que le crayon soit bien taillé ou le stylo de la bonne couleur.

La co-présence des corps permet d’enseigner au mieux à tracer une lettre, à faire observer la main adulte qui trace et écouter les indications verbales. Même avec un support audio et vidéo, les entraînements donnent des résultats hétérogènes, selon l’accompagnement des familles, selon le degré d’appropriation de l’élève des habitudes de classe, qui ne sont pas encore créées pour tous en cours d’année de CP.

Entrainement à l’écriture de la lettre B, avec utilisation d’un support vidéo : production d’Alice à gauche et Dozan à droite. Fourni par l’auteur

Entouré de ses pairs et de l’enseignant, l’élève se met petit à petit à parler un langage scolaire, il peut mobiliser d’autres outils.

Comment mémoriser le fait que les lettres C et H placées côte à côte se prononcent « ch » comme dans « chat » ? Sur les murs de la classe de CP, les affichages phonologiques sont des aides visuelles qui permettent d’associer un dessin de « chat » aux deux lettres CH, tracées en script et cursive, et le langage verbal et corporel de l’enseignant explicite la façon de les utiliser, par des mots et par des gestes qui pointent, qui focalisent l’attention.

Apprendre avec ses pairs, de ses pairs

L’une des plus grandes richesses de l’école réside dans le fait de pouvoir apprendre avec de nombreux autres individus du même âge. Les camarades de classe ont un rôle fondamental dans l’apprentissage de l’écriture, puisqu’on écrit pour être lu. La relation aux savoirs est symétrique à celles des camarades, tout le monde tâtonne, trace, se trompe inévitablement, ce qui permet de désacraliser les erreurs et d’apprendre en commentant, argumentant, proposant des solutions. Encore faut-il que l’enseignant fasse naitre ces échanges, en gardant comme cap les savoirs visés.

Des recherches menées en didactique montrent l’importance du « feedback » dans le processus d’apprentissage de l’outil culturel complexe et très puissant qu’est l’écriture. Comment l’enfant peut-il construire des repères, se situer dans la longue appropriation de cet outil, être sûr de ce qu’il sait déjà, afin de s’appuyer dessus pour continuer de conquérir l’écriture ? Les retours langagiers, verbaux ou corporels mais toujours explicites, sont des gestes professionnels que les enseignants cultivent dans leur propre pratique et développent du même fait chez leurs élèves. Les ateliers et chantiers d’écriture permettent les apprentissages chez les élèves plus grands, de 10 à 12 ans.

L’écriture manuscrite n’est pas une simple habitude culturelle, c’est aussi un outil clé d’apprentissage de la lecture. Shutterstock

À lire aussi : « In extenso » : Pourquoi apprend-on encore à écrire à la main ?


Mais dès le CP également, les mots ou petits textes produits par les enfants peuvent être donnés à lire aux camarades : la classe essaie d’en comprendre les idées, fait état de ce qui a été écrit et qui n’est pas lisible, pas déchiffrable, pas compréhensible. Ce dispositif d’enseignement de l’écriture et de la relecture, assorti des gestes professionnels de l’enseignant, s’inscrit dans la tradition du pédagogue Célestin Freinet, qui voyait l’éducation comme un moyen d’émancipation et accordait une place centrale aux écrits d’élèves.

L’enfant scripteur peut ainsi mettre son écrit à distance, apprendre à se relire en voyant son essai à travers les yeux des autres. Il reconnaît ses erreurs et ses réussites dans celle des autres. Lorsque l’enfant ne le fait pas ou pas consciemment, c’est alors à l’enseignant de le pointer, de l’expliciter. Tout ce langage oral, créé autour des écrits d’enfants, tâtonnant et progressivement devenant plus assuré, est source d’apprentissage et d’évolution.

Enseigner l’écriture dans toute sa complexité

Car la difficulté d’enseigner à écrire ou à lire réside en la complexité même de l’écrit. Cette complexité saute aux yeux de l’adulte qui essaie de faire écrire un enfant de six ans : à cet âge-là, l’enfant ne sait pas toujours tracer les lettres dans le bon sens, les lier les unes aux autres.

Parfois, il ne tient pas encore bien son stylo, ne sait pas quoi faire lorsqu’il n’y a plus de place sur la ligne. Il n’a pas toujours compris le principe alphabétique, le fait que chaque son que l’on prononce peut se traduire par une ou plusieurs lettres. Il sait encore moins que de nombreux mots, en français, ne peuvent pas s’écrire en écoutant les sons qui le composent, car trop irréguliers : on peut écouter « caravane » pour l’écrire, mais pas « aujourd’hui », qu’il faudra connaître par cœur.


À lire aussi : Pourquoi l’acquisition de l’écrit est si complexe pour les enfants


Certains enfants n’osent simplement pas écrire, car ils ne savent pas encore le faire, ou parce que leurs parents ne le font jamais. Certains écrivent sans se rendre compte que leur écrit ne répond pas à la question posée, se plaçant ainsi « hors sujet ».

Le rôle de l’enseignant est ainsi de proposer une progressivité dans la somme des savoirs à maîtriser, que ce soit ceux qui relèvent de la composante graphique, sémantique ou affective. Il aménage un espace où les enfants peuvent co-construire les savoirs, où l’écrit n’est plus un objet d’inhibition voire d’angoisse pour personne mais au contraire un moyen d’expression et d’émancipation qui fera de chaque enfant un individu réflexif et outillé.

Comment notre cerveau nous fait aimer une musique (ou pas)

29 samedi Oct 2022

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  1. Guilhem MarionDoctorant en Sciences Cogntives de la Musique, École normale supérieure (ENS) – PSL

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Guilhem Marion est membre et a reçu des financements de la Chaire Beauté(s).

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En 2O15, Spotify publie en ligne une carte interactive des goûts musicaux en fonction des villes. Dans cette carte, on découvrait les goûts des auditeurs : à New York, The Chainsmokers sont en tête, Jeanne Added à Paris et Nantes et Jul à Marseille. On sait bien que les goûts musicaux évoluent au cours du temps et des régions, et même entre groupes sociaux. Pourtant, à notre naissance, nos cerveaux sont très similaires, alors, que se passe-t-il dans notre cerveau qui affecte autant nos goûts musicaux ?

Lorsque l’on écoute de la musique, notre cerveau prédit en permanence ce qu’il va se passer ensuite, ces prédictions sont différentes selon d’où l’on vient et écouter une nouvelle musique engendre une plasticité neuronale (capacité du cerveau de créer, défaire ou réorganiser les réseaux de neurones et leurs connexions) qui nous permet de mieux prédire de nouvelles musiques d’un genre similaire.

Or, la façon dont nous prédisons des événements musicaux affecte directement le plaisir et les émotions que nous ressentons ainsi que certaines capacités cognitives comme la mémoire et l’attention. Ainsi, la musique à laquelle on a été exposée durant notre vie impacte la façon que l’on a de prédire et d’apprécier de nouveaux morceaux.

Les émotions, une histoire de prédiction

Nous venons de publier une étude qui montre que notre cerveau prédit en permanence la prochaine note pendant l’écoute de mélodies, sans même que nous en rendions compte. Chez les participants musiciens il est possible de leur demander de chanter la note qu’ils avaient prédite et la relier avec ce que l’on voit dans le cerveau, mais pour les participants non musiciens c’est un mécanisme inconscient. À chaque note entendue, la prédiction se mêle à la note qui est réellement jouée, cela crée ainsi une erreur de prédiction. Une sorte de score neuronal qui mesurerait à quel point cette note était bien prédite par notre cerveau.

Dès 1956, Leonard Meyer, compositeur et musicologue américain, suggérait que les émotions musicales étaient induites par la satisfaction et la frustration des attentes des auditeurs. Depuis, de nombreux développements de ce travail ont vu le jour et il a été possible de caractériser le lien entre les attentes et d’autres ressentis plus complexes. Par exemple, la capacité à mémoriser des séquences de notes est bien meilleure lorsque les participants ont une bonne capacité à prédire les notes de ces séquences.

Il est aussi possible de décomposer des émotions simples (comme la joie, la tristesse, l’énervement) en deux dimensions fondamentales : la valence et l’activation psychologique. Ces deux dimensions correspondent, respectivement, à quel point l’émotion est positive (tristesse vs joie) et à quel point l’émotion est excitante (l’ennui vs la colère). Ainsi, une combinaison de ces deux mesures permet de définir des émotions simples. Deux études de 2018 et 2013 montrent que si l’on demande à des participants de noter ces deux dimensions sur des curseurs, on retrouve une relation claire entre l’erreur de prédiction et les dimensions émotionnelles. Par exemple, les notes les moins bien prédites engendrent des émotions avec une plus grande activation psychologique.

Dans l’histoire des neurosciences cognitives, le plaisir a souvent été lié avec le système de récompense et en particulier l’apprentissage. Ainsi, des études ont pu montrer que des neurones dopaminergiques particuliers réagissent à l’erreur de prédiction. Cela permet, entre autres, d’apprendre à prédire l’environnement qui nous entoure. Il n’est pas encore clair si le plaisir engendre l’apprentissage ou si l’apprentissage engendre le plaisir, mais les deux sont indubitablement liés. C’est aussi le cas pour la musique.

En effet, lorsque l’on écoute de la musique, les événements qui sont modérément prédits sont ceux qui génèrent le plus de plaisir. En d’autres mots, les événements trop simples, trop prédictibles, et qui n’engendrent pas nécessairement d’apprentissage ne génèrent que peu de plaisir, idem pour les événements trop complexes. Par contre, les événements entre les deux, qui sont suffisamment complexes pour être intéressants, mais aussi suffisamment consistants avec nos prédictions pour être structurés sont ceux qui génèrent le plus de plaisir.

Ces prédictions dépendent de notre origine

Néanmoins, la façon de prédire les événements musicaux est indissociable de notre culture musicale. Par exemple, des chercheurs sont allés à la rencontre des membres du peuple sami qui s’étend du nord de la Suède au nord de la péninsule de Kola. Leur musique traditionnelle, appelée Yoiks, est très différente de la musique occidentale et n’a que très peu été en contact avec la culture occidentale.Bierra Bierra’s Joik (musique traditionnelle du peuple sami.

Dans cette étude, il a été demandé à des musiciens samis, finlandais et européens (de divers pays non-familiers avec les Yoiks) d’écouter différents extraits de yoiks qu’ils ne connaissaient pas et de chanter la dernière note qui avait été enlevée au préalable. Tous les participants de chaque groupe ne donnaient pas la même réponse, mais certaines notes étaient plus représentées que d’autres au sein de chaque groupe. Ce qui est très intéressant, c’est que ces distributions sont très différentes entre les groupes et que les Samis sont ceux qui prédisent le mieux la note qui était vraiment dans le morceau, suivis par les Finlandais qui sont plus exposés à la musique samie que les participants du reste de l’Europe. Cela montre bien que notre culture musicale (la musique à laquelle on a été exposées pendant notre vie) influence la façon dont nous prédisons des événements musicaux inconnus.

Une étude similaire a été conduite sur le rythme avec des participants américains et du peuple Tsimanés en Bolivie amazonienne. Cette étude montre que les participants américains et tsimanés perçoivent les rythmes de façon radicalement différente, mais aussi que les musiciens professionnels américains et les participants non musiciens américains perçoivent quant à eux, les rythmes de façon quasi-identiques. Cela permet d’imaginer que la façon dont nous prédisons (et ainsi percevons) la musique dépend de la musique à laquelle nous aurions été exposés passivement pendant notre vie, peu importe quelle musique nous aurions travaillée assidûment.

On peut apprendre une nouvelle culture en y étant exposé

Cela pose ainsi la question de l’apprentissage de la culture, communément appelé processus d’enculturation. Par exemple, en musique, le temps peut être différemment divisé. La musique occidentale divise généralement le temps en 4 (comme dans la danse rock, c’est la division la plus rependue) ou en 3 temps (comme dans la valse). Néanmoins, d’autres cultures musicales divisent le temps en ce que la théorie musicale occidentale appelle mesures asymétriques. Les musiques des Balkans sont, par exemple, connues pour utiliser des mesures asymétriques comme le 9 temps ou le 7 temps. Une étude de 2005 a composé des mélodies de Folk avec des mesures symétriques ou asymétriques.

Ensuite, ils ont présenté ces mélodies a des participants en y introduisant des accidents (un temps de plus ou de moins à un endroit particulier). Cette étude montre que les nouveau-nés de moins de 6 mois passaient autant de temps à regarder l’écran pendant les accidents quand ils étaient introduits dans des mesures symétriques et asymétriques. Par contre, les nouveau-nés de 12 mois passaient significativement plus de temps à regarder l’écran pendant les accidents dans les mesures symétriques qu’asymétriques. Cela donne à penser qu’ils sont plus surpris lorsque l’accident se produisait dans une mesure symétrique car ils ont compris qu’il y avait une disruption d’une structure qu’ils connaissaient déjà.

Pour vérifier cette hypothèse, les chercheurs ont fait écouter aux nouveau-nés de la musique des Balkans (en mesures asymétriques) à la maison à l’aide d’un CD. Après une semaine d’écoute, ils ont renouvelé l’expérience et cette fois les nouveau-nés passaient autant de temps à regarder l’écran pendant les accidents dans les mesures symétriques et asymétriques. Cela veut dire que l’écoute passive à la musique des Balkans a construit une représentation interne de la métrique musicale qui leur a permis de prédire la structure et ainsi de détecter les accidents dans les deux types de mesures. La même expérience a été conduite avec des adultes en leur demandant de détecter les accidents. Finalement, une étude de 2010 montre un effet très similaire, non pas pour le rythme, mais pour les hauteurs de notes chez les adultes. Ces expériences montrent ainsi que l’exposition passive à de la musique permet d’engendrer un apprentissage des structures musicales propres à une culture. C’est ce que l’on appelle l’enculturation.

Nous avons vu dans cet article que l’écoute passive à la musique permettait de changer notre façon de prédire les structures musicales lors de l’écoute de nouveaux morceaux. Or, nous avons aussi vu que la façon dont les auditeurs prédisent les structures musicales change drastiquement entre les cultures et déforme leur perception en leur faisant ressentir du plaisir et des émotions différemment. Même si de nombreuses recherches restent à conduire pour comprendre, entre autres, l’impact des influences sociales et des sensibilités individuelles dans ces mécanismes, ces études nous donnent une piste de compréhension de la diversité des goûts musicaux : notre culture musicale (définie par la musique que nous avons écoutée dans notre vie) déforme notre perception et fait que nous préférons certains morceaux à d’autres de par la ressemblance (ou différence) avec les morceaux que nous connaissons déjà.

Covid-19 : voilà l’impact réel de la pandémie sur l’espérance de vie

28 vendredi Oct 2022

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  1. Jennifer Beam DowdProfessor of Demography and Population Health, University of Oxford and Deputy Director, Leverhulme Centre for Demographic Science, University of Oxford
  2. José Manuel AburtoBrass Blacker Associate Professor of Demography at LSHTM and Marie Sklodowska-Curie Fellow at Leverhulme Centre for Demographic Science, University of Oxford
  3. Ridhi KashyapProfessor of Demography & Computational Social Science, University of Oxford

Déclaration d’intérêts

Jennifer Beam Dowd a reçu des fonds de recherche du Conseil européen de la recherche et du Leverhulme Trust (Centre Grant). Elle est rédactrice en chef de la plateforme de communication scientifique à but non lucratif Dear Pandemic.

José Manuel Aburto a reçu des financements du programme de recherche et d’innovation Horizon 2020 de l’Union européenne dans le cadre de la convention de subvention Marie Sklodowska-Curie n° 896821.

Ridhi Kashyap bénéficie du soutien du Leverhulme Trust, par le biais du Leverhulme Centre for Demographic Science. Elle bénéficie également du soutien financier de l’Economic and Social Research Council (ESRC). Elle est membre et administrateur du Nuffield College de l’université d’Oxford.

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La pandémie de Covid a déclenché une hausse, sans précédent récent, du nombre de décès dans le monde et une baisse visible au niveau mondial de l’espérance de vie. Dans une étude menée en 2021, nous avions déjà constaté que l’année 2020 avait entraîné d’importantes pertes d’espérance de vie. L’effet avait été particulièrement frappant aux États-Unis, avec une chute de plus de deux ans, et en Angleterre et au Pays de Galles, avec une baisse d’un an.

Cette fois, dans une nouvelle étude tout juste publiée dans Nature Human Behaviour, nous avons montré qu’en 2021, l’espérance de vie a quelque peu rebondi dans la plupart des pays d’Europe de l’Ouest, tandis que l’Europe de l’Est et les États-Unis ont enregistré des pertes supplémentaires. Partout, toutefois, la situation est moins bonne que ce qu’elle aurait probablement été sans la pandémie… Hormis en Norvège, qui a retrouvé et même dépassé son espérance de vie de 2019.

Nous savions que les perspectives pour 2021 étaient mitigées. L’enthousiasme suscité par le déploiement de la vaccination est en effet tempéré par le nombre considérable d’infections causées par l’émergence régulière de nouveaux variants. Pour évaluer l’impact de ces changements, notre équipe de recherche du Leverhulme Centre for Demographic Science (de l’Université d’Oxford) et du Max Planck Institute for Demographic Research a rassemblé des données provenant de 29 pays (principalement européens, ainsi que le Chili et les États-Unis).

Espérance de vie : de quoi parle-t-on ?

L’espérance de vie est une mesure utilisée pour « résumer » le schéma de mortalité d’un pays pour une année donnée. Elle est calculée sur la base des décès, toutes causes confondues : elle ne dépend donc pas de l’exactitude de l’enregistrement des décès liés au Covid, et peut donner une image plus large de la façon dont la pandémie a affecté la mortalité.

L’espérance de vie n’est pas une prédiction de la durée de vie d’un bébé né aujourd’hui. Il s’agit plutôt du nombre d’années qu’une personne née aujourd’hui pourrait espérer vivre, si elle vivait toute sa vie avec les taux de mortalité de l’année en cours (de 2021 dans le cas de notre recherche). Il s’agit donc d’un instantané des conditions de mortalité actuelles, si elles devaient se poursuivre sans amélioration ni détérioration.

Les démographes considèrent l’espérance de vie comme une mesure synthétique très utile de la mortalité de la population, car elle est comparable entre les pays et dans le temps. De fortes variations à la hausse ou à la baisse peuvent nous indiquer que quelque chose de significatif a changé – comme ça a été le cas avec le Covid. L’ampleur de ces baisses nous permet de comparer les chocs de mortalité dans le temps et dans l’espace.

L’Europe de l’Est et les États-Unis particulièrement touchés

Classement des pays cumulant du plus au moins de perte d’espérance de vie, en haut Bulgarie, Slovaquie, États-Unis, en bas Norvège
Classement des pays par pertes cumulées décroissantes d’espérance de vie (en mois) depuis 2019. Les deux niveaux de flèches indiquent l’évolution en 2020 (haut) et 2021 (bas). En rouge les hausses, en gris les baisses. On constate que la France a quasiment retrouvé son niveau de 2019, à 1,2 mois près. J. Dowd, J.M. Aburto, R. Kashyap, Author provided

Premier constat : nous avons remarqué que l’impact de la pandémie sur la mortalité variait beaucoup plus d’un pays à l’autre en 2021 qu’en 2020. L’espérance de vie a diminué dans pratiquement tous les pays étudiés en 2020, à l’exception du Danemark et de la Norvège. Mais en 2021, pour certains pays, l’espérance de vie s’est améliorée par rapport à 2020, tandis que pour d’autres elle s’est encore dégradée.

● En Europe de l’Est, ces nouvelles baisses s’expliquent probablement par un double phénomène : la région a évité certaines des vagues Covid précoces en 2020, ce qui n’a pas permis une première immunisation naturelle de la population ; elle a ensuite fait montre d’une plus faible utilisation des vaccins lorsque de grandes vagues sont arrivées en 2021. La Bulgarie est l’exemple le plus extrême, avec une perte de 3,5 années depuis 2019 (1,5 année en 2020 et deux années encore en 2021).

● La situation est mauvaise également aux États-Unis, pour des raisons différentes. Malgré un déploiement précoce des vaccins, ils ont continué de s’écarter de l’Europe de l’Ouest avec une perte supplémentaire de près de trois mois en 2021 après avoir perdu plus de deux ans en 2020. L’analyse des données épidémiologiques fait ressortir que les États-Unis ont un taux d’utilisation des vaccins et des rappels inférieur à celui des autres pays occidentaux : ce qui explique probablement une partie de cette différence en 2021.

Il faut aussi rappeler que l’espérance de vie aux États-Unis est à la traîne par rapport aux pays européens depuis des années. On peut faire l’hypothèse qu’une partie de ce désavantage américain peut refléter des vulnérabilités sanitaires sous-jacentes spécifiques à cette région, et qui ont été exacerbées par la pandémie de Covid. Ainsi, si la plupart des pertes d’espérance de vie peuvent être attribuées aux décès confirmés dus au Covid, une augmentation continue des décès dus aux surdoses de drogues a également été enregistrée.

● L’Angleterre et le Pays de Galles se situent quelque part au milieu, gagnant 2,1 mois en 2021 après avoir perdu presque un an en 2020. Même pour les pays qui s’en sortent relativement bien, le Covid a quand même fait dérailler la trajectoire d’amélioration de la mortalité que l’on devrait normalement observer d’année en année.

● La France, de son côté, fait partie des huit pays qui ont connu un rebond significatif : l’Hexagone a regagné 5 mois d’espérance de vie en 2021 après une perte de 6,2 mois en 2020, retrouvant ainsi un niveau proche de celui de 2019 (comme la Belgique, la Suisse et la Suède). Cela reflète une amélioration de la mortalité aux âges les plus élevés (presque une « normalisation »), sans les pertes aux âges plus jeunes observées en Europe de l’Est et aux États-Unis.

Évolution de l’espérance de vie à la naissance pour cinq pays. Pour la Bulgarie et les États-Unis, contrairement à l’Angleterre, l’Italie et la Norvège, elle baisse toujours
Évolution de l’espérance de vie à la naissance pour cinq pays en 2019, 2020 et 2021. J. Dowd, J.M. Aburto, R. Kashyap, Author provided

Comparer la crise du Covid aux grandes crises passées

De façon générale, les décès imputables au Covid se sont légèrement déplacés vers les personnes plus jeunes en 2021 par rapport à 2020. Cela est probablement dû à une meilleure couverture vaccinale et à davantage de précautions prises chez les plus âgés.

En effet, ce sont les pays qui ont une meilleure couverture vaccinale pour les plus de 60 ans qui s’en tirent le mieux en matière d’espérance de vie. Aux États-Unis, la mortalité des personnes âgées de plus de 80 ans a ainsi retrouvé son niveau d’avant la pandémie… mais, de façon plus globale, l’espérance de vie s’est dégradée dans le pays en raison de la hausse de la mortalité des moins de 60 ans.

Nous avons également comparé les récentes baisses d’espérance de vie avec les crises historiques qui ont entraîné des décès importants. Il s’avère que des pertes de l’ampleur de celles observées pendant la pandémie n’avaient plus été enregistrées depuis la Seconde Guerre mondiale en Europe de l’Ouest, ou depuis l’éclatement de l’Union soviétique en Europe de l’Est.

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Un dernier élément significatif ressort de cette comparaison de la situation actuelle avec les crises passées. L’impact des précédentes épidémies de grippe se voit, et on constate qu’elles étaient suivies de rebonds rapides des niveaux d’espérance de vie – qui regagnaient rapidement leurs niveaux antérieurs. Clairement, l’impact du Covid est de nature différente : il est plus important, et il est surtout plus persistant dans le temps. Ce qui dément donc catégoriquement l’affirmation encore trop couramment entendue que « le Covid, c’est comme la grippe ».

Comment aller plus loin

Les estimations de l’espérance de vie nécessitant des données fines sur les décès par âge et par sexe, nous n’avons pas été en mesure de calculer avec précision l’espérance de vie pour tous les pays du monde dans cette étude.

Nous savons que des pays comme le Brésil et le Mexique ont subi d’importantes pertes d’espérance de vie en 2020, et il est probable qu’ils ont continué à subir des pertes supplémentaires en 2021. La mortalité liée au Covid dans des pays comme l’Inde ne sera peut-être jamais comptabilisée avec précision en raison des limites des données, mais nous savons que le nombre de décès a été considérable.

Une personne montre le haut de son bras, couvert d’un petit pansement après vaccination
La vaccination contre le Covid a un effet positif sur l’espérance de vie. Verin/Shutterstock

Quelles sont les perspectives de récupération de l’espérance de vie en 2022 et au-delà ? Les données et modèles sont encore flous. Nous nous attendons toutefois à ce que les divergences se poursuivent en raison des différences entre les pays en matière d’utilisation des vaccins et des rappels, des infections antérieures et des mesures de santé publique (ou de leur absence).

Plusieurs éléments sont toutefois déjà à considérer, même si leurs impacts respectifs ne sont pas encore connus :

  • Les conséquences des retards dans les soins de santé habituellement dispensés (maladies chroniques, etc.) et de la pression continue sur les systèmes de santé restent à estimer ;
  • De nouveaux variants du SARS-CoV-2 capables de mieux échapper à l’immunité existante sont toujours susceptibles d’apparaître ;
  • L’impact à long terme des infections par le Covid (et les conséquences du Covid long) sur la santé des survivants est une grande inconnue.

Si nous espérons que la mortalité revienne aux niveaux prépandémiques (et que l’espérance de vie recommence à progresser), la persistance de la surmortalité en Angleterre et ailleurs en 2022 suggère que nous n’avons toujours pas complètement surmonté l’impact de la pandémie sur la mortalité, et que la voie de la guérison reste incertaine.

Parler plusieurs langues en famille : faut-il se fixer des règles ?

27 jeudi Oct 2022

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  1. Max Antony-NewmanLecturer in Education Studies, Sheffield Hallam University

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Max Antony-Newman a reçu des financements de Gouvernement de l’Ontario et L’Université de Toronto.

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Le plurilinguisme considère l’usage des langues sous un angle plus fluide et dynamique. Shutterstock

 

Beaucoup d’entre nous vivent dans des sociétés qui ne sont plus tant caractérisées par leur diversité que par leur « super-diversité », pour reprendre les mots de l’anthropologue Steven Vertovec. De plus en plus de personnes circulent à travers le monde, faisant voyager leurs langues et leurs cultures. En Grande-Bretagne, par exemple, 20 % des élèves sont multilingues et parlent au moins une langue en plus de l’anglais.

Les parents ont déjà beaucoup à faire pour nourrir leurs enfants, assurer leur sécurité et les éduquer. Mais pour les familles dans laquelle sont parlées plusieurs langues, il s’agit aussi de se positionner terrain pour décider de la manière dont elles seront pratiquées.


À lire aussi : Pourquoi autoriser le mélange des langues à l’école ?


Si les linguistes se sont depuis longtemps intéressés aux questions de parentalité et de bilinguisme, une réévaluation de la complexité de nos sociétés de la super-diversité amène une nouvelle approche. Ce que les experts appellent le plurilinguisme considère l’usage des langues sous un angle bien plus fluide et dynamique.

Avec les théories précédentes, on a souvent préconisé des règles strictes dans l’apprentissage des langues. Selon la règle « Une langue, un parent », pour éviter les confusions, chaque parent s’adresse à l’enfant dans sa langue maternelle. D’autres parents décident, quant à eux, de ne parler que leur langue d’origine à la maison, tandis que la langue du pays sera apprise à l’école.

L’adoption d’une approche plurilingue apporte, en revanche, un certain soulagement. Elle suggère qu’il n’y a pas de règle immuable, qu’on peut décider de ce qui est opportun au jour le jour et s’adapter aux situations. En bref, il n’y a plus de contre-indication au mélange des langues, à leur utilisation dans d’autres cadres que ceux fixés initialement.

Célébrer la diversité linguistique

Nous savons déjà combien le plurilinguisme est important dans l’enseignement, tant pour la réussite que pour le bien-être des élèves multilingues.

Afin de comprendre comment cela se traduit dans la sphère privée, j’ai mené en 2018 une étude auprès de 20 parents ayant immigré au Canada depuis neuf pays d’Europe centrale et orientale et constaté que le type de parentalité qu’ils ont instinctivement adopté est véritablement plurilingue.

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Les parents auxquels j’ai parlé croient en un usage fluide et dynamique des langues. Beaucoup envoient leurs enfants dans des programmes français d’immersion linguistique où l’enseignement se fait à la fois en anglais et en français, tout en acceptant que les compétences en français de leurs enfants ne soient probablement pas à la hauteur de leurs compétences en anglais.

Au quotidien, parents et enfants passent d’une langue à l’autre. Ils peuvent commencer une phrase dans une langue et la terminer dans une autre. Lorsque leurs grands-parents viennent d’Europe, les enfants dialoguent dans la langue qu’ils parlent. Mais, si un ami vient pour jouer avec eux, ils optent alors pour l’anglais.

Le plurilinguisme est important dans l’enseignement, tant pour la réussite que pour le bien-être des élèves multilingues. Shutterstock

L’éducation plurilingue implique une approche plus libérale. Nombreux sont les parents à ne pas croire qu’il faille punir les enfants qui parlent dans la « mauvaise » langue à la maison. Même ceux qui étaient stricts à la naissance des enfants se sont vite rendu compte que leurs enfants passent spontanément d’une langue à l’autre. Et ils ne le voient pas d’un mauvais œil.

Enfin, l’un des points clés de la parentalité plurilingue est l’interconnexion entre langue et culture. En traversant les frontières, les parents emportent avec eux tout un bagage culturel et la langue est liée à des questions d’identité et d’appartenance que les parents immigrants doivent régulièrement négocier dans leurs foyers.

Le fait de parler bulgare au Canada permet aux enfants de nouer un lien avec le pays de leurs parents, même s’ils se considèrent comme des Canadiens. Il est particulièrement important pour les parents de conserver leur langue d’origine et ils transmettent cette importance à leurs enfants également. Comme l’a dit un parent ukrainien : « C’est notre histoire, c’est notre patrimoine ».

Être ouvert à l’apprentissage de langues

Vous avez peut-être entendu dire que le fait de parler deux langues dans la famille perturbe les enfants, retarde les freine dans l’apprentissage du langage et nuit à leur réussite scolaire. Il s’agit en fait d’idées reçues que les chercheurs ont passé des décennies à démystifier. Ils ont ainsi montré que le bilinguisme, au contraire, présente des avantages cognitifs.

De nombreux éducateurs ont mis en garde contre l’introduction trop précoce de nouvelles langues dans la vie de l’enfant ou contre le mélange des langues. Un autre conseil qu’on entend couramment est de veiller à ce que l’enfant n’apprenne une langue qu’auprès de locuteurs natifs afin d’obtenir un accent parfait, une grammaire impeccable et un vocabulaire riche.


À lire aussi : Enfants bilingues : pourquoi ce n’est pas grave s’ils mélangent les langues


Ce type de règles auto-imposées est source de discorde dans la vie familiale lorsque les parents tentent de réguler le recours des enfants à telle ou telle langue. Le plurilinguisme, en revanche, découle d’une nouvelle compréhension de la manière dont les langues sont utilisées et met l’accent sur une approche plus fluide.

Cette école de pensée valorise toutes les langues qu’un élève donné est capable d’utiliser, quel que soit son niveau dans l’une ou l’autre. Elle cherche à développer attention aux faits linguistiques, leurs connaissances culturelles et leur ouverture à l’apprentissage des langues, tout en progressant dans la langue qui est l’objet du cours.

Et conformément aux études précédentes sur les apprenants multilingues, dans mon étude, tous les élèves ont obtenu de bons résultats scolaires, qu’ils soient dans des écoles anglaises, des écoles bilingues d’immersion française ou au baccalauréat international. Il n’y a manifestement aucun mal à conserver sa langue et sa culture d’origine. Et cette politique linguistique familiale flexible évite aux parents et aux enfants de nombreuses batailles.

Les « ZAD » et leurs mondes

26 mercredi Oct 2022

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Publié: 12 février 2018, 22:24 CET •Mis à jour le : 9 avril 2018, 10:26 CEST

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  1. Stéphanie DechézellesMaîtresse de conférences en Science politique, Sciences Po Aix

Déclaration d’intérêts

Stéphanie Dechézelles ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Célébrations de la victoire à Notre-Dame-des-Landes après 50 ans de lutte, lors du rassemblement « Enracinons l’avenir » le 10 février 2018. Jean-Sébastien Evrard/AFP

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La route départementale traversant la Zone à Défendre (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes en Loire-Atlantique a été rendue à la circulation par ses occupants selon l’injonction des autorités. Ces dernières ont donné « jusqu’au printemps » aux associations et personnes mobilisées contre le projet d’aéroport pour organiser l’évacuation des occupations jugées illégales.

En attendant, habitants et sympathisants de la lutte contre ce qu’ils jugent un « Grand projet inutile et imposé » se sont retrouvés nombreux le 10 février afin de discuter de son avenir, depuis l’annonce officielle de l’abandon du projet par le gouvernement le 18 janvier.

Mais qui sont-ils ces « zadistes » au juste ? Sont-ils des « terroristes » comme l’insinuaient assez grossièrement certains journaux, d’ailleurs moqués par Télérama ? Des hommes et femmes dont les intentions seraient funestes et l’organisation « paramilitaire », allant jusqu’à cacher – d’après ces mêmes journaux aux sources d’information pour le moins douteuses – des « boules de pétanques hérissées de clous » ?

La ZAD, terre de fantasmes

Les fantasmes et les clichés véhiculés par les politiques au sujet des militants ont été légion depuis au moins l’opération César de 2012 ordonnée en vue de détruire les installations jugées illégales, déloger par la force les occupants de la zone et réprimer dans son ensemble le mouvement anti-aéroport. En dépit de la dureté des affrontements et du nombre considérable de gendarmes mobiles alors déployés (2 000), l’opération avait viré au fiasco pour le gouvernement. La résistance pugnace de celles et ceux qui disaient « non » à l’aéroport, loin d’épuiser les énergies, avait largement contribué à renforcer la détermination de tous. D’ailleurs ceux qui sont appelés les « zadistes » réoccupèrent le bocage un mois seulement après, à l’occasion d’une opération ironiquement baptisée « Astérix ».

Du côté des professionnels des médias, préjugés et conditions précaires d’exercice du métier s’ajoutent à la grande méfiance qu’ils suscitent du côté des habitant·e·s des ZAD pour expliquer en grande partie la récurrence de certains poncifs à l’égard des « zadistes ». N’ayant qu’un accès limité à certaines zones et certains occupants, des journalistes dépêchés sur place peinent alors parfois à recueillir autre chose que des déclarations convenues ou évasives, quand ils ne se voient pas carrément refouler en lisière de zone. Ils sont alors contraints à ne reproduire que caricature, amalgames ou éléments fournis par les pouvoirs publics.

Armes « zadistes » ? Non à l’aéroport Notre-Dame-des-Landes/Flickr, CC BY

Seules une présence et une confiance réciproque permettent, dans de rares cas, d’accéder à une information de qualité. Quelques médias en ligne y sont parvenus, on pense ainsi à Reporterre ou Mediapart. Quelques ouvrages signés de professionnels des médias récemment publiés ont aussi eu le mérite de s’attacher à comprendre et analyser en profondeur les motivations des habitant·e·s de la ZAD.

Car les luttes prenant appui sur la désobéissance civile mettent souvent à mal les catégories d’analyse classiques. De ce point de vue, les regards que posent les chercheur·e·s en sciences humaines et sociales constituent des instruments précieux de dévoilement des chimères produites par les représentants de l’ordre social dominant et d’approfondissement des connaissances au sujet de cette modalité de protestation collective.

Une population bigarrée

Pour comprendre qui sont les groupes présents, qui apportent un soutien, s’installent dans une ZAD, plus ou moins durablement et participent à des chantiers ou y lancent de nouvelles activités, il convient tout d’abord de se déprendre de toute conception homogène. Ce qui frappe, c’est d’abord et avant tout l’extrême diversité des personnes qui résident sur les sites occupés, en particulier à Notre-Dame-des-Landes.

Les « zadistes » forment une réalité bien plus composite, bigarrée et complexe que ce que laissent à croire les nombreux fantasmes qu’ils suscitent. Notre-Dame des Landes/Flickr, CC BY-NC

Diversité des profils et des statuts sociaux, mais aussi hétérogénéité des motivations, variété des raisons et des niveaux d’engagement, différences des trajectoires biographiques et des expériences préalables, divergences idéologiques aussi bien sûr qui exposent parfois cette petite société protestataire à la discorde.

Enfermer les individus dans des catégories toutes faites ne rend alors pas justice à la réalité sociologique des multipositionnements identitaires, politiques, sociaux de celles et ceux qui deviennent à un moment donné des habitant·e·s des lieux. Cela ne permet pas non plus de saisir qu’un.e militant.e aguerri.e peut tout à fait s’avérer aussi féru.e de permaculture, passionné.e de rap, diplômé.e du supérieur, autoconstructeur de cabane, parent d’un enfant né sur la ZAD, etc. Et qu’en cas de menaces policières, celui ou celle-ci fasse barrage, y compris en usant de la force physique, pour défendre les lieux et ses idéaux.

Les identités sont rarement aussi simples (voire simplistes) que les dichotomies produites par les représentants de l’État (« bons agriculteurs » opposés aux « militants radicaux de l’ultra-gauche »).

Cela empêche aussi de percevoir le caractère composite des violences sociales et symboliques subies depuis parfois longtemps par certains des habitants, notamment par les plus enclins à la discrétion : pauvreté et son cortège de problématiques sociales, échec scolaire, institutions de placement, discriminations, insatisfactions liées au salariat et à son monde, déclassement social…

Car pour peu que l’on adopte une approche processuelle de l’engagement, ce sont surtout les bifurcations biographiques, les apprentissages croisés, les transformations de soi ainsi que l’expérience des métissages, des transgressions et des transfuges, qui caractérisent la très grande majorité de cette population bigarrée.

Doux rêveurs ? Terroristes ? Ici, une chaîne humaine en 2013. Jules78120/Wikipedia, CC BY-NC

Rassemblés par la mobilité

Au-delà des différences, l’un des points communs à de nombreux habitant·e·s des sites de contestation de projets d’équipement est la mobilité. Mobilité géographique surtout, mobilité sociale dans une moindre mesure.

Le nomadisme constitue en effet une caractéristique de nombre des « zadistes ». Beaucoup d’entre elles/eux circulent entre plusieurs espaces et formes de vie : au sein même de la ZAD parfois, à l’occasion d’un contrat de travail provisoire ailleurs ou d’une visite aux proches, mais aussi entre plusieurs zones à défendre. Divers modes de locomotion alternatifs à la voiture individuelle sont alors privilégiés, selon les ressources ou convictions de chacun.e : à pied, en vélo, en train, en auto- ou bateau-stop, ou encore dans son véhicule personnel (camionnette ou fourgons, souvent aménagés pour y dormir et cuisiner).

La mobilité et fluidité des habitant·e·s, aussi bien sur place qu’entre sites occupés, tout comme le caractère informel de certains des collectifs qui soutiennent les ZAD en France, rendent de facto leur recensement difficile et les tentatives de catégorisation de leurs membres au mieux hasardeuses, au pire stigmatisantes.

De la « maison-mère » aux « petites » ZAD

Depuis la fin des années 2000, à la ZAD du bocage nantais s’ajoutent d’autres formes d’occupation provisoire ou permanente contre les « grands projets inutiles et imposés ». C’est le cas en Val de Suse en Italie contre la ligne à très grande vitesse, au Testet dans le Tarn autour du barrage de Sivens, devenue tragiquement célèbre suite à la mort du naturaliste militant Rémi Fraisse et évacuée complètement en 2015, à Bure contre le projet d’enfouissement de déchets nucléaires radioactifs, à Kolbsheim (Grand-Est), contre contre le projet de « grand contournement autoroutier » de Strasbourg ou encore à Roybon (Isère), contre la création d’un parc d’attractions.

Aux yeux de beaucoup, Notre-Dame-des-Landes représente la « maison-mère » d’une forme de lutte qui se déploie en divers endroits en France et en Europe (Bruxelles, Cologne, Roumanie) et vers laquelle il fait bon venir régulièrement se ressourcer, s’informer, revoir des ami·e·s, participer à tel chantier ou à un festival estival, soutenir les « copains » restés sur place, récupérer quelques effets laissés dans une cabane lors d’un précédent séjour…

C’est aussi d’elle que proviennent souvent les premiers militants qui occupent un nouveau site (comme ce fut par exemple le cas à Sivens), grâce aux savoirs et savoir-faire acquis en Loire Atlantique. La récente victoire des opposants au nouvel aéroport pourrait donner à ces autres espaces de contestation un nouvel élan comme en témoignent les récents appels à soutien des « Hiboux » du bois Lejuc à Bure ou des « veilleurs d’arbre » de la ZAD du Moulin à Kolbsheim. Les appels à la convergence des luttes et le serment de solidarité entre causes ont été affirmés à plusieurs reprises lors du grand rassemblement du 10 février 2018.Sur la route des ZAD.

Rejoindre le bocage de Notre-Dame-des-Landes, emblématique par sa durée, la richesse des activités qui s’y déploient et, surtout désormais, la victoire contre le projet d’aéroport, permet ainsi de remettre du combustible dans l’engagement : on y trouve une grande variété de profils et de projets, une relative abondance alimentaire, spatiale et festive, une multiplicité d’occasions de mettre en œuvre des initiatives de toutes sortes, une richesse dans les discours et les pratiques mises en œuvre… qui nourrissent celles et ceux qui y séjournent.

Cela pare, sinon évite, les risques liés à un militantisme total en offrant un havre aux personnes à la recherche d’un lieu pour s’isoler, se cacher, se réparer. Sur les « petites » ZAD, moins peuplées, plus intermittentes, et donc moins couvertes médiatiquement, les activités tendent a contrario à se raréfier et les soutiens de collectifs, associations ou syndicats susceptibles de les soutenir à se montrer plus aléatoires. Tout cela rend inévitablement la lutte plus éprouvante et les rétributions de l’engagement plus rares.

Politiser le moindre geste

Autre élément de ressemblance, la protestation en actes, qui passe par une « politisation du moindre geste »

Cette forme de vie implique de développer au quotidien des alternatives aux pratiques et normes en vigueur existant dans la société dominée par un système de normes standardisées et marchandes. Cela implique aussi de penser différemment la représentation politique, confinée principalement à l’élection : horizontalité des pratiques, démocratie directe, rejet de la personnalisation et des porte-parolats, organisation en réseaux de réseaux.

Il en est aussi des façons d’habiter ou de se nourrir qui sont conçus comme autant de modes d’agir aussi ordinaires que profondément critiques. Du choix d’un habitat léger (cabanes perchées ou au sol, tentes) ou plus « lourd » (maisons en pierre, bois, paille ou boue, caravanes ou yourtes), en passant par celui des matériaux de construction (uniquement naturels ou récupérés), la distribution des espaces de vie ou l’adoption de toilettes sèches, tout dans le style résidentiel adopté contient une remise en cause fondamentale de l’ordre social dominant.

Cabane sur la ZAD du Testet, 2014. Sébastien Thébault/Wikimedia, CC BY-ND

Ce qui concerne l’habitat est aussi valable en matière agricole, alimentaire, mais aussi ludique, familiale… Les repas peuvent aussi bien résulter d’une préparation et consommation collectives, à partir des denrées produites sur place, que consommés de manière plus individuelle et en dehors des horaires socialement normés. Des espaces de gratuité ou encore un « non-marché » hebdomadaire durant lequel des biens divers peuvent s’échanger sans prix fixé à l’avance sont organisés. Des zones ou moments non-mixtes (entre femmes, entre homosexuels) sont proposés afin de favoriser la parole et de dénoncer les dominations et discriminations de genre. Des zones non motorisées voisinent les axes sur lesquels transitent tracteurs et autres engins agricoles, des éleveurs influencés par la biodynamie cohabitent avec des adeptes de l’alimentation vegan. En bref, il s’agit de formes variées du vivre autrement pour lutter différemment et… vice-versa !

Le métavers va-t-il bouleverser les liens d’amitié chez les jeunes ?

25 mardi Oct 2022

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auteurs

  1. Thomas LeclercqProfesseur assistant en marketing, IESEG School of Management (LEM-CNRS 9221), Head of Marketing and Sales Department, IÉSEG School of Management
  2. Elodie GentinaAssociate professor, marketing, IÉSEG School of Management

Déclaration d’intérêts

Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.

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Demain, serons-nous « amis » avec des avatars virtuels ? lilmiquela / Instagram, capture d’écran

L’adolescence correspond à une période de changements profonds, tant sur le plan biologique que social, pendant laquelle le jeune se détache progressivement de sa famille d’origine et construit un monde plus personnel, séparé des parents, en intégrant un nouveau groupe : le groupe de pairs, regroupant ses amis. Selon l’étude de Find Your Tribe de 2020, 46 % des adolescents préfèrent créer des amitiés en ligne (35 % des Français le pensent).

Les avancées technologiques ouvrent les portes d’un nouveau monde virtuel fictif – le métavers – qui a conquis les jeunes passionnés de jeux vidéos utilisant les plates-formes de Roblox, Fornite, et d’autres. Une étude menée par Razorfish et Vice Media Group montre que 52 % des « gamers » de moins de 25 ans se sentent plus eux-mêmes dans le métavers que dans la « vraie vie ». Cependant, hormis pour les passionnés utilisant ces plates-formes, il faudra de solides arguments pour embarquer la nouvelle génération dans cette nouvelle économie du métavers. En effet, bien que 9 entreprises sur 10 accélèrent leurs investissements dans le métavers, une étude publiée par la banque Piper Sandler souligne que l’ensemble des jeunes n’est pas encore prêt à adhérer au monde du métavers. Parmi les 7 100 adolescents américains interrogés (âge moyen : 16 ans), 48 % d’entre eux déclarent être « incertains » quant à l’avenir du métavers ou se disent tout simplement « pas intéressés ».

Étant donné son récent développement, il y a encore peu d’information sur ce que sera ce métavers et ses effets sur les liens sociaux. Nous pouvons cependant émettre quelques hypothèses. En quoi le métavers pourrait révolutionner les relations humaines dans les prochaines décennies, en particulier chez les adolescents et les jeunes adultes ?

Les relations parasociales avec des amis qui nous ignorent

Avec les réseaux sociaux numériques, les jeunes créent des amitiés virtuelles, amenant à un nouveau type de relation, spécifique au monde du web et des réseaux sociaux – l’amitié 2.0 (extension de l’amitié réelle ou amitié virtuelle). L’enjeu de l’amitié 2.0 est d’intéresser l’autre, d’être remarqué et éventuellement d’être aimé (liké).

La plupart des adolescents ont tendance à rendre leurs messages caricaturaux, voire provocateurs, de façon à attirer les commentaires et les visionnages. Plus on a « d’amis », plus on se sent exister et moins on devrait se retrouver confronté à l’absence et au vide existentiel (parmi tous ces « amis activables », au moins l’un d’entre eux va se manifester).

Sur Facebook par exemple, la création de ces nouveaux liens amène à une nouvelle définition de l’amitié : le « friending ». Il s’agit ici du lien entre deux « profils », les « friends » étant des personnes dont le profil intéresse, dont on peut avoir envie de télécharger les fichiers MP3, voir leurs photos, lire leurs blogs mais… qui ne sont pas forcément des « amis » sur Facebook (ne parlons pas de la « vraie vie » !). Le friending est donc un acte déclaratif qui autorise l’échange d’informations, mais qui n’a plus rien à voir avec le plaisir à être et à échanger ensemble. Le sujet se sent exister pleinement parce qu’il s’imagine qu’un grand nombre de personnes pensent à lui, s’intéressent à ce qu’il dit et fait. Les jeunes tendent à établir des relations sociales sans chercher à entrer dans l’intimité.

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Comment expliquer que l’on puisse tisser des liens affectifs avec des personnes ou personnages qui, pourtant, ignorent tout de notre existence ? Si vous vous sentez véritablement proche d’une personne que vous ne connaissez que par média interposé, vous faites l’expérience de ce que certains chercheurs nomment une « relation parasociale ».

Dans le cadre de relations parasociales, les utilisateurs ne peuvent pas passer le cap de la rencontre, et vont garder une distance avec la figure en ligne, tout en lui envoyant des signes de reconnaissance, en commentant ses publications ou en lui écrivant des messages privés. Les célébrités et les influenceurs demeurent dès lors des personnalités idéalisées. Grâce au développement de ces relations parasociales, ils peuvent maintenir un sentiment de proximité envers les fans sans devoir entretenir des échanges avec ces derniers – ou bien rarement et de façon superficielle, voire professionnalisée (dans ce cas ce n’est pas la personnalité qui répond, mais la personne qui est en charge de gérer sa communication en ligne).

Ces fans peuvent également se rencontrer et se lier d’amitié au sein de communautés, selon des liens plus classiques.

Cette forme d’amitié en ligne est bien distincte de l’amitié réelle, telle qu’on la connaît, qui, selon Antonio Casilli, sociologue, se fonde sur un échange mental, moral mais aussi physique. Le besoin, à l’adolescence, de créer des amitiés en ligne plutôt que dans le monde physique témoigne de l’importance pour les adolescents de contrôler leur identité. Le virtuel pourrait ainsi les aider à dépasser leurs peurs mais réduire leur implication véritable dans la relation amicale.

La dissymétrie propre à la relation parasociale tient-elle alors toujours à l’ère du métavers ? Si les réseaux sociaux offrent la possibilité aux adolescents d’élargir les relations en dehors des liens interpersonnels que nous tissons dans la vie réelle, ils sont aussi le lieu où il est possible de traverser l’écran et échanger avec la figure médiatisée via son/ses avatars, si ce dernier est authentique.

La création de nouveaux espaces de rencontre grâce aux métavers

Les métavers offrent la possibilité d’accéder à des espaces publics virtuels où les citoyens peuvent travailler, partager une activité sportive, jouer, faire du shopping, ou danser. Ces espaces offrent de nouvelles opportunités de rencontres et donc la création d’amitié sur base du partage d’intérêts communs. Par exemple, les Horizon Worlds permettent à des groupes d’amis de se retrouver dans un lieu privé mais proposent également des boîtes de nuit, des espaces de jeu, des ateliers, des clubs de sport, des salles de spectacles virtuels où les utilisateurs pourront se rencontrer, développer de nouveaux liens d’amitié et former de nouvelles communautés. Alors que les réseaux sociaux généraient des liens d’amitié via des échanges, le métavers offre en plus la possibilité de partager des activités et des expériences.

Les liens parasociaux à l’ère du métavers : le dialogue retrouvé ?

Les réseaux sociaux tels que TikTok, Instagram, Facebook et Twitter permettent déjà de suivre le quotidien d’influenceurs et de célébrités, et ainsi de créer un sentiment d’affection et de proximité unilatéral envers ces derniers, une relation d’amitié décrite comme parasociale. Si ces relations guident déjà fortement les comportements de consommation, particulièrement pour la génération Z habituée aux amitiés digitales, l’avènement du métavers va accentuer leur intensité en rendant les échanges plus interactifs et immersifs.

En effet, les utilisateurs du métavers pourront évoluer dans des mondes créés par ces célébrités et influenceurs, parfois les rencontrer, ou jouer avec eux via leur avatar (ou jumeau digital). Par exemple, Snoop Dogg a créé l’espace « Snoopverse » (sur la plate-forme The Sandbox) et Paris Hilton est propriétaire de l’espace « Paris World » sur Roblox. Justin Bieber va également prochainement organiser un concert dans le métavers « The Wave ».

Selon une étude de IZEA Worldwide, 56 % des influenceuses et influenceurs indiquent être déjà présents dans un métavers et 70 % d’entre eux pensent que le métavers remplacera les réseaux sociaux. Ce métavers permettra aux fans et followers de se sentir davantage « connectés » aux célébrités et influenceurs. Et aux influenceurs de démultiplier les occasions de générer des revenus publicitaires…

La possibilité de développer un lien d’amitié avec des influenceurs virtuels

Le développement des intelligences artificielles a fait naître de nouveaux acteurs sur les réseaux sociaux : les influenceurs virtuels. Leur succès est exponentiel. Par exemple, créée en 2003, Lu de Magalu est une influenceuse virtuelle à la tête d’une communauté comptant plus de 32 millions de fans. Sa popularité l’a amenée à faire la couverture du magazine Vogue. De manière similaire, Miquela Sousa est une influenceuse virtuelle sur TikTok. Elle rassemble plus de 3,5 millions de followers.

Ces influenceurs partagent un quotidien fictif avec leur communauté. Leur succès repose sur leur réalisme et leur capacité à créer un sentiment de proximité avec leurs fans. Comme suggéré par les travaux de Dwivedi et ses collègues, en devenant citoyens du métavers, ces agents virtuels pourront se mêler aux utilisateurs et donc renforcer le réalisme de la relation amicale partagée – qui restera pour autant factice, voire encore plus factice, puisque ces I.A ne sont que des programmes informatiques et non des êtres humains. Ils pourront, par ailleurs, se dupliquer pour apparaître simultanément dans un même univers et dans plusieurs métavers, ce qui augmentera les opportunités d’interactions directes avec ces influenceurs et donc le sentiment de relations parasociales auprès de leurs fans.

Le métavers n’est cependant pas exempt de dangers. Comme le suggère une étude de Statista, environ 40 % des consommateurs voient dans le métavers des risques d’addiction, d’usurpation d’identité, ou de harcèlement. Ces sujets devront rapidement être abordés afin de réguler les interactions dans ces mondes digitaux.

En conclusion, même si son développement en est encore à ses débuts, le métavers va probablement transformer la manière dont les jeunes pourront créer des liens d’amitié en les immergeant dans des espaces où ils pourront partager des activités et des expériences avec des pairs, des célébrités, des influenceurs et des intelligences artificielles, tous « citoyens » de l’univers virtuel. Le métavers aura à terme un impact sur tous les aspects de notre quotidien, y compris le travail. Pour le moment, les recruteurs se rendent compte que les jeunes ne sont pas encore présents massivement dans le métavers, mais ils commencent à se préparer à y attirer et recruter des talents pour les années à venir. Le métavers pourra dès lors devenir une nouvelle opportunité d’entrer en contact et d’interagir avec les jeunes.

États-Unis : la survie de la démocratie est-elle en jeu dans les élections de mi-mandat ?

24 lundi Oct 2022

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  1. Jérôme Viala-GaudefroyAssistant lecturer, CY Cergy Paris Université

Déclaration d’intérêts

Jérôme Viala-Gaudefroy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Personnes en tshirts et casquettes en l'honneur de Trump en train de prier pendant un meeting électoral
Des sympathisants républicains en prière avant un rassemblement « Save America » de Donald Trump, le 23 septembre 2022 à Wilmington, en Caroline du Nord. Allison Joyce/Getty Images via AFP

À l’approche des élections de mi-mandat du 8 novembre prochain, dans un discours controversé, le président Joe Biden a accusé les Républicains MAGA (acronyme de « Make America Great Again », le slogan de Donald Trump et de ses partisans) de « détruire la démocratie américaine » et d’être « une menace pour ce pays » et pour « les fondements mêmes de notre république ». Quelques jours auparavant, il avait déclaré que la philosophie de ces Républicains pro-Trump était « presque du semi-fascisme ».

Ces mots forts constituent une véritable rupture chez un président qui avait fait de la réconciliation nationale le cœur de sa rhétorique, répétant inlassablement sa volonté d’unifier et non de diviser le peuple dès l’annonce de sa victoire, puis dans son discours d’investiture.


À lire aussi : Le discours d’investiture de Joe Biden : un retour à la normale ?


Toutefois, il n’est pas le premier président à dénoncer d’autres Américains comme une menace existentielle pour la nation. Son prédécesseur, Donald Trump, avait ainsi désigné les journalistes qui le critiquaient comme des « ennemis du peuple ». Trump n’a d’ailleurs pas tardé à répliquer aux attaques de Biden en le qualifiant d’« ennemi de l’État. Quant au chef du groupe républicain à la Chambre des Représentants, Kevin McCarthy, il a déclaré que Biden avait raison de dire que « la démocratie est en jeu en novembre »… mais que c’étaient « Joe Biden et la gauche radicale à Washington [qui] sont en train de [la] démanteler ».

Qu’en est-il vraiment ? Ces propos des uns et des autres relèvent-ils d’une simple stratégie électoraliste visant à mobiliser les électeurs, ou bien la démocratie est-elle vraiment en jeu en novembre ?

Une opinion publique inquiète mais divisée sur la question de la démocratie

Il semble en tout cas qu’une majorité d’États-Uniens (69 %), Républicains comme Démocrates, considèrent que la démocratie est « en danger d’effondrement », selon un récent sondage de l’université Quinnipiac.

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Il faut dire que, pour la première fois de l’histoire des États-Unis, un président sortant n’a toujours pas reconnu sa défaite, affirmant même avoir obtenu une « victoire écrasante », et n’exprime aucun regret pour avoir incité ses partisans à l’insurrection en se lançant à l’assaut du Capitole afin de bloquer la certification des résultats du vote du collège électoral.


À lire aussi : Trump : le chaos jusqu’au bout


L’inquiétude commune du pays cache cependant de profondes divisions : d’après un sondage réalisé par CBS, si une majorité des sondés citent comme menace majeure les « personnes qui tentent de renverser les élections », aux yeux des Républicains ce sont les « personnes qui votent illégalement » qui représentent l’une des menaces les plus graves.

En outre, alors même que nombre d’analyses sérieuses, y compris universitaires, ont clairement démontré qu’il n’y avait aucune preuve de fraude électorale qui aurait pu changer le résultat de la présidentielle de 2020, force est de constater que, sondage après sondage, une large majorité de Républicains (70 %) continuent de contester la légitimité de Joe Biden, refusant de croire qu’il a réellement remporté cette élection.

Les tshirts en vente lors des meetings républicains proclament souvent que Joe Biden n’est pas le véritable président des États-Unis. Jeff Swensen/AFP

Cette remise en cause de la légitimité d’un président n’est pas entièrement nouvelle : en 2016, 72 % des électeurs républicains doutaient toujours de la citoyenneté du président Obama (en 2000, les Démocrates étaient sceptiques quant à l’élection de George W. Bush, mais la situation était bien différente, et surtout, Al Gore avait, lui, reconnu sa défaite).

De plus, la remise en cause du résultat des élections – un principe de base de la démocratie – a été soutenue par une majorité d’élus républicains. Au lendemain de l’attaque du Capitole, près des deux tiers des Représentants républicains à la Chambre avaient refusé de valider les résultats de l’élection présidentielle. Une majorité des sénateurs républicains ont, quant à eux, refusé pour la seconde fois de voter en faveur de la destitution de Donald Trump, cette fois pour « incitation à l’insurrection » après l’assaut du Capitole, ce qui aurait empêché l’ancien président de se présenter aux présidentielles de 2024.

Le vote : une affaire très locale

Alors que les élections de mi-mandat sont traditionnellement un scrutin sur le bilan, notamment économique, de l’administration élue deux ans plus tôt, la campagne de 2022 prend une tournure tout à fait inédite.

Tout d’abord parce que jamais un ancien président n’a dominé les primaires d’une élection de mi-mandat comme l’a fait Donald Trump. Il a ainsi soutenu plus de 200 candidats, non seulement au niveau fédéral mais également au niveau local. Car si le scrutin intermédiaire de novembre 2022 renouvelle l’ensemble des 435 sièges de la Chambre des Représentants, ainsi qu’un tiers des 100 sièges du Sénat au niveau fédéral, il concerne également des centaines d’élections locales : seront mis en jeu des postes de gouverneurs, de secrétaires d’État, de procureurs généraux locaux, et la plus grande partie des assemblées législatives locales. Or, il ne faut pas oublier que dans le système fédéral des États-Unis, ce sont les États, et non le pouvoir fédéral, qui sont en charge de l’organisation des élections.

Selon la Constitution de chaque État, les gouverneurs et les secrétaires d’État peuvent avoir un pouvoir de contrôle plus ou moins important sur les élections, même s’ils ne peuvent, à eux seuls, renverser les résultats d’une élection. On se souvient que, le 2 janvier 2021, après la présidentielle, Donald Trump avait demandé au secrétaire d’État de Géorgie, Brad Raffensperger, de « trouver 11 780 voix » afin de modifier le résultat final en sa faveur (en Géorgie, Trump accusait un retard de 11 779 voix sur Biden), transformant ainsi instantanément un poste de second plan, non partisan et administratif, en une fonction politique, partisane et très médiatisée.

Personnes brandissant des pancartes « Save America »
Pour les Républicains, comme ici lors d’un meeting le 17 août 2022 à Youngstown (Ohio), les prochaines élections doivent permettre tout simplement de « sauver l’Amérique » du danger que représentent les Démocrates. De leur côté, ces derniers emploient une rhétorique très proche. Jeff Swensen/AFP

Cette année, lors des primaires républicaines, Trump a fait du déni du résultat de l’élection présidentielle de 2020 un test de loyauté essentiel au sein du Parti républicain. Les résultats vont dans son sens : aux midterms, 60 % des Américains auront la possibilité de voter en faveur d’un candidat qui nie le résultat des élections de 2020. Il s’agit non seulement de faire du 8 novembre une revanche de la présidentielle 2020, mais aussi de préparer la présidentielle de 2024. Et, en cas de défaite en 2024, si ce n’est dès 2022, de pouvoir contester, bloquer, voire confisquer l’appareil électoral, ce qui pourrait potentiellement conduire à une crise constitutionnelle.

L’extrémisme, une stratégie risquée qui ne paie pas forcément

Historiquement, les candidats les plus extrémistes qui gagnent les primaires réduisent les chances de leur parti de gagner les élections générales.

Ce constat a poussé les Démocrates de certains États à mettre en œuvre une stratégie risquée et quelque peu cynique : financer des campagnes publicitaires visant à mettre en avant les candidates républicains les plus extrêmes dans les primaires, en les liant à Donald Trump par exemple, dans l’espoir de les battre plus facilement dans les élections générales.

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Si cette stratégie a fonctionné par le passé, elle pourrait se retourner contre eux dans un environnement hautement polarisé où l’appartenance à un parti se confond de plus en plus avec un sentiment d’identité.

L’autre espoir des Démocrates est la question du droit à l’avortement. Elle est devenue un enjeu local démocratique majeur depuis que ce droit n’est plus garanti au niveau fédéral, suite à l’arrêt Dobbs de la Cour suprême en juin dernier.


À lire aussi : Fin du droit à l’avortement aux États-Unis : moins de démocratie, plus de religion


À en croire le vote test du Kansas cet été, même les électeurs d’un État très conservateur restent largement favorables au maintien de la garantie constitutionnelle sur l’avortement. En outre, l’augmentation conséquente du nombre de femmes inscrites sur les listes électorales pour ce scrutin pourrait indiquer qu’il s’agit là d’un sujet mobilisateur.

L’ironie de l’histoire est que ce sont, désormais, les Démocrates qui mettent en avant des questions morales et sociétales et livrent aux Républicains, à leur tour, une guerre dite « culturelle ». Ces derniers, de leur côté, et même si l’immigration et la criminalité restent pour eux des sujets de prédilection, cherchent avant tout à maintenir l’attention sur les questions économiques comme l’inflation, actuellement galopante – ce qui, en temps normal, suffirait probablement à leur assurer une victoire écrasante.

Un scrutin essentiel

Ainsi, la transformation d’un scrutin intermédiaire en « match retour » de la présidentielle de 2020 (entre un président relativement impopulaire et un ex-président encore plus impopulaire et radicalisé, à l’image des candidats qu’il soutient) rend les pronostics bien incertains.

Si la question de l’avenir de la démocratie est donc bien l’un des enjeux de ces élections, c’est aussi parce que, au-delà de Trump lui-même, ce qui s’y joue, c’est l’emprise du trumpisme et du négationnisme de la réalité sur un Parti républicain en guerre avec lui-même.

PlantNet, eBird, Spipoll, iNaturalist… ces applis au service de l’i-écologie

23 dimanche Oct 2022

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auteurs

  1. Pierre BonnetChercheur en Botanique et Informatique appliqué à la biodiversité, Cirad
  2. Alexis JolyDocteur en informatique, Inria

Déclaration d’intérêts

Pierre Bonnet est responsable du projet Pl@ntnet. Il a reçu des financements de la Fondation Agropolis, l’ANR, l’ANRU, l’Institut de convergence #DigitAG, et l’Union européenne.

Alexis Joly est responsable du projet Pl@ntnet. Il a reçu des financements de la Fondation Agropolis, l’ANR, l’ANRU, l’Institut de convergence #DigitAG, et l’Union européenne.

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Personne identifiant une plante à l'aide de son smartphone
L’application Pl@ntnet permet à partir d’un smartphone de reconnaître une espèce et la recenser pour contribuer à son étude. Pl@ntnet

Le déclin alarmant de la biodiversité terrestre menace le bien-être futur de l’humanité, notamment par la réduction de tous les services (dit « écosystémiques ») auxquels cette biodiversité contribue.

L’amélioration des connaissances sur les pressions qui s’exercent sur le vivant – fragmentation des habitats, urbanisation croissante ou intensification agricole – a permis une large prise de conscience de la société civile, qui se mobilise désormais contre les causes du changement climatique et pour une meilleure conservation des espèces vivantes.

Le manque d’expertise taxonomique – qui désigne notre capacité à identifier les espèces – est reconnu depuis près d’une trentaine d’années comme un frein majeur à l’application de la Convention sur la diversité biologique.

C’est pourquoi de nombreuses initiatives à travers le monde expérimentent de nouvelles formes d’accès à cette connaissance taxonomique.

Certaines d’entre elles visent à répondre à la demande croissante de connaissances, tout en impliquant la société dans la caractérisation et l’étude de son environnement. Elles participent ainsi au développement de plates-formes de sciences participatives pour le suivi des oiseaux, comme eBird, des insectes pollinisateurs, comme Spipoll, ou encore de la biodiversité dans son ensemble, comme iNaturalist.

L’exemple de la plate-forme Pl@ntNet

Les plantes représentant l’une des sources majeures de notre alimentation et de la structuration des écosystèmes, quelques plates-formes se sont spécialisées dans leur identification et leur recensement.

C’est le cas de Pl@ntNet, initiée il y a plus d’une dizaine d’années, par un consortium de recherche français (Cirad, Inrae, Inria, IRD), et qui mobilise des expertises complémentaires, à la frontière entre sciences informatiques et sciences du végétal.Présentation de l’application Pl@ntNet (Inria, 2014).

Cette plate-forme de science participative, utilisée aussi bien par le grand public que par des professionnels de la gestion et de la conservation, est aujourd’hui l’une des principales sources d’information sur les plantes au sein du système d’information mondial sur la biodiversité, le GBIF.

Elle expérimente et développe des services d’identification automatisée des plantes par l’image, qui permettent à partir d’un smartphone de rapidement reconnaître une espèce et la recenser pour contribuer à son étude.

Avec plusieurs centaines de milliers d’utilisateurs journaliers, et un nombre croissant de contributeurs depuis sa création (statistiques Pl@ntNet), elle permet aujourd’hui le recensement de plus de 43 000 espèces de plantes à l’échelle mondiale.

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Les données qu’elle génère ont été utilisées dans un grand nombre d’études différentes, que ce soit dans le suivi des espèces envahissantes, sur les biais de collecte de données issues des programmes de sciences participatives, dans des travaux en sciences informatiques, ou encore pour l’étude des espèces à plus large échelle (dont les publications sur les données publiées au Gbif).

Vers le développement d’une i-écologie

La force de ces nouvelles plates-formes naturalistes repose sur trois aspects principaux :

  • leur très grande accessibilité (applications web et mobiles gratuites, multilingues, avec authentification facultative) ;
  • leurs performances liées aux vastes corpus de données sur lesquelles elles s’appuient ainsi qu’à l’usage de l’intelligence artificielle qui contribue à rapidement identifier les espèces par des données multimédias ;
  • leur visibilité qui résulte de l’intérêt grandissant de la société civile pour ce type de démarche.

Ces plates-formes contribuent ainsi au développement d’une nouvelle approche scientifique en écologie, intitulée l’i-Ecology (i-écologie), qui permet d’apporter un soutien précieux aux approches plus conventionnelles.

Malgré les efforts d’initiatives comme eBird, Pl@ntNet et iNaturalist, ou encore des sites et projets universitaires, pour caractériser les espèces à l’échelle mondiale, reste que près de la moitié des plantes sur Terre n’ont certainement jamais été photographiées à l’état sauvage !Présentation de l’application eBird. (Cornell Lab of Ornithology, 2018).

Mobiliser toujours plus d’observateurs

Ce constat de notre méconnaissance de la biodiversité engage à poursuivre les efforts initiés pour renforcer notre capacité à recenser toutes ces espèces qui nous entourent, plus facilement et plus rapidement. Dans cet objectif, la mise en commun des expertises et des données est indispensable pour accélérer la caractérisation de la distribution de la biodiversité.

La numérisation des collections d’histoire naturelle, à travers des initiatives telles qu’iDigBio ou e-ReColNat, constitue un pas important en ce sens. Elles doivent être complétées par des observations sur le terrain, produites en plus grand nombre, pour permettre de connaître tout le gradient visuel exprimé par les espèces. Comment sinon protéger les espèces en danger si on ne peut les reconnaître ? !

Les techniques automatiques d’identification d’espèces imaginées par Gaston et O’Neill en 2004 ont énormément progressé au cours des quinze dernières années. Elles permettent aujourd’hui d’envisager des approches intégrées au sein de dispositifs autonomes, que ce soit pour le suivi d’espaces naturels ou agricoles.

Le passage à l’échelle de ce type d’approche nécessite toutefois un nombre bien plus important d’observations et d’observateurs de terrain. C’est pourquoi, plus que jamais, les réseaux citoyens de suivi de la biodiversité doivent poursuivre leur développement en favorisant le partage de données libres, tout en répondant aux attentes d’une meilleure connaissance de notre environnement proche.

Ces technologies sont au cœur de plusieurs initiatives européennes d’ampleur en cours et à venir – on peut citer Cos4Cloud, EU-MAMBO et EU-GUARDEN –, ce qui permettra sans nul doute leur plus large exploitation dans le futur.

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