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Archives Mensuelles: avril 2023

Santé et environnement, comment réinventer le périphérique de Paris ?

30 dimanche Avr 2023

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  1. Éloi LaurentEnseignant à Sciences Po et à l’Université de Stanford, économiste senior à l’Observatoire français des conjonctures économiques, Sciences Po

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Éloi Laurent ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Le boulevard périphérique parisien, inauguré par le premier ministre Pierre Mesmer le 25 avril 1973, ne fête que son demi-siècle, mais, pour beaucoup, il incarne déjà la préhistoire urbaine. Monument de nuisances dont les bénéfices ont été épuisés, il concentre tout ce dont on ne veut plus dans les villes du XXIe siècle : la congestion, le bruit, les îlots de chaleur urbains, les émissions de CO2 et de particules fines, la mobilité thermique individuelle mais aussi le séparatisme social. Alors qu’il devait relier, connecter, accélérer, il est devenu une double enceinte qui fige le petit Paris et enferme les automobilistes dans leur propre pollution.

Au mois de janvier dernier, lors d’une matinée organisée par le club Ville hybride, Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la Mairie de Paris en charge (notamment) de l’Urbanisme, de l’architecture et du Grand Paris, déclarait que détruire le périphérique était « un fantasme ». Certes, mais comment le reconstruire ? Revêtements antibruit, végétalisation, voie réservée aux usages collectifs, couverture de certaines portions, passage de 4 à 3 files : les projets ne manquent pas pour actualiser le périphérique et sont au cœur des travaux de l’Atelier parisien d’urbanisme.

Si une consultation vient d’être ouverte sur les « modalités du projet de voie dédiée au covoiturage et aux transports collectifs », ce sont toutes les voies possibles de l’avenir du périphérique qu’il faudrait ouvrir à projet. Les concepts forgés par l’économie du bien-être pourraient ici servir de boussole.

Une infrastructure est aussi sociale et écologique

La première question est de savoir ce que l’on entend par « infrastructure ». Pour Karl Marx, il s’agit d’une fondation constituée de forces productives et de rapports de production sur laquelle repose une superstructure, elle-même à deux étages : les institutions et les idéologies.

Très récemment, cet enjeu de définition a été soulevé outre-Atlantique autour du plan d’investissement voulu par le président démocrate américain Joe Biden. En novembre 2021, le Congrès n’adoptait qu’un des trois piliers du plan initial, celui intitulé « infrastructures », compris au sens étroitement matériel du terme : 1 200 milliards de dollars étaient engagés sur dix ans pour entretenir les ponts, les routes et permettre le déploiement d’une connexion Internet haut débit partout sur le territoire américain.

Les débats aux États-Unis autour du plan d’investissement voulu par le Président Biden ont retenu une définition très matérielle du terme infrastructure. Flickr, CC BY-SA

Mais la société américaine, dans laquelle l’espérance de vie continue de baisser inexorablement alors qu’elle a rebondi dans les pays comparables après le pire du Covid, a tout autant besoin de nouvelles fondations sociales et environnementales. Il faudra attendre jusqu’en août 2022 pour arracher aux Républicains un plan sur le climat et la santé, à hauteur de 370 milliards de dollars, très loin des quelque 1 750 milliards espérés par les progressistes : des mesures capitales pour la transition énergétique, les soins ou l’accès à l’université en ont été retirées.

Aux États-Unis, les superstructures continuent donc de saper les infrastructures sociales et écologiques. Comment, en Île-de-France, faire mieux et penser des infrastructures social-écologiques urbaines à partir de l’économie du bien-être ? Quel visage aurait le périphérique dans la ville post-croissance ?

Quel Paris post-croissance ?

Le premier visage de la ville post-croissante est la ville décroissante, objet encore largement impensé dans la littérature académique. On peut distinguer trois décroissances urbaines par ordre décroissant (tant qu’à faire) d’importance. La première décroissance, sans doute la moins explicite et pourtant la plus essentielle, est la désartificialisation des sols, dans la foulée de la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 et des principes de sobriété foncière et de densification urbaine. Cela pourrait bien s’avérer être, à bas bruit, la première politique de décroissance française.

La deuxième décroissance est la démétropolisation, qui vise à réduire la taille des plus grandes villes françaises pour les ramener à des proportions à la fois socialement et écologiquement soutenables. C’est la figure de la ville moyenne, particulièrement saillante dans l’après-pandémie de Covid (mais aussi de manière intrigante dans la cartographie du mouvement social de début 2023 contre la réforme des retraites) qui s’impose dans le paysage français comme alternative souhaitable à la métropole globale.

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La troisième décroissance, enfin est la décélération urbaine, qui vise à réduire non pas seulement les volumes de flux de matière consommée par les villes (métabolisme urbain) mais la vitesse des flux humains dans les villes. La « ville du quart d’heure » en est le mot d’ordre paradoxal, masquant en partie l’enjeu de la décélération numérique.

Une ville de la coopération

Le deuxième visage de la ville post-croissance est déjà expérimenté à Bruxelles et Amsterdam. Il s’agit de la ville du Donut, modèle inspiré des travaux de l’économiste Kate Raworth. Il vise à trouver pour chaque endroit un plancher social et un plafond écologique entre lesquels situer les activités : un minimum de consommation de ressources s’avère nécessaire pour satisfaire des besoins élémentaires mais il y a également des seuils dangereux à franchir.

Kate Raworth tente avec son équipe de mettre en œuvre ses intuitions théoriques dans un Doughnut Economics Action Lab (DEAL), lequel a inspiré le projet Brussels Donut. Celui-ci propose notamment de répondre de manière empirique, cohérente et intégrée aux quatre questions suivantes : « que signifierait pour les habitants du territoire de vivre une vie épanouie ? », « que signifierait pour le territoire de prospérer dans son habitat naturel ? », « que signifierait pour le territoire de respecter le bien-être de toutes les personnes à travers le monde », « que signifierait pour le territoire de respecter la santé de la planète ? ».

Le troisième et dernier visage de la ville post-croissance est la ville du bien-être, qui mettrait la coopération sociale et la pleine santé (aussi bien physiologique que psychologique, individuelle que collective, humaine qu’écologique) au cœur des politiques territoriales. Cette ville du bien-être n’est pas une ville de l’attractivité : sa priorité est le bien-être des personnes qui vivent sur son territoire plutôt que celui des personnes qui n’y vivent pas mais voudraient y faire vivre leur capital.

Trois initiatives récentes permettent de mieux l’envisager. La première, initiée à Grenoble, consiste à proposer de piloter la ville avec des indicateurs de santé-environnement pour en déduire des politiques publiques visant les co-bénéfices et la justice environnementale. Des indicateurs produits récemment pour la métropole de Lyon permettent de même d’imaginer ce type de pilotage. La deuxième, en cours dans la capitale des Gaules, consiste à partir d’une enquête sur le bien-être des habitants pour en déduire des priorités de financement public. Enfin, à Uzès, dans le Gard, il s’agit de partir de la santé des habitants pour construire de manière collective des moyens de se protéger des chocs écologiques, à commencer par les canicules et la sécheresse, qui s’installent pour longtemps en France.

Au cœur de cette ville du bien-être se déploie la coopération plutôt que la collaboration. On pourrait penser ces termes synonymes, mais la collaboration s’exerce au moyen du seul travail, pour une durée et un objet déterminés tandis que la coopération fait appel à l’ensemble des capacités humaines, sur un horizon long, dans un processus libre de découvertes mutuelles.

Forêts urbaines

On le voit, les mondes de la post-croissance émergent et évoluent dans l’univers urbain, en France comme ailleurs, aussi loin de leurs caricatures que proches des réalités et défis de leur temps. Alors que ces approches fleurissent et convergent partout en Europe, la grande transformation du périphérique parisien peut-elle se réduire à se mettre au niveau des autoroutes américaines d’il y a 50 ans (la première voie à usage collectif, bus et co-voiturage, a en effet été ouverte à Washington en 1973, année d’inauguration du périphérique) ?

Les projets de transformations des portes en place, comme ceux en cours porte Maillot ou en débat porte de Montreuil, dessinent pourtant de nouveaux horizons : recoudre Paris avec les communes limitrophes et favoriser la coopération entre territoires comme entre habitants. Les espaces d’échangeurs, pensés dans une optique de fluidifier et d’optimiser la circulation automobile, auraient vocation à devenir des lieux de vie.

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L’exécutif parisien recherche d’ailleurs des espaces pour implanter des forêts urbaines et pourrait vouloir faire du périphérique une ceinture verte, c’est-à-dire aussi une ceinture de fraîcheur pour affronter les canicules. Les bénéfices en matière de santé et de justice seraient considérables : les études d’Airparif et Bruitparif montrent que les abords du périphérique constituent de véritables points noirs en matière de pollutions atmosphérique et sonore avec des conséquences néfastes sur la santé des plus vulnérables (400 000 personnes seraient exposées à des risques liés aux particules fines, 140 000 vivant dans un environnement qui excède les seuils de bruit recommandés par l’Organisation mondiale de la Santé), sans parler d’un Paris à 50 degrés.

À la nécessité de construire une infrastructure de pleine santé correspond la nécessité de la concevoir comme une transition juste, à laquelle les habitants seraient pleinement associés. C’est certainement ambitieux, mais l’idée était au cœur des Routes du futur du Grand Paris et elle pourrait remettre le bien-être humain, la justice sociale et la participation démocratique, aujourd’hui périphériques, au centre des politiques franciliennes.

Le mal des transports va-t-il augmenter avec les voitures de demain ?

29 samedi Avr 2023

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  1. William EmondDoctorant sur le thème de la réduction du mal des transports en voiture, Université de Technologie de Belfort-Montbéliard

Déclaration d’intérêts

William Emond reçoit dans le cadre de sa thèse un financement de la société Mercedes-Benz AG.

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Nous sous-estimons trop souvent l’importance de nos fonctions d’équilibre. Et pourtant, qu’un détail vienne les perturber et c’est la chute ou… le mal des transports ! L’être humain a découvert à son corps défendant les désagréments de la « cinétose » à mesure qu’il multipliait ses moyens de déplacement.

On estime que 25 à 30 % de la population y est régulièrement sujette – un chiffre qui pourrait être sous-évalué, tant ce phénomène est mal compris : on le résume souvent à des symptômes de malaise (nausée, sueurs, pâleur, hypothermie, maux de tête, vomissements) alors qu’il peut aussi se manifester sous des formes plus légères comme la somnolence, l’apathie ou une diminution des capacités cognitives. 60 à 70 % des voyageurs l’expérimenteraient au moins une fois dans leur vie.

C’est à bord des voitures qu’on en fait le plus fréquemment les frais. Les passagers y sont plus sensibles que le conducteur par manque d’anticipation des trajectoires. Les conflits entre les informations apportées par nos différents sens perturbant notre d’équilibre et les difficultés à ajuster notre posture pour nous y adapter sont les deux principales théories pour l’expliquer de façon générale.


À lire aussi : Comment explique-t-on le mal des transports ?


On aurait pu croire que, depuis plus d’un siècle que l’automobile se développe, ce problème serait résolu. Il n’en est rien. Et alors qu’elle est en pleine métamorphose technologique, des bouleversements tels que l’électrification, la digitalisation et l’automatisation des véhicules apportent leur lot de bénéfices… comme de nouvelles problématiques.

Quelques-unes de ces évolutions risquent en l’occurrence de créer ou d’accentuer ce fameux déséquilibre ressenti et de limiter encore la capacité d’anticipation des usagers. De ce fait, elles amplifient le risque de ressentir plus souvent des symptômes de malaise. Voici celles dont les effets sont déjà documentés.

L’électrification : moins de repères et des mouvements plus brusques

Un moteur électrique de voiture est plus linéaire et silencieux qu’un moteur thermique. Cet atout a un revers : il peut gêner les usagers dans leur capacité d’assimilation du mouvement du véhicule – par exemple ceux habitués à estimer l’accélération aux bruits du régime moteur, et pour qui le silence d’un moteur électrique signifie la perte d’un repère.

De même, les vibrations du moteur thermique sont parfois perçues comme apaisantes. Poser leur tête contre la fenêtre vibrante est en effet bénéfique à certains passagers. Ces mêmes vibrations sont presque intégralement supprimées dans une voiture électrique.

L’adoption du freinage régénératif (permettant de récupérer de l’autonomie électrique lors des décélérations) peut également être perturbante. Les décélérations induites par ce système, généralement de basse fréquence et parfois franches, peuvent être particulièrement déstabilisantes. Tout comme, inversement, les à-coups d’accélérateur, susceptibles d’induire des mouvements brusques en raison du couple élevé et disponible des ces moteurs.

Des intérieurs digitalisés qui incitent à la distraction

Autre avancée technologique à risque : la présence croissante des écrans, toujours plus grands et toujours plus nombreux, à l’intérieur des véhicules. Car au-delà de leur capacité technologique et leur attractivité aux yeux de l’utilisateur, ces écrans le « surchargent » d’informations visuelles.

Leur omniprésence encourage la distraction, au risque là encore de créer un conflit entre les informations visuelles et inertielles sur le mouvement reçues par le corps. En se concentrant sur le contenu d’écrans, un passager restreint ses capacités à assimiler les « bons » signaux visuels, qui lui permettent de percevoir correctement sa position et sa vitesse dans l’espace – à savoir la vue extérieure du véhicule. C’est la raison pour laquelle il est déconseillé de se concentrer sur un livre ou un écran lors d’un trajet mouvementé…

Illustration d’un intérieur de voiture avec des écrans disponibles partout
Intégrer des écrans partout, sur le tableau de bord, au niveau des vitres, etc. pourrait être une fausse bonne idée. Car ils nuisent à nos capacités à lutter contre le mal des transports. metamorworks/Shutterstock

Cette tendance à l’implantation d’écrans risque de s’accentuer au cours des prochaines années, avec des véhicules qui pourraient même associer des écrans aux fenêtres ou proposer l’intégration de réalité virtuelle. Autant d’éléments invasifs pour les passagers, qui peuvent impacter leur bien-être…

Savoir que l’on risque plus facilement de souffrir de nausée en étant bloqué dans un espace surchargé d’écrans peut en effet stresser des passagers vulnérables. C’est une problématique qui n’a rien d’anodin quand on sait que l’état psychologique a une forte influence sur la cinétose : jusqu’à 40 % de la sévérité des symptômes peut en effet lui être imputé.

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Conduite autonome et manque d’anticipation

La course au véhicule autonome lancée ces dernières années entre les différents constructeurs automobiles aura aussi, vraisemblablement, un impact.

Pour l’heure, les véhicules ne sont équipés que d’un niveau partiel d’automatisation… mais à l’avenir, ils seront capables de se piloter seuls. C’est-à-dire que la tâche de conduite, meilleur moyen d’anticiper les trajectoires et de limiter les symptômes, est vouée à disparaître sur le long terme.

Pour ceux qui ont toujours conduit, la situation risque d’être compliquée. Notre susceptibilité d’être sujet au mal des transports dépendant en partie de notre habitude à être simple passager, les conducteurs réguliers pourraient ainsi se découvrir sensibles à la cinétose au point d’être inaptes à voyager dans des véhicules hautement autonomes.

De plus, avec la disparition du poste de conduite, les habitacles seront repensés pour devenir plus accueillants, à l’image de salons roulants. Ces nouvelles configurations offriront davantage de liberté aux passagers qui pourraient par exemple orienter leur siège dos à la route pour discuter avec d’autres occupants. Or, dans l’inconscient collectif, s’asseoir dos à la route est associé à un risque accru de malaise. Bien que des expériences ont montré que cela ne fait aucune différence, cette idée peut constituer un biais psychologique facilitant l’apparition de symptômes.

Illustration d’un intérieur de voiture sans volant et avec les 4 sièges se faisant face
Faire disparaître le poste de conduite pour réorganiser complètement l’habitacle pourrait être préjudiciable. Beaucoup ne supportent pas de ne pas conduire ou de se trouver dos à la route. Chesky/Shutterstock

Permettre à ses passagers de consacrer leur temps de trajet « inutile » à des activités ludiques ou de productivité est une des promesses du véhicule autonome. Mais, on l’a vu, l’utilisation d’écrans entraîne une distraction des « bons » signaux visuels, ce qui favorise l’apparition du mal des transports. La popularisation des voyages en taxi et VTC, où les utilisateurs ont les yeux rivés sur leurs tablettes et autres portables, a d’ores et déjà confirmé cette tendance.

Il est enfin à noter que dans des véhicules non autonomes, l’incidence de cinétose reste modérée, car les conducteurs peuvent adapter leur style de conduite si leurs passagers font part d’un malaise. Or, cette dimension humaine disparaîtra dans les véhicules autonomes, dont le style de conduite sera moins flexible et moins naturel que celui d’un conducteur humain.

Le stress ou le manque de confiance associé à ce mode de conduite pourraient là encore devenir des facteurs aggravants.

L’être humain, principal obstacle aux évolutions technologiques ?

Les multiples facteurs cités pourraient donc pénaliser l’émergence du « véhicule de demain », autonome et électrique, initialement supposé accroître la mobilité et accessible au plus grand nombre d’usagers.

En l’absence de moyens efficaces pour la contrer, il est possible qu’une hausse des cas de mal des transports dans ces véhicules pousse à leur rejet. Si l’on prend en compte les dimensions éthiques, psychologiques et légales liées à leur développement, le facteur humain constitue ainsi le principal obstacle à l’introduction de ces nouveaux types de véhicules.

Pour ces mêmes raisons, on assiste depuis plusieurs années à un intérêt croissant des constructeurs et équipementiers automobiles pour ce phénomène afin de mieux le comprendre et enfin le réduire efficacement… non pour des raisons d’intérêt public, mais parce qu’il compromettrait l’adoption de ces nouvelles technologies.

À ce jour, les causes et mécanismes de déclenchement de la cinétose ne sont toujours pas clairement élucidés, aussi la recherche industrielle se concentre sur comment limiter son apparition. Des pistes sont en cours d’étude. On peut notamment citer l’utilisation de signaux visuels, sonores et tactiles pour aider l’usager à mieux percevoir et anticiper les mouvements du véhicule, ou encore la programmation d’un style de conduite confortable, imitant celui d’un être humain et limitant les accélérations brusques.

Audiovisuel : sanctionner sans censurer, la difficile mission de l’Arcom

28 vendredi Avr 2023

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  1. Arnaud MercierProfesseur en Information-Communication à l’Institut Français de presse (Université Paris-Panthéon-Assas), Auteurs historiques The Conversation France

Déclaration d’intérêts

Arnaud Mercier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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Cyril Hanouna  a insulté le député LFI Louis Boyard sur le plateau de son émission Touche pas à mon poste en novembre 2022.
Après les insultes proférées par Cyril Hanouna contre le député LFI Louis Boyard, C8 a écopé d’une amende record de 3,5 millions d’euros. Capture d’écran C8

Séquence après séquence, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle (Arcom) est saisie après la tenue de propos outranciers sur le plateau de Touche pas à mon poste, l’émission de Cyril Hanouna, diffusée sur C8. Sans que cela empêche ce genre de scène de se reproduire.

Voilà pourquoi dans sa « chronique médiatique » du 3 avril dernier, sur France Inter, le journaliste Cyril Lacarrière pose une question un brin provocatrice : « À quoi sert encore l’Arcom ? », et de répondre, désabusé : « en regardant la télé, on peut parfois être tenté de répondre : à rien ! »

À l’heure où les attaques tombent contre la supposée frilosité de l’Arcom, il est indispensable de revenir sur l’histoire de cette autorité administrative et sur la philosophie qui sous-tend ses décisions.

L’Arcom est l’héritière d’une succession d’organismes ayant pour vocation d’introduire une régulation dans le monde de l’audiovisuel, qui serait, idéalement, séparée du pouvoir politique.

Quand l’audiovisuel public servait les intérêts du pouvoir

Du temps de la RTF-Radiodiffusion-télévision française-, puis de l’ORTF (Office de radiodiffusion-télévision française) créée en 1964, à une époque où prévalait un quasi-monopole public sur les ondes, l’exécutif gouvernemental considérait que l’audiovisuel public devait servir les intérêts du pouvoir en place, au prix d’un mépris pour l’accès démocratique à l’antenne des forces d’opposition.

Comme le résuma abruptement le président Georges Pompidou en juillet 1970, l’ORTF, « qu’on le veuille ou non » est « la voix de la France », dans un contexte où tout le monde comprit qu’il fallait entendre la voix de son maître.

Mais la montée des idéaux libertaires après Mai 68 et l’avènement des radios pirates après 1975, dites « radios libres », ont sonné le glas d’un contrôle politique. Celui-ci, jusque-là, inféodait les journalistes et livrait les journaux télévisés et radio à la supervision d’une hiérarchie qui devait son poste au bon vouloir des gouvernants, comme nous l’avons montré dans un ouvrage sur le sujet.


À lire aussi : Les radios libres, un moment révolu de l’histoire des médias


Voilà pourquoi, en 1981, figurait parmi les promesses de campagne du candidat Mitterrand, l’instauration d’une autorité administrative indépendante visant à couper le cordon ombilical entre le pouvoir et l’audiovisuel.

Vers un peu d’indépendance

Ce sera chose faite dès 1982 grâce à la loi sur la communication défendue par Georges Fillioud, créant la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (Haca), « chargée notamment de garantir l’indépendance du service public de la radiodiffusion sonore et de la télévision », dit le texte.

La Haca est aussi chargée de veiller « au respect du pluralisme et de l’équilibre dans les programmes ; au respect de la personne humaine et de sa dignité, de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la protection des enfants et des adolescents ».

Elle nomme les administrateurs dans les conseils d’administration des sociétés publiques de l’audiovisuel et désigne leurs présidents. Elle délivre également les autorisations d’émettre et supervise les cahiers des charges des chaînes.

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Mais l’indépendance est loin d’être totale puisque le processus de nomination reste complètement politique, calqué sur celui du Conseil constitutionnel. L’instance est composée de neuf membres : trois désignés par le président de la République, trois par le président de l’Assemblée nationale, trois par celui du Sénat.

Cette création marque un premier pas modeste vers une autonomisation de l’audiovisuel public vis-à-vis du pouvoir, qui n’exclura pas des retours en arrière.

« Guéguerre » politique stérile

En 1986, la droite arrivée au pouvoir fait voter une loi Communication et liberté, qui introduit notamment la privatisation de TF1 et qui abolit la Haca pour installer une autre commission, aux pouvoirs très similaires, appelée Commission nationale communication et liberté (CNCL).

Cela a permis de changer les titulaires en place avant la fin de leur mandat pour placer des personnalités plus proches politiquement.

Pour ne pas être en reste, les socialistes, de retour aux affaires en 1988, firent voter une nouvelle loi en janvier 1989 pour attaquer le CNCL et créer le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA, doté peu ou prou des mêmes pouvoirs, et conservant des principes de nomination politiques et identiques).

Cette « guéguerre » stérile, signe d’une forte immaturité politique, prit fort heureusement fin avec cette troisième loi en sept ans… instaurant globalement la même instance de régulation.

Le CSA garant du pluralisme

Le CSA a donc pu s’installer durablement dans le paysage audiovisuel et administratif français, gagner ses lettres de noblesse par sa jurisprudence, accédant peu à peu à son autonomie (certes toujours un peu relative puisque les nominations restent politiques et que les rapports de force perdurent).

Le CSA a joué son rôle de régulateur, en contrôlant le temps de parole politique, singulièrement en période électorale. Son rôle a aussi été de contrôler le respect du cahier des charges des opérateurs audiovisuels et de nommer et révoquer les PDG des médias publics. En janvier 2018, le CSA a ainsi décidé de retirer son mandat au président de Radio France Mathieu Gallet car il avait été condamné en justice pour favoritisme lorsqu’il dirigeait l’INA.

Autre apport, celui de quantifier et défendre l’expression des minorités – le CSA étant garant du respect du pluralisme. Les rappels à l’ordre en cas de dérapages à l’antenne et les sanctions financières ont pu constituer des outils de régulation.

Mais ses membres ont toujours eu en tête de ne jamais en faire une autorité de censure politique, comme au temps de l’ORTF.

Au 1er janvier 2022, le CSA a fusionné avec la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi, créée en 2009), pour devenir l’Arcom.

Cette fusion a pour principale motivation de mieux affronter un défi sociotechnique, celui de l’interpénétration du monde audiovisuel avec l’univers du numérique. Objectif : mieux appréhender les déstabilisations dans les contenus et les modèles économiques de l’audiovisuel face à l’essor de l’internet.

L’Arcom, régulateur de l’audiovisuel et du numérique

L’exécutif a donc créé un régulateur unique, avec ce double regard à la fois sur l’audiovisuel et sur le numérique, grâce à des compétences élargies et renforcées.

L’Arcom dispose en effet d’une gamme de sanctions contre les chaînes, dès lors qu’elles ne respectent pas leur cahier des charges, ou des principes d’équilibre, de pluralisme et de déontologie. On peut citer la suspension de la diffusion d’un programme, l’amende, et, l’arme atomique, le retrait de l’autorisation d’émettre. Mais cette instance prétend-elle faire plein usage de tous ses pouvoirs ?

En vérité, ce régulateur se trouve en situation de fragile équilibre, écartelé entre, d’un côté, son rôle de défenseur d’une certaine indépendance des médias, et de l’autre côté, celui de contrôleur des contenus pour faire respecter des principes éthiques et juridiques.

De cette tension naît une forme de prudence et de refus d’un interventionnisme tous azimuts. L’Arcom, comme le CSA par le passé, refuse d’apparaître comme le shérif du PAF. L’instance préfère manier l’arme de la conviction et de la concertation, comme lorsqu’elle a organisé un travail de réflexion avec les chaînes télévisées sur leur couverture des attentats de 2015. Le but était de leur faire prendre conscience de leurs égarements et d’aboutir à mieux couvrir ce type d’actualité « chaude » et sensible.

Face aux polémiques sur le défaut de réactivité de l’Arcom, son président, Roch-Olivier Maistre, s’est défendu, sur BFMTV de faire de l’ARCOM « une police de la pensée ».

Interrogé le 31 mars 2023 sur le fait de savoir si une surveillance particulière touchait Cyril Hanouna, il a répondu fermement :

« Il n’y a pas de surveillance particulière de tel ou tel. […] On fonctionne quand on signale des contenus. On n’intervient jamais a priori.[…] L’Arcom n’est pas une autorité de censure ».

Roch-Olivier Maistre, président de l’Arcom, entouré de la présidente de France Télévision Delphine Ernotte et de celui de TF1 Gilles Pelisson lors du débat de l’entre-deux tour de la présidentielle, le 20 avril 2022.

Face à un monde médiatique en pleine accélération, face aux polémiques instantanées sur les réseaux socionumériques, cette instance entend continuer à prendre son temps, se calant sur le rythme de la justice plutôt que sur celui de l’opinion publique.

L’Arcom est beaucoup intervenue face à CNews

L’Arcom instruit des plaintes, auditionne, délibère, rend des décisions à froid. C’est ce qui laisse bien des citoyens frustrés, ayant le sentiment qu’un dérapage avéré, devenu rapidement viral, demeure pas ou peu sanctionné, ou en tout cas pas assez vite.

Pourtant, si on prend l’exemple de CNews, dont nombre d’émissions ont généré des polémiques ou d’évidents abus l’Arcom est beaucoup intervenue.

L’association Sleeping Giants France, qui traque notamment les modes de financement des acteurs de la désinformation, a relevé le grand nombre de rappels à l’ordre et parfois de sanctions pécuniaires contre la chaîne.

Face à ces actions, deux problèmes émergent néanmoins. La chaîne Cnews conduite par un agenda idéologique réactionnaire semble n’en avoir cure.

La publicité apportée à ces décisions du régulateur dans les médias est très faible et sans commune mesure avec l’ampleur des polémiques qui ont initié une saisine de l’Arcom. C’est hélas un constat classique de la communication de crise concernant le fonctionnement des médias : une vive polémique initiale très reprise, mais une plus faible visibilité de l’éventuel démenti ou de l’arbitrage final.

Arrivant plusieurs mois après, énoncée avec une prudence de sioux, face à des acteurs médiatiques qui ont souvent les moyens financiers pour ne pas être ébranlés par une sanction pécuniaire, une décision de l’Arcom peut apparaître inaudible et accréditer l’idée fausse qu’elle n’agit pas. Sans doute est-ce à l’instance de repenser sa communication pour dissiper les malentendus qui entourent parfois son action.

Pompiers volontaires : pourquoi de telles difficultés à recruter ?

27 jeudi Avr 2023

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  1. Pauline BornDoctorante en Sciences de l’Éducation, Université de Bourgogne – UBFC

Déclaration d’intérêts

Pauline Born a reçu des financements de l’ANRT (thèse Cifre)

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Groupe de pompiers
Les femmes ont deux fois plus de risques que les hommes de rompre leur engagement au cours des premières années en tant que sapeur-pompier volontaire. Arles, 31 août 2011. a@k / Flickr

En France, les sapeurs-pompiers volontaires sont essentiels. Ils représentent 78 % des effectifs de pompiers et prennent en charge 67 % des interventions (secours d’urgence aux personnes, lutte contre les incendies, accidents de la route, risques industriels, protection de l’environnement…). Leurs missions, menées en parallèle de leur activité professionnelle, sont indispensables, et le ministère de l’Intérieur ne s’en cache pas, indiquant que les sapeurs-pompiers volontaires : « constituent le socle de notre modèle de Sécurité civile ». Or, les difficultés de recrutement sont réelles.

Une large partie de la population peut en théorie s’engager comme pompier volontaire. En pratique, on observe une forte homogénéité dans les rangs, composés d’une majorité d’hommes, jeunes et issus de milieux populaires. Si l’âge peut constituer un facteur assez facilement compréhensible, le sexe et l’origine sociale méritent une attention plus particulière. Ainsi, près de cinquante ans après qu’elles aient pu s’engager pour la première fois, les femmes ne représentent toujours que 20 % des effectifs. De surcroît, moins de 1 % de chefs d’entreprise sont comptabilisés dans les rangs, contre 35 % d’employés ou d’ouvriers.

Pour tenter de comprendre ce phénomène, nous avons réalisé une enquête qualitative, par l’intermédiaire d’entretiens et d’observations. Les individus interrogés ont fait le choix de mettre un terme à leur engagement au cours des premières années et plus particulièrement au cours de leur formation initiale. Cette dernière constitue en effet une première étape essentielle dans le parcours des sapeurs-pompiers volontaires. Elle leur permet non seulement de développer les compétences nécessaires pour répondre aux missions qui leur sont confiées, mais elle constitue également l’une des premières occasions d’immersion dans le milieu et d’interaction avec les pairs. Elle est organisée sur une trentaine de jours, répartis sur une à trois années, et est constituée de cinq modules, dont la validation permet l’accès à certains types d’intervention.

Des obstacles rencontrés en formation initiale

Les résultats montrent que certains profils sont plus susceptibles que d’autres de rencontrer des obstacles en formation initiale. Les plus touchés sont les femmes et les chargés de famille. Les femmes interrogées ont surtout été affectées par la difficile conciliation entre la formation initiale et la vie de famille, sans doute en raison de leur plus faible disponibilité pour leur engagement au regard de leur investissement familial.

Mais elles ont également été marquées par différents problèmes rencontrés avec les formateurs. Ces derniers adoptent parfois une posture rappelant celle de l’instructeur, aux antipodes de l’idée d’accompagnement dans le développement des compétences portée par les référentiels, ou peuvent manquer de rigueur dans le suivi des apprenants. Certains propos ou comportements des formateurs ont, en ce sens, pu entraver la motivation et l’apprentissage des femmes concernées, à l’image de Julie (tous les prénoms ont été modifiés), qui explique que « quand on parle comme ça, moi je préfère me mettre dans une coquille ».

Les chargés de famille ont quant à eux surtout regretté l’aspect chronophage de cette formation, qui a notamment affecté leur organisation familiale, dans la mesure où elle est généralement organisée pendant les vacances scolaires ou sur plusieurs week-ends. Mais ils ont également été déçus de la qualité du suivi de leur formation initiale, qui ne leur semble pas toujours à la hauteur, tant sur le plan administratif que sur le plan humain – en caserne notamment. De surcroît, ils ne se sont pas sentis à l’aise face aux évaluations, éprouvant généralement stress et angoisse, particulièrement en manœuvre, lorsqu’ils doivent affronter le regard de l’autre.

Des défis au sein de la caserne

Les obstacles entravant le parcours des sapeurs-pompiers volontaires ne se limitent pas à la seule formation initiale. La caserne en introduit d’autres, particulièrement pour les femmes, les chargés de famille et les diplômés du supérieur. Ces derniers sont notamment déçus par l’ambiance qui y règne, ressentant des difficultés d’intégration et la nécessité de faire ses preuves pour être accepté, ou observant des tensions entre les sapeurs-pompiers au sein de la caserne. Mais ils sont également frustrés du manque de reconnaissance de l’institution, à l’image de Pierre, qui regrette la faible indemnisation accordée aux volontaires (notamment parce que le temps d’astreinte n’est généralement pas pris en compte) : « c’est quand même un sacré sacrifice pour le peu d’argent ».

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Les chargés de famille ont régulièrement été insatisfaits de l’organisation de la caserne, en particulier parce que les nouvelles recrues ne semblent pas toujours accueillies avec bienveillance par les sapeurs-pompiers déjà en place. Sur ce point, Chloé s’adresse directement à ses anciens collègues :

« Vous dites qu’il faut recruter, que vous êtes en manque de personnel, mais le peu de gens qui sont motivés, qui viennent franchir le pas de votre caserne, essayez déjà de vous intéresser à eux et de les garder, et pas de les dégoûter en les prenant de haut et en leur faisant laver le matériel, les véhicules et compagnie ».

Les chargés de famille relèvent aussi un manque de communication et de suivi, et regrettent plus largement, comme les diplômés du supérieur, un manque de reconnaissance de l’institution et de l’État.

Un milieu toujours sexiste

Comme lors de leur formation initiale, les femmes ont éprouvé des difficultés pour concilier engagement et vie de famille. Mais elles ont surtout été affectées par l’organisation de la caserne et l’ambiance qui y règne, notamment en raison des problèmes liées à leur condition de femme que la majorité d’entre elles (61 %) ont rencontrés. Le milieu apparaît sexiste et les propos désagréables ou remarques déplacées semblent monnaie courante. Elles peuvent porter sur la stature des femmes, qui ne leur permettrait pas de répondre à l’ensemble des missions, particulièrement celles réputées dangereuses comme les incendies. Elles concernent aussi la répartition des rôles au sein de la caserne, puisque comme le souligne Myriam :

« Quand on est une fille dans la caserne, on va dire que la fille elle fait le ménage, et le reste, tout ce qui est lourd, c’est les hommes ».

Campagne de recrutement des sapeurs pompiers. Sapeurs pompiers de France

Mais les femmes évoquent également des propos à connotation sexuelle, et sont parfois victimes de gestes ou de comportements déplacés. Trois d’entre elles indiquent en avoir parlé avec leur chef de centre, mais ont été déçues par leur réaction, à l’image de Léa, qui explique que :

« Personne ne faisait rien et que tout le monde avait passé ça sous silence, en disant que “ça reste entre nous, que ça sort pas de nous quatre”. »

Myriam, elle, a fini par mettre un terme à son engagement :

« Je suis allée le voir deux ou trois fois, et il m’a dit qu’il allait arranger ça, mais il n’a jamais rien fait, jusqu’au jour où je suis partie. »

La plupart de ces femmes ont mal vécu les situations auxquelles elles ont pu être confrontées. Ces événements ont parfois affecté leur motivation et leur santé mentale. Cela a été le cas pour Cindy :

« J’avais 17 ans, je l’ai très mal vécu, mes parents n’étaient même pas au courant, du coup je me suis sentie seule au monde. C’était vraiment la dégringolade jusqu’au bout. »

Ces résultats font largement écho à des travaux antérieurs, dans la mesure où les stéréotypes sociaux de genre semblent toujours s’inviter dans le quotidien de la vie des casernes. Certains hommes ont du mal à accepter la présence des femmes dans un milieu qui leur a longtemps été réservé. Ils utilisent alors diverses stratégies pour les dissuader de poursuivre leur engagement, malgré la volonté de féminisation des effectifs de l’organisation et les campagnes de sensibilisation menées.

Les statistiques réalisées dans le cadre de cette étude ont d’ailleurs montré que les femmes ont deux fois plus de risques que les hommes de rompre leur engagement au cours des premières années.

Un entre-soi très marqué

Cette nouvelle enquête corrobore les résultats d’autres réalisées il y a plusieurs années. Le constat reste le même : une forte homogénéité est observée dans les rangs.

Les services départementaux d’incendie et de secours semblent toujours peiner à recruter et à maintenir dans l’engagement certains profils, à l’image des femmes, des chargés de famille et des diplômés du supérieur.

Tous éprouvent de réelles difficultés à s’intégrer dans le milieu et finissent généralement par rompre leur engagement. Il est par ailleurs intéressant de noter que dans près des deux tiers des cas, l’engagement se fait dans un contexte de connaissance du milieu, favorisé soit par la présence de sapeurs-pompiers dans l’entourage, soit par un engagement précédent en tant que jeune sapeur-pompier, soit, pour certains, par les deux. Le milieu affiche donc un certain entre-soi dont il a du mal à se défaire, malgré différentes campagnes de communication et de recrutement.

Pourquoi l’inflation plombe le sentiment de bien-être des Français

26 mercredi Avr 2023

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  1. Claudia SenikDirectrice de l’Observatoire du bien-être du CEPREMAP, Professeur à Sorbonne Université et à Paris School of Economics, Sorbonne Université

Déclaration d’intérêts

Claudia Senik ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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L’inflation ne pèse pas seulement sur le pouvoir d’achat des Français, mais aussi sur leur bien-être.

Depuis le premier trimestre de l’année 2022, l’indicateur de satisfaction des ménages de l’Observatoire du bien-être, rattaché au Centre pour la recherche économique et ses applications (Cepremap), est en effet en baisse.

À la fin de l’an passé, les grandes dimensions du bien-être subjectif ont retrouvé ainsi des niveaux similaires à ceux enregistrés pendant la crise des « gilets jaunes ». Elles sont identifiées grâce à vingt questions invitant les enquêtés à donner des notes entre 0 et 10, par exemple, « dans quelle mesure êtes-vous satisfait de votre santé ? », 0 valant pour « pas du tout satisfait » et 10 pour « complètement satisfait ».

Fourni par l’auteur

Cette flambée d’insatisfaction s’appuie surtout sur l’inflation, qui a atteint +5,2 % en France au cours de l’année 2022. La hausse des prix pèse fortement sur le sentiment de bien-être pour des raisons multiples. D’abord, dans un contexte où les augmentations salariales restent inférieures au rythme de l’inflation, elle pèse mécaniquement sur le pouvoir d’achat.

Ensuite, l’inflation crée de l’incertitude et brouille les anticipations que peuvent former les ménages concernant l’avenir. Enfin, les ménages sont très inégalement exposés à l’inflation, en particulier face aux prix de l’énergie et de l’alimentation, ce qui conduit à un impact disproportionné sur certains budgets.

Une inquiétude face à l’avenir

En d’autres termes, la perte de bien-être en 2022 paraît d’abord liée, pour la grande masse des ménages, à des inquiétudes quant à l’avenir.

Ainsi, l’indicateur de bien-être subjectif qui a le plus souffert dans l’année correspond à la question : « quand vous pensez à ce que vous allez vivre dans les années à venir, êtes-vous satisfait de cette perspective ? » Il a chuté de concert avec l’indice synthétique de confiance des ménages de l’Insee qui agrège différentes variables tel que l’opinion sur les niveaux de vie passés et anticipés, sur les perspectives de chômage ou sur l’opportunité d’épargner ou non.

Fourni par l’auteur

Cette dégradation du bien-être se reflète notamment dans notre série d’indicateurs de « sentiments » et d’émotions exprimées sur le réseau social Twitter. Entre 2015 et 2018, on constate une montée de la négativité. L’expression de la joie (courbe verte) était plus fréquente que celle des trois émotions négatives. Or, elle connait un point d’inflexion dans la deuxième partie de l’année 2016 et chute encore plus fortement en 2019 après la période des « gilets jaunes ».

Fourni par l’auteur

Les deux séries d’émotions empruntent des trajectoires opposées, avec la montée des expressions d’émotions négatives et la chute des émotions positives. Même les déconfinements, qui coïncident avec un rebond significatif de nos autres indicateurs de bien-être subjectif, n’ont qu’un effet limité sur les expressions de joie, et cette courbe atteint son nadir au premier trimestre 2021, entre le deuxième et le troisième confinement. Ce n’est qu’à partir de l’été 2021 que les fréquences des deux types d’émotions ont commencé à se rapprocher (avec une plus haute fréquence des expressions de joie, et une moindre prévalence des émotions négatives).

Notons qu’au cours des semaines récentes, nous avons assisté à une forte augmentation des expressions de colère, en parallèle avec la contestation de la réforme des retraites.

Les Français de plus en plus écoanxieux

Au-delà de l’inflation et de la guerre en Ukraine, la menace climatique affecte également le bien-être de la population. Alors que moins de la moitié des Français plaçaient le réchauffement climatique parmi leurs deux premières préoccupations en 2016, c’est maintenant le cas de 60 % d’entre eux. Cette progression régulière illustre la prise de conscience grandissante par les Français de l’urgence de la crise climatique en cours.

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Cette écoanxiété pousse aujourd’hui les Français à agir : 61 % de la population déclare ainsi participer activement à la lutte pour la protection de l’environnement. Plus d’un tiers des répondants estiment pouvoir faire davantage et seule une très faible fraction pense qu’il n’est pas vraiment utile d’agir individuellement. Notons d’ailleurs que les personnes qui indiquent la nécessité d’un investissement individuel maximal déclarent également un niveau de satisfaction dans la vie plus élevé que ceux qui évoquent un manque de moyens pour agir.

Fourni par l’auteur

Les Français estiment très majoritairement (73,2 %) que chacun doit s’investir le plus possible. Une part encore importante (13,5 %) estime ne pas disposer des moyens nécessaires pour agir à son niveau. Ainsi, une grande majorité de la population est consciente et s’inquiète des problèmes environnementaux, désire fondamentalement agir mais trouve difficile d’en faire davantage.

Les motivations entraînant l’action pro-environnementale des individus sont plus diversement réparties. Si 40 % de la population pense avant tout à laisser aux générations futures un environnement de qualité, la protection de la santé (25 %) ainsi que de la nature et des espèces animales et végétales (22 %) constituent ainsi des motifs d’action également.

Une nostalgie du passé

Comme nous l’avions relevé dans notre précédent baromètre qui portait sur l’année 2021, l’inquiétude face à l’avenir a pour contrepartie le repli vers le passé. Nous posons depuis le début de notre enquête la question suivante : « certaines personnes aimeraient bien vivre dans une autre époque en France. Si vous aviez le choix, laquelle choisiriez-vous ? ».

Nous laissons à cette question la possibilité de répondre « l’époque actuelle », et de fait 27 % des répondants la choisissent. Les deux tiers des répondants choisissent des périodes passées, tandis que l’avenir n’attire que moins de 3 % des répondants. Or, on note un net décrochage des réponses en faveur des époques passées depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.

Fourni par l’auteur

Lorsqu’on demande de quelle période les interrogés sont le plus nostalgiques, beaucoup sélectionnent la décennie de leurs vingt ans. Plus qu’à un état de la France, c’est probablement à leur jeunesse passée qu’ils se reportent. Cependant, les années 1980 jouissent d’une popularité certaine, même auprès de personnes trop jeunes pour les avoir connues.

Enfin, comme l’an dernier, nous relevons que la sphère proche (familles, amis, relations professionnelles) constitue un autre refuge face aux inquiétudes. Les relations avec les proches et le sentiment de pouvoir en attendre du soutien restent ainsi des points de satisfaction importants. Au sein de notre jeu de questions, celles-ci attirent régulièrement les scores moyens les plus favorables.


Mathieu Perona, directeur exécutif de l’Observatoire du bien-être du Cepremap, et Claudia Senik, directrice de l’Observatoire, ont rédigé les rapports 2020 et 2021 « Le Bien-être en France ». Le rapport 2022 sera présenté lors d’une conférence en ligne le 21 avril 2023.

Comment fabriquer de l’ADN et créer de nouveaux génomes

25 mardi Avr 2023

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  1. Amina Ben AblaEnseignante Chercheure en Biologie Moléculaire, École de Biologie Industrielle (EBI)

Déclaration d’intérêts

Amina Ben Abla ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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École de Biologie Industrielle (EBI) et CY Cergy Paris Université fournissent des financements en tant que membres adhérents de The Conversation FR.

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Double hélice en forme de 53
La double hélice d’ADN a été découverte en 1953, il y a 70 ans. Qu’en a-t-on tiré depuis? Peter Artymiuk, Wellcome Trust Images, CC BY

Il y a 70 ans, le 25 avril 1953, trois articles publiés dans la revue Nature ont changé notre vision du monde. La découverte de la structure de la molécule origine de l’hérédité, l’ADN en double hélice, représente l’une des plus grandes découvertes en biologie du XXe siècle.

L’organisation de la molécule siège de la vie est somme toute assez simple : l’ADN est constitué d’unités répétitives, les nucléotides, qui forment une chaîne chimique. Un nucléotide est une molécule issue de la combinaison de trois composants chimiques : une base azotée, un sucre et de l’acide phosphorique. Quatre types de bases azotées déterminent quatre types de nucléotides, qui se combinent à l’infini dans l’ADN et sont à la base de la diversité du vivant (A : adénosine ; T : thymine ; G : guanine ; C : cytosine). Enfin, dans l’ADN, chaque nucléotide est lié à ses deux voisins par une liaison chimique dite « phosphodiester ». Dans le vivant, ce sont des enzymes, catalyseurs des réactions biochimiques, qui réalisent ces liaisons chimiques.

Depuis que cette structure a été élucidée, les humains ont appris à lire l’ADN, de plus en plus vite et des brins de plus en plus longs. Parallèlement, nous avons trouvé comment fabriquer (synthétiser) de l’ADN à partir de bases azotées (1972) – ce qui nous permet aujourd’hui d’aller jusqu’à inventer des ADN comme un écrivain invente un livre à partir de l’alphabet (en respectant quelques règles de grammaire tout de même). Nous savons également « amplifier » de l’ADN (1983), c’est-à-dire cibler une région bien déterminée sur l’ADN et la recopier en milliers d’exemplaires, notamment avec la désormais bien connue PCR. Et bien sûr, nous savons éditer le génome (à partir de 1973 grâce à l’« ADN recombinant », où on combine différents morceaux d’ADN), c’est-à-dire le modifier localement pour en modifier ses fonctions – la technique d’édition du génome la plus connue est désormais celle des « ciseaux moléculaires » CRISPR-Cas9, né en 2012.

Ainsi, depuis 70 ans, l’amélioration des techniques de lecture de l’ADN, puis de fabrication et d’édition, ont conduit à développer notre capacité à comprendre le vivant.

Pourquoi fabriquer de l’ADN alors qu’il y en a partout dans la nature ?

Les synthèses à grande échelle et à faible coût sont sources de progrès tant en recherche fondamentale qu’appliquée. Par exemple, la reconstruction de génomes viraux (c’est-à-dire la re-création en laboratoire de génomes viraux identiques) – virus de la grippe espagnole, VIH, SARS-CoV-2 par exemple – ont permis des avancées spectaculaires, comme l’accélération de la production de vaccins ou la génération de cellules résistantes aux infections liées à ces virus (tomates résistantes aux potyvirus par exemple).

Désormais, nous savons même écrire et concevoir de l’information génétique en nous inspirant du génome naturel, pour le reproduire en partie sur des régions intéressantes, ou bien dans sa globalité en l’optimisant.

Ceci est possible grâce à des progrès technologiques récents, comme les « puces à ADN », microdispositifs permettant de manipuler simultanément plusieurs séquences d’ADN, ou encore les technologies microfluidiques.

Une puce à ADN avec 37500 tests (et un zoom), permettant d’analyser de grandes quantités de données. Paphrag/Wikipedia

Ainsi, la génomique synthétique a désormais le potentiel de créer de nouveaux génomes et aussi des cellules rudimentaires, à l’exemple de la bactérie JCVI-syn3.0, une bactérie de synthèse possédant le plus petit génome jamais observé chez un organisme indépendant. Issue de Mycoplasma genitalium, une bactérie sexuellement transmissible, cette bactérie dont le génome a été synthétisé par des scientifiques ne contient que les gènes nécessaires à la vie.

Nous pouvons même créer de nouvelles formes de vie artificielle comme les robots ADN, capables de se déplacer et de transporter des « colis » de molécules. Cette dernière technologie est à l’étude pour amener des médicaments vers des cellules ciblées dans le corps humain, telles que les cellules cancéreuses.

Faire avancer la recherche et la médecine

La synthèse de génomes permet d’aborder des questions de recherche ouvertes et accélère les avancées dans un large éventail de domaines. Par exemple, il est désormais possible de construire une super cellule immunologique en programmant sa séquence d’ADN. C’est le cas des cellules CAR-T (chimeric antigenic receptor-T), des lymphocytes T modifiés génétiquement en 2012 dans le but de détecter et d’éliminer les cellules cancéreuses. D’autres champs d’applications consistent à produire des gènes non défectueux pour la thérapie génique, ou encore à développer un génome minimal avec les gènes essentiels pour aborder les principes de base de la vie, explorer la conception du génome entier et l’ingénierie métabolique.

illustration de l’action des cellules CAR-T dans le traitement de leucémie
Illustration d’un lymphocyte T modifié génétiquement (en bleu) reconnaissant et attaquant une cellule leucémique (en vert). La molécule CAR (en rouge) s’accroche à la protéine CD19 que l’on trouve à la surface des cellules leucémiques. Ceci active le lymphocyte T, qui relâche de la perforine (violet), ce qui rend la membrane cellulaire poreuse et laisse pénétrer des molécules cytotoxiques (granzymes en magenta) qui déclenchent la mort cellulaire. David Goodsell/Protein Database, CC BY

Mais malgré les améliorations continues des techniques de synthèse, les capacités de lecture de l’ADN restent aujourd’hui très supérieures aux capacités d’écriture (en termes de temps requis par échantillon, nombre d’échantillons étudiés en même temps, analyse des résultats et automatisation).

Ainsi, la synthèse de l’ADN figure parmi les étapes les plus contraignantes de l’étude du vivant, limitée par les taux d’erreur (qui augmentent avec la taille de l’ADN à synthétiser) et les difficultés d’assemblage des fragments pour la synthèse de génomes complets.

Comment a-t-on appris à synthétiser de l’ADN

Suite à la découverte de la structure chimique de l’ADN, les chercheurs se sont intéressés à synthétiser de l’ADN au laboratoire : il s’agit de préparer les nucléotides à partir de leurs ingrédients, puis de les assembler.

La génomique synthétique est née avec le premier « dinucléotide » synthétisé au laboratoire en 1955. Ensuite, en 1963, H. Gobind Khorana et son équipe ont synthétisé un ADN bicaténaire beaucoup plus long de 77 « paires de bases » (les bases azotées vont par deux : une sur chaque brin de la double hélice).

Les techniques de synthèse se sont progressivement améliorées dans les décennies qui ont suivi, mais sont restées limitées en termes de longueur de chaîne, de qualité et de rendement, en raison de réactions instables qui généraient des séquences ramifiées, tronquées ou mutées, c’est-à-dire des molécules non conformes à la structure en double hélice, qui assure que l’ADN est fonctionnel.

Au début des années 80, un étudiant de Khorana, Marvin Caruthers, a introduit des réactifs plus efficaces, les phosphoramidites, et a ainsi révolutionné la synthèse de l’ADN. Cette synthèse comprend quatre étapes et aboutit à l’addition d’un seul nucléotide au brin d’ADN, qui croît en étant fixé à un support solide (du verre ou du polystyrène par exemple). Cette méthode a été encore améliorée grâce à différents supports, puis automatisée, ce qui a permis de réduire le temps de synthèse.

Comment fabrique-t-on aujourd’hui de l’ADN ?

Aujourd’hui, de nombreuses versions modifiées des phosphoramidites ont vu le jour, avec des propriétés optimisées pour des synthèses d’ADN spécifiques.

La chimie des phosphoramidites reste la méthode de référence pour la fabrication d’ADN, utilisée dans l’industrie depuis près de 40 ans avec une efficacité aujourd’hui supérieure à 99 % et une rapidité de synthèse de quelques minutes. Sa simplicité et sa haute efficacité permettent de synthétiser de grandes longueurs de séquences, jusqu’à 200 paires de bases, dont l’assemblage aboutit à la construction d’ADN encore plus grands, pour produire des gènes simples jusqu’à des génomes synthétiques entiers, tel que le génome de la levure de boulanger, Saccharomyces cerevisiae.

Si la chimie des phosphoramidites résiste à l’épreuve du temps, elle a des limites techniques. Par exemple, des erreurs peuvent se produire lors de synthèses successives résultant de réactions secondaires, comme des couplages incomplets, quand la liaison entre nucléotides complémentaires ne se produit pas, ou des incorporations erronées, par exemple un G au lieu d’un A.

Fabriquer de l’ADN, demain

Nous devons être conscients que les capacités de synthèse de l’ADN disponibles aujourd’hui ont pris beaucoup de retard par rapport aux progrès réalisés dans le domaine du séquençage de l’ADN. Les technologies actuelles de fabrication de l’ADN ne sont pas suffisamment mûres pour permettre l’ingénierie pratique et économique de génomes de grande taille.

Des efforts interdisciplinaires continus sont déployés pour utiliser de nouvelles chimies et stratégies pour synthétiser de l’ADN et assembler des gènes. De nouvelles stratégies inspirées des systèmes biologiques émergent mais pour l’instant, aucune technologie ne permet d’accéder à des séquences aussi grandes que celles trouvées dans la nature.

Les défis techniques actuels concernent l’assemblage de régions de la chaîne d’ADN qui sont hautement répétitives ou complexes. Quand ces verrous techniques seront surmontés, avec des stratégies de synthèse plus optimales, de nouvelles perspectives s’ouvriront pour résoudre les défis majeurs auxquels nous sommes confrontés en matière de ressources, d’énergie, de santé et d’environnement.

Quelle est la signification de la critique radicale de l’antiracisme ?

24 lundi Avr 2023

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  1. Alain PolicarChercheur associé en science politique (Cevipof), Sciences Po

Déclaration d’intérêts

Alain Policar a été nommé le 14 avril membre du Conseil des sages de la laïcité et des valeurs de la République.

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Une manifestante brandi une pancarte dénonçant le racisme systémique à Seattle, États-Unis, le 12 juin 2020.
Une manifestante brandi une pancarte dénonçant le racisme systémique à Seattle, États-Unis, le 12 juin 2020. Shutterstock

Pour certains intellectuels, médiatiquement influents, l’antiracisme, autrefois moral, s’est transformé, en devenant politique, en racisme, ce qu’on nomme parfois l’antiracisme racialiste. Comment expliquer ce mouvement et caractériser le courant qui s’en réclame ?

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et notamment après les réflexions élaborées à l’Unesco débouchant sur les deux premières déclarations sur la question raciale, en 1950 et 1951, l’antiracisme était uniquement considéré dans sa dimension morale : le racisme, c’est le mal. On pensait alors pouvoir éradiquer le racisme avec des arguments plus ou moins scientistes, selon lesquels la race n’a pas de pertinence biologique. Donc, si la race n’existe pas, le racisme, qui est une doctrine de l’inégalité naturelle des races humaines, n’a aucune raison d’être.


À lire aussi : Débat : Peut-on parler de « racisme d’État » ?


Le retour de la race

Pourtant, malgré ces déclarations, la race est remobilisée par certains militants antiracistes à partir des années 2000, dans une perspective politique, avec « la théorie critique de la race ».

Selon celle-ci, la race est un fait social et non biologique, qui a des effets en termes de discriminations sur les personnes racisées, d’une façon générale les non-Blancs.

Ces analyses nouvelles et d’une grande richesse ont été rendues possibles par un progrès dans la prise de conscience nationale des crimes coloniaux. Elles se fondent aussi sur le constat que la politique d’indifférence à la couleur a échoué. C’est parce que la race a des effets discriminants sur les individus à qui on attribue une race non-blanche (les « racisés ») que l’on ne peut ignorer les identités dites raciales.


À lire aussi : Une enquête dévoile les ressentis des personnes victimes de racisme


La reconnaissance de celles-ci marque la dissension avec les anti-antiracistes, fortement critiques à l’égard de ce « retour » de la race et, selon eux, du risque d’essentialiser ces identités.

Cette dissension a un moment fondateur : dans son premier livre, La force du préjugé, paru en 1988, le politologue français Pierre-André Taguieff sous-estime les dimensions institutionnelles du racisme. Il défend un modèle théorique proche de celui du psychologue américain Gordon W. Allport, lequel privilégie dans The Nature of Prejudice (1954), une acception du racisme en tant qu’attribut des agents individuels. Néanmoins, la pertinence du concept de racisme n’est pas mise en cause et Taguieff en renouvelle l’étude en insistant sur l’émergence d’une forme différentialiste (c’est-à-dire qui insiste sur la différence et non sur l’inégalité).

Mais, dans cette perspective, il ne peut exister « un racisme sans racistes », c’est-à-dire un racisme produit par le fonctionnement des institutions sans que, nécessairement, les membres de celles-ci soient explicitement racistes dans leurs comportements ou dans leur idéologie.

Le racisme crée donc bel et bien et reproduit des rapports inégalitaires et des discriminations. Mais l’antiracisme qui insiste sur cette dimension institutionnelle serait devenu fou. Pourtant, rien ne nous oblige à opposer racisme institutionnel et racisme individuel : plus encore, penser l’un sans l’autre supposerait que l’on fasse abstraction du « milieu sociopolitique et culturel des agents impliqués et des normes morales qui régissent leur environnement ».

Le racisme : injure ou réalité sociale ?

Cette critique de l’antiracisme se développe dans des milieux qui insistent sur l’importance de l’appartenance à la nation et, corrélativement, exaltent les valeurs de la République.

On peut donc la qualifier de « nationale-républicaine » et, redisons-le, la caractériser par le rejet de l’idée d’un racisme comme rapport social : il résulterait uniquement d’attitudes individuelles, éventuellement traduites en actes hostiles, qu’une idéologie justifierait. C’est dans le cadre de cette opposition théorique que va se développer une véritable guerre des idées, aux conséquences politiques fortes.

Le terrain pour ce changement de paradigme trouve ses racines dans les années 1990 : dans les articles de du sociologue Paul Yonnet dans la revue Le Débat et dans l’infléchissement de la pensée de Taguieff, repérable dès 1993. Dans un article paru dans la revue esprit Esprit (mars-avril), significativement intitulé « Comment peut-on être antiraciste ? », il notait que « la notion de racisme paraît confuse, voire autocontradictoire » et proposait de « refuser toute spécificité aux phénomènes ordinairement caractérisés en tant que racistes ».

Il en déduisait « l’effacement de la valeur conceptuelle du terme de racisme », et voyait en lui un « opérateur d’illégitimation, applicable à tout comportement qu’un sujet se propose de dénoncer, de condamner ou de combattre ». Le philosophe Roger-Pol Droit écrivait alors lucidement : « N’allez surtout pas croire que le racisme ait la moindre réalité, ce n’est qu’une injure à éliminer. »

Dès lors, on en déduit que ce n’est pas le racisme qui pose problème, ce sont les mouvements qui s’y opposent, d’autant que Taguieff n’hésite pas à attribuer la responsabilité de la « grande vague de confusion idéologique » à une « certaine prédication antiraciste ». On est ainsi tout à fait disposé à accepter que non seulement l’antiracisme est plus préoccupant mais qu’il est aussi plus nocif que le racisme.

La confusion des idées

De ce mouvement vers la réaction, nous avions pourtant été avertis une nouvelle fois, en 2002, par l’historien Daniel Lindenberg et son Rappel à l’ordre (sous-titré, sans ambiguïté, « Enquête sur les nouveaux réactionnaires ». L’ouvrage fut voué aux gémonies : l’Histoire n’a pourtant invalidé aucune de ses propositions.

Ce qui avait été justement qualifié de « libération de la parole gauloise », cette supposée levée générale des tabous, n’était en réalité qu’une revendication de l’expression des passions et des aversions au détriment de l’argumentation. De cette « libération », Michel Onfray, et sa revue Front populaire, témoignent régulièrement : son dernier numéro s’inquiète de la tyrannie des minorités (de « l’art de détruire la France » !), ces dernières étant énoncées, dans un inventaire à la Prévert, sans traduire le moindre rapport à la réalité, « européisme, immigrationnisme, transgenrisme », etc.).

Les réactionnaires d’hier et d’aujourd’hui condamnent la société métissée (la mixophilie, c’est-à-dire l’amour du métissage, étant définie comme le mal qui nous menace, en quelque sorte l’arme secrète du « grand remplacement » !), au nom de la prééminence de la nation sur l’individu et, chemin faisant, contestent l’idée d’une humanité commune. Ils se gaussent des « naïvetés » du cosmopolitisme, instruisent le procès de l’égalité et, bien entendu, celui de l’islam, n’hésitant pas à revendiquer leur islamophobie, tout en se plaignant de l’inconsistance « scientifique » du terme.

La confusion des idées, dont parlait Roger-Pol Droit dans l’article de 1993, a produit une aberration idéologique : au lieu de se préoccuper de la réalité des discriminations dont les personnes racisées sont victimes, on préfère reprocher aux antiracistes d’essentialiser les identités raciales, ce qui ferait d’eux, au moins implicitement, des racistes. C’est ne pas comprendre que la prise en compte des mécanismes de racialisation et d’assignation subie vise non pas à exalter des identités particulières mais, in fine, à déracialiser la société, c’est-à-dire, dans le cas américain, banaliser et diversifier les interactions entre Blancs et Noirs. Cet objectif peut être considéré comme un bien collectif dont la réalisation est assimilable à un devoir de citoyenneté.

Faire de l’antiracisme une expression forte de la haine envers l’Occident et les Blancs, est incongru. Tout comme est indigne l’affirmation selon laquelle la « civilisation occidentale » est la seule et unique civilisation, la seule source de savoir légitime, et que la pensée décoloniale est une imposture. Comment mieux justifier la colonisation et le faire, hélas, au nom de l’universalisme, en réalité de son dévoiement au service des causes les plus criminelles ?


Alain Policar vient de publier « La haine de l’antiracisme » aux Éditions Textuel.

Le consommateur français est-il responsable ?

23 dimanche Avr 2023

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auteurs

  1. Marie-Christine LichtléProfesseur des Universités, Université de Montpellier
  2. Anne MioneProfesseur de marketing stratégique, management de la qualité et stratégie, Université de Montpellier
  3. Béatrice Siadou-MartinProfesseur des universités en sciences de gestion, Université de Montpellier
  4. Jean-Marc FerrandiProfesseur Marketing et Innovation à Oniris, IAE Nantes

Déclaration d’intérêts

Je suis co-responsable de la chaire Marketing responsable et bien-être

Cofondatrice de la Chaire Maréson

Béatrice Siadou-Martin est membre de la Chaire Maréson

Cofondateur de la Chaire MARESON

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Université de Montpellier, IAE Nantes et IAE France fournissent des financements en tant que membres adhérents de The Conversation FR.

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Le consommateur français peut-il être considéré comme « responsable » ? La 1re édition du baromètre MARÉSON-Responsable de la consommation responsable, lancé par la Chaire MARÉSON (Marketing Responsable et Bien-être), apporte des éléments de réponse à cette question. Son objectif est de comprendre le comportement des Français et d’offrir des clés pour faciliter le passage à des solutions désirables, valorisables et valorisées.

Les résultats de l’étude, menée auprès de 1000 personnes représentatives de la population nationale âgées de 18 ans et plus qui ont été interrogées en juin 2022, montrent des comportements paradoxaux et enrichissent « l’attitude-behavior gap » (écart entre attitude et comportement) mis en évidence dans de nombreuses recherches.

Il existe en effet un contraste entre une prise de conscience sincère et l’adoption ferme de nouveaux comportements. De manière plus originale, les résultats soulignent également une attitude critique vis-à-vis des marques qu’ils jugent irresponsables, mais sans bonus alloué aux marques engagées. Finalement, l’attitude des consommateurs permet de distinguer des profils variés.

La quête de la « déconsommation » : une réalité ?

Avec la crise de la Covid-19 et les manifestations du changement climatique, de nombreuses personnes ont pris conscience de la nécessité de consommer de manière plus durable afin de préserver les ressources de la planète. Toutefois, d’après les résultats du baromètre, peu de consommateurs traduisent leurs préoccupations dans des modifications sensibles de leur consommation.

Les Français sont engagés pour la cause environnementale et le font savoir à leur manière en centrant leurs efforts sur la réduction du gaspillage, le recyclage et l’achat de produits locaux de saison. Ainsi, dans leur esprit, les notions d’environnement et de consommation durable sont corrélées. Pour 62,4 % des répondants, en effet, la consommation durable englobe l’aspect environnemental. Les Français montrent donc de vraies aspirations pour plus de durabilité. Pourtant, s’ils semblent prêts à s’engager, ils ne renoncent pas pour autant à consommer.

Ainsi, seulement 35,2 % des personnes interrogées ont affirmé moins consommer.

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En revanche, 64,8 % d’entre elles n’ont pas modifié leur comportement de consommation. Seules 16 % des personnes interrogées considèrent que la consommation durable induit une réduction de la consommation. 84 % des répondants ne considèrent donc pas la réduction de la consommation comme un facteur de consommation durable.

Baromètre MARÉSON-Responsable (2023)

Le libre arbitre reste le mot clé du consommateur français : il n’est pas prêt à se priver, ne cherche pas à réduire sa consommation ni à renoncer à ses marques favorites.

Sa responsabilité n’est pas globale : seule une minorité de personnes accorde de l’importance aux critères de la santé et de l’éthique. Pourtant, ils sont près de 89 % à considérer que leur comportement respecte l’environnement.

Un comportement paradoxal vis-à-vis des marques

À première vue, les offres durables sont en pleine expansion. Les consommateurs déclarent de plus en plus vouloir que les marques adoptent des comportements responsables. Pourtant, un paradoxe frustrant demeure au cœur de l’entreprise verte : seul un petit nombre de consommateurs déclarant des attitudes positives envers les produits et services respectueux de l’environnement sont prêts à mettre la main au portefeuille.

Baromètre MARÉSON-Responsable (2023)

Les consommateurs restent ambigus, censeurs plutôt que moteurs : ils critiquent et sanctionnent les entreprises qui ne font pas d’efforts pour réduire leur impact environnemental (près de 76 % des répondants montrent leur mécontentement en manifestant ou en boycottant une marque si cette dernière rejette ses déchets dans l’environnement) mais n’encouragent pas véritablement les efforts salutaires des entreprises par leurs actes d’achat.

Baromètre MARÉSON-Responsable (2023)

Pour que l’entreprise agroalimentaire soit perçue comme impliquée dans une alimentation durable, il est important, pour le consommateur, qu’elle ait une gestion des matières premières raisonnée (réduction des emballages, de la consommation de ressources, des pertes de matières premières, tout ceci grâce à l’amélioration continue), qu’elle donne des preuves du caractère vertueux de son process (fabrication à partir de matières premières locales, bien-être animal, soutien à une agriculture raisonnée, labellisation bio) et qu’elle soit éthique (prix juste, soutien aux agriculteurs, transparence).

Cependant, même si 65 % des Français ont déclaré vouloir acheter un produit fabriqué par une entreprise qui s’implique dans une politique de développement durable, ils sont seulement 21 % à le faire réellement.

Différents profils de consommateurs

Les résultats de l’observatoire ont par ailleurs permis de segmenter les consommateurs en fonction de leurs comportements en cinq profils en fonction de leurs préoccupations quotidiennes et de leurs modes de consommation : le « responsable », le « locavore consommant moins », le « non-équitable », le « plutôt locavore » et le « non-responsable ».

Baromètre MARÉSON-Responsable (2023)

L’observatoire MARÉSON-Responsable distingue deux profils dans la partie ouest de la carte : le « non-responsable » (15,5 % des personnes interrogées) et le « plutôt locavore » (20,2 %). Le « non-responsable » déclare être indécis lors de ses achats. Il ne souhaite pas intégrer les enjeux du développement durable, qu’il perçoit comme une contrainte à sa consommation. De fait, sa consommation ne change pas et il ne fait pas d’efforts particuliers.

Le « plutôt locavore », lui, a un comportement d’achat impulsif, il achète souvent sur un coup de cœur pour satisfaire un désir momentané. Son bonheur est de court terme. Il ne cherche pas à réduire sa consommation et achète des produits qu’il ne va pas toujours consommer. Par ailleurs, il n’a pas conscience de l’empreinte carbone de sa consommation. Hormis ces deux groupes, tous consomment de façon responsable à leur manière.

Dans la partie est du graphique, trois profils viennent compléter l’étude : le « non-équitable », le « locavore consommant moins » et le « responsable ». Ils représentent respectivement 26,6 %, 25,8 % et 11,9 % des personnes interrogées.

Le « non-équitable » est un responsable un peu particulier. Il s’implique dans la consommation responsable mais n’en intègre pas toutes ses caractéristiques. Contrairement au « plutôt locavore », il a conscience de l’empreinte carbone de sa consommation et achète seulement les produits qu’il est certain de consommer.

Le « locavore consommant moins », quant à lui, adopte un comportement d’achat responsable réfléchi. Il s’informe avant d’acheter et connaît déjà les produits qu’il souhaite se procurer.

Enfin, le « responsable » est le profil le plus développé en termes de consommation responsable. Il a un comportement d’achat « eco-friendly » et organise son mode de vie global autour du développement durable.

Et vous, à quel profil de consommateur correspondez-vous ?

Phase d’apprentissage erratique

Finalement, le consommateur est aujourd’hui dans une phase d’apprentissage plus erratique que balisé, par manque de représentations concrètes. L’impact carbone n’a que peu de signification pour lui. Il a besoin d’informations, de preuves, de priorisation, de concrétisation et d’implication pour s’engager dans un véritable changement comportemental.

La question de la responsabilité des offreurs, des parties prenantes ou des consommateurs, est posée. Cette étude conduit donc à s’interroger sur les méthodes pédagogiques et les explications à fournir à chacun des acteurs pour faire évoluer les comportements vers un système de consommation durable.


Mathilde Hoareau, étudiante à l’Université de Montpellier, a apporté une grande contribution à la rédaction de cet article.

Comment les cadres se projettent-ils dans leur retraite ?

22 samedi Avr 2023

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auteurs

  1. Richard Huaman RamirezAssociate professor à l’EM Strasbourg, Université de Strasbourg
  2. Khaled LahlouhUniversité internationale de Rabat (UIR)

Déclaration d’intérêts

Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.

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Beaucoup se posent la question de continuer une activité à temps partiel après leur carrière professionnelle.

Âge de départ, durée de cotisations, évolution du nombre d’actifs par rapport au nombre de retraités, taux de remplacement… Parmi les nombreuses questions soulevées par la problématique des retraites demeure également celle du sens qu’on souhaite lui donner. Âge du loisir, de la « paresse » a-t-on pu entendre sur les bancs de l’Assemblée nationale, la période n’est cependant pas toujours synonyme de retrait définitif du monde du travail, parfois par contrainte financière, parfois par choix. De plus en plus, prendre sa retraite relève davantage d’un processus que d’une rupture, d’un développement particulier de la carrière plutôt que d’une sortie.

Nous avons, pour notre part, étudié les intentions des cadres français du secteur privé en la matière. Beaucoup cumulent durant la retraite plusieurs activités professionnelles, ce que la littérature scientifique a désigné sous l’appellation d’ « emploi pont », ou « bridge employment » en anglais.

Comprendre le phénomène et tenter de l’anticiper peut s’avérer particulièrement utile. Beaucoup d’entreprises témoignent de leurs difficultés à recruter, notamment pour des tâches d’encadrement : plus de la moitié des recrutements de cadres était envisagée comme difficiles par les entreprises en 2022 selon l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). Au milieu également des injonctions multiples à rehausser le taux d’emploi des séniors, mesurer les intentions de chacune et chacun donne des indications précieuses.

C’est à la construction de ces outils que nous avons travaillé, dressant le constat d’une littérature relativement incomplète sur le sujet. Il s’agissait notamment de pouvoir approcher cette étape de la vie autrement que selon les méthodes économiques ou gérontologiques, qui définissent ce qu’est être retraité selon la composition de son revenu ou un nombre d’heures travaillées déclarées.

La retraite comme continuité

Nos travaux s’inscrivent dans le cadre de la théorie du comportement planifié selon laquelle l’intention initiale joue un rôle central pour déterminer le comportement effectif. Des auteurs qui séquencent le processus de départ en retraite font de l’intention de départ une première étape. Une étude menée aux Pays-Bas, aujourd’hui certes un peu ancienne puisque datée de 1997 observait, en termes de retraite, que 83 % des intentions de départ anticipé étaient effectivement suivies.

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Pour orienter notre démarche, nous avons réalisé une série d’entretien dont nous nous sommes vite rendu compte qu’ils devenaient redondants (dès le treizième en fait), témoignant de comportements et intentions assez homogènes. Retrait définitif ou continuation d’une activité professionnelle ? Dans son secteur de carrière ou dans un autre ?

Il apparaît que même les personnes souhaitant se retirer définitivement de la vie professionnelle cherchent tout de même à agir en continuité avec leurs expériences passées, en s’engageant dans d’autres rôles sociaux mais en lien avec leurs compétences de carrière. Un directeur d’une agence bancaire envisage ainsi :

« On a de bonnes relations avec l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE), qui est la principale association microcrédit en France, pourquoi ne pas aller leur donner un coup de main. Je suis assez proche de leurs valeurs de solidarité… »

Si l’on continue ainsi dans son domaine d’activité mais en s’étant retiré de la vie professionnelle, on insistera alors sur les caractères bénévoles et caritatifs de son action, comme ce consultant en énergie :

« Je ne parlerais pas d’emploi : si on dit emploi, on va dire rémunération, et pour moi, ça sera vraiment du bénévolat. Chez nous, nous avons deux bureaux d’aide sociale, on peut par exemple participer aux Restaurants du cœur… Je ne reprendrai pas de travail derrière, ça, c’est sûr ! »

Pareils arguments font dire à certains sociologues que la retraite serait davantage un salaire continué (un retraité est rémunéré pour une activité qu’il a librement choisie) qu’un revenu différé (un retraité touche une pension qui est la contrepartie de cotisations versée au cours de la vie active, comme s’il s’agissait d’argent mis de côté).

Un outil pour accompagner les fins de carrière

Pour ceux qui poursuivent une activité à titre professionnel, salariés ou indépendants (la retraite est parfois un moment pour se mettre à son compte), ce sera à temps partiel. Un responsable informatique n’imagine pas autre chose :

« Si l’on continue après avoir travaillé 42 ou 43 ans, ce n’est pas pour être dans le même rythme qu’en activité : le but est quand même d’avoir du temps à consacrer à sa famille, à des loisirs, voilà quoi ! »

Là encore, l’activité n’est pas envisagée dans un autre domaine que celui de la vie professionnelle :

« Je ne me vois pas à 63 ou 65 ans me reformer en peintre bâtiment, ou en écrivain public. Soit on dit : on est dans le monde pur du loisir, ce qui est tout à fait, je dirais défendable et honorable ; soit on dit que ça va être une activité professionnelle. Dans ce cas, même réduite, il faut qu’elle s’appuie sur un savoir-faire, des compétences qui puissent être reconnus et éventuellement “monnayables”, que l’on puisse justifier d’avoir des clients en face ».

Outre ces traits généraux, nous avons, de ces entretiens extraits plusieurs phrases qui donneraient des indications de l’intention réelle. Une intention ne s’exprime en effet pas toujours avec la dichotomie « je me retirerais complètement » ou « j’occuperai un emploi pont », notamment car, comme notre propos le suggère, tout cela reste relativement poreux. Penser que « la retraite et l’activité professionnelle à temps partiel ne font pas bon ménage » est par exemple un indice de ne pas vouloir occuper un emploi pont.

Les différents items que nous avons construits, 12 au total, ont été soumis à une batterie de tests statistiques afin de s’assurer qu’ils constituent des indices pertinents. 10 ont finalement été retenus pour leur fiabilité satisfaisante. Aux responsables des ressources humaines désormais de s’en saisir pour apprivoiser au mieux les fins de carrière des cadres de leur entreprise. Cela peut leur permettre de cibler qui souhaite rester actif durant sa retraite et pourrait apporter une plus-value, par ses compétences, à l’entreprise.

Un an après l’élection d’Emmanuel Macron, que reste-t-il de la « Macronie » ?

21 vendredi Avr 2023

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  1. Pierre BréchonProfesseur émérite de science politique, Sciences Po Grenoble, Auteurs historiques The Conversation France

Déclaration d’intérêts

Pierre Bréchon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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À Reims, lors de la 11e journée de mobilisation contre la réforme des retraites.
À Reims, lors de la 11e journée de mobilisation contre la réforme des retraites. François Nascimbeni/AFP

Dans quelles conditions le second quinquennat d’Emmanuel Macron peut-il se poursuivre ? L’actualité sociale et politique permet de douter d’un déroulement politique serein au vu des nombreuses mobilisations, aussi bien sur le front social (mouvement contre la réforme des retraites) mais aussi écologique et politique, avec un fort bouleversement de la vie parlementaire et partisane.

Au cœur de la crise politique actuelle figure la personnalité du président, fortement décriée par ses adversaires politiques et également désormais critiqué à l’étranger. Le socialiste Boris Vallaud n’a ainsi pas hésité à qualifier le chef de l’État de « forcené retranché à l’Élysée ».

Comment comprendre cette situation et cette crispation un an après l’élection d’Emmanuel Macron pour un second mandat ?


À lire aussi : Dossier : Présidentielle, législatives, deux élections plus tard, quel bilan ?


Un président inattendu

Emmanuel Macron avait émergé de manière assez imprévue dans la campagne présidentielle de 2017. Ministre de l’Économie de François Hollande jusqu’à fin août 2016, il avait progressivement pris ses distances avec le camp socialiste avant de lancer son propre mouvement « En marche ».

En se présentant comme à la fois de gauche et de droite, en s’affirmant libéral en économie et sur les questions sociétales, mais favorable à des politiques sociales, soutenant clairement la construction européenne, il se proposait de bouleverser la politique française, publiant même un essai intitulé « Révolution ». Au programme : la promesse d’un nouveau monde.

Rejoint par un certain nombre de socialistes déçus par les fractures internes du parti entre socio-libéraux et frondeurs, Emmanuel Macron parvient peu à peu à rallier un électorat très composite malgré une forte abstention et créer un parti d’apparence solide, La République En Marche (LREM). Il est très largement élu (66,1 % des suffrages).

Stratégie de fracturation aux législatives de 2017

La stratégie d’Emmanuel Macron a reposé sur une forme de fracturation de l’ensemble partisan. Pour obtenir une majorité à l’Assemblée nationale en dépit d’un faible nombre de députés ralliés, il nomme le juppéiste Edouard Philippe et acquiert ainsi l’attention d’une certaine frange de la droite.

Le gouvernement, savamment dosé entre personnalités de gauche, du centre et de droite, annonce très vite des mesures populaires. Après un appel d’offres pour susciter des candidatures (15 000 recensées), il investit un candidat dans chaque circonscription, souvent des personnes peu connues et totalement novices en politique.


À lire aussi : Débat : Emmanuel Macron face à 30 ans de faillite intellectuelle et politique sur la transformation du monde


Contre toute attente, les candidats LREM obtiennent un très bon résultat (28,2 % des suffrages) auxquels il faut adjoindre 4,1 % pour ceux du MoDem. La nouveauté des candidats sur la scène politique a joué en leur faveur alors qu’un fort mouvement de « dégagisme » affectait les élus sortants, particulièrement ceux de gauche. Le deuxième tour confirme le premier et la République en marge obtient 308 élus et le MoDem 42.

Il dispose donc d’une majorité absolue très conséquente pour appliquer ses réformes. Le système partisan français, qui reposait sur l’alternance au pouvoir de deux partis de gouvernement, est complètement chamboulé au terme de ce cycle électoral. Mais la nouvelle majorité réunit des sensibilités politiques très variées, ce qui laissait prévoir des divisions et d’éventuelles recompositions.Macron veut « tourner la page » des retraites, France 24.

Au cours de la mandature, LREM a perdu des sièges et des partis satellites se sont développés, avec à la fois des députés sortants de LREM et d’autres quittant LR ou l’UDI.

Un groupe d’une vingtaine de députés LREM de centre gauche, qui voulaient davantage d’écologie et de social, prennent aussi leur indépendance en mai 2020, ce qui fait perdre à LREM la majorité absolue dont elle disposait à elle seule. Et Edouard Philippe, remplacé par Jean Castex comme Premier ministre, lance en 2021 le parti Horizons pour peser davantage au sein de la majorité.

LREM n’a pas su se structurer, ne conférant aucun pouvoir réel à ses adhérents. Fonctionnant comme un mouvement très vertical, à l’image du président jupitérien lui-même, le parti devient une coquille vide, avec très peu de militants. Et si ce parti a obtenu des résultats honorables aux élections européennes de 2019, ceux-ci ont été plutôt mauvais aux élections municipales de 2020 (11 % des suffrages avec le MoDem), ainsi qu’aux régionales et départementales de 2021 (environ 10 %).

Des politiques aux antipodes des mesures sociales espérées ?

Dès le début du quinquennat, le président engage des politiques économiques libérales, notamment l’abandon de l’ISF au profit d’un impôt peu productif sur la fortune immobilière et la création d’un prélèvement forfaitaire unique sur les revenus des placements financiers qui lui valent d’être souvent qualifié de « président des riches ».


À lire aussi : Redistribution des richesses : quand mobilisation contre la réforme des retraites et « gilets jaunes » se rejoignent


Ces politiques doublées de mesures d’austérité (taxe carbone) ont provoqué le mouvement spontané de protestation sociale des « gilets jaunes » qui se développe à partir d’octobre 2018. Face à l’ampleur du mouvement, le pouvoir lâche progressivement du lest et lance un grand débat national sur la transition écologique, la fiscalité, les services publics et le débat démocratique. Au terme du processus, en avril 2019, il annonce des baisses d’impôts sur le revenu pour les classes moyennes et la réindexation des petites retraites. Le mouvement aura coûté cher aux finances de l’État (10 à 15 milliards) mais, contrairement aux espoirs de certains soutiens du mouvement, le président ne change pas sa méthode de gouvernance très verticale.

Les retraites, point de bascule

Edouard Philippe lance alors la réforme des retraites pour passer à un régime universel à points déclenchant un second grand mouvement social.

Malgré des manifestations réunissant jusqu’à 800 000 personnes, le gouvernement fait passer la loi en utilisant le 49.3 en première lecture à l’assemblée. L’examen de la réforme est suspendu du fait de la pandémie de Covid-19.

La pandémie et le choix du président de piloter lui-même la politique de lutte contre le nouveau virus, malgré des confusions initiales, des hésitations et l’émergence de thèses complotistes, donnent à Emmanuel Macron une nouvelle assise politique et une image de protecteur de la population.

La guerre en Ukraine lui est aussi favorable en pleine campagne électorale présidentielle. Elle génère un ralliement à celui qui incarne l’action et la coordination des pays européens contre l’agresseur russe.

Dans ce contexte, il est assez largement réélu début mai 2022 (58,55 % des suffrages exprimés) malgré une défiance accrue dans les institutions de la démocratie représentative et une forte abstention.

Mais entre la présidentielle et les législatives, la mécanique semble se gripper avec un président peu actif dans la préparation de l’élection des députés, qui met beaucoup de temps à choisir sa Première ministre et à concrétiser le début de son second mandat, alors que la gauche s’unit – à la hussarde – derrière Jean-Luc Mélenchon et en tire un grand bénéfice en sièges (131 députés de la Nupes). De l’autre côté du spectre, le RN a déployé ses forces de façon spectaculaire, obtenant 89 députés à l’Assemblée nationale.


À lire aussi : Le bilan d’Emmanuel Macron : agenda néo-libéral et pragmatisme face aux crises


Un projet à la peine

La Macronie est à la peine. Le changement de nom de LREM pour Renaissance ne parvient pas à faire oublier le revers législatif : le président ne dispose que d’une majorité relative (245 élus alors que la majorité absolue est de 289 députés), rendant difficile l’exercice du pouvoir.

La majorité ne parvient pas à convaincre Les Républicains (74 élus), affaiblis, de conclure une alliance pour gouverner ensemble. Elle en est donc réduite à chercher des majorités au cas par cas pour faire voter des lois, un peu comme Michel Rocard pendant le second septennat de François Mitterrand.

Un an plus tard, le président, toujours aussi jupitérien malgré ses engagements à changer de méthode de gouvernance, ne semble pas tirer les conséquences de la nouvelle situation parlementaire, qui devrait inciter à chercher des compromis alors qu’il veut toujours imposer ses réformes, y compris celles qui sont très impopulaires comme en témoigne le long feuilleton de la réforme des retraites. La validation de la loi par le Conseil constitutionnel risque de ne pas calmer le mouvement syndical. L’exécutif dit qu’il veut apaiser, écouter et continuer les réformes, mais il semble complètement embourbé et on voit mal comment il va pouvoir faire voter des lois un tant soit peu novatrices.

La Macronie pourrait bien n’avoir été qu’une parenthèse dans la vie politique française, faute d’avoir construit un parti politique solide, capable de subsister après le départ de son fondateur.

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